Homosexualité dans la chanson française

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L'homosexualité dans la chanson française peut prendre plusieurs formes. Au fil des époques les chansons peuvent caricaturer, ignorer, défendre ou militer pour l'acceptation de cette orientation sexuelle, quelle que soit l'orientation sexuelle de leurs auteurs ou de leurs interprètes. Mode d'expression populaire par excellence, la chanson permet à la fois le divertissement et le débat. La culture gay et lesbienne en a fait un médium privilégié d'expression, mais la chanson peut être également utilisée pour la railler ou la parodier.

Histoire

Résumé
Contexte
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André Claveau lors du Concours Eurovision de la chanson 1958 à Hilversum.

Déjà présente à une époque où le terme « homosexuel » n'existait pas encore, le thème de l'homosexualité a véritablement éclos dans la chanson française à l'avènement de la Troisième République grâce à l'explosion des cafés-concerts[c 1],[a 1]  à la suite des décrets de 1867 et de 1880 , lieux de toutes les licences (qu'elles soient alcooliques ou morales) malgré une censure toujours attentive. Il s'agissait à l'époque plus de caricaturer la « tante » comme sujet de moquerie parmi tant d'autres (soldats, belles-mères...), même si peu à peu des artistes et auteurs ouvertement homosexuels tendent à donner une image plus troublante, sortant de la moquerie pour évoquer la vie homosexuelle de l'époque et l'ivresse de ces amours interdites[d 1].

Du sous-entendu grivois distillé par Yvette Guilbert, Suzanne Lagier ou Charlotte Gaudet[d 2] à l'apparition du style « tapette » popularisé par Mayol[a 1] (et rapidement parodié, parfois de façon non subtile), le XXe siècle franchit allègrement le pas. À l'image des milieux littéraires qui voient s'épanouir Marcel Proust[c 2], André Gide[c 2], Colette ou Jean Cocteau, les music-halls deviennent des pépinières d'artistes « invertis », ainsi que des lieux de drague très courus. C'est le règne de la chanson interlope[c 3]. Bien sûr, le voile de l'ambiguïté plane toujours la plupart du temps sur les textes, mais la vie privée des vedettes des « années folles » est de notoriété publique : les producteurs Henri Varna[a 1] et Oscar Dufrenne, le compositeur Gaston Gabaroche[d 3], les auteurs Jean Lorrain, Maurice Aubret et Louis Amade ne cachent pas leurs préférences. Le bal du Magic-City[a 2], inauguré en 1922 rue de Lappe, organise chaque année au Mardi gras un grand concours de travestis[c 2]. Charpini[c 4] ou O'dett[c 5] triomphent en précurseurs des drag queen dans des parodies d'opérette[1] ou des imitations de comédiennes célèbres. Les chanteurs Reda Caire, Max Trébor, Jean Lumière, André Claveau, Jean Tranchant ou Jean Sablon font rêver les femmes[c 6],[a 3],[d 4] sans qu'elles soient dupes. Côté femmes, Fréhel, Damia, Suzy Solidor[c 7] ou Yvonne George[c 8] profitent de la brèche ouverte par le roman à scandale La Garçonne de Victor Margueritte[c 9] pour s'approprier des textes « masculins[a 4]. »

La Seconde Guerre mondiale incite à plus de discrétion, qui plus est à partir de la loi du sur l'incitation à la débauche[a], même si le style zazou de Charles Trenet véhicule toujours quelques sous-entendus[c 10]. La Libération en revanche est une période de remise aux normes assez brutale que l'arrivée du « rock », symbole de virilité, ne contredira pas[a 3]. Luis Mariano, Jean-Claude Pascal, Mick Micheyl ou Colette Mars[c 11] se retranchent prudemment derrière les convenances face à l'expansion d'un discours homophobe sous le masque de la caricature[a 3]. D'autres comme Gribouille[a 3] se réfugieront dans l'alcool et les barbituriques, elle en mourra le [2].

C'est paradoxalement grâce à des chanteurs « hétéros » que l'homosexualité va peu à peu devenir un sujet plus anodin à partir de 1968. Juliette Gréco, Régine ou Mouloudji interprètent des auteurs ouvertement gays comme Frédéric Botton ou Jean Genet, et surtout des textes qui évoquent l'homosexualité sans en faire un objet de condamnation ou de moquerie[a 3]. Charles Aznavour aborde le sujet en 1972 avec Comme ils disent[c 12],[a 5] en énonçant pour la première fois "homo" (écrit « homme oh[a 6] ») et en prêchant la tolérance[3].

Les années disco imposent la mode androgyne personnifiée par les Bee Gees, ou Patrick Juvet[a 6], tandis que des chanteurs comme Dave continuent à chanter les amours hétérosexuels sans dissimuler leurs propres préférences[a 7], et que les Village People[b], ou Boys Town Gang prêchent l'hédonisme décomplexé de certains milieux gays de l'époque, véhiculé par des chanteurs et danseurs dont la plastique est mise en valeur. Dans les années 1990, les boys band garderont leur principe de présenter des hommes comme objets sexuels, mais sans connotation homosexuelle affichée. Au début des années 1980, plusieurs artistes prennent ouvertement la défense de la cause homosexuelle comme Dalida qui soutient la Radio Fréquence Gay et participe dès 1985 à un gala pour aider la recherche contre le virus du SIDA[4]. À ce propos, elle déclare publiquement à l'antenne en direct : « Moi je trouve ça merveilleux, les homosexuels ça existe et ça a toujours existé depuis toujours et c'est merveilleux que maintenant c'est au grand jour en liberté. Je pense que chacun est libre de faire ce qu'il veut de son corps. »[5].

Parallèlement, des artistes plus discrets comme Dick Annegarn ou Yann-Fañch Kemener trouvent également leur terrain d'expression[a 8].

L'épidémie de sida qui se répand à partir du milieu des années 1980 chasse les paillettes et le discours devient plus politique. Alors que Mylène Farmer construit sa notoriété sur (entre autres) le thème de la bisexualité, Jean Guidoni choque en développant un univers d'une noirceur et d'une crudité rarement évoquées jusque-là[a 6],[a 9]. D'autres ne cachent pas leur homosexualité, sans en faire un sujet central de leur art, comme Juliette[a 7]. Ce n'est qu'avec les années 2000 (et la relative normalisation de l'homosexualité grâce à des lois comme le PACS) que, sans renoncer à un certain militantisme, la chanson homosexuelle retrouve un peu de légèreté grâce à des artistes comme Mouron, Nicolas Bacchus[a 7] ou Laurent Viel et qu'on voit même apparaître des artistes ouvertement gays dans des milieux jusqu'alors plutôt fermés comme le rock ou le rap, genre qui cristallise également depuis quelques années les attaques les plus homophobes[a 7].

Chansons traitant de l'homosexualité ou de la bisexualité

Résumé
Contexte

Entre 1900 et 1950

Années 1950 et 1960

Années 1970

  • 1979 : Depuis qu'il vient chez nous (C.Carmone, V.Buggy, J.Barnel) par Dalida[24],[33]
  • 1979 : Mes parents, sachez-le (J.Gabriel/M.Frantz) par Daniel Roux[f]
  • 1979 : Laissez-nous aimer (J.M.Keller/D.Carlet) par Daniel Roux[15]
  • 1979 : Comme les princes travestis chanté par Marie Paule Belle[3],[b 4]

Années 1980

  • 1984 : I'm the boy par Serge Gainsbourg[53]
  • 1984 : Kiss Me Hardy de et par Serge Gainsbourg[53],[29]
  • 1985 : Il aimait les garçons (Michel Kricorian, P. Honeyman, G. Di Nino) par Kelly[29]
  • 1986 : Qui est qui ? extrait du spectacle Lily passion par Barbara[12]

Années 1990

1994 : Ruisseau Bleu par Anne Sylvestre[65]

Années 2000

  • 2000 : Parc'qu'elle aime une femme par Mannick
  • 2000 : Venus par le groupe Indochine
  • 2000 : Stef II par Indochine

  • 2002 : J'aime regarder les mecs (feat. Bernard Garcia) par le groupe Polyester
  • 2002 : Le harpon de Cupidon par le groupe Krêposuk

  • 2004 : Coming out de et par Alexis HK[29]
  • 2004 : L'Attraction des cœurs (P. Loiseau, T. Valona, S. Ramin) par Dave[29]

  • 2006 : Free your love par Desireless et Esteban
  • 2006 : Gabriel par Najoua Belyzel
  • 2006 : I'm afraid par le groupe Sexy Sushi
  • 2006 : Lola (Jennifer Ayache) par Superbus
  • 2006 : Jenn je t'aime (Jennifer Ayache) par Superbus
  • 2006 : Let me hold you (Jennifer Ayache) par Superbus
  • 2006 : J'ai essayé, Inventaire , Les Maladies mortelles, Enquête préliminaire par Nicolas Bacchus
  • 2006 : Ma copine est lesbienne par le groupe Zephyr 21
  • 2007 : Au grand jour par Émily Bégin
  • 2007 : Comme un autre (J. Cherhal) par Jean Guidoni
  • 2007 : Dans la peau par Océan
  • 2007 : Du pareil au même par Nolwen
  • 2007 : En visage par Océan

Années 2010

  • 2011 : Swing ta vie par Nawal
  • 2011 : T'enflamme pas pétasse par le groupe Sexy Sushi
  • 2011 : Toi garçon par Océan
  • 2011 : Tu par Océan
  • 2012 : Brian Williamson par Tryo
  • 2012 : Elle par Shy'm
  • 2012 : Elle a dit (Laurent Boutonnat) par Mylène Farmer
  • 2012 : L'amour est éternel par Cali
  • 2013 : Deux ils, Deux elles par Lara Fabian

  • 2018 : La Marcheuse Christine and the Queens[84],[b 12]

  • 2019 : Tu me regardes par Angèle
  • 2019 : Le Monarque des Indes par Pierre Lapointe
  • 2019 : Vendredi 13 par Pierre Lapointe

Années 2020

  • 2020 : Tata yo-yo par Jim Bauer
  • 2021 : Le Drapé par Ratel C
  • 2021 : Un Fil d'Amour par Ratel C
  • 2022 : Touche-Moi par Kalika (avec Joanna)
  • 2022 : Ni reine ni roi par Christophe Willem
  • 2022 : J'avance par Christophe Willem
  • 2022 : Joli Danger par Aloïse Sauvage
  • 2022 : Mater hilara par Ratel C
  • 2024 : Sa Solitude par Ratel C
  • 2024 : Buffet froid par Ratel C

Parodies

Cette section regroupe les chansons abordant l'homosexualité de façon parodique, humoristique ou stéréotypée :

Chansons ouvertement homophobes

  • 1907 : Chanson de l'armée allemande (Pierre-Louis Flers/Alfred Patusset) par Maurel et Vilbert[y],[d 12]
  • 1908 : Scandale teuton (J. Péheu/T. Poret) par Jean Péheu[y],[d 12]

Notes et références

Voir aussi

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