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militaire français De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Philippe Leclerc de Hauteclocque, plus connu sous le nom de général Leclerc ou maréchal Leclerc, né Philippe de Hauteclocque le à Belloy-Saint-Léonard (Somme) et mort dans un accident d'avion le près de Colomb-Béchar (Algérie française), est un militaire français, l'un des principaux chefs militaires de la France libre durant la Seconde Guerre mondiale. Figure majeure de la Libération, il est notamment connu pour avoir commandé la 2e division blindée.
Philippe Leclerc de Hauteclocque | ||
Nom de naissance | Philippe François Marie de Hauteclocque | |
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Naissance | Belloy-Saint-Léonard, Somme |
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Décès | (à 45 ans) Colomb-Béchar, territoire d'Ain Sefra, Algérie française |
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Origine | Français | |
Allégeance | France | |
Arme | Cavalerie | |
Dignité d'État | Maréchal de France | |
Années de service | 1924 – 1947 | |
Commandement | 2e division blindée | |
Conflits | Guerre du Rif Seconde Guerre mondiale |
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Faits d'armes | Bataille de France Campagne du Gabon Bataille de Koufra Bataille de Normandie Libération de Paris Libération de Strasbourg. |
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Distinctions | Maréchal de France à titre posthume Médaille militaire |
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Compagnons de la Libération | ||
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Officier anticonformiste et brillant, il se révèle un stratège et un organisateur hors pair. Fait prisonnier en 1940 pendant la bataille de France, il s'évade et rejoint l'Angleterre. Il prend alors pour nom de guerre « Leclerc » (il sera autorisé à l'ajouter à son patronyme en 1945)[1]. Il rencontre à Londres le général de Gaulle, qui lui confie pour mission de rallier l'Afrique-Équatoriale française à la France libre.
Après y être parvenu, il remonte vers la Libye, où il prend l'oasis de Koufra malgré l'infériorité numérique de ses troupes. Il prononce alors le serment de Koufra : « Jurez de ne déposer les armes que lorsque nos couleurs, nos belles couleurs, flotteront sur les cathédrales de Metz et de Strasbourg. » Après plusieurs batailles dans le Maghreb, la « colonne Leclerc » stationne au Maroc en 1943, où elle prend le nom de 2e division blindée (ou 2e DB). En août 1944, son unité prend part à la bataille de Normandie, puis est la première unité à entrer dans Paris lors de la libération de la capitale. Le , la 2e DB libère Strasbourg.
Fait compagnon de la Libération, Philippe Leclerc de Hauteclocque meurt en 1947 dans un accident d'avion. Il est élevé à la dignité de maréchal de France à titre posthume.
Philippe François Marie de Hauteclocque naît le au château de Belloy-Saint-Léonard, dans le département de la Somme. Il est issu de la famille de Hauteclocque, originaire de la province d'Artois dont une branche a fait souche en Picardie, de noblesse chevaleresque dont l'existence est prouvée depuis 1340[2].
Il est le petit-fils de Gustave de Hauteclocque (Arras, 1829 – Naples, ), historien et archéologue, maire de Bermicourt et de Marie-Henriette de Morgan-Frondeville (1834-1908). Le couple a trois fils : Henry (1862-1914, mort pour la France), Adrien (1864-1945) et Wallerand (1866-1914, mort pour la France).
Il est le fils d'Adrien de Hauteclocque (1864-1945) et de Marie-Thérèse Van der Cruisse de Waziers (1870-1956), fille elle-même de Louis Van der Cruisse de Waziers (1820-1907) et de Léontine du Passage (1841-1913).
Philippe de Hauteclocque grandit au sein d'une fratrie de six enfants :
Ses parents assurent son éducation jusqu'à l’âge de 13 ans. Il entre en quatrième en 1915 au collège de La Providence d'Amiens, évacué à Poitiers au cours de la Première Guerre mondiale, où il poursuit ses études en lycée[3],[4],[5].
En 1922, après avoir préparé le concours à Sainte-Geneviève de Versailles, il est admis à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr (promotion Metz et Strasbourg-1922-1924), dont il sort cinquième en 1924[6]. Il entre alors à l'École d'application de la cavalerie de Saumur, dont il sort major en 1925.
Pour sa biographe Christine Levisse-Touzé, Philippe de Hauteclocque se dote d'une canne par habitude de la chasse qu'il affectionne. Cette canne lui permet de fouiller les fourrés à la recherche de gibier[7].
Le futur maréchal Leclerc habite une maison, face à la gare de Saint-Cyr-l'École, avec sa famille de 1932 à 1938. Il est alors, en tant que capitaine, instructeur à l’école spéciale militaire. Charles, l’un de ses enfants, y fait ses premiers pas.
Il épouse le , Thérèse de Gargan (1903-1996), fille d'Auguste de Gargan (1861-1902) et d'Henriette d'Irumberry de Salaberry (1866-1944). Ils ont six enfants :
De tradition catholique[14] et fervent pratiquant, il manifeste toute sa vie son attachement à sa foi.
Le lieutenant de Hauteclocque a pour première affectation le 5e régiment de cuirassiers à Trèves en Rhénanie-Palatinat ; après y avoir passé un an, il obtient une affectation au 8e spahis, au Maroc. Il participe à la « pacification » du territoire au cours de la guerre du Rif, durant laquelle il se distingue. En 1929, le commandement du 38e goum lui est confié.
Au cours d'un second séjour au Maroc, il est promu capitaine en 1934 et obtient la Légion d'honneur. En 1938, il réussit le concours d'entrée à l'École de Guerre, dont il sort major en 1939.
Il est « issu d'une famille Action française jusqu'en 1940 »[15],[16]. Il lit l'Action française, sans adhérer à l'ensemble de la doctrine, appréciant surtout l'exaltation des valeurs de la France monarchique contenues dans ce journal et le fait qu'il fonde sa politique sur cette notion : « Le présent vient du passé »[17]. Chevauchant à la tête de son escadron lors de la revue du et passant devant la tribune officielle où se tiennent Léon Blum et Édouard Daladier, il aurait brocardé ce dernier d'un « Pour le fusilleur, tête droite ! »[18],[19].
Il rompt avec l'Action française en 1940, jugeant que le mouvement trahit ses idées et fourvoie les élites qui le suivent. Il se défait également, à cette même époque, des préjugés antisémites des milieux maurrassiens[20]. Toutefois, il maintient sa lecture quotidienne de L'Action française pendant ses conquêtes africaines[21]. Après la guerre, il n'évoque plus Charles Maurras que pour juger sa philosophie critiquable et fera détruire les exemplaires du journal conservés à Tailly[17].
En mai 1940, le capitaine Philippe de Hauteclocque est chef du 3e bureau à l'état-major de la 4e division d'infanterie, qui fait mouvement vers la Belgique du 12 au et dont certains éléments se trouvent encerclés dans la poche de Lille durant les derniers jours du mois de mai.
Le 28 mai, alors que la capitulation du groupement Molinié est proche et qu'il est devenu inutile, le capitaine de Hauteclocque obtient de son chef, le général Musse, l'autorisation de tenter de traverser les lignes allemandes pour échapper à la captivité. Il part vers la porte de Douai et récupère une bicyclette abandonnée. Il va mettre le cap au sud, échapper plusieurs fois à la capture et abandonner casque et ceinturon, guidé par la rage de s'échapper pour reprendre le combat[7].
Le , il est capturé en vêtements pseudo-civils et à bicyclette[22]. Fouillé, il est trahi par un certificat de paiement de l'école militaire[7]. Lors de son interrogatoire à la mairie de Bohain-en-Vermandois par un officier allemand, il affirme être réformé comme père de famille de six enfants, attestant de cela par une prescription de quinine qu'il avait avec lui et qui mentionnait le nombre de ses enfants[7]. Il subit la raillerie de l'officier qui s'étonne qu'à 37 ans il ne soit pas en train de défendre son «Vaterland». Certainement fatigué de ramasser des prisonniers, l'officier l'invite à décamper de façon dédaigneuse, non sans avoir affirmé que :
« Nation en décadence… (Il ajoute, l'air méprisant : ) Jamais le Grand Reich allemand ne permettra à la France de se relever. »
— Dronne 1970, p. 14-16.
Leclerc n'oubliera jamais cette insulte, à laquelle il s'abstient néanmoins de répondre. Il rejoint les lignes françaises en traversant le canal du Nord et réintègre alors une unité combattante.
Le 15 juin, il participe à une contre-offensive dans la plaine de Champagne. Il est blessé à la tête, à Magnant dans l’Aube. Les blindés allemands ont ouvert le feu sur la maison dans laquelle il se trouvait et une partie du plafond s'est effondrée sur lui. La blessure ne semble pas l'affecter, à tel point qu'il continue le combat, jusqu'à ce qu'il soit de nouveau fait prisonnier.
Son cheval, Iris XVI, sera abattu par les troupes allemandes à l'École de Saint-Cyr le , après avoir tué un soldat d'une ruade[23],[24].
Le , il parvient à s'évader de l'hôpital d'Avallon et prend le parti de continuer sa route, désertant[7], pour poursuivre la lutte. Il atteint Paris le 21 juin.
Le , à Grugé-l'Hôpital, il fait faire de faux papiers au nom de Philippe Leclerc, un nom de famille fréquent dans la Somme[7].
À bicyclette, malgré l'occupation allemande, il rejoint sa femme et leurs six enfants sur les routes de l'exode, près de Libourne en Gironde. Après les avoir mis au courant de sa volonté de se battre, il se rend à Bayonne où il obtient le un visa pour le Portugal, mais pas pour l'Espagne.
Repassant la ligne de démarcation le , il est le lendemain[25] à Perpignan où il obtient son visa pour l'Espagne. Arrivé le 12 à Cerbère par le train, il est brièvement arrêté le 13 à Port-Bou par les douaniers espagnols qui le font conduire à Figueras pour interrogatoire et jugement, à cause d'un excédent de devises étrangères[Note 1].
Mais il s'échappe à nouveau, prend le train pour Madrid et de là celui de Lisbonne, où il arrive le . Embarqué le sur le SS Hilary, il arrive à Londres[26] le .
Il se présente au général de Gaulle le . Afin d'éviter que des représailles ne soient dirigées contre sa famille, il a pris le pseudonyme de «François Leclerc», le patronyme étant très fréquent en Picardie et à Belloy même[27],[28],[29],[30].
Cette décision a probablement changé sa vie. Le général de Gaulle, reconnaissant en lui un chef exceptionnel, le promeut de capitaine à chef d'escadron[Note 2] dès leur première rencontre et lui donne pour mission de rallier l'Afrique-Équatoriale française à la France libre.
Le , il quitte l'Angleterre pour le Cameroun avec René Pleven, les capitaines André Parant et Claude Hettier de Boislambert. Le voyage se fait à bord d'un hydravion Sunderland, le Clyde[31]. Il atterrit à Lagos au Nigéria le . Dans la nuit du 26 au 27, avec Boislambert, il débarque de nuit en pirogue à Douala avec 22 hommes. Il fait la connaissance du commandant Louis Dio, qui arrive de Fort-Lamy ( Ndjamena) à la tête d'un détachement du régiment de tirailleurs sénégalais du Tchad. Il parvient à convaincre les autorités fidèles à Vichy de s'effacer et rallie le Cameroun, le Tchad et le Congo à la cause de la France libre, sous l’égide de Félix Éboué et du colonel de Larminat.
Jugeant son grade de commandant insuffisant, face au gouverneur général et au lieutenant-colonel Bureau, commandant les troupes à Douala, il arrache les quatre galons de sa manche gauche pour en recoudre un sur celle de droite : le voici colonel, lui qui n'était qu'un simple capitaine un mois plus tôt.
Le 28, le colonel Edgard de Larminat prend possession des bâtiments de gouvernement général à Brazzaville.
Leclerc est nommé Commissaire général du Cameroun et le , c'est toute l'Afrique-Équatoriale française, à l'exception du Gabon, qui s'est ralliée au général de Gaulle. Celui-ci, au cours d'une visite à Douala le , donne son accord à Leclerc pour qu'il tente de rallier ce dernier pays à sa cause.
Avec l'aide des Forces françaises libres, repliées après l’échec de l’expédition de Dakar (23-25 septembre), Leclerc débarque près de Libreville le 8 et, le , le Gabon se joint à la France libre.
Leclerc est alors officiellement confirmé au grade de colonel par le général de Gaulle, grade qu'il s'était attribué « comme par enchantement », selon l'expression de De Gaulle, en arrivant au Cameroun pour ne pas être en infériorité hiérarchique par rapport au lieutenant-colonel Bureau[32],[33] en poste à Douala, et il est désigné comme commandant militaire du Tchad.
La France libre a pour la première fois une assise territoriale et stratégique significative.
À partir de ces bases, sa colonne, qui compte notamment le capitaine Massu, effectue des raids de plusieurs milliers de kilomètres au milieu du désert, avec un équipement peu adapté aux conditions climatiques et au sol sableux, et se dirige vers des postes italiens.
Ayant pris l'oasis de Koufra () avec un canon et 300 hommes seulement (par surprise, avec des effectifs limités et avec une grande rapidité, ce qui sera plus tard sa tactique dans ses combats sur le sol français en 1944), il fait le serment avec ses soldats de ne pas déposer les armes avant d'avoir vu le drapeau français flotter sur la cathédrale de Strasbourg. Koufra sera honoré par le RMT longtemps stationné au quartier Koufra sur le camp de Linas-Montlhery à côté du 1er RAMa (quartier Champrosay) appartenant à la 2e DB du Maréchal Leclerc dont les troupes étaient entrées dans Arpajon jouxtant le camp le 23 aout 1944.
Le , il est déchu de la nationalité française par un décret du gouvernement de Vichy[34]. Le , la cour martiale de Gannat le condamne à mort par contumace et à la confiscation de ses biens pour « crimes et manœuvres contre l'unité et la sauvegarde de la patrie »[35].
Parallèlement, il est promu général de brigade dès le mois d’août 1941, mais, trouvant cette promotion prématurée, il n’arborera ses étoiles que plus tard, lorsque ses hommes lui offriront un képi étoilé cousu main.
En février-mars 1942, il mène une campagne dans le Fezzan italien. Nommé le commandant supérieur des troupes de l'Afrique française libre, il part pour Brazzaville, laissant le colonel François Ingold à la tête des troupes du Tchad. Le , de Gaulle lui donne l'ordre de conquérir le Fezzan et d'avancer jusqu'à Tripoli, de même qu'il prescrit l'envoi de troupes au Niger, afin de rallier à la France libre l'Afrique-Occidentale française (objectif qu'il abandonne finalement à la mi-novembre).
Le , Leclerc est à Zouar en inspection[36]. Il lance le l'offensive sur le Fezzan et conduit sa colonne, forte de 4 000 Africains et 600 Européens appuyés par le groupe aérien Bretagne, à Sebha le 12 janvier, Mourzouk le 13 et Tripoli le 25. Le , il rencontre à Ghadamès le général Delay, commandant le front Est du Sud algérien.
Puis, rejoint par la colonne volante de Jean Rémy, détachée des Forces françaises libres du Western Desert, il participe avec la 8e armée britannique à la campagne de Tunisie contre l'Afrika Korps. Après la bataille de Ksar Ghilane, où la Force L (L pour Leclerc) résiste victorieusement à une attaque allemande, il s'empare de Gabès, puis entre à Kairouan le 12 avril. Huit jours plus tard, il participe, à Tunis, au défilé de la victoire, à la tête de ses troupes (au sein des troupes anglo-américaines et non avec les Français de l'Armée d'Afrique, que les FFL ont parfois combattus, notamment à Dakar).
« Tirailleurs africains ou coloniaux et soldats de France métropolitaine venus du cœur de l'Afrique à travers le Sahara, fraternellement unis, debout dans leurs étonnantes voitures bardées de filets de camouflage, de tôles de désensablement, de guerbas avaient un halo de légende. Ils furent frénétiquement applaudis. »
— Raymond Dronne (1970) p. 291
Leclerc se consacre dès lors à forger l'outil du renouveau de l'Armée française.
Leclerc est nommé général de division le , la Force L devenant 2e division française libre (2e DFL) le 30 mai, sur le sol africain. Renvoyée par le général Giraud en Libye le 10 juin, sa division reçoit le renfort d'évadés de France par l'Espagne et d'unités issues des troupes vichystes ralliées de l'Armée d'Afrique. Rebaptisée 2e division blindée (2e DB) le , elle est réorganisée sur le modèle américain et rejoint, en septembre 1943, le camp de Temara, au Maroc, où elle demeure jusqu'en avril 1944, pour y parfaire son entraînement et compléter ses effectifs. Il reçoit enfin l'affectation d'un régiment de chasseurs de chars, le RBFM, qui lui avait été promis.
Le , la 2e DB au complet entame son embarquement pour l'Angleterre, où elle est affectée à la 3e armée américaine du général Patton. Une grande unité française, armée, équipée et structurée à l'américaine, va combattre sous commandement américain.
Envoyée en Normandie, la 2e DB débarque le dans la Manche, sur la plage de Saint-Martin-de-Varreville, et va établir son premier camp à Vesly, dans un champ dénommé «champ Robert», où elle séjourne dix jours, le temps de s'organiser, avant de faire route sur Argentan et Alençon, tout en ayant au passage prêté main-forte, lors de la fermeture de la poche de Falaise, à Chambois-Mont-Ormel.
Faisant partie de la 3e armée du général Patton, la division de Leclerc, ou «division Croix de Lorraine», devient parfois même le fer de lance des attaques américaines. Sa division libère, le 12 août, Alençon, s'illustre dans la forêt d'Écouves mais bute, le 13 août, à Argentan, qu'elle ne peut investir, gênant, en fait, les mouvements américains. Leclerc demande alors l'autorisation de quitter le théâtre des opérations en Normandie, pour : « Ne plus perdre un seul homme ici et libérer Paris, la capitale de la France. ».
Il a à sa disposition un char PC de commandement armé d'un simulacre de canon en bois, le Tailly.
Il peut, au passage, le , s'arrêter chez ses cousins à Prétot-Sainte-Suzanne, chez Françoise de Hautecloque. Il en repart accompagné des deux premiers engagés sur le sol de France (un neveu et son ami).
Après les demandes répétées du général de Gaulle aux alliés, le général Marie-Pierre Kœnig porte le une seconde lettre de De Gaulle au général Eisenhower. Celui-ci informe alors le général Marshall, chef d'état-major de Roosevelt, qu'il a donné l'ordre de libérer Paris[37], car l’insurrection ayant démarré le 19 août, la situation était grave dans la capitale. Dans la soirée, le général Omar Bradley autorise le général Leclerc à marcher sur Paris[38].
Au château de Rambouillet, le soir du 23 août le général Leclerc et le général de Gaulle se rencontrent pour mettre la touche finale de l'entrée dans Paris[39]. Ce jour, une colonne de reconnaissance est accueillie par des tirs à Arpajon[40] (alors que d'autres sources[41] mentionnent une entrée de troupes US un jour plus tot).
La 2e DB fonce pour la libération de Paris dans une attaque audacieuse[41] en deux axes sur la N10 et la N20 et, le , le général Leclerc reçoit la reddition du général von Choltitz, gouverneur militaire allemand de Paris, dans les appartements du préfet de police Charles Luizet. Ils se rendent ensuite à la gare de Paris-Montparnasse, où la capitulation des troupes nazies est signée également par le chef communiste Rol Tanguy. La capitale a été libérée en deux jours, en particulier par l'action menée de l'intérieur par ces mêmes forces résistantes sous les ordres de Rol Tanguy, dans un mélange de liesse et de coups de feu. Les blindés de Leclerc ont exercé une pression supplémentaire sur les forces nazies.
Les généraux de Gaulle et Leclerc descendent alors côte à côte l'avenue des Champs-Élysées le 26 août alors qu'éclatent encore des accrochages sporadiques.
Autorisé à prendre une courte permission chez lui à Tailly, où il se rend en avion, il retrouve sa famille qu'il n'avait pas vue depuis quatre années. Il rentre après deux jours de séjour accompagné de ses deux fils aînés, Henri (18 ans) et Hubert (17 ans) qui s'engagent dans les unités de la 2e DB. Le combat reprend, en famille.
Partie de Paris le , la 2e DB se dirige vers l'Est pour des combats contre le général von Manteuffel durant lesquels la 112e Panzer Brigade est écrasée à Dompaire le 13 septembre perdant 59 chars[Note 3]. Après une pause imposée par le commandement américain, l'axe de marche est dirigé sur Strasbourg.
Pendant la pause face à la Vorvogesenstellung (1re ligne de défense), Leclerc a connaissance d'exactions allemandes. Il adresse une lettre de mise en garde au Kampfkommandant de Baccarat :
« L'armée allemande n'obéit plus, vis-à-vis des populations civiles, aux lois de la guerre. Des villages sont systématiquement brûlés, les habitants fusillés ou déportés… L'ordre de déportation de la population de Baccarat et de celle de Raon-l'Étape vient d'être donné… J'avertis officiellement le commandement allemand que je vais faire, au fur et à mesure, des constats et que je relève, chaque fois, les noms des officiers responsables. Quel que soit le nombre de semaines, de mois pendant lesquels l'Allemagne réussira encore à prolonger la guerre, elle devra bientôt s'incliner. J'emploierai tout mon poids à ce que justice soit faite. »
— Général Leclerc au Général Feuchtinger[42]
Le général Feuchtinger n'exécute pas la déportation prévue et part avant l'attaque du 29 octobre.
Avant la fin de l'année 1944, le 23 novembre, ses troupes libèrent Strasbourg à l'issue d'une charge partie de Baccarat, ville libérée le 31 octobre, et traversant des cols des Vosges difficilement praticables et barrés.
C'est l'occasion d'une prise d'armes à Strasbourg pour rappeler que le serment de Koufra a été tenu.
Cependant, Leclerc est cloué en Alsace et doit se battre contre sa hiérarchie. Sa division est bloquée dans la plaine d'Alsace inondée, en position défensive. Il travaille à la réduction de la poche de Colmar puis à celle de Royan. Ses relations sont difficiles avec le général de Monsabert. Leurs conceptions militaires s'affrontent.
Dans les premiers jours de mai, passés en Allemagne, les soldats de la 2e DB découvrent les horreurs des camps de concentration et portent secours à des Français rescapés de Dachau[43].
Ils s'emparent brillamment, dans la nuit du 4 au , du Kehlsteinhaus, le « nid d'aigle » d'Adolf Hitler, à Berchtesgaden, en Bavière, et le tiennent jusqu'au 10 mai, date à laquelle ils sont remplacés par des troupes américaines.
En réalité, plusieurs unités revendiquent le fait que leurs hommes aient atteint les premiers le « Nid d'aigle », notamment :
Le 6 mai au matin, Leclerc prend ses quartiers dans le village de Bad Reichenhall (Haute-Bavière), non loin de Berchtesgaden. Le même jour, douze Waffen-SS français, issus pour la plupart de la division Charlemagne, ont été capturés par les Américains. Ils sont remis à la 2e DB. Quelques clichés photographiques ont été pris lors de cette rencontre entre Français[48]. Leclerc a un bref échange avec les prisonniers, demandant à l'un d'eux : « N'avez-vous pas honte de servir sous cet uniforme ? » Le SS français aurait alors répondu que Leclerc portait lui-même un uniforme américain.
Selon les témoignages existants, Leclerc aurait ensuite quitté les lieux, en déclarant sur le ton de l'agacement : « Débarrassez-moi de ces gens-là ! »[49] Le GPRF, informé de l'existence des prisonniers, ne reçoit plus ensuite aucune nouvelle et s'en inquiète par télégramme le . Les autorités de Paris ignorent alors que les douze SS français ont été fusillés, le 7 ou le 8 mai, dans une clairière, au lieu-dit Kugelbach, par des soldats du régiment de marche du Tchad (des républicains espagnols de la Nueve). Exécutés par groupe de quatre, ils ont été assistés religieusement par le père Maxime Gaume, aumônier de la division. L'exécution des prisonniers ne s'est accompagnée d'aucun jugement, le tribunal militaire de la 2e DB ne s'étant pas réuni pour l'occasion.
Plusieurs décennies après les faits, la responsabilité de cet acte, qui s'inscrit dans le cadre plus large de la répression de la collaboration avec l'Allemagne nazie[50], n'a pas pu être déterminée. Le père Gaume, désigné pour assister les fusillés, aurait déclaré que la décision d'exécuter les prisonniers avait été prise « à l'état-major » de la division[51]. Le , le même père Gaume déclare aux gendarmes du Dahomey que l'ordre de fusiller les prisonniers avait été donné par « le commandant français », sans plus de précisions[52].
Au moment de l'exécution, le lieutenant Morvan, qui commandait l'un des pelotons, aurait évoqué « le haut état-major de la division ». Jean-Christophe Notin, biographe de Leclerc, estime impossible de déterminer ce que recouvre exactement ce terme de « haut état-major » et s'abstient dès lors, de conclure si l'ordre d'exécution a été donné par Leclerc lui-même, « travaillé par les horreurs de Dachau, révolté par l'arrogance des prisonniers », qui aurait alors cédé à un accès de colère, ou par un autre officier supérieur, qui aurait interprété le « Débarrassez-moi de ces gens-là ! » de Leclerc comme un ordre de les fusiller. Jean-Christophe Notin estime que « l'affaire est grave, puisqu'elle mêle l'icône de la Libération à l'exécution de douze prisonniers ». En l'absence de toute conclusion définitive, il replace cependant cet épisode dans le contexte « des horribles visages de la guerre, qui n'en a que très peu de beaux[49] ».
Le [53], Leclerc fait ses adieux avec solennité à sa division. Il la quitte pour rejoindre le Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient, mis sur pied pour intervenir en Indochine française, que l'empire du Japon occupe depuis 1940 et contrôle totalement depuis le coup de force du . Leclerc prend en charge l'entraînement du Corps expéditionnaire, mais le Japon annonce finalement sa capitulation en août. Leclerc arrive le 22 août à la base alliée de Kandy (Ceylan) pour préparer l'entrée de ses troupes en Indochine, où différents groupes indépendantistes prennent le pouvoir et une partie des Français demeurent prisonniers des Japonais.
Leclerc apprend de la bouche du commandant britannique Louis Mountbatten que Britanniques et Chinois, en vertu des accords de Potsdam négociés sans la France, pénétreront les premiers en Indochine française et que les troupes françaises n'ont pas encore l'autorisation d'y débarquer.
Leclerc, bloqué à Ceylan et empêché de secourir les populations françaises, alerte de Gaulle pour qu'il fasse pression sur le président Truman, mais les États-Unis s'abstiennent d'intervenir pour ne pas mécontenter le président chinois Tchang Kaï-chek[54].
Le , Leclerc signe, au nom de la France, les actes de capitulation du Japon à bord du cuirassé USS Missouri, en rade de Tokyo. Le , il est présent à la signature de la reddition japonaise à Singapour [Note 4].
Ce n'est que le 5 octobre que Leclerc, après avoir enfin reçu l'autorisation des Alliés, peut débarquer en Indochine, pour en entamer la reconquête et participer au désarmement des troupes japonaises. La destruction de l'administration coloniale par les Japonais en mars 1945 et la reddition des Japonais en août, ont laissé le territoire indochinois en plein chaos, les indépendantistes vietnamiens, cambodgiens et laotiens ayant les mains libres. Hô Chi Minh, chef du Việt Minh communiste, a notamment proclamé le (jour de la capitulation officielle du Japon) l'indépendance du Viêt Nam.
La reprise en main du Cambodge est aisée : le roi Norodom Sihanouk ayant invité les Français à rétablir leur protectorat, Leclerc peut arrêter facilement le premier ministre indépendantiste Son Ngoc Thanh.
La situation est nettement plus complexe en territoire vietnamien, où les hommes de Leclerc parviennent progressivement, entre octobre 1945 et janvier 1946, à rétablir la souveraineté française dans toute la Cochinchine, puis dans le Sud-Annam, tandis que le nord de l'Annam et tout le Tonkin demeurent sous le contrôle du Việt Minh. Les accords Hô-Sainteny permettent finalement de débloquer la situation, en lançant un processus de négociations avec les indépendantistes communistes vietnamiens.
Le , le Corps expéditionnaire, commandé par Leclerc, peut enfin faire son entrée dans Hanoï. Le 26 mars, Leclerc rencontre Hô Chi Minh, et leur prise de contact se passe bien, Leclerc étant favorable à une résolution par la voie politique de la crise qui secoue la colonie française. En mai 1946, les troupes de Leclerc achèvent de reprendre le contrôle de l'Indochine en s'assurant celui du Laos[55].
Le , Leclerc est nommé inspecteur des forces terrestres en Afrique du Nord. Pour qu'il accepte plus facilement ce poste moins prestigieux, il est promu général d'armée deux jours plus tard[56].
Le , au cours d'une tournée d'inspection en Afrique du Nord, l'avion de Leclerc, un B-25 Mitchell est pris dans une tempête de sable. On suppose que le pilote est descendu à basse altitude pour trouver des repères géographiques, mais l'avion a percuté le remblai de la voie ferrée, à côté du Djebel Aïssa, non loin de Colomb-Béchar[57]. Les douze occupants de l'appareil sont tués sur le coup.
Un treizième cadavre aurait été retrouvé dans la carcasse de l'avion[57]. Selon le général Vézinet, il ne s'agirait que de vertèbres cervicales[58]. Ce treizième corps, jamais identifié[57], a alimenté l'idée d'un complot[59],[60] ; l'enquête de Jean-Christophe Notin révèle qu'il s'agit du corps d'un officier de l'armée de l'air qui aurait bénéficié du vol en « taxi-stop »[60].
Plusieurs rumeurs circulent quant au fait que Leclerc aurait été victime d'un attentat[60]. Conrad Kilian, mort le dans des circonstances controversées, est le premier à lancer l'idée : la Grande-Bretagne aurait fait assassiner Leclerc à cause de la guerre secrète du pétrole dans le Fezzan, dans la partie ouest de la Libye. Cette théorie est reprise par la suite par d'autres sources[61]. Aucune preuve n'a toutefois permis de la confirmer[60].
A contrario, Jean-Christophe Notin apporte des pistes de réflexion montrant que l'avion, modifié pour accueillir des passagers et déséquilibré par l'ajout d'une couchette à l'arrière, aurait simplement décroché alors qu'il volait à basse altitude, ainsi qu'il avait tendance à le faire à la suite de ces modifications[62],[63]. Selon la même source, qui cite plusieurs exemples, Leclerc avait à de nombreuses reprises durant la Seconde Guerre mondiale forcé des équipages à voler dans des conditions plus que défavorables, ce qui provoqua plusieurs accidents. C’est cette dernière version des faits qui tend à être la plus plausible, en effet elle a été confirmée par le célèbre aviateur Marcel Marcel Henriet qui été présent sur l’aérodrome au moment du décollage de l’appareil et qui a été témoin de l’ordre donné par Leclerc de décoller malgré les mauvaises conditions climatiques.
Les légionnaires bâtiront en 1948 le « monument Leclerc » sur le lieu de l'accident[64],[65],[66].
La nouvelle de cette mort est un choc pour une France qui se relève difficilement d'une terrible guerre et voyait en cet homme le libérateur de Paris et de Strasbourg, celui qui avait lavé l'affront de la défaite de 1940.
Le , l'Assemblée nationale vote à l'unanimité les obsèques nationales, sur une résolution déposée par le député René Pleven.
La dépouille mortelle, ainsi que celle de ses onze compagnons, est transférée d'Alger à Toulon à bord du croiseur Émile Bertin entre le 3 et le . Après un hommage national à Notre-Dame, la 2e DB escorte son chef vers l'Arc de Triomphe, où une foule de Français vient s'incliner devant le cercueil du général. Il est inhumé dans la crypte des Invalides, dans le caveau des gouverneurs[67].
Le , pour le cinquantenaire de l'anniversaire de son décès, une homélie ainsi qu'une messe sont célébrées en la cathédrale d'Amiens par Mgr Jacques Noyer, évêque d'Amiens et le père Maurice Cordier, ancien combattant de la 2e DB et aumônier général des anciens de la 2e DB.
(Nota : la médaille militaire se porte avant la LH pour les officiers généraux ayant commandé au front, attention selon La Grande Chancellerie aucun texte officiel n'existe et il s'agit d'une simple habitude)
Il est élevé à la dignité de maréchal de France à titre posthume par décret du [69] (Avant lui, deux autres généraux d'armée s'étant illustrés au cours de la Seconde Guerre mondiale avaient été élevés à la dignité de maréchal de France : Jean de Lattre de Tassigny (1889-1952), à titre posthume, par décret du [70] et Alphonse Juin (1888-1967), de son vivant, par décret du [71]. Après lui, un autre général d'armée est fait maréchal : Pierre Kœnig (1898-1970), à titre posthume, par décret du [72]).
Auxquels s'ajoutent des stèles et plaques commémoratives sur les lieux de son passage au cours de la Libération de la France.
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