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actrice et chanteuse allemande naturalisée américaine De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Marie Magdalene Dietrich, dite Marlene Dietrich [maɐ̯ˈleːnə ˈdiːtʁɪç][c] Écouter (parfois francisé en Marlène Dietrich [maʁlen djetʁiʃ ][d]), née le dans l'arrondissement de Schöneberg, à Berlin, et morte le à Paris 8e, est une actrice et chanteuse allemande naturalisée américaine.
Nom de naissance | Marie Magdalene Dietrich |
---|---|
Surnom |
L'Ange bleu[a] La Vénus blonde[b] |
Naissance |
Schöneberg, Brandebourg (Allemagne) |
Nationalité |
Allemande puis Américaine (par naturalisation 1939) |
Décès |
(à 90 ans) 8e arrondissement de Paris (France) |
Profession |
Actrice Chanteuse |
Films notables |
L'Ange bleu (1930) Shanghaï Express (1932) L'Impératrice rouge (1934) L'Ange des maudits (1952) |
Après s'être destinée à une carrière musicale dans un premier temps, elle se tourne vers le théâtre et le cinéma au début des années 1920. Lancée par le film L'Ange bleu de Josef von Sternberg, produit par l'Universum Film AG en 1930, elle est repérée par le studio américain Paramount et poursuit sa carrière à Hollywood. Sa collaboration artistique avec Josef von Sternberg produit sept films dont Morocco (1930), Shanghaï Express (1932) ou L'Impératrice rouge (1934), faisant de l'actrice l'incarnation parfaite de la femme fatale.
Par la suite, elle tourne avec les plus grands réalisateurs, dans divers genres de films. La comédie avec Ernst Lubitsch (Angel, 1937), René Clair (La Belle Ensorceleuse, 1941) ou Billy Wilder (La Scandaleuse de Berlin, 1948), le western avec George Marshall (Femme ou Démon, 1939) ou Fritz Lang (L'Ange des maudits, 1952), le film policier avec Alfred Hitchcock (Le Grand Alibi, 1950), Billy Wilder (Témoin à charge, 1957) ou Orson Welles (La Soif du mal, 1958).
Elle s'engage contre le nazisme dès les années 1930, et participe activement à la Seconde Guerre mondiale entre 1944 et 1945, rendant célèbre la chanson Lili Marleen, et obtenant en 1947 la médaille de la Liberté, plus haute distinction militaire américaine que peut recevoir un civil. Alors que ses rôles au cinéma se font moins nombreux, elle se tourne vers la radio puis vers le music-hall, faisant le tour du monde avec son tour de chant entre 1953 et 1975. Pour protéger son image, elle vit recluse les quinze dernières années de sa vie, dans son appartement du 12, avenue Montaigne à Paris, refusant de se faire photographier, tout en restant présente médiatiquement[1].
Marlene Dietrich marque aussi son époque par son style et son élégance au cours de ses apparitions publiques, s'habillant chez les grands couturiers français, notamment Hermès, Dior, Chanel ou Balenciaga[2]. Surnommée « L'Ange bleu » ou « La Vénus blonde », elle est classée en 1999 par l’American Film Institute à la neuvième place des actrices de légende[3].
Marie Magdalene Dietrich naît le à Schöneberg (aujourd'hui un quartier de Berlin), au numéro 65 de la Sedanstraße (aujourd'hui Leberstraße), dans le quartier de la Rote Insel[e], de Louis Erich Otto Dietrich (1868-1908), lieutenant de la police impériale prussienne, et de Wilhelmina Elisabeth Joséphine Felsing (1876-1945), riche héritière d'une famille d'horlogers[4]. Le couple, qui s'est marié en , a déjà une première fille, Elisabeth, née en 1900.
Ils donnent à leurs deux jeunes filles une éducation très stricte, entièrement basée sur la discipline. Celles-ci prennent notamment des cours de maintien, des leçons de français et d'anglais[5]. Alors que sa sœur aînée est une enfant obéissante, Marie Magdalene Dietrich est plus dissipée et s'envisage espionne ou artiste. C'est dans cette perspective qu'elle contracte ses deux premiers prénoms en Marlene[6]. Elle perd son père le . Les biographies divergent sur les circonstances de sa mort[7] : il est probablement emporté par la syphilis après être entré dans un sanatorium.
Sa mère se remarie en 1916 avec le meilleur ami de celui-ci, Eduard von Losch, capitaine de cavalerie, qui meurt sur le front de l'Est en juillet 1917 lors de la Première Guerre mondiale, sans avoir eu le temps d'adopter officiellement ses deux belles-filles[8].
Marlene Dietrich fréquente l’école des filles Auguste-Viktoria de 1907 à 1917 puis est diplômée de l’école Victoria-Luise (actuel lycée Goethe (de)). Elle cultive parallèlement ses dons pour la musique et le chant. En 1918, elle s'inscrit à l'École supérieure de musique Franz-Liszt de Weimar et prend des cours privés de violon avec le professeur suisse Robert Reitz, qui devient son premier amant[9]. Elle envisage une carrière de violoniste de concert, mais doit abandonner l'usage intensif de cet instrument à la suite d'une blessure au poignet (ganglion douloureux ou inflammation du ligament de l'annulaire gauche selon les biographies)[10]. Elle jouera plus tard de la scie musicale quand elle attendait son tour pour jouer une scène. Son premier emploi est celui de violoniste dans un orchestre qui accompagne la projection de films muets dans un cinéma de Berlin[11].
« Marlene Dietrich refuse de parler de ses débuts de comédienne, c'est-à-dire de la période comprise entre 1922 et 1930. Ce n'est pas négociable. »
Marlene Dietrich prend ses premiers cours de théâtre auprès de Max Reinhardt en 1921. En 1922, elle joue ses premiers petits rôles au théâtre, notamment au Großes Schauspielhaus, et joue dans des revues, comme celle du théâtre Komoedie dans le Kurfürstendamm de Berlin, aux côtés de la vedette française Margo Lion. Elle obtient aussi des rôles mineurs au cinéma. Son premier rôle crédité est Lucy dans Tragédie de l'amour de Joe May. Elle se marie le avec le régisseur Rudolf Sieber et donne naissance à sa fille Maria Elisabeth, le . Elle n'aura pas d'autres enfants, vivra peu avec son mari, et ne se remariera jamais (bien qu'un mariage[f] avec Jean Gabin semble avoir été, plus tard, sérieusement envisagé)[13].
Marlene Dietrich enregistre à la fin des années 1920 ses premières chansons, et les chante dans la revue Es liegt in der Luft (« C'est dans l'air », 1928) où elle se fait remarquer par le metteur en scène Josef von Sternberg[14].
En 1929, Marlene Dietrich tourne son premier rôle important dans L'Énigme sous la direction de Curtis Bernhardt. Mais c'est L'Ange bleu[15] tourné par Josef von Sternberg l'année suivante, et notamment la chanson « Ich bin von Kopf bis Fuß auf Liebe eingestellt » (« Je suis faite pour l'amour de la tête aux pieds »), qui lui apportent la gloire.
Tourné dans les studios de l'UFA à Babelsberg, ce film, qui réunit Emil Jannings (immense vedette à l'époque) dans le rôle du professeur Rath, et Dietrich dans celui de Lola-Lola, est le premier film parlant du cinéma allemand. Von Sternberg, qui entrevoit le potentiel de la jeune actrice, la recommande, avant même la sortie, au studio américain Paramount Pictures pour lequel il vient de tourner et dont le bureau berlinois cherche une actrice pour concurrencer Greta Garbo lancée par la Metro-Goldwyn-Mayer. La Paramount lui offre un cachet de 1 250 dollars par semaine[16].
Le soir de la première, le au Gloria Palast, en long manteau de fourrure blanche, une gerbe de roses dans les bras, Marlene Dietrich arbore sur sa robe un bouquet de violettes épinglé au niveau du pubis. À 23 heures, elle prend le train à la gare de Lehrter vers le port de Bremerhaven, d'où elle embarque pour New York. D'une actrice encore inconnue hors d'Allemagne, Sternberg va façonner un mythe.
Dès son arrivée, Marlene Dietrich interprète à nouveau une chanteuse de cabaret dans Morocco aux côtés de Gary Cooper. Premier des six longs métrages que tourneront ensemble Sternberg et Dietrich aux États-Unis, le film vaut à Marlene Dietrich une nomination à l'Oscar de la meilleure actrice en 1931 et lui confère une notoriété internationale. L'écrivain allemand Franz Hessel publie la même année la première biographie de l'actrice, Marlene: Ein Porträt, dans lequel il tente de brosser le portrait de la femme derrière la vedette. L'usage dans le titre de l'ouvrage du seul prénom de l'actrice donne une idée de sa célébrité déjà à ce moment-là ; la fascination pour Dietrich ne fait que commencer.
Von Sternberg et sa muse vont en effet asseoir définitivement au cours de leur collaboration le personnage de femme fatale[g] sur lequel Dietrich a construit sa renommée à partir de L'Ange bleu et qu'elle va s'atteler à entretenir tout au long de sa vie, tout en jouant sur une certaine ambiguïté sexuelle (elle apparaît régulièrement en habits masculins et exerce son charme autant sur les hommes que sur les femmes[h]).
« Après Lola-Lola, Marlene restera l'image parfaite de la femme fatale : mystérieuse et indomptable, sculptée par la lumière, dans le nuage irréel de la fumée de sa cigarette. On la suivrait au bout du monde... Dans son sillage, les personnes les plus sérieuses et les plus dignes deviennent des petits enfants. »
Le couple enchaîne ainsi avec Agent X 27 (1931), Shanghaï Express (1932), véritable succès du box-office jusqu'au Japon qui récompense l'actrice d'un kimono de cérémonie ; puis viennent Blonde Vénus en 1932 et L'Impératrice rouge en 1934, délire baroque qui sert davantage la gloire de Marlene Dietrich que celle de Catherine de Russie qu'elle interprète, et qui, malgré un échec financier deviendra avec le temps un chef-d'œuvre reconnu[18].
Même en dehors de l'écran, Marlene Dietrich subjugue les foules :
« Avec son profond regard mélancolique, ses cils longs de trois centimètres, le nimbe doux de ses cheveux, ses traits classiques, son air mystique et son corps de panthère, elle n'aurait pas pu entrer dans une église sans aussitôt troubler le sermon. »
La fille de l'actrice, Maria Riva, raconte une soirée avec sa mère à l'Opéra Garnier en 1933, et notamment l'entracte : « Tout le monde buvait du champagne et essayait de se rapprocher de ma mère, qui se comportait à son habitude, comme si elle était seule sur une île déserte, et fumait tranquillement sa cigarette pendant que les dames et les messieurs la dévoraient des yeux, comme si de rien n'était. »[20]
Cette fructueuse — mais houleuse[i] — collaboration s'achève en 1935 par La Femme et le Pantin d'après le roman homonyme de Pierre Louÿs, film préféré de l'actrice[21].
« La Femme et le Pantin est une superbe adaptation de Pierre Louÿs et l'apogée du mythe de la femme fatale symbolisée par Marlene. »
Après sa séparation artistique d'avec Sternberg, Marlene Dietrich ne continuera pas moins à incarner les femmes fatales, notamment dans La Maison des sept péchés (1940), La Belle Ensorceleuse et L'Entraîneuse fatale (1941), La Scandaleuse de Berlin en 1948, Le Grand Alibi (1950) ou encore Témoin à charge (1957)[j].
« Il est exact que cette actrice a fait de la vamp la reine des écrans, il est exact qu'elle incarne la féminité, il est exact que le sex-appeal n'a jamais de représentante plus brillante, plus attirante, plus persuasive qu'elle. »
Alors que ses films avec Sternberg sont reconnus aujourd'hui comme des chefs-d’œuvre du patrimoine cinématographique, ceux que Dietrich tourne en 1936 et 1937 marquent moins les esprits[k]. L'actrice peine en effet à trouver ses marques sans son pygmalion. Le tournage de I Loved a Soldier, est ainsi interrompu au bout d'un mois à la suite d'un désaccord entre Dietrich et la production, alors qu'il a déjà coûté près de 900 000 dollars. Désir de Frank Borzage (sorti en 1936, mais tourné avant I Loved a Soldier en 1935) et Le Jardin d'Allah de Richard Boleslawski, un des tout premiers films en couleurs, ne font pas recette.
La Paramount laisse Dietrich partir pour l'Europe en 1937 tourner Le Chevalier sans armure de Jacques Feyder aux studios de Denham près de Londres. Elle rentre ensuite à Hollywood pour jouer dans Ange sous la direction d'Ernst Lubitsch (qui avait assisté Borzage sur Désir). Le nouvel échec de ces films la fait taxer dans la presse de « poison du box-office » (« Box Office Poison »)[24] par l'association des propriétaires de salles de cinéma (Independent Theater Owners of America), comme Greta Garbo, Joan Crawford, Katharine Hepburn ou Bette Davis[l]. Ce à quoi l'actrice répond : « Tout ce que je sais, c'est que lorsqu'un des gars de la direction a besoin de rembourser son emprunt, ils m'appellent avec une idée de film[25] ».
Elle choisit alors de s'éloigner des studios et entame une liaison avec l'écrivain pacifiste Erich Maria Remarque. La même année, séjournant avec lui au cap d'Antibes, elle entretient une liaison discrète avec Joseph Patrick Kennedy, ambassadeur des États-Unis à Londres favorable à une politique d'apaisement envers l'Allemagne nazie. Elle accorde également ses faveurs au fils de celui-ci, le jeune John Fitzgerald Kennedy[26],[m]. C'est aussi à cette époque qu'elle entretient une liaison avec Suzanne Baulé dite Frede, une entraîneuse puis animatrice de cabaret qu'elle rencontre en 1936 au Monocle, une boîte de nuit féminine située boulevard Edgar-Quinet, à Paris ; les deux femmes restèrent amies jusque dans les années 1970, ainsi qu'en témoigne la correspondance conservée aux archives Marlene Dietrich de Berlin[27].
À l'été 1939, le producteur Joe Pasternak lui propose un western, Femme ou Démon, sous la direction de George Marshall, à condition que son cachet soit revu à la baisse[n]. Sur les conseils de son mari et de Sternberg, elle accepte néanmoins et remporte un triomphe qui apporte un second souffle à sa carrière.
Elle enchaîne alors avec La Maison des sept péchés de Tay Garnett en 1940, premier des trois films qu'elle tourne avec John Wayne, suivi de La Belle Ensorceleuse de René Clair et L'Entraîneuse fatale de Raoul Walsh en 1941. Trois films suivent en 1942, dont Les Écumeurs et La Fièvre de l'or noir, dans lesquels elle retrouve Wayne.
Résolument opposée au régime nazi, Marlene Dietrich rompt peu à peu, bien qu'à contre-cœur[o], les liens qui l'attachent à l'Allemagne. Devenue citoyenne américaine en [28],[29], elle met, comme de nombreuses vedettes de l'époque, sa célébrité au service de l'effort de guerre après l'entrée en guerre des États-Unis dans le conflit mondial en . Elle participe ainsi à l'Hollywood Canteen, et récolte des bons du trésor avec Orson Welles.
De 1941 à 1943, elle héberge chez elle Jean Gabin qui, refusant de tourner pour les Allemands, a quitté la France occupée[p]. Les deux acteurs ne tardent pas à entamer une liaison passionnée alors que Gabin est encore marié à Jeanne Mauchain, demeurée en France (le divorce sera prononcé le aux torts « entiers et reconnus » de l'acteur, bien qu'en son absence)[30].
Au début de l'année 1944, elle tourne Kismet, film musical dans lequel ses jambes peintes en or font autant parler la presse que la percée des Alliés en Italie[q] puis apparaît dans le film de propagande Hollywood Parade aux côtés du tout-Hollywood.
Dietrich pousse plus loin son engagement en intégrant l'United Service Organizations (USO). Elle part pour le front européen en [r], chantant pour les troupes américaines et britanniques stationnées au Royaume-Uni, avant d'accompagner la 3e armée américaine du général Patton en Italie, en France puis en Allemagne et en Tchécoslovaquie pendant la campagne de libération[31], donnant plus de 60 concerts en quinze mois. Son interprétation de Lili Marleen, chanson popularisée par le régime nazi, devient l’emblème de la résistance à celui-ci[32].
L'âge avançant, trouvant moins de rôles à Hollywood, elle retrouve, à la libération de Paris, Jean Gabin qui a rejoint la 2e division blindée[s]. Un mariage entre eux semble avoir été alors envisagé[f]. Elle refuse le scénario des Portes de la nuit de Marcel Carné, ne souhaitant pas interpréter la fille d'un collaborateur[t], pour tourner avec Gabin Martin Roumagnac (1946). S'il reçoit un succès en salles, le film n'est pas apprécié par la critique française[33].
Après sa rupture avec Gabin, elle rentre à Hollywood et tourne, teinte en brune, dans Les Anneaux d'or de Mitchell Leisen, puis dans La Scandaleuse de Berlin de Billy Wilder l'année suivante, même si elle met du temps à accepter le rôle, étant confrontée au même problème que pour Les Portes de la nuit (les liens de son personnage avec le régime nazi). Devenue la même année « la grand-mère la plus fabuleuse du monde »[34] avec la naissance de son premier petit-fils, elle part en 1949 à Londres tourner Le Grand Alibi sous la direction d'Alfred Hitchcock. Habillée par Dior, elle y interprète La Vie en rose, que lui a « prêtée » son amie Édith Piaf[u].
En 1951, elle joue pour la première fois pour Fritz Lang dans le western L'Ange des maudits mais, tout comme avec Sternberg quelques années plus tôt, la collaboration entre le réalisateur et sa vedette, également compatriotes, est houleuse[v], le premier traitant l'actrice de « bonniche allemande »[w], la seconde estimant qu'« un homme qui est capable de faire un film comme M le maudit ne peut être qu'un sadique. »[35].
En parallèle de sa carrière au cinéma, Dietrich participe aux émissions radiophoniques de son amie Tallulah Bankhead[x], jouant avec son image, son âge, et multipliant les sous-entendus[36]. Loin de son image de vamp mythique, l'actrice révèle également un réel talent de cuisinière comme le montre le livre Dîner chez Marlene. Passionnée par la cuisine, elle adore concocter pour ses amis ou amants le chou farci, les œufs brouillés, le rognon braisé ou son plat fétiche le pot-au-feu.
Témoin du mariage de Piaf avec Jacques Pills en , elle fait une apparition remarquée en 1953 dans un gala au profit des enfants handicapés du cirque Ringling Bros. and Barnum & Bailey Circus au Madison Square Garden à New York, vêtue de l'uniforme de Monsieur Loyal en mini-short (une tenue dont elle revendiquera plus tard l'"invention"[37],[38]: «J’ai inventé le mini-short, qu'on appellera plus tard le « hot pants »[y] ). Cette prestation lui sert de tremplin pour monter son propre spectacle de cabaret à Las Vegas. Pour 30 000 dollars par semaine, elle monte pour la première fois le sur la scène du night club du Sahara Hotel[39], vêtue d'un fourreau semé d'étoiles de strass[40].
Accompagnée par son dernier amant en date[41], l'arrangeur Burt Bacharach, Marlene Dietrich transporte son tour de chant sur les scènes du monde entier à partir de 1960 en Europe, et à l'été en Israël où elle chante en allemand et a droit à une standing-ovation. Elle enregistre en hébreu la chanson Shir Hatan[z],[42],[43] Elle se produit sur le continent américain et en URSS en 1964.
Plusieurs disques sont les témoins de cette tournée : Dietrich in Rio (1959), Wiedersehen mit Marlene (1960) et Marlene Dietrich in London (1964). Dans Sag mir, wo die Blumen sind (Dis-moi où sont les fleurs), composée par Pete Seeger et traduite en allemand par Max Colpet, elle dénonce la guerre froide.
En 1960, elle fait une tournée triomphale en Allemagne, est acclamée à Munich et Düsseldorf (mais dans cette dernière ville, au moment où elle sortait de son hôtel, une jeune fille parmi la foule lui crache au visage[44]).
Seule la France lui réserve un accueil mitigé, au grand dam de cette francophile[45]. Son ami le poète Jean Cocteau lui dit : « Votre nom commence par une caresse et finit par un coup de cravache ».
En 1961, convaincue que le national-socialisme n'était pas encore mort et que le peuple allemand était responsable de sa prolifération[46], elle accepte de jouer dans Jugement à Nuremberg, film de Stanley Kramer inspiré d'un des procès de Nuremberg.
Elle assiste aux obsèques d'Édith Piaf le [47].
Lorsque Burt Bacharach la quitte en 1965, elle songe dans un premier temps à abandonner les récitals. Elle continue pourtant et triomphe à Broadway en 1967, obtenant un Special Tony Award pour sa prestation l'année suivante. L'abus d'alcool va cependant assombrir les dernières années de sa carrière[aa] : en 1973, elle tombe dans la fosse d'orchestre lors d'un concert à New York, puis fait une seconde chute juste avant d'entrer en scène à l'opéra de Sydney, le , se fracturant le col du fémur[48],[ab] et mettant ainsi un terme définitif à sa carrière de music-hall.
Après une dernière apparition au cinéma en 1978, après dix-sept ans d'absence, dans C'est mon gigolo de David Hemmings[49], elle se cloître dans son appartement parisien du 12 avenue Montaigne, fréquentant peu de gens en dehors de sa fille et de quelques amis fidèles, car « Marlene n'est pas facile à vivre au quotidien[50]. » Parmi ceux qui la côtoient car ils ont sa confiance totale, outre sa fille, on compte l'animateur de radio Louis Bozon, le comédien Sacha Briquet, et sa secrétaire Norma Bosquet, femme de l'écrivain Alain Bosquet[ac].
À partir de 1980, elle ne quitte plus son appartement et installe le téléphone près de son lit[51] car elle téléphone à peu de gens mais beaucoup et à toute heure. Néanmoins, elle reste présente médiatiquement :
Marlene Dietrich meurt à Paris le [55]. Ses obsèques ont lieu à l'église de la Madeleine. Son cercueil y est recouvert d'un drapeau français, sur lequel est épinglée, notamment, sa croix de la Légion d'honneur. Bien qu'elle ait toujours eu des rapports conflictuels avec son pays d'origine, Dietrich se sentait berlinoise et avait décidé de s'y faire inhumer. Elle est ainsi enterrée non loin de sa mère dans le petit cimetière Friedhof Schöneberg III (de) de Friedenau, dans l'arrondissement de Schöneberg.
En 1993, le sénateur berlinois chargé des affaires culturelles, Ulrich Roloff-Momin (de), parvient à faire racheter, grâce à l'État fédéral et à la loterie nationale, l'ensemble des biens de l'actrice, comptant notamment trois mille vêtements, mille objets de la garde robe, quelque seize mille cinq cents photographies, des documents écrits (correspondance, papiers d'état civil, partitions...), des affiches, des objets de bagagerie et des meubles ayant appartenu à la star. Cette collection, la plus grande au monde pour des archives cinématographiques, fait l'objet d'expositions au Filmmuseum Berlin où elle est entreposée[56], et à travers le monde[57]. En décembre de la même année, la tombe de l'actrice est profanée par des néo-nazis qui n'acceptent pas son départ du pays dans les années 1930, sa naturalisation et son refus de rentrer en Allemagne après la guerre[58],[59].
À l'occasion du centenaire de sa naissance, le à Berlin, le président de la République fédérale d'Allemagne, Johannes Rau, lui rend hommage. Cette cérémonie s'accompagne de révélations sur les causes de sa mort. Selon sa confidente et secrétaire Norma Bosquet, l'actrice se serait vraisemblablement suicidée après lui avoir demandé de lui fournir des somnifères[60].
Commencé au Sahara Hotel de Las Vegas, son tour de chant prend très vite une dimension internationale avec des concerts donnés en Europe, en Australie, au Brésil, au Japon, en Afrique du Sud ou encore au Canada. Le rôle de l'actrice pendant la Seconde Guerre mondiale confère à certaines de ses prestations une dimension politique, comme celles de Berlin et Jérusalem en 1960[61]. Sa prestation à Broadway en 1967 lui vaut un Special Tony Award pour son one-woman-show l'année suivante[62], elle qui ne reçut aucune récompense majeure pour sa carrière d'actrice en apparence plus intéressante.
Aux dires de sa fille Maria Riva, Dietrich était sans cesse à court d'argent et tourne, à partir de l'après-guerre, une bonne partie de films plus par nécessité que par envie. Néanmoins, le tournage de Madame veut un bébé en 1942, de Kismet en 1944, de La Scandaleuse de Berlin en 1948, et de L'Ange des maudits en 1952 vont lui permettre de prendre conscience de certains de ses atouts en dehors de l'écran.
D'une façon sans doute inconsciente, Marlene Dietrich s'inspire des vêtements qu'elle utilisait dans ses films ou les réutilise en les modifiant[ad].
Dès son premier show en 1953, Dietrich divise son spectacle en deux parties, une pour les hommes, d'après ses propres dires, l'autre pour les femmes[ae]. Avec ses robes qui créent à chaque fois la surprise, la première partie du tour de chants est consacrée aux chansons douces et romantiques. Ensuite, après un changement éclair pour une tenue d'homme dans le style de celles qu'elle portait déjà dans Cœurs brûlés ou dans Blonde Vénus, en pantalon ou short, elle continue son concert, mais avec des chansons plus provocantes. Avec le pianiste Burt Bacharach, dont elle suit les conseils avec rigueur et discipline, et qui l'accompagne dans son tour de chant entre 1956 et 1965, le spectacle de Dietrich va se perfectionner et devenir véritable one-woman-show des plus ambitieux.
Le , le critique canadien Dave Billington parle du spectacle de la star qui vient de se produire à Montréal en ces termes :
« (...) Pendant plus d'une heure, sans interruption, sans artifice, sans solliciter un sentimentalisme bon marché, Marlene Dietrich fait son métier, passe tout à tour du message à la chanson d'amour, joue les vamps, fait de l'humour, dans un mélange parfait qui laisse le public avec le sourire d'un chat qui vient de se repaître de crème. (...) Oublions le phénomène et acceptons le fait que nous avons assisté à une prestation menée de main de maître. Le minutage, le mélange de chansons, les gestes de la main, l'éclairage, le maquillage distillaient les éléments pour lesquels les grands de la scène se font aimer du public[63]. »
En août 1953, Marlene Dietrich doit faire un essai de son spectacle à Las Vegas, et la costumière Irene, sa costumière préférée à la MGM, déjà responsable de ses tenues de scène au temps de l'USO, et dans La Scandaleuse de Berlin en 1948, n'est pas disponible. Travis Banton, qui réalise avec Dietrich des toilettes époustouflantes lors de sa période von Sternberg, est retiré des affaires. Elle se retourne alors vers Jean Louis, costumier de la Columbia, d'origine française, ce qui assure confiance à la star, ayant l'habitude de s'habiller à Paris à l'époque. La coopération entre les deux durera jusqu'à la fin de la carrière de la chanteuse, et le couturier l'habille aussi dans les films Une histoire de Monte Carlo en 1956 et Jugement à Nuremberg en 1961. L'entente entre les deux se passa bien et un contrat signé entre eux interdisait seulement à l'actrice de réutiliser les robes de Jean Louis dans les films qu'elle pourrait tourner.
Mais si Jean Louis avait la charge de la création des robes, c'est la couturière Elisabeth Courtney de la maison Western Costume qui les confectionne, du moins jusqu'en 1972, où Ray Aghayan la remplace.
Chacune des robes de la star coûtaient entre 20 000 et 40 000 dollars[64]. Il n'y a pas de nom officiel donné aux robes de Dietrich, mais la presse, les proches ou la chanteuse elle-même en surnommèrent plusieurs en fonction de leurs caractéristiques. D'après Maria Riva, sa mère avait réfléchi avec la costumière Irène sur un fond de robe qui « contribuait à donner à Dietrich le corps sublime dont elle a rêvé toute sa vie », notamment lors des tournages des films Madame veut un bébé et Kismet, entre 1942 et 1944.
En 1944, le tissu est de la soie épaisse, mais à la fin de la décennie 1940, les maisons de textile italiennes, telles Baranccini, perfectionnent leurs tissus, notamment ce que Dietrich appelle le « souffle », une gaze ultra légère, délicate, vaporeuse, mais ferme comme un canevas, utilisée par la chanteuse jusqu'à la fin de sa carrière en 1975. La couleur est chair. C'est un sous-vêtement ultra fragile, qui existe en douzaines d'exemplaires d'après Maria Riva. Environ trois de ces corsets étaient prévus pour une seule robe, et la collection du Filmmuseum de Berlin renferme vingt-et-une robes de scène, donc une soixantaine de fonds de robe, sans compter les fonds de robe inachevés et tout le matériel nécessaire pour les situations d'urgence[65].
La mise en place de ce fond de robe est un travail qui requiert patience et rigueur, comme nous l'explique Maria Riva : « D'abord, elle enfilait le fond de robe par le bas, nous attachions la fine ceinture intérieure autour de sa taille, ensuite, elle plaçait le triangle élastique de l'entrejambe, l'ajustant bien entre les bords de la vulve pour minimiser la douleur causée par la tension inévitable. Elle se penchait en avant, les seins ballants, détachés du corps, glissant un bras dans l'une des emmanchures, puis l'autre. Ensuite, de la main, elle amenait ses seins tombants et les plaçait dans le soutien-gorge incorporé, coupé dans le biais du tissu, prenant soin d'insérer chaque bout de sein exactement au bon endroit. Une fois que les seins étaient positionnés à sa convenance, elle mettait ses mains en coupe pour les soutenir, les maintenait en place ainsi que le fond de robe, se relevait très rapidement et nous remontions la fermeture Eclair du dos. »[63]
Ce fond de robe, quasi invisible, pouvait apparaître en deux endroits :
Ce fond de robe présente néanmoins des limites pour Maria Riva, puisque « une fois qu'elle était à l'intérieur de ce moule, bien en place, fermeture Éclair remontée, ma mère se transformait en statue, respirant à peine, et le moindre mouvement devenait un luxe calculé et restreint. »[63]
Après son premier triomphe au Sahara Hotel de Las Vegas entre le et le , les plus grands hôtels de la ville signèrent avec la star un contrat tous les ans jusqu'en 1962. Chaque nouveau spectacle différait surtout par la tenue que portait la chanteuse, qui cherchait à créer l'événement, bien avant avec les chansons ou le show en lui-même. « Chaque fois que Dietrich passait à Las Vegas, elle essayait d'inventer de nouveaux effets, espérant retrouver ce moment où, apparaissant sur scène pour la première fois, le public muet de stupéfaction retenait son souffle »[63].
L'année 1960 est une année particulière pour la « seule Allemande connue à s'être publiquement opposée au régime nazi dans les années 1930 et 1940 », comme le rappelle sa fille Maria Riva en 2001[66]. En effet, elle se produit pour la première fois en Allemagne depuis la fin du second conflit mondial. Au mois de mai, elle est mal accueillie à Hambourg d'abord, avec des lettres anonymes de menaces et un succès mitigé de son spectacle, puis à Berlin où une partie du public la qualifie de « traîtresse », certains tenant même des panneaux « Marlene go home » devant le théâtre. Néanmoins, le futur chancelier Willy Brandt lui exprime toute sa sympathie, comme le compositeur Friedrich Hollander, le compositeur des chansons de l'Ange bleu, qui n'était d'ailleurs nullement fâché avec elle, ayant écrit pour elle les titres du film la Scandaleuse de Berlin en 1948.
La même année, elle se rend en Israël pour chanter à Tel-Aviv puis à Jérusalem, où elle est notamment reçue par le dirigeant David Ben Gourion. Néanmoins, le producteur israélien lui demande de ne pas chanter en allemand, cette langue ravivant des blessures trop profondes pour nombre de spectateurs, Juifs expatriés d'Allemagne dans les années 1930, voire sauvés des camps d'extermination. Malgré tout, elle le fait et obtient un réel triomphe[67].
Source : Musée de la mode de la Ville de Paris[71] (sauf précisions)
« Vous trouverez le chapeau « Dietrich », le tailleur « Dietrich », les chaussures « Dietrich », le look « Dietrich ». »[74]
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