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actrice et chanteuse française De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Catherine Ribeiro, née le à Lyon et morte le à Martigues, est une actrice et chanteuse libertaire[1] française d'origine portugaise. Elle commence à chanter dans les années 1960.
Naissance | |
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Martigues (depuis le ) |
Nom de naissance |
Christiane Marie Marguerite Ribeiro |
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Activités | |
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- |
Idéologie | |
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Membre de |
Catherine Ribeiro + Alpes (en) |
Label | |
Genres artistiques |
En 1970, elle crée le groupe Alpes avec Patrice Moullet. Catherine Ribeiro + Alpes figure sur la Nurse with Wound list et les albums réalisés avec ce groupe sont considérés ultérieurement comme ce qui se faisait de plus libre et de plus intense en France, avec Magma, dans la musique rock du début des années 1970[2]. Humaniste, militante, ses engagements multiples, pour la Palestine, pour les réfugiés chiliens fuyant le coup d'État de Pinochet, pour les réfugiés du franquisme, pour les anarchistes, etc., en font dans les années 1970 une « pasionaria rouge »[3]. Elle est qualifiée également de « grande prêtresse de la chanson française »[4]. Son refus des projecteurs et ses choix artistiques radicaux la poussèrent peu à peu en marge de l'industrie musicale[5].
Catherine Ribeiro naît le à Lyon, alors située dans la zone non occupée[6] par l'armée allemande, de parents portugais[7].
Elle est issue d'une famille modeste installée à Saint-Fons, dans la banlieue lyonnaise. Son père, ouvrier chez Rhône-Poulenc, est proche des communistes. Sa mère, illettrée, la frappe et ne la comprend pas, mais lui transmet sa voix de chanteuse de fado[8].
En 1963, elle obtient un rôle dans le film de Jean-Luc Godard Les Carabiniers[9], sur le tournage duquel elle rencontre son futur compagnon, Patrice Moullet[10], qui tient le rôle principal[11].
Jean Van Parys, le fils du compositeur Georges Van Parys, qui est tombé amoureux de sa voix, l'incite à chanter[12]. Entre 1964 et 1966, elle enregistre une quinzaine de titres édités par le label portugais Estudio puis chez Barclay. Ce sont des créations originales d'auteurs-compositeurs français ou des reprises du folk américain ; on y remarque plusieurs titres de Bob Dylan, dans leur adaptation française, comme il est courant à l'époque. C'est ainsi que Catherine Ribeiro figure, le , sur la « photo du siècle »[13] réalisée par Jean-Marie Périer pour le magazine Salut les copains. Ces premiers disques se vendent bien (les arrangements délicats sont à la mode des sixties et la voix jeune de Catherine Ribeiro particulièrement sensuelle), mais le monde du show-biz la fait fuir :
« Je ne veux pas me transformer en cover-girl […] la chansonnette de tous les jours ne m'intéresse plus. J'ai gâché beaucoup trop de temps. »
— Catherine Ribeiro[14]
Elle s'engage par ailleurs avec l'Organisation communiste internationaliste [15].
Patrice Moullet lit certains de ses poèmes, l'encourage à poursuivre l'écriture et lui propose de les mettre en musique. Après une tentative de suicide qui la voit passer le printemps 1968 à l'hôpital[2],[16], Catherine Ribeiro participe, l'été suivant, à la réalisation d'une maquette avec le groupe 2 bis (qui se restructure plus tard en « Alpes »). Cette maquette permet la signature d'un contrat avec la maison de disques Festival qui édite les deux premiers albums[17].
D'emblée, le travail, très original, choque à peine à une époque où tout est possible : « Les paroles ne sont qu'un accessoire, je préférerais qu'on en arrive presque à des onomatopées pour remplacer les paroles. On le fera peut-être ; il faudrait que la voix serve d'instrument… Ce que je cherche à faire, c'est détruire complètement la chanson classique, avec refrain et couplets réguliers[18]. »
La notoriété du groupe Alpes, jusque-là plutôt confidentielle, augmente d'un coup, en 1970, après sa participation impromptue au festival d'Aix-en-Provence[19].
« Sa carrière étonnante, […] c'est d'abord celle d'une voix énorme : voix d'espoir et de désespoir, voix de naissance et d'agonie, voix de haine et d'amour, voix du cœur et du sexe, voix du râle et du cri, voix magique par delà les mots qu'elle profère, voix des entrailles qui va droit aux entrailles de ceux qui l'écoutent… »
— Etienne Blondet[20].
En 1971, elle met au monde une fille, Ioana (décédée en 2013), souvent citée ensuite dans les chansons et à laquelle est dédié l'album Le Temps de l'autre[21].
Elle lutte contre la guerre du Vietnam, milite pour les réfugiés espagnols du franquisme, dénonce la dictature d'Augusto Pinochet au Chili, soutient les grèves ouvrières, prend position pour l’écologie, comme en 1974 avec Le Rat débile et l'Homme des champs[22], s'attaque à la politique de Valéry Giscard d'Estaing, le président de la République d'alors, avec Libertés ? un an plus tard[23],[24].
Relativement ignoré par les médias dès 1972[4],[25], Catherine Ribeiro + Alpes réalise au total neuf albums[26], se produit dans plus de 500 concerts dans des grandes salles (Pavillon de Paris, Olympia, Bobino, salle Wagram, Théâtre de la Ville, salle de la Maison de la Mutualité) ou petites, devant de grands rassemblements (Fête de l'Humanité), drainant des centaines de milliers de spectateurs, en France et à travers le monde (Zagreb, Cuba, Alger, Barcelone, etc.)[27]. Le concert païen donné le , à la cathédrale Sainte-Gudule de Bruxelles devant 4 000 personnes, est représentatif de cette période (le groupe se produira assez souvent dans des églises en absence d'autres salles disponibles, profitant de la maîtrise de la sonorisation de ces espaces par l'organiste Patrice Lemoine)[28]. Autre temps fort de la carrière de Catherine Ribeiro + Alpes : le , le groupe est à l'affiche de la première édition du Printemps de Bourges et se produit en co-plateau avec Jacques Higelin devant 3000 spectateurs[29],[30].
La rupture sentimentale survenue entre Catherine Ribeiro et Patrice Moullet ne met pas fin à leur collaboration artistique ; ils se retrouvent pour produire encore plusieurs albums avec Alpes et même bien après la dissolution du groupe en 1982, lorsque Patrice Moullet décide d'abandonner la scène pour se consacrer à la recherche musicale :
« Patrice est jusqu'à présent le seul à composer des musiques permettant à chacun de mes mots, chacune de mes intonations de s'exprimer pleinement, exactement, de même que mes mots et intentions vocales expriment pleinement les intentions de ses notes »
— Catherine Ribeiro[31].
En 1975, elle joue avec Michael Lonsdale et Fabrice Luchini dans le film de Jacques Richard Le Vivarium (Né)[32]. Cette même année, elle propose à sa maison de disques d'enregistrer un album autour du répertoire d'Édith Piaf, qu'elle chante depuis son enfance ; le projet attend deux ans avant de se réaliser[31]. Récompensé d'un grand prix de l'académie Charles-Cros[33], Le Blues de Piaf[34] est suivi en 1979 de Jacqueries[35], un album de chansons inédites sur des textes de Jacques Prévert. La veuve du poète n'appréciant guère ce titre, la société éditrice Phonogram décide de modifier la pochette du disque en cas de prochains tirages. Pour défendre le droit des artistes-interprètes, la chanteuse entame alors une grève de la faim qui suscite de multiples réactions et soutiens[36],[37],[38].
Cet éclectisme, caractéristique de la personnalité de l'artiste, peut troubler le public du groupe Alpes[39]. Le choix d'aborder le répertoire de la chanson française se confirmera cependant les années suivantes.
Elle obtient une certaine visibilité médiatique en mai 1982 lors de son passage à Bobino pour deux semaines de concert[40]. Elle y interprète des titres de Catherine Ribeiro + Alpes : Ame debout, Diborowska, Un regard clair obscur, Tous les droits sont dans la nature, La Vie en bref, La Nuit des errants, des textes personnels plus récents tirés de son album solo Soleil dans l'ombre[41] : Juste de quoi dormir, Sans amarres, Insoumission mondiale, Dans le creux de ta nuit, Guet-apens, Folle Amérique, et de rares reprises de Jacques Brel (Ne me quitte pas) ou d'Édith Piaf (Les Amants d'un jour)[42]. Lors d'une des représentations, François Mitterrand, alors président de la République se glisse dans la salle[43], non sans avoir attendu la fin de la chanson Folle Amérique afin d'éviter un incident diplomatique (ce titre étant un brûlot contre la politique reaganienne).
Déclarant avoir du mal face au regard des autres depuis ses débuts, elle s'installe dans les Ardennes.
En 1984, elle est invitée au Printemps de Bourges pour un corécital avec Michel Hermon autour d'Edith Piaf[30],[44], mais son activité artistique connait ensuite un net ralentissement. Elle épouse Claude Démoulin (1939-2009), maire socialiste de Sedan[8] de 1983 à 1989, dont elle a un fils, Jonathan, en 1985.
En mars 1985, son contrat avec Philips arrive à son terme[45] et n'est pas renouvelé. La même année, elle est faite chevalier de l'ordre des Arts et des Lettres.
En 1986, elle produit elle-même Percuphonante[46], album réalisé avec Patrice Moullet.
En 1987, l'album de compilation Tapages nocturnes incluant deux inédits[47] ne se vend qu'à quelques milliers d'exemplaires[45]. Malgré quelques concerts à l'étranger et une apparition aux Francofolies de La Rochelle pour un hommage à Léo Ferré[48], Catherine Ribeiro traverse une période difficile, compliquée par les problèmes de sa fille Ioana, devenue toxicomane[45].
En 1989, à l'occasion du bicentenaire de la Révolution, elle enregistre l'album 1989... Déjà ! pour lequel elle obtient une nouvelle fois le Grand Prix de l'Académie Charles-Cros[49],[50].
En 1992, Catherine Ribeiro présente à l'auditorium du Châtelet un répertoire de chanson française (quelques titres personnels, mais surtout des reprises de Brel, Ferré, Piaf, Manset, etc.). De ce spectacle est tiré un album en public, L'Amour aux nus[51].
Le , elle effectue un retour remarqué aux Francofolies, accompagnée au piano par Michel Precastelli [52]. La même année, elle enregistre un album studio qui marque un retour aux sources (du groupe Alpes), Fenêtre ardente[53],[54].
En 1994, elle évoque l'idée de remonter un groupe[45], mais de 1995 au seuil des années 2000, c’est pourtant au travers des grandes œuvres du patrimoine de la chanson qu’elle fait entendre sa voix. Deux spectacles sont successivement créés au théâtre des Bouffes du Nord et présentés en tournée dans de nombreuses salles de France, souvent à guichets fermés : Vivre Libre en 1995[55],[56] (prolongé l’année suivante au théâtre national de Chaillot) et Chansons de Légende en 1997[57]. Entre les œuvres de Piaf, Brel, Ferrat, Barbara, Llach, Leclerc, Magny ou Messia, on retrouve quelques-uns des titres les plus récents de l’interprète elle-même, Stress et Strass, Racines et Héro Zéro notamment.
En 2002, elle décide de reformer le groupe Alpes et, avec Patrice Moullet, projette de sortir un nouvel album intitulé La Pierre et le Vent, projet non abouti[58].
En 2005, à Valenciennes, après trois ans de préparation, elle donne avec Francis Campello, musicien d'Alpes et son nouveau groupe, un concert intitulé Catherine Ribeiro chante Ribeiro/Alpes. Le répertoire comprend plusieurs grands titres des années 1970 et de nouvelles pièces composées entre 2002 et 2004 par Patrice Moullet sur ses derniers textes [59]. Une captation de ce programme réalisée à Palaiseau le , paraît en disque sous le titre Live intégral[60].
Le , accompagnée de ses cinq musiciens, elle revient sur une grande scène parisienne, le Bataclan, pour présenter ce même spectacle[61],[62]. Ce sera son dernier concert.
En , l'album Fenêtre ardente est disponible sur l'ensemble des plates-formes de streaming[63].
Après les décès de son époux en 2009 et de sa fille Ioana en 2013, elle part s'installer dans une maison dans les bois à la frontière franco-allemande en 2016, où elle vit de sa retraite d'intermittente du spectacle[64] et prépare une autobiographie[2],[65], jamais publiée. Cette période de retrait lui vaut dans la presse le surnom d'« ermite de Sedan »[66],[67],[68].
En , à 76 ans, dans le sillage du mouvement MeToo, elle révèle sur Facebook avoir été violée en 1962 par un journaliste du quotidien Paris Jour, devenu par la suite une vedette d'émissions culturelles à la télévision et sur France Inter. Au cours de cette déclaration, elle donne également le nom du journaliste, décédé depuis plusieurs années[69].
Elle est victime d'un AVC en [70]. À son retour en France, le , elle intègre un EHPAD, où elle meurt dans la nuit du au à Martigues (Bouches-du-Rhône), à l'âge de 82 ans[8]. Ses obsèques se déroulent dans la matinée du dans la même ville[71], où elle est incinérée[72].
Une nouvelle génération lui rend hommage : Sofia Portanet reprend Racines sur l'album Freier Geist en 2020[73] ; Jann Halexander lui consacre un spectacle entier[74], Vincent Dupas[75] ; Julie Constantine[76] et Hero Fisher[77] reprennent Jusqu'à ce que la force de t'aimer me manque ; la chanteuse américaine Circuit des yeux adapte et enregistre Soeur de race[78],[79]. Le chanteur Dominique A évoque l'influence de Catherine Ribeiro dans un entretien avec la plate-forme Qobuz le [80], puis sur l'antenne de France Inter le [81]. Le mathématicien Cédric Villani exprime régulièrement sa passion pour la chanteuse, aussi bien en interview que dans ses propres écrits[82],[83].
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