Elle est issue de la communauté de Sainte-Barbe, fondée par l'abbé Germain Guillot et dirigée à sa mort par Thomas Durieux, sous la protection de Charles Rollin.
Il a pris successivement les noms de collège Sainte-Barbe (en 1821), collège Rollin (en 1830), lycée Rollin (en 1919) et enfin lycée Jacques-Decour (en 1944). C'est le seul lycée parisien à avoir été rebaptisé à la Libération du nom d'un de ses professeurs résistant[1].
C'est le seul lycée d'Île-de-France à offrir une section internationale en chinois.
Il est connu pour ses classes préparatoires scientifiques et pour avoir accueilli en son sein de nombreux élèves devenus intellectuels, hommes politiques ou encore scientifiques.
Le collège-lycée Jacques-Decour a été construit entre 1867 et 1876 à l'emplacement des abattoirs de Montmartre, démolis en 1867[2].
Avec la séparation du collège Sainte-Barbe en deux établissements après la Révolution, chaque établissement a essayé de garder le nom de «Sainte-Barbe»[3].
L'autre, le collège Sainte-Barbe-Nicolle rue des Postes, l'était par les frères Nicolle, Henri Nicolle (1767-1829)[4] et l'abbé Charles Nicolle (1758-1835)[5] son frère aîné.
Par arrêté du Conseil royal de l'Instruction publique en date du 28 août 1821, l'institution de la rue des Postes, connue sous le nom d'Association des anciens élèves de Sainte-Barbe, fut érigée en collège de plein exercice[6]. Le 2 juillet 1822, le même conseil autorisa le collège de la rue des Postes à porter le nom de collège Sainte-Barbe[3]. Le collège était établi à l'emplacement de l'ancien couvent des Filles de Saint-Michel fermé en 1790. Par arrêté du même Conseil, en date du 6 octobre 1830, le collège Sainte-Barbe de la rue des Postes se vit attribuer le nom de collège Rollin afin de conserver l'appellation d'Institution Sainte-Barbe à la maison d'éducation dirigée par Victor de Lanneau[6], il resta rue des Postes à Paris, actuelle rue Lhomond, jusqu'en 1876.
«Quant au collège de la rue des Postes, il fut appelé le Collège Rollin par un acte de justice qu'on peut regarder comme le digne pendant de l'autre, car ce fut consacrer la mémoire du saint de l'Université, que de l'associer à l'existence d'un de nos meilleurs établissements d'instruction. Sainte Barbe se félicite d'avoir fourni pour des rivaux qu'elle estime la pensée d'un si respectable patronage[7].»
Le bâtiment actuel, qui comporte quatre cours, une chapelle, un théâtre et un musée, occupe 3 hectares et demi. Il fut construit entre 1867 et 1876 par l'architecte Napoléon Alexandre Roger (1806-1883)[11] sur l'emplacement de l'ancien abattoir de Montmartre.
Après avoir porté le nom de Charles Rollin (1661-1741), historien, professeur et chancelier des universités, il prit en 1944 celui de Jacques Decour, nom de résistance de Daniel Decourdemanche (1910-1942), professeur d'allemand, écrivain et résistant fusillé en 1942 au Mont-Valérien. On lit chaque année depuis la Libération sa lettre d'adieu à ses parents avant d'être fusillé par les Allemands.
«Je me considère un peu comme une feuille qui tombe de l'arbre pour faire du terreau. La qualité du terreau dépendra de celle des feuilles. Je veux parler de la jeunesse française»
—Daniel Decourdemanche,(Lettre, extrait)
Dans la cour d'honneur plusieurs plaques rendent hommage aux anciens élèves, professeurs et fonctionnaires morts durant les différents conflits (1914-1918, 1939-1945, Maroc), 245 noms y ont été relevés[12].
L'orgue de la chapelle du lycée construit en 1893 subit des dégâts considérables et resta muet pendant trente ans. De 1974 à 1982, Bernard Manguin, professeur de musique, mena une équipe d'élèves passionnés pour reconstruire un «grand orgue» dans la chapelle de l'établissement. Le facteur d’orgueSwiderskiharmonisa l’instrument. Inauguré en 1982, l’orgue comprend 20 jeux répartis sur deux claviers manuels et pédalier. L’organiste titulaire du lycée est Boris Lefeivre, président de l’«Association des Amis de l’Orgue»[13], qui organise des récitals d’orgue et des concerts dans la chapelle. Dans le cadre du 250eanniversaire de la mort de Jean-Sébastien Bach, l'intégrale de son œuvre pour orgue y fut interprétée[14].
Les «années soixante-huit» au lycée Jacques-Decour se caractérisèrent surtout par une tendance dadaïste-libertaire fortement inspirée par les situationnistes, sensible dès 1967 et qui se poursuivit dans les années soixante-dix. En Mai 68, le lycée fut occupé jour et nuit. Des salles de cours furent baptisées Antonin Artaud, André Breton et Tristan Tzara. Au cours des années qui suivirent, une communauté de lycéens occupants s'installa secrètement dans les caves de l'établissement, renommées «Ravachol-City» en l'honneur du célèbre anarchiste[16]. En 2017, deux étudiants, Ricardo Monteiro et François Wu, remirent à jour l'existence de la cité perdue «Ravachol-City».
En 1974, par une initiative ministérielle novatrice d'initiation à l'informatique pour élèves et enseignants intéressés, le lycée Jacques-Decour fut éligible à l'opération dite «Expérience des 58 lycées»[17]: utilisation de logiciels[18] et enseignement du langage de programmation LSE[19], en club informatique de lycée[20],[21], pour 58 établissements de l’enseignement secondaire[22]. Quelques enseignants de diverses disciplines furent formés à la programmation informatique. L'établissement fut doté d'un matériel informatique ultra-moderne pour l'époque[23] (mini-ordinateur CII Mitra 15[24] avec disque dur, lecteur de disquettes 8 pouces, plusieurs terminaux écrans claviers Sintra TTE[25], téléimprimeur Teletype ASR-33(en)) pour mettre en œuvre une démarche pédagogique expérimentale.
En mai 2009 fut apposée, dans la cour du lycée, en présence de Simone Veil dont le père, André Jacob (1890-1944), avait été scolarisé à Jacques-Decour, une plaque portant les noms des 27 lycéens juifs, dont 26 sont morts en déportation et un fusillé pour faits de résistance, Julien Selonczyk[26].
Jules Michelet (1798-1874) y a enseigné l'histoire à partir de 1821[32].
Émile Lefranc (1798-1854), homme de lettres, professeur d'histoire avant 1847[33].
Charles Sturm (1803-1855) y a enseigné les mathématiques (en classe de math spé) entre 1830 et 1840.
Henri Wallon (1812-1904), historien et homme politique, auteur de l'amendement Wallon de 1875, y exerça au début de sa carrière en qualité de professeur d'histoire.
Félix Ravaisson (1813-1900), professeur de philosophie, il fut le maître de Bergson[32].
Jules Romains (1885-1972), professeur de philosophie en 1916-1917.
Jean Bouzet (1892-1954), hispaniste, félibre, linguiste et poète.
Fernand Cohen, professeur agrégé de physique, médaillé de 1914-1918, touché par les lois antisémites de Vichy en 1940, arrêté et interné au camp de Drancy, il dirigea l'orphelinat Rothschild pendant la Seconde Guerre mondiale.
Louis Francis (1900-1959), professeur agrégé de lettres
Irénée Barbance (1901-1980), syndicaliste et enseignant, professeur de mathématiques de 1948 à 1966.
Francisque Poulbot[32] (1879-1946), affichiste, dessinateur et illustrateur, élève de 1890 à 1896.
Don Sauveur Paganelli (1888-1979), professeur agrégé de lettres classiques, puis inspecteur général de l'Enseignement secondaire, résistant, préfet du Gard à la Libération.
Alain Chastagnol (1945-2010), professeur agrégé, responsable de médias, député du Lot.
Marc Delouze (né en 1945), poète, son premier recueil Souvenirs de la Maison des Mots (1971) est préfacé par Louis Aragon. Il crée Les Parvis Poétiques.
Jean Morange (né en 1946), professeur de droit, études secondaires au lycée Jacques Decour[43].
Bertrand Meyer (né en 1950), informaticien, chercheur et chef d'entreprise, pionnier de la programmation par objets, études secondaires au lycée de 1959 à 1967.
Pierre Ratinaud, Historique des technologies de l'information et de la communication dans l'Éducation nationale: Expérience des 58 lycées - Matériels (Diaporama de présentation - Extrait), Toulouse, 14p. (lire en ligne), p.5
Émile Lefranc, Polyeucte, tragédie, par Corneille: Édition classique accompagnée de remarques littéraires, grammaticales et historiques par E. Lefranc, ancien professeur au Collège Rollin, Paris, Imprimerie et librairie classiques de Jules Delalain, , 72p. (lire en ligne).