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possibilité pour un couple de deux hommes ou de deux femmes de contracter un mariage civil De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le mariage entre personnes de même sexe en France, également qualifié de mariage homosexuel ou « mariage pour tous »[1], est autorisé par la loi depuis le . Il consiste en la possibilité pour un couple de deux hommes ou de deux femmes de contracter un mariage civil, auparavant réservé à un homme et une femme.
Depuis 1999, les couples homosexuels ou hétérosexuels avaient la possibilité de signer un partenariat civil, appelé pacte civil de solidarité (PACS), ou de s'établir en concubinage. Cependant, l'un et l'autre statuts n'offrent pas les mêmes garanties juridiques que le mariage civil.
Le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, déposé au Parlement le , a fait l'objet de débats importants et a connu en France une opposition plus forte que dans d'autres pays européens[2]. La loi no 2013-404 a été définitivement adoptée le puis validée par le Conseil constitutionnel et promulguée le . Le premier mariage homosexuel français a été célébré le à Montpellier.
En 2014, sur 241 292 mariages célébrés en France, 10 522 l'ont été entre personnes de même sexe, soit 4,4 %, dont 46 % de femmes[3].
Entre le et le , le Code pénal est adopté. L’absence de la mention de la sodomie, considérée jusque-là comme un crime, ou tout autre terme désignant les rapports homosexuels, fonde ainsi la dépénalisation de l’homosexualité en France. Le rapporteur de la loi, Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, affirma en effet que le Code pénal n’a mis hors-la-loi que les « vrais crimes », et non pas les « délits factices, créés par la superstition, la féodalité, la fiscalité et le despotisme »[4]. Cette dépénalisation dans le Code pénal de 1791 influença directement ou indirectement (par son successeur, le Code pénal de 1810) plusieurs pays voisins (notamment les Pays-Bas, la Belgique, l'Espagne et l'Italie, et plusieurs États allemands avant l'unification en 1871 — la Bavière, le grand-duché de Bade, le Wurtemberg, le royaume de Hanovre et le duché de Brunswick) qui adoptèrent le modèle juridique français de non-criminalisation de l'homosexualité dans le cadre privé[5].
C'est au début des années 1980, que la société française commence à prendre en compte la réalité des homosexuels et de leurs couples. Le , la proposition de loi no 527 « tendant à abroger l’alinéa 2 de l’article 331 du Code pénal » est déposée à l’Assemblée nationale par le député socialiste Raymond Forni, président de la commission des lois, « et plusieurs de ses collègues »[6]. L’Assemblée nationale adopte définitivement le texte le [7] et la loi est promulguée le [8] : l’alinéa 2 de l’article 331 du Code pénal est aboli et la distinction discriminatoire dans la majorité sexuelle entre rapports homosexuels et hétérosexuels est ainsi supprimée (comme avant 1942), devenant de 15 ans pour tous. Mais l'homosexualité n'est retirée de la liste des maladies mentales de la CIM-10 publiée par l'Organisation mondiale de la santé que huit années plus tard, le [9].
La jurisprudence française évolue lentement. Le , la Cour de cassation rappelle encore que même : « le concubinage ne peut résulter que d'une relation stable et continue ayant l’apparence du mariage, donc entre un homme et une femme[10] ».
De 1990 à 1998, plusieurs parlementaires de gauche — le premier d'entre eux étant Jean-Luc Mélenchon[11] — déposent sans succès des propositions de loi afin d’instaurer un nouveau contrat civil. La longue bataille politique et sociétale pour la reconnaissance du couple homosexuel trouve une issue sous le gouvernement Jospin, par l'adoption du PACS, le .
En 1999, le Parlement adopte la loi mettant en place le Pacte civil de solidarité (PACS), ouvert aux couples hétérosexuels et homosexuels. Pendant les débats parlementaires, la loi est fortement contestée par la droite, en particulier par la députée Christine Boutin. A contrario, Roselyne Bachelot est la seule députée du RPR à voter pour la loi. Comme le mariage, le PACS est interdit entre personnes déjà mariées ou pacsées, entre ascendants, descendants et alliés en ligne directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré. Cependant, il n'est pas signé en mairie mais dans un tribunal d'instance ou une ambassade et, en cas du décès d'un des partenaires, le survivant n'est pas héritier du défunt. Il ne permet pas non plus l'adoption conjointe.
Au fil des années, le régime du PACS se rapproche de celui du mariage en ce qui concerne les obligations mutuelles entre partenaires, mais il reste sans effet sur la filiation et l'autorité parentale. Il donne donc un statut au couple mais ne crée pas de relations familiales.
Le , le maire vert de Bègles, Noël Mamère, constatant que le Code civil ne précise pas le sexe des époux[12], célèbre un mariage entre deux hommes. Le 27 juillet suivant, le tribunal de grande instance de Bordeaux statue sur la question du sexe des mariés, en s'appuyant sur un autre article du Code civil qui précise que lors de la cérémonie du mariage, l’officier de l’état civil « recevra de chaque partie, l'une après l'autre, la déclaration qu'elles veulent se prendre pour mari et femme »[13], et annule ce mariage[14]. Cette décision est confirmée par la cour d'appel de Bordeaux, le [15].
La Cour de cassation confirme l'arrêt de la Cour d'appel de Bordeaux par un arrêt en date du [16] : « le mariage est l’union d’un homme et d’une femme ; ce principe n’est contredit par aucune des dispositions de la Convention européenne des droits de l'Homme et de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne »[17]. Le , Martine Billard, Yves Cochet et Noël Mamère proposent une loi « clarifiant l'accès au mariage des couples de personnes de même sexe »[18].
En 2008, Frédéric Minvielle est déchu de sa nationalité française en raison de son mariage avec un homme aux Pays-Bas. En effet, le mariage homosexuel aux Pays-Bas est autorisé depuis le et une convention bilatérale entre les Pays-Bas et la France autorise les Français mariés à un citoyen néerlandais à devenir néerlandais tout en conservant leur nationalité française. Cependant, la France ne reconnaissant pas le mariage de Frédéric Minvielle avec un homme, celui-ci perd sa nationalité française en devenant néerlandais.
Cette décision est contestée par Frédéric Minvielle et scandalise les associations de défense des homosexuels[19]. Il est finalement réintégré dans sa nationalité française et la France dénonce la convention bilatérale afin que la situation ne se reproduise plus.
Le , la Cour européenne des droits de l'Homme est saisie d'un recours au nom du droit au mariage protégé par l'article 12 de la Convention, contre le refus par l'État autrichien d'autoriser le mariage de deux personnes du même sexe. Dans l'arrêt Schalk et Kopf c. Autriche, la Cour conclut que « l'article 12 n'impose pas au gouvernement défendeur l'obligation d'ouvrir le mariage à un couple homosexuel tel que celui des requérants »[20].
Le Conseil constitutionnel a été saisi le par la Cour de cassation, dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 75[21] et 144[22],[23] du Code civil. Ces articles impliquent dans leur rédaction que le mariage est réservé aux couples hétérosexuels. Le Conseil constitutionnel décide que ces articles sont conformes à la Constitution en ce qu'il est possible de traiter différemment les couples homosexuels, placés dans une situation différente des couples hétérosexuels, sans que ce ne soit contraire au principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 6 de la DDHC. Il souligne, dans les « considérant », qu'il « n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, de cette différence de situation[24] », soulignant ainsi qu'il relève du Parlement de changer la loi s'il le souhaite.
Dans les années qui suivent l'adoption du PACS, la plupart des partis politiques de gauche se déclarent en faveur de l'ouverture du mariage aux couples de même sexe, dont Ségolène Royal, candidate PS au second tour de l'élection présidentielle de 2007. Le , la maire de Montpellier, Hélène Mandroux, lance l'Appel de Montpellier en faveur du mariage des couples de même sexe et de l'adoption homoparentale. Elle est rejointe par des dizaines de maires, par des associations et quelques milliers de signataires particuliers[25],[26]. Par ailleurs, plusieurs propositions de loi sont déposées devant le Parlement, mais aucune n'est adoptée. En 2010, Martine Billard, Yves Cochet, Noël Mamère et François de Rugy proposent une loi « permettant l’accès au mariage des couples de personnes de même sexe » faisant notamment référence à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen[27]. En 2011, une proposition similaire de Patrick Bloche est rejetée par l'Assemblée nationale.
En 2012, François Hollande, candidat du Parti socialiste à l'élection présidentielle, promet d'ouvrir le mariage aux couples de même sexe dans son « engagement 31 »[28]. Une fois élu président, cette promesse est reprise par son parti lors des élections législatives de 2012[29].
Le , Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, annonce que le premier mariage homosexuel se déroulera à Montpellier[30].
Le , l'Assemblée nationale adopte définitivement la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples du même sexe[31],[32]. Le , le Conseil constitutionnel la déclare intégralement conforme à la Constitution[33]. Le même jour, la loi est promulguée par le président de la République, puis publiée au Journal officiel le lendemain[34],[35],[36].
Titre | Loi no 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe |
---|---|
Référence | NOR : JUSC1236338L |
Pays | France |
Type | Loi ordinaire |
Branche | Droit civil |
Régime | Ve République |
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Législature | XIVe législature |
Gouvernement | Jean-Marc Ayrault II |
Adoption | |
Promulgation |
Lire en ligne
Le projet de loi s'est étalé sur une période d'un peu plus de six mois, entre la présentation du projet en Conseil des ministres et la promulgation au Journal officiel, faisant de ce texte de loi l'un des plus longuement débattus[37].
Chronologie | |
---|---|
Présentation du projet de loi en Conseil des ministres par la ministre de la Justice Christiane Taubira | |
Adoption du projet de loi en première lecture à l'Assemblée nationale | |
Adoption du projet de loi en première lecture par le Sénat | |
Adoption définitive du projet de loi par l'Assemblée nationale | |
Validation par le Conseil constitutionnel | |
Promulgation et publication au Journal officiel |
L'avis consultatif du Conseil d’État d' n'a pas été officiellement et intégralement publié.[Passage à actualiser] Selon des extraits dévoilés par la presse le , l'avis du Conseil d’État, émis sur le texte du gouvernement, est favorable au projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe mais contient des réserves sur plusieurs de ses dispositions. Soulignant des insuffisances dans l'étude d'impact l'accompagnant, notamment en ce qui concerne l'ouverture de l'adoption aux conjoints de même sexe, le Conseil d’État s'inquiète de la mise en place d'une « fiction juridique » sur laquelle reposerait la filiation en cas d'adoption plénière et sur l'inégalité qu'elle induirait entre les adoptés, c'est-à-dire « entre ceux dont on saura forcément qu'ils sont adoptés puisqu'ils seront officiellement « nés » de deux hommes ou de deux femmes, et ceux dont on l'ignorera puisqu'ils seront inscrits dans un schéma familial classique »[38],[39].
Le Conseil d’État s'interroge également sur les risques pénaux liés au contrat de mariage pour les conjoints étrangers ressortissants d'un pays ne reconnaissant pas ce type de mariage, pouvant les exposer dans leurs pays d'origine à des sanctions pénales, en raison de leur homosexualité[38].
Enfin, le Conseil d’État évoque les conséquences substantielles du texte sur les fondements de l'institution du mariage en général et sur les mariages hétérosexuels en particulier. Il demande que le projet de loi « ouvre le mariage et l'adoption aux couples de même sexe dans les mêmes conditions que pour les autres couples, sans changer en rien les conditions applicables pour ces derniers ». Si l'avis du Conseil d’État n'est que consultatif, il peut être l'un des textes servant de base juridique aux décisions du Conseil constitutionnel, en cas de saisine[38].
Le , la Garde des sceaux, ministre de la Justice, Christiane Taubira, présente en Conseil des ministres le « projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe »[40],[41]. Dans son exposé des motifs[42], le gouvernement note que « le mariage est traditionnellement défini comme un acte juridique solennel par lequel l’homme et la femme établissent une union dont la loi civile règle les conditions, les effets et la dissolution » mais que « l’idée de l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe a constamment progressé » depuis l'adoption du PACS et qu'« une nouvelle étape doit donc être franchie. »
Dans un entretien publié le même jour par le journal Sud Ouest, la ministre de la Justice affirme que cette loi sera « une réforme de civilisation »[43].
Le projet de loi[41] :
À l'Assemblée nationale, le projet de loi est renvoyé en Commission des lois où Erwann Binet est nommé rapporteur[41]. Le , Marie-Françoise Clergeau est nommée rapporteur pour avis de la Commission des Affaires sociales[45].
Le , l'ancien Premier ministre et député de Paris François Fillon (UMP) annonce qu'« en cas d'alternance, nous l'abrogerons » en parlant de la loi sur le mariage des couples de même sexe[46]. Valérie Pécresse va dans le même sens, annonçant qu'il faudra « démarier les couples homosexuels »[47]. Toutefois, selon des constitutionnalistes, il sera juridiquement « absolument impossible » de casser les mariages existant et politiquement « très difficile, voire impossible » de revenir sur la loi[48].
Le , lors d'un débat sur une loi concernant le terrorisme, le député UMP Nicolas Dhuicq établit un parallèle entre le projet de loi sur le mariage homosexuel, l'homoparentalité et le terrorisme, considérant qu'un terroriste « n’a jamais rencontré l’autorité paternelle le plus souvent ». La porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem déclare que ces propos « constituent plus qu'un dérapage » et sont d'une « violence inqualifiable »[49]. Le lendemain, dans le cadre d'une question au gouvernement, Marc Le Fur (UMP) déclare que légaliser l'adoption pour les couples homosexuels reviendrait à dire que pour certains « l'enfant est simplement un produit de consommation » et que le gouvernement entend « imposer par la force » la loi. Dominique Bertinotti, ministre déléguée à la famille, considère que ces propos « n'honorent pas » le député et lui répond : « Au moment du PACS, vous annonciez la fin du monde. La fin du monde n'a pas eu lieu[50]. »
La commission des Lois procède à partir de à des auditions tous les jeudis[41]. Lors de ces auditions, la commission entend successivement des parlementaires de pays ayant déjà ouvert le mariage aux personnes de même sexe, des représentants d'institutions, des ethnologues et philosophes, des médecins, des juristes et des familles homoparentales[51]. Des associations opposées au projet de loi contestent toutefois la méthode du rapporteur, Erwann Binet, qui les auditionne à part[52].
Le , lors de son audition Nicolas Gougain, porte-parole de l'Inter-LGBT, dénonce des propos qui insinueraient que « parce que vous êtes homosexuels, parce que vous êtes parents homosexuels, vous remettez en cause la société, vous êtes potentiellement dangereux pour vos enfants »[53].
Le , le défenseur des droits, Dominique Baudis, souligne que le texte « met fin à des situations d'inégalités ou de discriminations indirectes » et donne aux enfants élevés par un couple homosexuel « un cadre juridique préférable à la situation actuelle », tout en déclarant avoir des réserves « sur la méthode d'élaboration du projet de loi » : « Bien que les situations conjugales et parentales de tous les époux […] ne soient pas en tous points identiques, le projet s'efforce de les confondre », « de cette confusion résultent de nombreuses incertitudes juridiques préjudiciables » à « tous les enfants »[54].
Les 15 janvier et , le débat en Commission des lois fait évoluer le texte du gouvernement, notamment par un amendement du rapporteur Erwann Binet modifiant l'article 4 du projet précisant que les dispositions du code civil s'appliquent « aux parents de même sexe lorsqu'elles font référence aux père et mère », « aux aïeuls de même sexe lorsqu'elles font référence aux aïeul et aïeule » permettant de ne pas remplacer les mots « père et mère » par le « parents » ou « mari et femme » par « époux »[55].
Le débat en séance commence le [56],[57]. 5 362 amendements sont déposés, principalement par les groupes d'opposition de droite[58], ce qui fait entrer ce projet de loi « dans le top 10 des textes objets du plus grand nombre d'amendements depuis 30 ans »[59],[60].
La motion référendaire déposée par 60 députés est rejetée le par 298 voix contre 184[61] et l'amendement sur la clause de conscience est rejeté par 244 voix contre 101, le [62], alors que le même jour est adopté par 249 voix contre 97, le premier article du projet de loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe[63]. La première lecture prend fin le , à 5 h 40 du matin[64], après 109 heures et 30 minutes de débat réparties sur 24 séances[65], dont 90 présidées par Claude Bartolone, ce qui constitue un record[66]. En raison de sa longueur, ce projet de loi se place à la septième place des textes de loi les plus longuement débattus de la Ve République[67], 4 999 amendements[68] ayant été discutés et tous les articles ayant été adoptés. Le texte a été soumis au vote solennel des députés le et adopté à 329 voix contre 229.
Groupe | Pour | Contre | Abstention | Votants/Total | |
---|---|---|---|---|---|
Groupe socialiste, républicain et citoyen (SRC) | 283 | 4 | 5 | 292 / 295 | |
Groupe écologiste (ÉCO) | 17 | 0 | 0 | 17 / 17 | |
Groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP) | 13 | 2 | 0 | 15 / 16 | |
Groupe Union pour un mouvement populaire (UMP) | 3 | 187 | 5 | 195 / 196 | |
Groupe Union des démocrates et indépendants (UDI) | 4 | 25 | 0 | 29 / 29 | |
Groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR) | 9 | 4 | 0 | 13 / 15 | |
Non-inscrits (NI) | 0 | 7 | 0 | 7 / 7 | |
Total | 329 | 229 | 10 | 568 / 575 |
Dans l'opposition, ont voté pour : Philippe Gomès, Yves Jégo, Sonia Lagarde et Jean-Christophe Lagarde (UDI), Benoist Apparu, Franck Riester et Dominique Tian (UMP) — ce dernier fait savoir par la suite « qu'il avait voulu voter contre », alors qu'à l'inverse Jean-Louis Borloo (UDI), qui a voté contre, indique « qu'il avait voulu voter pour »[69].
À gauche et dans la majorité, Bernadette Laclais, Jérôme Lambert, Patrick Lebreton et Gabrielle Louis-Carabin (SRC), Ary Chalus et Thierry Robert (RRDP), Bruno Nestor Azerot, Patrice Carvalho, Alfred Marie-Jeanne et Jean-Philippe Nilor (GDR) ont voté contre[69].
Se sont abstenus : Ibrahim Aboubacar, Marie-Françoise Bechtel, Jean-Luc Laurent, Jean-Philippe Mallé et Dominique Potier (SRC), Nicole Ameline, Nathalie Kosciusko-Morizet, Pierre Lellouche, Bruno Le Maire et Édouard Philippe (UMP)[69],[70].
Le projet de loi a été examiné par le Sénat à partir du [71]. Le vote final sur l'ensemble du projet de loi s'est fait à main levée, aucun sénateur n'ayant demandé de vote public[72],[73]. Toutefois à la demande des sénateurs, le compte-rendu[74] de la séance mentionne les intentions de vote de chacun.
Groupe | Pour | Contre | Abstention | Votants/Total | |
---|---|---|---|---|---|
Groupe socialiste et apparentés (SOC) | 121 | 2 | 5 | 128 / 128 | |
Groupe communiste, républicain et citoyen (CRC) | 20 | 0 | 0 | 20 / 20 | |
Groupe du rassemblement démocratique et social européen (RDSE) | 13 | 2 | 0 | 15 / 18 | |
Groupe écologiste (ECO) | 12 | 0 | 0 | 12 / 12 | |
Groupe UMP (UMP) | 3 | 124 | 4 | 131 / 131 | |
Groupe Union des démocrates et indépendants (UDI - UC) | 1 | 30 | 1 | 32 / 32 | |
Non-inscrits (RASNAG) | 0 | 7 | 0 | 7 / 7 | |
Total | 170 | 165 | 10 | 345 / 348 |
Dans l'opposition de droite, se déclarent « pour » : la centriste Chantal Jouanno et les UMP, Fabienne Keller, Christian Cointat et Jacqueline Farreyrol. Ne prennent pas position : le centriste Vincent Capo-Canellas et les UMP Roger Karoutchi, Alain Fouché, Yann Gaillard et Alain Milon.
Dans la majorité de gauche, se prononcent « contre » : les socialistes Roland Povinelli et Richard Tuheiava. Deux sénateurs du groupe RDSE (Rassemblement démocratique, social et européen), à majorité radicale de gauche, se déclarent également « contre » : Gilbert Barbier (membre de l’UMP) et Nicolas Alfonsi (PRG). Cinq socialistes ne se prononcent pas : Maurice Antiste, Jacques Cornano, Claude Domeizel, Jean-Noël Guérini et Jeanny Lorgeoux.
Jean-Pierre Chevènement (MRC), Pierre-Yves Collombat (PS) et François Vendasi (PRG) n’ont pas indiqué leur position[75].
Les opposants au projet de loi, dont le député Jean-Frédéric Poisson[76], dénoncent la traditionnelle méthode du vote à main levée utilisée[76].
Marine Le Pen accuse l'UMP de complicité, soulignant que si les sept sénateurs UMP qui se sont prononcés « pour » ou qui se sont abstenus, avaient voté « contre », le texte n'aurait pas pu être adopté[77].
Le texte retourne à l'Assemblée nationale pour une seconde lecture[78]. Le gouvernement a décidé de renvoyer le texte devant l'Assemblée dès le mercredi , et non en mai comme c'était prévu[79], et d'utiliser la procédure du temps législatif programmé[80], ce qui provoque la colère de l'opposition. Les opposants reprochent également que le Sénat permette au gouvernement de recourir aux ordonnances[81]. La commission des lois de l'Assemblée nationale examine le projet de loi les 15 avril et . À l'issue de cet examen, le projet de loi est adopté sans être modifié[82].
Dès le , l'examen du texte (et les 3 429 amendements déposés sur le texte[83]) en séance publique à l'Assemblée nationale débute pour se finir dans la nuit du 18 avril au . Le vote sur la totalité du projet de loi, dont le texte est identique à celui transmis par le Sénat, a lieu le .
Groupe | Pour | Contre | Abstention | Votants/Total | |
---|---|---|---|---|---|
Groupe socialiste, républicain et citoyen (SRC) | 281 | 4 | 4 | 289 / 292 | |
Groupe écologiste (Écolo) | 17 | 0 | 0 | 17 / 17 | |
Groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP) | 13 | 2 | 0 | 15 / 16 | |
Groupe Union pour un mouvement populaire (UMP) | 6 | 183 | 5 | 194 / 196 | |
Groupe Union des démocrates et indépendants (UDI) | 5 | 25 | 0 | 30 / 30 | |
Groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR) | 9 | 4 | 1 | 14 / 15 | |
Non-inscrits | 0 | 7 | 0 | 7 / 8 | |
Total | 331 | 225 | 10 | 566 / 575 |
Chez les députés socialistes, Bernadette Laclais, Jérôme Lambert, Patrick Lebreton et Gabrielle Louis-Carabin ont voté contre, Marie-Françoise Bechtel, Jean-Luc Laurent, Jean-Philippe Mallé et Dominique Potier se sont abstenus. Dans le groupe GDR, Bruno Nestor Azerot, Patrice Carvalho, Alfred Marie-Jeanne et Jean-Philippe Nilor, ont voté contre et Gabriel Serville s'est abstenu. Chez les radicaux, seuls Ary Chalus et Thierry Robert, se sont opposés[85].
Dans l'opposition, six membres du groupe UMP ont voté en faveur du texte : Benoist Apparu, Franck Riester, Luc Chatel, Alain Chrétien, Marianne Dubois et Henri Guaino. Ces quatre derniers élus ont déclaré s'être trompés de bouton lors du vote. Nicole Ameline, Nathalie Kosciusko-Morizet, Pierre Lellouche, Bruno Le Maire et Édouard Philippe se sont abstenus. Sur les trente députés de l'UDI, cinq ont voté pour le texte — Jean-Louis Borloo, Philippe Gomès, Yves Jégo, Sonia Lagarde et Jean-Christophe Lagarde —, les autres ont voté contre[85].
Le , par ailleurs également journée mondiale de lutte contre l'homophobie, le Conseil constitutionnel déclare la loi conforme à la Constitution.
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel rejette les arguments des requérants, déclarant notamment que le mariage comme l'union exclusive d'un homme et d'une femme « ne peut […] constituer un principe fondamental reconnu par les lois de la République » et que la loi « n'a ni pour objet, ni pour effet de reconnaître aux couples de personnes de même sexe un « droit à l'enfant ». Il a par ailleurs déclaré que l'« intérêt de l'enfant » en matière d'adoption était une « exigence constitutionnelle », quel que soit le sexe des adoptants[33].
La loi est promulguée par le président de la République le jour même de la décision du Conseil constitutionnel puis publiée au Journal officiel le lendemain, le [35].
La loi ouvre le mariage et l'adoption pour tous les couples, qu'ils soient de sexes différents ou de même sexe (article 1[34]).
La nouvelle loi française no 2013-404 du ouvrant le mariage civil aux couples de personnes de même sexe, modifie le Code civil français[86], en son chapitre Ier (titre V du livre Ier)[87] en ces termes :
En France, le droit civil des familles est ainsi modifié: le mariage civil est célébré sur le territoire français, entre deux personnes de sexe opposé ou de même sexe, dès lors que l’un des futurs époux majeur est français ou réside en France.
De plus, les unions départementales des associations familiales ont fait l'objet d'un amendement visant à leur interdire de refuser l'adhésion d'une association familiale telle que définie par le code de l'action sociale et des familles (article 15[34]).
La loi est applicable sur tout le territoire de la République, y compris dans tous les départements et collectivités d'outre-mer (article 22[34]), et notamment les territoires qui avaient choisi de ne pas appliquer le PACS.
Une circulaire du présentant la loi est publiée dans le Bulletin officiel du ministère de la Justice le 31 mai[89]. Elle détaille les modalités d'application de la loi pour le mariage entre personnes de même sexe et précise notamment les interactions avec les lois d'autres pays (règle de conflit de lois en matière de mariage et impossibilité de prononcer le mariage dans certains cas, reconnaissance d'un mariage homosexuel contracté en France par des ressortissants étrangers dans leurs pays d’origine, reconnaissance des mariages entre personnes de même sexe célébrés à l’étranger avant l’entrée en vigueur de la loi)[90].
Ainsi, elle précise les « règles de conflit de lois en matière de mariage – impossibilité de prononcer le mariage dans certains cas – reconnaissance d'un mariage homosexuel contracté en France par des ressortissants étrangers dans leurs pays d’origine – reconnaissance des mariages entre personnes de même sexe célébrés à l’étranger avant l’entrée en vigueur de la loi – etc[90] » et informe aussi les maires que par exception, ils ne peuvent pas marier les homosexuels français aux citoyens de onze autres pays : « d’Algérie, de Bosnie-Herzégovine, du Cambodge, du Kosovo, du Laos, du Maroc, du Monténégro, de Pologne, de Serbie, de Slovénie, et de Tunisie[91] ». Cette exception est faite aux ressortissants de 11 pays visés ci-dessus, du fait des accords bilatéraux entre pays qui indiquent que la loi applicable et relative au mariage est celle du pays d’origine.
Toutefois, la Cour de Cassation a rejeté en janvier 2015 l'application de ces accords bilatéraux dans le cas d'un couple comprenant un ressortissant marocain vivant en France, considérant que « la loi du pays étranger ne peut être écartée que si l'une des conditions suivantes est remplie : soit il existe un rattachement du futur époux étranger à la France, soit l'État avec lequel a été conclue la convention, n'autorise pas le mariage entre personnes de même sexe, mais ne le rejette pas de façon universelle[92]. »
Le premier mariage entre deux personnes de même sexe enregistré à l'état civil est celui de Dominique Adamski et Francis Dekens, mariés à Mouscron en Belgique le [93], qui ont fait retranscrire ce mariage dans leur commune de Cayeux-sur-Mer[94]. Ils avaient déjà été les premiers Français à conclure un PACS le à Lille[93].
Le , Hélène Mandroux, maire de Montpellier, célèbre le premier mariage entre deux personnes de même sexe en France, unissant Vincent Autin et Bruno Boileau[95], qui divorceront en novembre 2020[96].
Le , les premiers mariages entre deux femmes ont lieu à Saint-Jean-de-la-Ruelle et à Montpellier[97].
Fin , France Inter estime à 596 le nombre de mariages célébrés entre personnes de même sexe lors des trois premiers mois d'application de la loi dans les 50 plus grandes communes françaises, soit environ 1 % des mariages célébrés durant cette période[98].
Le , le Conseil d'État transmet au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité qui lui avait été soumise par un collectif de maires au sujet de l'absence de clause de conscience pour les officiers d'état civil opposés à la célébration de mariages de couples de même sexe[99],[100]. La question est examinée par le Conseil constitutionnel en audience publique le 8 octobre suivant[101]. Le , le Conseil constitutionnel rend la décision no 2013-353 QPC[102] « considérant qu'en ne permettant pas aux officiers de l'état civil de se prévaloir de leur désaccord avec les dispositions de la loi du 17 mai 2013 pour se soustraire à l'accomplissement des attributions qui leur sont confiées par la loi pour la célébration du mariage, le législateur a entendu assurer l'application de la loi relative au mariage et garantir ainsi le bon fonctionnement et la neutralité du service public de l'état civil ; qu’eut égard aux fonctions de l'officier de l'état civil dans la célébration du mariage, il n'a pas porté atteinte à la liberté de conscience. »
Le , le tribunal correctionnel de Marseille condamne à cinq mois de prison avec sursis Sabrina Hout, une élue socialiste qui avait usé de stratagèmes pour ne pas avoir à unir un couple de femmes, alors même qu'elle avait célébré les quatre autres mariages prévus le même jour au sein de la mairie des 15e et 16e arrondissements[103]. Le parquet de Marseille estime qu’il s’agit de la première affaire de discrimination, alors que 17 500 mariages entre personnes de même sexe ont été célébrés en France depuis la promulgation de la loi le . Trois mois et demi après sa condamnation, Sabrina Hout est réhabilitée en tant qu’adjointe au maire et peut à nouveau prononcer des mariages. Un journal local ironise: « tous les mariages ? »[104].
Entre juin et , 7 367 mariages (sur un total de 238 592 en 2013) ont été célébrés entre des personnes de même sexe, dont 3 060 entre femmes et 4 307 entre hommes. Au cours de l'année 2014, on dénombre 10 522 mariages entre personnes de même sexe (4 856 entre femmes et 5 666 entre hommes) sur un total de 241 292 mariages, soit 4,36 % des mariages célébrés à la même période[105]. Pour 2015, les données provisoires de l'Insee sont d'environ 8 000 mariages entre personnes de même sexe sur un total de 239 000, soit 3,3 %[106],[107].
Type de mariage | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Ensemble des mariages | 245 930 | 238 592 | 241 292 | 236 316 | 232 725 | 233 900 | 235 000 |
Mariages entre personnes de sexe différent | 245 930 | 231 225 | 230 770 | 228 565 | 225 612 | 227 000 | 229 000 |
Mariages homosexuels | 0 | 7 367 | 10 522 | 7 751 | 7 113 | 7 000 | 6 000 |
dont entre femmes | 0 | 3 060 | 4 856 | n.d. | n.d. | n.d. | n.d |
dont entre hommes | 0 | 4 307 | 5 666 | n.d. | n.d. | n.d. | n.d |
Part des mariages homosexuels | 0,00 % | 3,09 % | 4,36 % | 3,28 % | 3,06 % | 2,99% | 2,55% |
La procréation médicalement assistée (PMA) est ouverte en France aux couples hétérosexuels stériles depuis 1994. La condition médicale de stérilité serait annulée si la PMA était ouverte aux couples de lesbiennes, ce que le gouvernement n'a pas prévu en déposant son projet de loi.
En , les députés socialistes prévoient de déposer un amendement autorisant la PMA pour les couples de femmes[109], le président de la République ayant laissé entendre qu'il ne s'y opposerait pas[110]. Finalement, en , ils annoncent qu'ils ne déposeront pas d’amendement pour inclure la procréation médicalement assistée (PMA) dans le projet de loi sur le mariage homosexuel, acceptant qu'elle soit ajoutée à un autre projet de loi sur la famille, en [111].
Dans un avis[112] de , le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) s'est prononcé contre l'ouverture de la PMA aux couples homosexuels[113], au motif que « la PMA a toujours été destinée à résoudre un problème de stérilité d'origine médicale et non à venir en aide à une préférence sexuelle ou à un choix de vie sexuelle » et précise que « l'ouverture de la PMA à l'homoparentalité ou aux personnes seules ouvrirait de fait ce recours à toute personne qui en exprimerait le désir et constituerait peut-être alors un excès de l'intérêt individuel sur l'intérêt collectif. La médecine serait simplement convoquée pour satisfaire un droit individuel à l'enfant[114]. » Dans ce même avis, le CCNE s'était en revanche prononcé pour l'adoption par les couples homosexuels[114].
Le , le CCNE s'auto-saisit de la question de la PMA, avant que François Hollande n'annonce le 25 janvier son intention de le consulter sur le sujet[115] et que Jean-Marc Ayrault n'annonce le vouloir attendre l'avis des membres du comité, avant d'engager l'examen d'un texte sur l'ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples d'homosexuelles, qui n'aurait donc plus lieu en mars mais sans doute à l'automne 2013[116].
Sur l'opportunité d'ouvrir la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes, François Hollande s'est prononcé pour (« Oui à la PMA, non à la GPA », dit-il au magazine Têtu en ) avant de déclarer « Si j'y avais été favorable, je l'aurais intégrée dans le projet de loi », déclare-t-il le )[117].
La philosophe Élisabeth Badinter plaide en faveur de la gestation pour autrui (GPA), lors de son audition à l'Assemblée nationale, le [118]. En marge d'une manifestation parisienne pour l'ouverture du mariage aux couples homosexuels, le , Pierre Bergé exprime son désir d'ouvrir le débat sur le sujet de la GPA, et assimile « une femme qui louerait son ventre » à « un ouvrier qui loue ses bras »[119], ce qui provoque de vives réactions[120].
Interdite en France pour tous les couples, la GPA est fortement critiquée, notamment par le mouvement féministe pour qui il ne s'agit pas d'« une forme de procréation médicalement assistée » mais d'« une industrie de « location des ventres » qui « donne la possibilité aux hommes de disposer du corps des femmes »[121]. Le Parti socialiste est également favorable au maintien de son interdiction[122],[123] et aucun amendement en faveur de l'autorisation de la GPA n'est prévu.
Au moment où l'Assemblée nationale commence l'examen du projet de loi sur le « mariage pour tous », est publiée une circulaire du Ministère de la Justice, datée du , demandant aux greffiers des tribunaux d'instance de « ne plus refuser la délivrance de certificats de nationalité française au seul motif qu'ils concernent des enfants nés de mère porteuse à l'étranger »[124]. François Hollande tente d'apaiser le débat, dans une lettre adressée à Christian Jacob, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, lettre dans laquelle il dit s'opposer « fermement à la gestation pour autrui »[125].
Alors que son parti s'est officiellement prononcé contre le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels et a appelé le gouvernement à organiser un grand débat sur le sujet, lors d'états généraux de la famille, le député Daniel Fasquelle (UMP), rejoint par plusieurs de ses collègues et, plus tard, par Axel Poniatowski et Nathalie Kosciusko-Morizet, propose une « alliance civile en mairie » donnant aux couples homosexuels « les mêmes droits économiques et fiscaux que les couples hétérosexuels », mais pas l'adoption et la procréation médicalement assistée[126],[127],[128]. Cette idée avait été avancée par Nicolas Sarkozy en 2007, avant d'être abandonnée, car des juristes estimaient anticonstitutionnel de réserver une telle union civile aux seuls homosexuels, comme le souhaitait le Président[129].
L'écrivain Benoît Duteurtre oppose le conformisme bourgeois, qui trouve application dans le mariage, au caractère « sulfureux » de certains homosexuels. Il publie en 2004 une tribune dans Libération intitulée « Noce gay pour petits-bourgeois », dans laquelle il conteste l'intérêt et la cohérence de cette revendication[130]. En 2012, il reprend les mêmes arguments dans un article intitulé « Pourquoi les hétéros veulent-ils marier les homos ? »[131]. Il publie en janvier 2013 dans Marianne un nouvel article approfondissant ces arguments[132].
Alors qu'en droit français, le droit au mariage implique automatiquement le droit à l'adoption conjointe[133], des sondages sont effectués en séparant les deux questions :
Source | Date de réalisation | Panel | NSP | Pour | Contre |
---|---|---|---|---|---|
BVA | 2000 | 2 % | 48 % | 50 % | |
BVA | 2004 | 4 % | 50 % | 46 % | |
CSA | 2004 | 4 % | 50 % | 46 % | |
BVA | 2006 | 2 % | 60 % | 38 % | |
BVA | 971 | 4 % | 63 % | 33 % | |
Ifop | 2 000 | 65 % | 35 % | ||
Ifop | 988 | 61 % | 39 % | ||
BVA | 1 021 | 1 % | 58 % | 41 % | |
CSA | 1 005 | 5 % | 54 % | 41 % | |
Ifop | 1 005 | 60 % | 40 % | ||
Ifop | 1 005 | 60 % | 40 % | ||
Opinionway | 981 | 57 % | 43 % | ||
Ifop | 1 026 | 63 % | 37 % | ||
Ifop | 959 | 66 % | 34 % | ||
BVA | 1 219 | 1 % | 58 % | 41 % | |
BVA | 994 | 1 % | 61 % | 38 % | |
BVA | 987 | 3 % | 55 % | 42 % | |
Ifop | 1 009 | 68 % | 32 % | ||
BVA | 1 102 | 2 % | 67 % | 31 % | |
Pew Research Center | 4 % | 73 % | 23 % | ||
Eurobaromètre | 2019 | 6 % | 79 % | 15 % | |
Ipsos | ≈1 000 | 19 % | 59 % | 22 % |
Note : pour des échantillons de près de 1 000 personnes et un seuil de confiance de 95 % (comme c'est le cas de la majorité des sondages du tableau), la marge d'erreur est de près de 3 % quand les pourcentages « pour » et « contre » se répartissent à 40-60 % ou 50-50 %.
Source | Date de réalisation | Panel | NSP | Pour | Contre |
---|---|---|---|---|---|
BVA | 1998 | 2 % | 28 % | 68 % | |
BVA | 2002 | 8 % | 41 % | 51 % | |
CSA | 2004 | 2 % | 33 % | 65 % | |
BVA | 2006 | 2 % | 48 % | 50 % | |
BVA | 971 | 4 % | 56 % | 40 % | |
Ifop | 2 000 | 53 % | 47 % | ||
Ifop | 988 | 48 % | 52 % | ||
BVA | 1 021 | 3 % | 50 % | 47 % | |
CSA | 1 005 | 4 % | 48 % | 48 % | |
Ifop | 1 005 | 46 % | 54 % | ||
Ifop | 1 005 | 46 % | 54 % | ||
Opinionway | 981 | 45 % | 55 % | ||
Ifop | 1 026 | 49 % | 51 % | ||
Ifop | 959 | 47 % | 53 % | ||
BVA | 1 219 | 2 % | 45 % | 53 % | |
BVA | 994 | 1 % | 50 % | 49 % | |
BVA | 987 | 2 % | 48 % | 48 % | |
Ifop | 1 009 | 53 % | 47 % | ||
BVA | 1 102 | 2 % | 57 % | 41 % | |
Ipsos | ≈1 000 | 10 % | 62 % | 29 % |
Note : pour des échantillons de près de 1 000 personnes et un seuil de confiance de 95 % (comme c'est le cas de la majorité des sondages du tableau), la marge d'erreur est de près de 3 % quand les pourcentages « pour » et « contre » se répartissent à 40-60 % ou 50-50 %.
Un sondage[134], commandé à l'Ifop par l'association « Les adoptés », réalisé les 27 et [135], analyse la hiérarchie de l'importance entre deux propositions de « principe à garantir prioritairement dans la perspective de l’élargissement des droits des couples de même sexe » : 63 % des répondants déclarent qu'« il faut que les enfants adoptés puissent avoir un père et une mère » contre 34 % qui déclarent que « il faut que les couples homosexuels puissent adopter des enfants ».
Dans un sondage réalisé par l'Ifop, du 18 au , 69 % des personnes interrogées estiment que les Français « doivent être appelés à décider par référendum » sur le projet de loi autorisant le mariage homosexuel avec droit d'adopter des enfants[136].
Dans un sondage de commandé à l'Ifop par Alliance VITA – association elle-même opposée au mariage des couples de même sexe – 39 % des personnes interrogées sont favorables « au droit au mariage pour des personnes de même sexe, assorti du droit d’adopter », 36 % « à une union civile, qui accorderait davantage de droits que le PACS mais sans pour autant permettre le droit à l’adoption » et 21 % « à aucun de ces projets »[137].
Dans un autre sondage, datant du sur « Les Français et la politique de François Hollande », 55 % des personnes interrogées se déclarent défavorables à « L’instauration du droit au mariage et à l’adoption pour les couples homosexuels » parmi les « mesures, décisions ou projets initiés par François Hollande »[138].
Dans un sondage commandé à l'Ifop par le journal Metro réalisé entre le 26 et 27 (soit juste après le vote de la loi) au près d'un échantillon de 961 personnes représentatives de la population française âgées de 18 ans ou plus, 53 % des sondés se déclarent favorables « à la loi permettant aux couples de même sexe de se marier et d’adopter des enfants » contre 47 % opposés. Ils étaient 51 % à y être favorables et 49 % opposés entre le 23 et 25 . Dans le même sondage, 67 % des sondés se déclarent hostiles à la poursuite des manifestations contre le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe contre 33 % qui s'y annoncent favorable[139].
En , sept mois après la promulgation du texte de loi autorisant le mariage homosexuel, un sondage de BVA pour Le Parisien indique que 48 % des sondés sont favorables « à l’instauration du droit au mariage et à l’adoption pour les couples homosexuels » et 50 % défavorables[140], soit des proportions assez comparables à celles enregistrées au moment du débat sur la loi. Le clivage politique est également très marqué, avec 81 % des sympathisants de gauche interrogés qui approuvent la mesure et 78 % des sympathisants de droite qui la désapprouvent[141].
En , selon un sondage Odoxa pour i-Télé, 73 % des sondés, dont 56 % des sympathisants UMP, ne souhaitent pas que la droite supprime le mariage homosexuel si elle revenait au pouvoir[142].
En , un sondage Ifop commandé pour l’Avenir Pour Tous, le mouvement fondé par Frigide Barjot, montre 54 % des sondés opposés à la loi en vigueur et à la reconnaissance des enfants nés par GPA à l'étranger et par insémination artificielle et adoptés par des couples homosexuels[143]. Le sondage est cependant considéré comme orienté par certains médias, notamment car la GPA et l'insémination artificielle ne font pas partie de la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples homosexuels[144],[145].
Dès 2002, le Parti socialiste se déclare favorable à l'égalité des droits sur les questions du mariage civil et de la reconnaissance de la filiation[146]. Lors de l'élection présidentielle de 2012, puis des législatives, la légalisation du mariage et de l'adoption pour les couples homosexuels fait partie du projet du Parti socialiste[28],[29] et constitue l'engagement no 31 de François Hollande. La plupart des autres partis situés à gauche sont également favorables au mariage homosexuel : EELV (qui le revendique dès 2003), le Parti radical de gauche (qui l'inscrit dans son programme « La Gauche moderne »[147] dès 2005), le Front de gauche (qui l'inscrit dans son programme « L'Humain d'abord »[148]), le Nouveau Parti anticapitaliste[149] et Lutte ouvrière[150].
Les partis de droite sont généralement opposés au mariage homosexuel, mais quelques personnalités de droite y sont favorables[151],[152], comme Roselyne Bachelot[153], Franck Riester[154], Franck Louvrier[155], Benoist Apparu[156], Dominique de Villepin[157], Monique Pelletier[158] ou encore Valéry Giscard d'Estaing[159].
Au sein de l'UDI, un collectif composé notamment d'Yves Jégo, Chantal Jouanno, Jean-Christophe Lagarde et Rama Yade signe le un article publié par Le Monde, intitulé « Disons oui au mariage gay ! Suivre les évolutions sociales »[160].
Nicolas Bays, député socialiste, hétérosexuel, est l'auteur d'un baiser de solidarité échangé avec un autre élu, Yann Galut, lors de la manifestation en faveur du « mariage pour tous » du . Lorsqu'il monte le à la tribune de l’Assemblée, c’est pour rappeler que l’égalité des droits « n’est pas qu'affaire de symboles » : « L'égalité ne se négocie pas. L'égalité ne s'ajuste pas. L'égalité des droits est la condition première aujourd'hui de la lutte contre l'homophobie. C'est le droit de vivre dans la dignité que nous donnons aujourd'hui à des centaines de milliers d'homosexuels maintenant et pour les prochaines générations, ici et au regard du monde entier, où tant d'homosexuels sont encore emprisonnés, torturés, tués » [161].
Plusieurs associations LGBT et féministes soutiennent le mariage pour les couples de même sexe (SOS homophobie[162], Act Up-Paris[163], l'Inter-LGBT[164], le Planning familial[165], Osez le féminisme ![166]
Les associations LGBT appellent à manifester les 15 et en soutien au projet de loi[167]. L'appel est soutenu par les partis de gauche et des syndicats[168]. 60 000 personnes selon la police, 150 000 selon les organisateurs, défilent à Paris[169] et entre 7 800 et 20 000 à Marseille, Lyon, Nantes et Lille[170] et l'association GayLib proche, jusqu'en , de l'UMP)
Deux nouvelles manifestations sont organisées, une à Lyon le (11 000 personnes selon la police, 20 000 selon les organisateurs[171]) et une autre à Paris, le [172], pour laquelle le Premier ministre Jean-Marc Ayrault espère « une forte mobilisation »[173]. Lors de ce rassemblement, 125 000 personnes défilent selon le décompte de la police[174]. Les organisateurs revendiquent 400 000 manifestants à Paris et 500 000 sur l'ensemble du week-end[175].
Plusieurs associations antiracistes ou de défense des droits de l'homme y sont également favorables (Amnesty International[176], la Ligue des droits de l'homme[177], le MRAP[178] ou encore SOS Racisme[179]) tout comme des associations familiales, de parents d'élèves ou d'éducation populaire et de jeunesse (Union des familles laïques[180], FCPE[181], Ligue de l'enseignement[182]).
Enfin plusieurs syndicats se prononcent également en faveur de l'ouverture du mariage aux homosexuels (CGT[183], CFDT[184], l'UNSA[185], le SNES et la FSU[186], l'UNEF[187] ou encore l'Union nationale lycéenne[188]).
Le banquier d'affaires Philippe Villin, qui a été vice-président directeur général du Figaro, est favorable à l'ouverture du mariage, de l'adoption, de la procréation médicalement assistée (PMA) et de la gestation pour autrui (GPA) aux couples homosexuels[189].
Éric Walter, secrétaire général de la Hadopi, est favorable au « mariage pour tous » et estime, contrairement à Jean-Pierre Rosenczveig[190], que l'ouverture de l’adoption aux couples homosexuels n’atteint pas les droits de l’enfant[191].
En réponse à la lettre ouverte des 170 juristes, quatre enseignants-chercheurs de l'Université Paris Ouest Nanterre La Défense (Éric Millard, Pierre Brunet, Stéphanie Hennette-Vauchez et Véronique Champeil-Desplats) procèdent à une remise en cause théorique et épistémologique de l'opposition exprimée par leurs collègues à qui ils reprochent de n'avancer aucun argument juridique. Selon les auteurs nanterrois, ni la nature du savoir juridique, ni l'état du droit positif n'autorisent les juristes à prendre position « en tant que juristes » et « au nom du droit » sur « l'admissibilité juridique » de l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe. Éric Millard, Pierre Brunet, Stéphanie Hennette-Vauchez et Véronique Champeil-Desplats dénoncent ainsi les « méthodes fallacieuses » de leurs collègues, qui mettent en avant leur qualité de juristes savants pour « faire profession [...] de moraliste »[192]
D'après un sondage IFOP de , 52 % des maires sont contre l'adoption du projet et 61 % demandent le report de la discussion. Un « Collectif des maires pour l'enfance » revendique plus de 20 000 maires et adjoints[273],[274] opposés à l'ouverture du mariage et de l'adoption à des couples de même sexe. Ce collectif a comme porte-parole Franck Meyer, maire de Sotteville-sous-le-Val»[275], qui demande, « en dehors de toutes contingences politiques »[276], « solennellement au président de la République de retirer le projet de loi sur le mariage et l'adoption entre personnes de même sexe, et de lancer des états généraux sur le mariage, la famille et la filiation »[277],[278]. Sur son site internet, ce collectif déclare notamment que « le droit fondamental de l’enfant se base sur la nature : idéalement c’est grandir avec ses parents naturels. Dans le cas des enfants adoptés qui connaissent déjà la blessure de ne pas connaître cette normalité, la société doit leur préserver le droit à 1 papa et 1 maman »[279],[280]. Si la loi était adoptée, ces maires et adjoints demandent la possibilité d'exercer une « clause de conscience » leur permettant de ne pas célébrer de mariage entre deux personnes du même sexe[281].
Le , le président de la République reconnaît, devant l'Association des maires de France, cette « liberté de conscience » des élus qui ne voudraient pas appliquer la future loi[277]. L'inter-LGBT se déclare scandalisée par ces déclarations et « exige d’être reçue rapidement par le Président de la République »[282]. Le , François Hollande reçoit deux de ses représentants, Nicolas Gougain et Mathieu Nocent[283], et retire l'expression « liberté de conscience » à l'issue de cet entretien[284].
Des constitutionnalistes soulignent qu'une « clause de conscience » pourrait s'opposer au principe de « l'égalité devant la loi »[281]. Cependant, en accord avec les lois en vigueur, un maire peut déléguer la célébration d'un mariage à un membre de son conseil municipal. Il pourrait donc faire de même dans le cas d'un mariage entre personnes de même sexe, mais aucune mairie ne serait autorisée à refuser de célébrer un tel mariage, si la loi était adoptée[285].
Le , le Conseil constitutionnel, saisi dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité qui lui a été posée par un collectif de maires[286], estime que la loi « n'a pas porté atteinte à la liberté de conscience » en ne prévoyant pas de clause de conscience pour les officiers d'état civil opposés à la célébration de mariages entre personnes de même sexe[102].
Le , le Conseil d'État déboute le « Collectif des maires pour l'enfance », rappelant qu'« aucun texte ni aucun principe n'impose aux officiers d'état civil d'approuver les choix de vie des personnes dont ils célèbrent le mariage ». Le Conseil d'État juge que l'interdiction faite aux officiers d'état civil de refuser de célébrer les mariages, en dehors des cas prévus par la loi, ne méconnaît pas la liberté de conscience garantie par la Convention européenne des droits de l'Homme[287]. En , les « maires pour l'enfance » en appellent à l'Organisation des Nations unies, pour dénoncer « l’atteinte à leur liberté de conscience »[288].
Il y a un fort consensus des grandes autorités religieuses françaises contre le mariage homosexuel :
Le , La Croix indique que l'Académie des sciences morales et politiques « s’élève avec fermeté contre le projet de loi sur le mariage et appelle les pouvoirs publics à ouvrir un débat », les membres de l'Académie estimant notamment que le projet de loi effectue « la promotion d’un « droit à l’enfant qui fait passer celui-ci de sujet de droit à objet de droit »[313]. Elle rappelle que juridiquement, la différence des sexes dans le mariage n'est pas discriminatoire, et met par ailleurs en avant le droit de l'enfant (réel et « sur lequel l'État doit veiller ») sur le « droit à l'enfant » qui n'existe pas juridiquement[314]. Dans une analyse du droit de la famille effectuée en 2001, elle avait notamment énoncé qu'« être juridiquement parent, c’est être en même temps l’auteur biologique de l’enfant et celui qui déclare vouloir l’assumer comme sien »[315].
Les opposants au mariage et à l'adoption pour les couples de même sexe organisent plusieurs manifestations à l'appel de plusieurs associations, dont certaines proches de l'Église catholique, regroupées sous l'intitulé « La Manif pour tous »[339]. Le , 70 000 personnes selon la police et 200 000 selon les organisateurs, manifestent contre le mariage des couples homosexuels à Paris et entre 40 000 et 52 000 à Lyon, Marseille[340], Toulouse[341], Nantes et Rennes[262],[342] puis de nouveau le lendemain dans la capitale, à l'appel cette fois-ci de groupes proches des catholiques traditionalistes (9 000 manifestants[343]). Cette dernière manifestation est émaillée de violences[344],[345] avec des contre-manifestants non autorisés à manifester[262],[346]. Malgré ces manifestations, la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine annonce que le gouvernement « ne renonce pas à son projet »[347].
Les opposants manifestent à nouveau le dans cinq grandes villes[343].
Une manifestation nationale rassemble à Paris, le , 340 000 personnes selon la préfecture de police et 1 000 000 selon les organisateurs[348]. Après vérification, le préfet de police maintient son évaluation de 340 000 manifestants, défend sa manière de compter et critique celle des organisateurs[349], qui maintiennent eux aussi leur estimation — plus d'un million de manifestants — et évoquent un « mensonge d'État » à propos du comptage de la police[350]. Les organisateurs sont reçus par François Hollande, le [351].
Le , les opposants au mariage homosexuel déploient des banderoles sur 170 ponts de Paris et sa banlieue, alors que le même jour débute le débat à l'Assemblée sur le projet de loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples homosexuels. Ces banderoles reproduisent des slogans tels que « Un père et une mère c'est élémentaire », « Tous nés d'un homme et d'une femme », « Non à la filiation-fiction » ou « L'enfant n'est pas un droit »[352],[353].
La Manif pour tous organise des rassemblements dans tous les départements, le samedi [354]. La police comptabilise 80 000 participants et 80 rassemblements[355].
Le , Xavier Bongibault, Frigide Barjot et Philippe Brillault, maire du Chesnay, déposent au Conseil économique, social et environnemental (CESE) une pétition revêtue de 700 000 signatures certifiées par huissier, demandant un débat sur le projet de loi ouvrant le mariage et l'adoption aux homosexuels. C'est la première pétition citoyenne complète transmise au CESE pour avis consultatif. Il la juge irrecevable le [356],[357].
Les opposants au mariage entre personnes de même sexe manifestent à nouveau à Paris le [358]. La police estime à environ 300 000 le nombre de manifestants, tandis que les organisateurs l'estiment à 1,4 million[359],[360].
Le collectif La Manif pour tous porte plainte pour « incitation à commettre un acte de terrorisme » contre Pierre Bergé, en raison d'un message qu'il avait relayé sur Twitter le et qui disait : « Vous me direz, si une bombe explose le 24 mars sur les Champs à cause de la Manif pour tous, c'est pas moi qui vais pleurer »[361].»
Le vote à mains levées au Sénat, le , et l'accélération de la procédure parlementaire pour l'adoption de la loi sur le mariage homosexuel, décidée par le gouvernement le même jour, provoquent la colère des opposants, qui multiplient les manifestations devant le Sénat et l'Assemblée nationale.
L'UMP dénonce un risque de confrontation[362]. Christine Boutin considère que le vote du Sénat est une « injure sans limite » et parle de « guerre civile », déclarant : « Ça va péter, je vous assure que ça va péter »[363]. Frigide Barjot évoque une « dictature » et prévient : « Hollande veut du sang, il en aura ! »[76], puis retire ces propos violents trois jours après et appelle au calme[364]. L'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, reprenant le vocabulaire du général de Gaulle lors des évènements de mai 68[365], évoque une « menace de chienlit ».
Lors de la manifestation du , certains membres de La Manif pour tous provoquent des débordements et des confrontations avec la police ont lieu (des gaz lacrymogènes sont utilisés contre des manifestants, par exemple contre Christine Boutin)[366]. La Manif pour tous, qui se veut populaire et pacifique, se divise après cette manifestation, et le Printemps français, mouvement plus politisé qui dénonce la politique du gouvernement et qui est proche de l'extrême droite, est créé. Ses membres mènent des actions incluant le harcèlement de personnalités favorables au mariage homosexuel et la dégradation des locaux de l'inter-LGBT. Des liens existeraient entre le Printemps français et Civitas, association catholique intégriste qui lutte aussi contre le mariage homosexuel, mais que la Manif pour tous avait toujours écarté de ses rangs en raison de sa radicalité et de son opposition plus générale à l'homosexualité[367].
Un article de Marianne daté de début indique que l'association SOS homophobie constate une forte hausse des actes homophobes, qu'elle impute au moins en partie aux débats sur le projet de mariage pour les couples de même sexe[368]. Les appels aux associations LGBT pour motif d'homophobie pourraient avoir jusqu'à triplé les trois premiers mois de 2013[369]. La porte-parole du gouvernement français, qui reconnaît également l'augmentation des actes homophobes sur cette période, a déclaré dans un communiqué condamner l'augmentation de ces violences[370]. Frigide Barjot dénonce toutes les violences et affirme que la Manif pour tous n'a aucun lien avec les fondamentalistes et les extrémistes. La droite et la gauche se renvoient la responsabilité des violences[371],[372],[373]. Le , évoquant en particulier la manifestation du des opposants au projet de loi Taubira, le député italien, Luca Volontè, président du groupe PPE (droite) à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE), pose une question au Conseil de l'Europe au sujet de la gestion des manifestations par le gouvernement français, l'accusant de violences sur les manifestants[374]. Le , l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe vote une résolution déplorant « les récents cas de recours excessif à la force pour disperser les manifestants » et réitérant « son appel aux autorités de veiller à ce que l’action de la police, si elle est nécessaire, reste proportionnée »[375],[376],[377],[378].
La presse internationale s'étonne du « climat homophobe » dans lequel s'est déroulé le débat en France et Courrier international indique que la France est perçue comme « repliée sur elle-même »[379],[380]. En Espagne, El País fait écho « [d']appels et tweets menaçants, [de] prières de rue et [d']attaques physiques » envers les personnes homosexuelles. De son côté, la BBC parle d'un « lobby anti-mariage homosexuel, soutenu par l'Église catholique et l'opposition conservatrice », tandis que le quotidien britannique conservateur The Daily Telegraph évoque « des mois de débat politique acharné », rapportant notamment les propos du député UMP Philippe Cochet, qui déclarait le qu'on était « en train d’assassiner des enfants », et mentionne une étude qui classe la France comme le pays le moins tolérant d'Europe de l'Ouest envers les homosexuels[381].
Wilfred de Bruijn, agressé avec son compagnon rue des Ardennes, dans le 19e arrondissement de Paris, pendant la nuit du 6 au (2013), publie sa photo sur les réseaux sociaux. Elle devient un « symbole » pour des associations LGBT, afin de dénoncer un climat devenu homophobe et violent, selon elles, depuis le début des débats parlementaires[382], bien qu'aucun lien n'ait pu être démontré entre les débats en cours et cette agression. Quatre personnes (de 17 à 19 ans) d'une « cité » du 19e arrondissement, déjà connus des services de police pour faits de violence, ont été interpellées en [383]. Ils sont mis en examen le 20 septembre pour violences aggravées en réunion. Selon certaines sources, les suspects avaient été en fait identifiés dès les jours suivant l'agression, mais n'ont été interpellés que cinq mois plus tard[384]. Des peines de prison de dix-huit et vingt-quatre mois ferme sont requises contre les agresseurs[385].
Plusieurs analystes considèrent que la loi sur le « mariage pour tous » a été une des causes de la défaite de la gauche, et notamment du Parti socialiste (PS), aux élections municipales de 2014. Selon un sondage Harris Interactive pour La Croix, la question du mariage homosexuel a été jugée « très importante » ou « importante » pour 37 % des Français, et 42 % des catholiques pratiquants[390]. Le démographe Hervé Le Bras avait également anticipé cette situation dès le mois d', considérant que le PS venait « de s'aliéner ce qui [avait] été à la base de son succès lors des dernières élections » (la présidentielle et les législatives de 2012), à savoir « ce centre droit, lié à une tradition catholique » qui n'avait pas « adhéré aux positions xénophobes de Nicolas Sarkozy »[391].
Mais plusieurs socialistes[392], dont Patrick Mennucci[393], ainsi que le philosophe Bertrand Vergely[394], soulignent également l'impact du mariage homosexuel sur l'électorat musulman, votant habituellement à gauche et qui se serait largement abstenu[395],[396]. Le chercheur Gilles Kepel estime quant à lui que « le PS a largement perdu cet électorat aux municipales de 2014 », et que « La Manif pour tous [lui] a fourni une possibilité d'identification avec les cathos de droite et anti-gay, par le biais des valeurs, pour s'affirmer français ». Il voit là une « mutation significative », et fait le lien avec la fin du « tabou du FN » chez cet électorat, sans que cela en soit la seule cause[395].
Dans les années qui suivent l'entrée en vigueur de la loi, certains médias en dressent des bilans chiffrés et tire un constat d'apaisement. Deux ans après le vote de la loi, le Nouvel Obs relève que les célébrations se sont passent sans incident et que les mairies récalcitrantes sont très rares, relevant aussi une plus grande acceptation de l'homosexualité (58 % des sympathisants UMP se déclarent en faveur du mariage pour tous contre 33 % en janvier 2013) jusqu'à l'extrême-droite, avec un vote quasi unanime de l’Assemblée nationale pour admettre les homosexuels au don de sang[397],[398]. En 2016, les mariages entre personnes de même sexe étaient surreprésentés en milieu urbain : deux sur dix ont été célébrés dans une commune d'au moins 200 000 habitants contre un mariage sur dix entre personnes de sexe différent pour l'année 2014[399]. Selon un sondage réalisé en 2017 par l'Ifop, 63 % des Français considèrent qu'un couple d'homosexuels vivant avec ses enfants « constitue une famille à part entière » et 62 % des sondés se disent opposés à l'abrogation de la loi. Sur les trois premières années, l'INSEE recensait 3 % de mariages du même sexe, avec une légère surreprésentation des couples d'hommes[400]. Dans son livre publié en 2018 Les Leçons du pouvoir François Hollande déclare regretter d'avoir manqué d'audace pour ouvrir de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes[401].
En , l'Association des parents gays et lesbiens avait connaissance de seulement 4 couples homosexuels qui avaient pu adopter (en dehors des adoptions de l'enfant du conjoint)[402], et l'Association des familles homoparentales (ADFH) pense que « quelques familles » ont pu accueillir un enfant pupille de l'État et « moins de dix » un enfant étranger[403]. Les couples lesbiens peuvent en revanche depuis recourir légalement à la PMA[404].
En avril 2023, dix ans après l'adoption de la loi, plusieurs opposants de l'époque déclarent avoir changé d'avis ou regretter de s'y être opposés, comme les anciens parlementaires de droite Gérald Darmanin et Christophe Béchu (devenus ministres) et Jean-François Copé (ancien ministre) ainsi que plusieurs militants engagés en 2013 dans la Manif pour tous[405].
Pour la journaliste et autrice Rozenn Le Carboulec, « C'est un droit qui est à présent largement accepté »[406]. Christiane Taubira n'envisage pas de retour en arrière : « Les personnalités politiques qui, pour la présidentielle de 2017 par exemple, promettaient l'abrogation de la loi en ont fini avec ça. Pas par esprit progressiste mais parce qu'ils ont compris qu'il n'y a plus d'écho dans la société »[407].
Entre les printemps 2013 et 2023, près de 70 000 mariages de même sexe ont été conclus en France avec une moyenne relativement constante de 7 000 par an, sauf en 2020, année marquée par la pandémie de Covid-19[406]. En 2022, l'INSEE dénombrait ainsi 7000 mariages entre personnes de même sexe sur un total de 244 000 (près de 3%)[408].
Pour ce qui est de Paris, la mairie a célébré 7 970 mariages de même sexe, soit 9,4 % du total sur la commune (8,6 % en 2022, car l'année record se situe en 2014 juste après le vote de la loi Taubira). Parmi eux, 75 % sont des couples d'hommes et 25 % des couples de femmes[409].
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