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chevalier, connétable de France et de Castille De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Bertrand du Guesclin, né vers 1320[alpha 1] au château de la Motte-Broons, à Broons près de Dinan, et mort le devant Châteauneuf-de-Randon (actuel département de la Lozère), est un noble breton, connétable de France et de Castille, personnage majeur de la première partie de la guerre de Cent Ans.
Bertrand du Guesclin Bertran du Guesclin | ||
Gisant de Bertrand du Guesclin à la basilique Saint-Denis. | ||
Naissance | vers 1320 Broons |
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Décès | (à ~ 60 ans) Châteauneuf-de-Randon |
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Origine | Breton | |
Allégeance | Duché de Bretagne (maison de Blois) Royaume de France |
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Arme | Chevalerie | |
Grade | Connétable de France et de Castille | |
Années de service | vers 1335 – 1380 | |
Conflits | Guerre de Cent Ans Guerre de Succession de Bretagne Première guerre civile de Castille |
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Faits d'armes | Bataille de Cocherel Bataille d'Auray Bataille de Nájera Bataille de Montiel Bataille de Pontvallain Bataille de Chizé |
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Distinctions | Duc de Molina Comte de Tancarville |
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Hommages | Enterré à la basilique Saint-Denis | |
Autres fonctions | Chambellan de France Capitaine de Pontorson Capitaine du mont Saint-Michel |
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Né vers 1320 à Broons, Bertrand est le fils aîné des dix enfants de Robert II du Guesclin (v. 1300-1353), seigneur de la Motte-Broons, et de son épouse Jeanne de Malesmains (morte en 1350), dame de Sens-de-Bretagne[1]. Bertrand du Guesclin est issu d'une rustique seigneurie de la petite noblesse bretonne. Les Guesclin font en effet partie des familles nobles de Bretagne, mais Robert du Guesclin n'appartient qu'à la branche cadette de la famille (la branche aînée vit au château du Plessis-Bertrand et au château de la Motte-Jean) et occupe un modeste manoir[alpha 2] à la Motte-Broons[2], dans le pays gallo, ce qui veut dire que sa langue maternelle fut une langue d'oïl et non le breton[3].
Comme il est d'usage, Bertrand est placé en nourrice et est élevé parmi des paysans jusqu'à l'âge de cinq ans. Le portrait peu flatteur qui nous est laissé par les historiens le décrit[4],[5] « petit », « les jambes courtes » et « noueuses », « les épaules démesurément larges », « les bras longs », « une grosse tête ronde et ingrate », « la peau noire comme celle d'un sanglier ». Sa laideur (la Chanson de Bertrand du Guesclin du trouvère Cuvelier dit de lui qu'il fut « l'enfant le plus laid qu'il y eût de Rennes à Dinan »[6]) et sa brutalité lui valent l'opprobre parental. Bien qu'il soit l'aîné d'une fratrie de dix enfants, sa mère donne la préférence à ses deux frères cadet et puîné, et son père le traite assez mal, refusant de le former à la chevalerie : la chronique de Cuvelier dit de ses parents qu'ils « le détestaient tant, que souvent en leur cœur ils désiraient qu’il fût mort ou noyé dans l’eau courante »[7].
Vers l'âge de six ans, il gagne néanmoins le respect de sa mère et ses cadets : selon les chroniques médiévales de l'époque (qu'il faut lire de nos jours avec une certaine circonspection à cause de leur tendance à embellir les actions des personnages — et de leurs proches — commanditaires ou protecteurs du chroniqueur, comme les Chroniques de Froissart[8]), relégué comme à son habitude dans un coin de la pièce lors d'un repas familial en l'absence du père, il explose de colère et bouscule ses frères pour prendre sa place d'aîné sur le banc. Sa mère s'apprête à le punir quand il renverse la lourde table. Alors, une femme juive convertie, versée dans la chiromancie, venue pour raconter la bonne aventure, prédit la gloire à ce fils belliqueux. Bertrand est désormais traité avec les égards dus à son rang[9]. Selon un vers de Cuvelier contant que « lire ne savait, ni écrire, ni compter », nombre d'historiens en ont déduit que du Guesclin était illettré, ce qui est peu vraisemblable, ses parents lui ayant certainement donné une éducation nobiliaire digne de leur statut[10].
Selon les chroniques de l'époque, il se fait remarquer dès son enfance par sa force, son habileté dans les exercices du corps et ses goûts belliqueux avec ses compagnons de jeunesse, des paysans roturiers. Bagarreur, il se sent la vocation de guerrier. Alors qu'il s'est enfui (ou a été chassé par ses parents ?) chez son oncle (Bertrand du Guesclin, seigneur de Vauruzé) à Rennes, il assiste à un tournoi sur la place des Lices de cette ville le , auquel il a interdiction de participer[11] : un de ses cousins, vaincu, quitte la lice et lui prête son équipement. Toujours selon les chroniques de l'époque, Bertrand défait, masqué, douze ou quinze chevaliers selon les versions[12], avant de refuser de combattre son père en inclinant sa lance par respect au moment de la joute, à la grande surprise de l'assemblée qui se demande qui est ce chevalier sans blason. Un seizième chevalier qui le défie parvient à faire sauter la visière de son heaume. Robert du Guesclin découvre le visage de son fils : ému et fier, il s'engage à l'armer grâce à une collecte réalisée auprès de ses proches. Bertrand va pouvoir ainsi gagner sa réputation d’excellent tournoyeur[13].
Il commence à signaler sa bravoure dans les guerres que se livrent Charles de Blois et les comtes de Montfort, Jean II et son fils Jean III, pour l'héritage du duché de Bretagne. Il se fait remarquer aussi dès le début de la guerre de Cent Ans, notamment en 1354 en prenant par ruse le château de Grand-Fougeray et en 1357 en participant à la défense de Rennes assiégée par Henri de Grosmont, duc de Lancastre. Du Guesclin ayant gagné le respect de la noblesse à la pointe de son épée, le chevalier Alacres de Marès[15], dépendant du bailliage de Caux, l'adoube chevalier au château de Montmuran dans les Iffs en 1357[16] (ou en 1354, par Arnoul d'Audrehem sur un champ de bataille entre Bécherel et Combourg, d'après d'autres sources[17]). Il prend alors pour devise « Le courage donne ce que la beauté refuse »[12]. Il est nommé capitaine de Pontorson et du Mont Saint-Michel sur recommandation de Pierre de Villiers. Il promet « qu'il ne trouveroit jamais occasion qu'il ne chargeast les Anglois quelque part qu'il les renconstrat »[18].
En 1360, il est lieutenant de Normandie, d'Anjou et du Maine puis, en 1364, capitaine général pour les pays entre Seine et Loire et chambellan de France.
Alerté par Guillaume de Craon, seigneur de Sablé, qu'une troupe anglaise dirigée par Hugues de Calveley se dirige vers Juigné-sur-Sarthe en , ce dernier se propose de se joindre à lui pour les attaquer. Du Guesclin se retrouve isolé et est fait prisonnier. Il retrouve sa liberté après le paiement d'une rançon de 30 000 écus. Hugues de Calveley devient par la suite l'un de ses lieutenants en Espagne.
Du Guesclin s'illustre en 1364 lors des prises de Rolleboise, de Mantes et de Meulan et célèbre l'avènement de Charles V en , en remportant la bataille de Cocherel contre l'armée de Charles de Navarre. Il prend ensuite Valognes où son fidèle Guillaume Boitel, qui commande l'avant-garde, joue le rôle déterminant. Il reçoit le comté de Longueville en Normandie.
Après ces victoires, il vole de nouveau au secours de Charles de Blois en Bretagne ; mais, en , à la bataille d'Auray, malgré tous ses efforts, son parti est battu : il est fait prisonnier par John Chandos, chef de l'armée anglaise. Sa rançon est de 100 000 livres. Le roi de France paie 40 000 livres, Guy XII de Laval répond du reste[19].
En 1365, à la demande du roi de France, il délivre le royaume des Grandes compagnies, groupes de mercenaires qui ravageaient les provinces. Il les persuade de participer à la première guerre civile de Castille aux côtés d'Henri de Trastamare qui dispute à Pierre le Cruel le trône de Castille. Avec l'aide de son fidèle lieutenant Guillaume Boitel qui dirige son avant-garde, il s'y couvre de gloire, et déjà il a anéanti le parti de Pierre le Cruel, lorsque celui-ci appelle à son secours le Prince Noir, gouverneur de Guyenne.
Du Guesclin est défait par les Anglais du Prince Noir à la bataille de Nájera, livrée contre son avis (1367). Il est fait prisonnier et libéré sur parole grâce à l'insistance de Hugues de Calveley auprès du Prince Noir. Du Guesclin collecte des fonds auprès de ses amis pour payer la rançon de ses officiers et reconstituer ainsi son armée avant de payer sa propre rançon qu'il a lui-même fixée d'abord à 100 000 livres puis à 60 000 livres, ayant compris que le Prince Noir ne pouvait accepter qu'il vaille si cher. L'épouse du Prince Noir, qui admire du Guesclin, verse 10 000 livres à son mari sur sa cassette personnelle et le solde est à nouveau payé par Charles V. En 1369, Du Guesclin retourne en Espagne où il remporte la bataille de Montiel contre Pierre le Cruel et l'armée des Sarrazins venus du Maroc. Il rétablit Henri sur le trône et, en récompense de ses actions en Espagne, il est fait duc de Molina.
En , revenu en France, il est fait connétable de France par Charles V. Sa grande entreprise va être d'expulser les Anglais. Contrairement aux habitudes de la chevalerie française, il ne procède pas par grandes campagnes avec tout l'ost français, mais préfère reconquérir méthodiquement des provinces entières, assiégeant château après château. Il va chasser les Anglais de la Normandie, de la Guyenne, de la Saintonge et du Poitou.
Bien souvent, le siège ne dure pas, l'issue en étant accélérée par un assaut victorieux ou plus souvent encore par une ruse. Pour libérer Niort de la domination anglaise, il utilise un subterfuge : il fait revêtir à ses soldats l'uniforme anglais. L'ennemi, confiant, ouvre les portes de la ville et l'armée de du Guesclin s'en empare.
Georges Minois, historien du Moyen Âge, qualifie ainsi les victoires et la reconquête menées par Bertrand du Guesclin : « Certes, il ne conduit qu'une petite troupe de quelques centaines d'hommes, mais il obtient avec eux des résultats plus importants qu'avec une grosse armée, coûteuse, lourde, encombrante et lente[20]. » Cette tactique victorieuse est menée pour trois raisons majeures :
En 1374, il combat à La Réole. La même année, il se marie avec Jeanne de Laval dans la chapelle du château de Montmuran et en devient propriétaire par alliance jusqu'en 1380. En outre, son épouse lui apporte en dot le château de Montsabert en Anjou. Le château de Montsûrs[22] est dès lors sa demeure, et il y réside dans les périodes hors-guerre. Il y traitera du mariage de sa nièce Marie d'Orange, avec Jean, vicomte de Vendôme.
En 1376, il reçoit la seigneurie de Pontorson en Normandie. Charles V, ayant en 1378 fait prononcer la confiscation du duché de Bretagne, occupé par ses officiers depuis 1373[23], le duc Jean IV étant en exil à Londres, provoque une fronde nobiliaire bretonne et le rappel du duc exilé en Angleterre. L'inaction de du Guesclin lors du débarquement de Jean IV à Dinard le fait soupçonner de trahison[24]. Il est indigné d'un tel soupçon. Selon la version non établie de la chronique de Jean Cabaret d'Orville, il aurait même renvoyé aussitôt au roi son épée de connétable et voulu passer en Espagne auprès d'Henri de Trastamare. Ayant retrouvé la confiance du roi grâce à l'entremise du duc d'Anjou, il retourne dans le Midi pour combattre encore les Anglais. En 1378, il participe à la campagne contre la Bretagne, avec son cousin Olivier de Mauny — chevalier banneret, seigneur de Lesnen et pair de France, qui fut nommé capitaine général de Normandie et chambellan de Charles V en 1372.
En 1380, il combat contre les Grandes compagnies en Auvergne et dans le Sud du Massif central, où il met le siège devant Châteauneuf-de-Randon (Gévaudan). Après plusieurs assauts terribles, la place promet de se rendre au connétable lui-même, si elle n'est pas secourue dans 15 jours. Du Guesclin, pris d'une forte fièvre, meurt dans l'intervalle. La tradition attribue son décès à la consommation d'eau glacée pendant les chaleurs de l'été, une allégation commune à cette époque. Il aurait étanché sa soif à la fontaine de la Cloze / Glauze (selon les sources), visible au hameau d'Albuges[25]. Le jour de son décès, le , le gouverneur vient, la trêve expirée, déposer en hommage les clefs de la place sur son cercueil[26]. Son corps est déposé à Saint-Denis.
Lors de la guerre d'Espagne et des campagnes de France qui suivirent, Bertrand du Guesclin était secondé par des dits généraux bretons, français et anglais :
La reconnaissance politique que le roi Charles V veut témoigner à son connétable vaut à du Guesclin le privilège d'une quadruple sépulture. La partition de son corps (dilaceratio corporis, « division du corps » en cœur, entrailles, chairs et ossements) avec des sépultures multiples permet ainsi la multiplication des cérémonies (funérailles du corps, la plus importante, puis funérailles du cœur, des chairs et funérailles des entrailles) et des lieux (avec un tombeau de corps, de cœur, de chairs et un tombeau d'entrailles) où honorer le défunt. Bertrand du Guesclin est probablement le seul défunt au monde inhumé dans quatre tombeaux[31].
Du Guesclin a souhaité par testament que son corps repose en Bretagne après sa mort. Au cours d'un arrêt du cortège funèbre au Puy-en-Velay, le corps est éviscéré et subit un premier embaumement, les viscères étant inhumés dans l'église du couvent des Dominicains dans un tombeau couvert d'un gisant réaliste du connétable, portant la barbe et la moustache des guerriers en campagne[32]. Arrivé à Montferrand quelques jours plus tard, un nuage de mouches obscurcit le cortège, suivant de près la charrette sur laquelle le corps est déposé. En l'absence des embaumeurs royaux, l'opération d'embaumement a échoué[33] : maladresse des praticiens ? chaleur estivale trop forte ? Il est décidé de faire bouillir le corps dans une marmite de vin aromatisé d'épices pour détacher les chairs du squelette, technique funéraire d'excarnation connue sous le nom de mos Teutonicus, l'« usage teuton »[34]. Les chairs sont inhumées au couvent des Cordeliers de Montferrand[alpha 3]. Le squelette et le cœur poursuivent leur route vers la Bretagne. Passant outre les dernières volontés du défunt, le roi Charles V décide de faire enterrer les ossements de son connétable dans la basilique royale de Saint-Denis, aux pieds même du tombeau qu'il se fait alors préparer pour lui-même. Son cœur seul parvient en Bretagne où il est déposé sous une dalle d'une chapelle du couvent des Jacobins à Dinan. La chapelle tombant en ruine au XIXe siècle, le , la pierre tombale et l'urne contenant le cœur sont transférées dans l'église Saint-Sauveur de Dinan[31].
Sa sépulture à Saint-Denis (sous un gisant en armure avec ses deux solerets, genouillères et cubitières, un surcot et un baudrier sur lequel est attaché d'un côté une dague anachronique, de l'autre côté l’épée dans son fourreau de cuir et l’écu en métal doublé de cuir et gravé avec ses armoiries, l'œil gauche percé, marque d’un coup de lance reçu en combattant les Anglais en 1364[35]), comme celles de la plupart des princes et dignitaires qui y reposaient, est profanée par des révolutionnaires en 1793, comme l'est aussi le tombeau contenant ses chairs bouillies (à Montferrand). Cependant il n'est pas entièrement détruit, le gisant étant conservé et toujours en place à Saint-Denis dans la chapelle de Saint-Jean Baptiste[36] : il est l’œuvre des sculpteurs Thomas Privé et Robert Loisel et fut achevé en 1397.
Quant au tombeau qui contient ses entrailles (église Saint-Laurent, au Puy), il échappe à la profanation : l'urne est mise en dépôt à la mairie en vue de lui donner une sépulture laïque puis est finalement replacée dans l'église Saint-Laurent avec son contenu ; ils y demeurent toujours[32].
Trois des quatre tombes sont encore visibles et ornées de monuments, celle de Montferrand ayant disparu lors de la Révolution française. Les gisants de Saint-Denis et celui du Puy permettent d'observer un personnage et un visage apparemment sculptés à la ressemblance du sujet, par ailleurs connu par des descriptions physiques et plusieurs miniatures contemporaines, insistant toutes sur la laideur et la pugnacité que révélait son visage.
Il existe à Chateauneuf-de-Randon (Lozère) et au lieu-dit « L'Habitarelle » où se situait le campement de du Guesclin au moment de sa mort, un cénotaphe construit par subvention et souscription nationales, dont le gisant reproduit celui du Puy : sans casque, car il n'est pas mort au combat, avec un chien à ses pieds, le connétable porte la barbe alors qu'il est imberbe sur le gisant de la basilique Saint-Denis[32].
Eustache Deschamps a composé une Ballade sur le trépas de Bertrand du Guesclin[37].
Du Guesclin laisse une image de grand homme dans l'histoire de France. Elle est partagée sans être unanime. Il est ainsi considéré, selon les sources, soit comme un héros français à la loyauté absolue, soit comme un traître (surtout pour les nationalistes régionaux). Les historiens du XXe siècle proposent des interprétations contradictoires : Eugène Déprez décrit le connétable comme le héros qui « a donné à Charles V le prestige des victoires et séduit son siècle par ses exploits. Toujours prêt à mourir pour défendre la France, il a éclipsé la renommée de tous les capitaines de son temps ». Édouard Perroy dénonce « le médiocre capitaine, incapable de gagner une bataille ou de mener à bien un siège de quelque envergure, tout juste bon à galvaniser les bandes de routiers pillards, qui reconnaissaient en lui leur maître, tout bouffi de son importance et pointilleux par surcroît d'honneur chevaleresque »[39]. Philippe Contamine se pose la question d'une gloire usurpée[40].
Il doit son statut de héros au fait qu'il a de son vivant soigné son image en travaillant personnellement à sa propre réputation, et à la faire connaître, en comptant notamment dans son entourage Cuvelier, un trouvère qui composa de lui une biographie rimée. Il le doit également à la mythographie de sa mort (telle la ballade Sur le trépas de Bertrand du Guesclin d'Eustache Deschamps) ou à la description dans les Chroniques de Froissart de l'ascension sociale que sa naissance ne lui laissait espérer[41]. Les poètes du XIVe siècle comme Cuvelier ou Deschamps l'adjoignent comme dixième héros aux Neuf Preux légendaires[12]. Cette figure héroïque est également diffusée par la propagande nationaliste française du XIXe siècle avec des historiens comme Ernest Lavisse, Albert Malet (il est ainsi présenté comme précurseur de Jeanne d'Arc en cristallisant l'identité nationale du peuple français qui s'est construite autour du roi contre les Anglais) et est maintenue par des historiens du XXe siècle comme Jean Duché[42].
Son image de traître a une double origine :
Si la première origine de cette qualification de traître est purement partisane (Montfortistes contre Blésistes), la seconde origine est totalement anachronique : l'historien Louis Élégoët fait remarquer qu'il s'agit de la transposition, par les nationalistes, de leur vision moderne du concept de nation, alors que Du Guesclin vit à une époque où un système féodal est en place : ayant pris le parti de Charles de Blois lors de la guerre de Succession de Bretagne, il se positionne en vassal du seigneur de celui-ci, le roi de France Charles V, et, contrairement à nombre d'autres seigneurs de l'époque, ne changera jamais d'allégeance au cours de sa vie, en ayant fait une question de principe. Le parti des Montfort faisait, lui, appel aux Anglais quand le parti de Blois s'appuyait sur les Français.
Entre le petit nobliau de province qui se constitue une bande de partisans dans la forêt de Paimpont et le « bon » connétable à la tête de l'armée du roi Charles V le Sage (ce roi peu fait pour la guerre qui a rétabli la paix grâce à des chevaliers comme Du Guesclin), Bertrand du Guesclin constitue ainsi dans la mentalité collective une image « à mi-chemin entre un Robin des Bois breton et un Bayard médiéval »[44].
Outre un prix hippique en son nom, un prix littéraire, le prix du Guesclin a été créé en 2010 par l'Association Cocktail & Culture pour récompenser l’auteur d’un essai, d’une biographie ou d’un roman historique.
La 6e promotion de l'École militaire interarmes (1966-1967) le choisit comme parrain sous le nom de « connétable du Guesclin »[45].
La 129e promotion de l'École des officiers de la Gendarmerie Nationale porte le nom « Connétable Bertrand du Guesclin »[46]
Bertrand du Guesclin avait un frère :
et deux cousins :
Il contracte deux mariages, qui ne laissent pas d'enfant :
En revanche, il laisse des bâtards ou des enfants semi-légitimes[49]. De sa relation avec Doña de Torró, Dame de Soria[50],[51],[52],[53], dame de la cour de la la princesse Jeanne d'Aragon[54], on suppose qu'il a eu deux enfants (nés vers 1366) :
Bertrand Du Guesclin, connu en Espagne sous le nom de Beltran Claquin, est apparu en Espagne en 1366-1374. Sa trajectoire et ses résidences incluent Molina, Soria et Montblanc et sont liées à son soutien à Enrique de Trastamara[59].
On connaît également un troisième enfant, issu d'une autre relation (ou de Doña de Soria, la filiation étant mal établie[60]) : Michel du Guesclin.
La devise de Bertrand du Guesclin, dénote une disgrâce physique : celui du « vilain petit canard ».
Le poète Cuvelier placera au cœur du cheminement de son héros, au moment clé du sortir de l'enfance, lors du tournois de Rennes[62] : « Mais puisque je suis laid, je veux être hardi »[63].
« D'argent à l'aigle bicéphale éployée de sable becquée et membrée de gueules, à la cotice du même brochant sur le tout. »
La cotice (ou bâton en bande — quasi équivalent) est une bande réduite en largeur et était utilisée en général comme brisure pour les cadets. Le père de Bertrand représente une branche cadette de la famille Du Guesclin.
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