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courant de pensée politique réunissant le communisme et l'anarchisme De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le communisme libertaire ou anarcho-communisme est une doctrine politique au croisement de deux autres :
Le communisme libertaire est proche du socialisme libertaire et de l'anarcho-syndicalisme.
L'association des termes « communisme libertaire » est revendiqué, dès 1876, par la Fédération italienne de l’Association internationale des travailleurs. Errico Malatesta et Carlo Cafiero en sont les figures les plus notoires. Pour ce dernier, « on ne peut pas être anarchiste sans être communiste. […] L’anarchie et le communisme sont les deux termes nécessaires de la révolution ». Et de conclure, « Nous voulons la liberté, c’est-à-dire l’anarchie, et l’égalité, c’est-à-dire le communisme »[1],[2].
Le projet des communistes libertaires est l'établissement d'un nouvel ordre social juste et émancipateur (et non pas le « désordre » social), grâce à l'abolition conjointe du capitalisme et de l’État. Les communistes libertaires proposent de substituer à la propriété privée la « possession individuelle », ne garantissant aucun droit concernant l'accumulation des biens « non utilisés »[3].
Le mouvement anarchiste est depuis ses origines associé au mouvement socialiste : les anarchistes socialistes comptent au XIXe siècle des personnalités comme Déjacque[4], Bakounine ou Cœurderoy.
Le est fondée l'Association internationale des travailleurs (AIT), également connue sous le nom de Première Internationale, qui tente de définir les principes de base : les principes de l'administration des choses. Cependant, de nombreuses divergences existent en son sein. Les « mutuellistes » s'inspirent de Proudhon, les collectivistes s'inspirent de Michel Bakounine et les communistes s'inspirent notamment de Karl Marx. Par la suite, deux moyens différents pour arriver à l'application de ces principes sont discutés au sein de l'AIT. L'un envisage de mener une lutte sur le terrain politique (y compris avec participation aux élections) au service de la classe ouvrière, comme moyen transitoire, l'autre passe outre et ne prône que l'autonomie ouvrière comme seul moyen d'émancipation. Au congrès de La Haye de 1872, trois anarchistes sont exclus de la première Internationale par vote du congrès, ce qui est malgré elle un suicide de l'AIT, déjà affaiblie : la scission qui suivit est très importante.
Les libertaires tels que Bakounine et Proudhon, bien qu'en désaccord sur de nombreux points, souhaitent l'abolition stricte de l'hégémonie étatique. Ils considèrent en outre que toute domination, qu'elle soit au niveau parlementaire, ou bien même industrielle (patrons, chefs, etc.) ne peut pas participer au bonheur des hommes. La base de la décision doit se faire à l'échelle du peuple, seule entité décisive possible. Les libertaires exècrent la représentativité parlementaire, comptée comme élite profiteuse et avare.
À partir de ce moment-là, le mouvement anarchiste se transforme et différentes tendances continuent à se développer en son sein, les unes étant plus ou moins complémentaires avec les autres. Il y a notamment les collectivistes (bakouninistes), les individualistes (stirneriens…), les syndicalistes (Pouget…) et les communistes (Carlo Cafiero, Errico Malatesta, Pierre Kropotkine…).
Le « communisme libertaire » est proclamé pour la première fois à la Fédération italienne de l'AIT (anti-autoritaire de St-Imier créée en 1872) au congrès de Florence de 1876 par Costa, Errico Malatesta, Carlo Cafiero et Covelli[5]. Ce positionnement est pris en opposition au collectivisme qui est la position officielle de l'AIT anti-autoritaire (avec l'influence de Bakounine) de cette époque.
Le choix du communisme plutôt que du collectivisme apparaît vite dans le mouvement anarchiste à cause de la crainte qu'un centralisme économique puisse être amené par la théorie collectiviste (dont le défenseur est alors Michel Bakounine)… En effet, cette théorie propose de quantifier la valeur du travail, et ceci selon le temps ou la tâche effectuée. Cela implique qu'il y ait un centralisme économique qui définisse cette valeur (en monnaie ou en bons de consommation), et donc des personnes spécialisées dans l'estimation de la valeur du travail ; théoriquement et pratiquement, cela est évidemment inacceptable pour les anarchistes, car il n'est pas possible ni souhaitable de définir une valeur à l'activité humaine. La théorie communiste libertaire balaie toutes ces contraintes ou manquements associés au collectivisme libertaire, et le communisme devient pour une bonne part des anarchistes le successeur du collectivisme dans de nombreuses contrées. Les Espagnols garderont longtemps le collectivisme comme base économique envisagée, et ceci jusqu'au début des années trente, où ils considéreront alors le communisme libertaire comme but.
Des réflexions et des questions autour des modes d'organisations, tel le syndicalisme révolutionnaire au début du XXe siècle, et aussi dans les années 1920 à la suite de la révolution russe, tels le plateformisme, apparaissent au sein de l'immigration anarcho-communiste russe, le spécifisme développé par le mouvement communiste libertaire sud américain. Beaucoup d'anarchistes communistes (dont Malatesta, Cafiero, Faure, Berneri...) répondent négativement au plateformisme (pour ses insuffisances théoriques pouvant permettre à un autoritarisme de s'installer au sein de son organisation) ou au syndicalisme révolutionnaire (qui peut mener autre part qu'à l'anarchie).
Depuis la révolution russe, où les bolcheviques se sont approprié le mot « communisme », bien qu'ils ne pratiquent en fait que le collectivisme d'État (voire du capitalisme d'État), le mot « communisme » est associé à ces groupements d'État (ce qui est pourtant un non-sens, puisque le communisme est un mode d'organisation sans État). Pourtant l'histoire du mouvement communiste est beaucoup plus ancienne et plus riche que le collectivisme d'État, et a existé bien avant Marx et les marxistes.[réf. souhaitée]
Communisme libertaire et communisme marxiste ont cohabité au sein de la Première Internationale.
Le communisme libertaire a en commun avec le communisme marxiste la critique du mode de production capitaliste qu'ils considèrent tous deux devoir être aboli par la révolution prolétarienne pour aboutir à une société communiste, c'est-à-dire une société sans classe sociale et sans État. Le communisme libertaire se distingue du communisme marxiste dans la méthode à suivre pour parvenir à cette fin. Le communisme libertaire refuse la centralisation économique et politique et prône l'abolition immédiate de l’État pour son remplacement par une organisation sociale fédérale reposant sur la libre association et limitant fortement le pouvoir des représentants politiques par le mandat impératif. Pour Marx, la société communiste se devait d'être le point d'aboutissement du processus révolutionnaire, mais contrairement aux anarchistes, il considérait qu'elle ne pouvait être atteinte directement. D'après lui, il faut en passer par la médiation d'une dictature du prolétariat suivie d'une extinction progressive du pouvoir étatique.
L'héritage de Marx est contrasté en la matière. À la suite de la révolution d'Octobre, la prise de pouvoirs des bolcheviks en Russie et la création de l'Internationale communiste, la version dominante du marxisme fut le léninisme, une doctrine qui renforça le pouvoir d'État en Russie. Mais différentes tentatives de synthèse entre anarchisme et marxisme ont été élaborées par la suite.
Dans les années 1960-70, Daniel Guérin tente l'élaboration d'un courant qualifié de « marxiste libertaire », cherchant à faire la synthèse entre anarchisme et marxisme. Il s'agit pour l'anarchisme de se réapproprier la conception matérialiste de l'histoire, et pour le marxisme majoritaire de se débarrasser de visées étatistes et autoritaires[6]. Ce concept a remis en lumière les points de convergence du « marxisme » et de l'« anarchisme », notamment sur la question de l'analyse économique et sociale.
Plutôt qu'une synthèse entre anarchisme et marxisme, de nombreuses organisations communistes libertaires préféreront un prélèvement de concepts marxistes : la méthode dialectique en premier lieu. C'est ce qu'on retrouve dans le Projet communiste libertaire de l'Union des travailleurs communistes libertaires, puis chez Alternative libertaire et l'Union communiste libertaire. Ce courant mène à une forme de rupture avec certains dogmes anarchistes, comme l'« absence de pouvoir », alors perçu comme une « pure vue de l'esprit », y préfèrent la construction d'un pouvoir populaire fonctionnant de bas en haut[7].
« Le Communisme - qu'il faut se garder de confondre avec le Parti Communiste - est une doctrine sociale qui, basée sur l'abolition de la propriété individuelle et sur la mise en commun de tous les moyens de production et de tous les produits, tend à substituer au régime capitaliste actuel une forme de société égalitaire et fraternelle. Il y a deux sortes de communisme : le communisme autoritaire qui nécessite le maintien de l'État et des Institutions qui en procèdent et le communisme libertaire qui en implique la disparition »
— Sébastien Faure, art. « Communisme », Encyclopédie anarchiste, vol. 1.
Il y a des expériences de communisme libertaire en Ukraine dans divers cantons ou villages qui sont cependant trop courtes pour que l'on puisse en retirer un enseignement, cependant il reste des écrits de Makhno au sujet de Goulai Polié et de ses environs.
L'expérience la plus importante qui ait existé de mise en pratique du communisme libertaire a eu lieu en Espagne durant la période révolutionnaire allant de 1936 à 1938.
Dès le 18 juillet, jour de l'insurrection, une collectivisation des terres et des usines se fait dans quasiment toute l'Espagne « républicaine » avec plus ou moins d'intensité selon les régions et selon la force ouvrière et paysanne présente et influencée par les anarchistes. Dans certaines parties les communes ou collectivités vivent selon le communisme libertaire, dans d'autres parties le collectivisme libertaire. L'expérience espagnole est controversée dans la mesure où certains mettent en avant le vécu démocratique et populaire, tandis que d'autres soulignent que les idées anarchistes n'ont pas permis d'organiser la victoire contre le soulèvement fasciste.
L'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN) dans la province mexicaine du Chiapas organise les zones qu'elle contrôle sur un modèle proche du communisme libertaire : les paysans mettent en commun les terres et s'associent au sein de communautés pour traiter librement de l'organisation de leur société. Ces structures constituent une véritable administration qui remplace l'État dans certaines parties de cette région, où son autorité est presque absente depuis 1994[8].
Il y a eu d'autres exemples de mise en pratique de communisme libertaire : collectivités libertaires à l'époque des Soviets en URSS, initiatives autogestionnaires en Argentine, en France, etc.
Certains comme Pierre Clastres considèrent que le mode d'organisation de certaines sociétés traditionnelles extra-occidentales (à l'instar des Guayaki[9]) situées dans différentes parties du monde (Amériques, Afrique, Asie, Polynésie), et qui ont perduré durant des millénaires, sont assez similaire au moins en partie à l'anarcho-communisme[10]. Ces systèmes d'organisation mettent en valeur la satisfaction du besoin de chacun, et non le surplus et le bénéfice de quelques-uns au détriment de tous.
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