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signe typographique de ponctuation De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L’apostrophe (nom féminin) est un signe typographique pour l’élision grammaticale, ou éventuellement servir de ponctuation ou servir à former un diacritique, voire servir de lettre. Issue d’une ponctuation de l’alphabet grec qui indique l’élision, elle a été empruntée par d’autres écritures, dont l’alphabet latin principalement.
Apostrophe | |
’ ' ʼ |
|
Graphies | |
---|---|
Graphie | ’ ' ʼ |
Codage | |
Noms | guillemet-apostrophe (recommandée comme ponctuation), apostrophe (à usages variés), lettre apostrophe (recommandée comme lettre) |
Unicode | U+2019 U+0027 U+02BC |
Blocs | Ponctuation générale Commandes C0 et latin de base Lettres modificatives avec chasse |
modifier |
L’apostrophe a traditionnellement la forme d’une virgule placée en hauteur. On retrouve déjà cette définition d’« une virgule que l’on met un peu au-dessus du mot » dès la première édition du Dictionnaire de l’Académie française (1694)[1] et plus récemment chez Jean-Pierre Lacroux : « Une virgule libérée de la pesanteur qui la clouait sur la ligne de base »[2]. En allemand, dans le langage courant ou populaire, elle est nommée Hochkomma, littéralement « virgule haute ». L’apostrophe est donc généralement courbe et plus ou moins inclinée ; cependant de nombreuses polices de caractères la représentent par une barre oblique.
En raison des contraintes techniques des claviers de machines à écrire, puis de nos jours de ceux des ordinateurs, elle est très souvent tracée comme une barre verticale droite dans les documents informatiques. Cette apostrophe est alors appelée « apostrophe dactylographique » (car apparue avec les machines à écrire mécaniques utilisant une seule touche pour l’apostrophe et le guillemet anglais ouvrant ou fermant, ou même d’autres signes comme l’accent aigu), « apostrophe droite » (car elle est souvent droite pour le guillemet anglais ouvrant ou fermant, mais pas toujours), apostrophe informatique[3] ou d’autres noms plus imagés[4]. Les expressions « apostrophe dactylographique » et « apostrophe typographique » sont utilisées par Aurel Ramat[5].
Selon les usages des typographes, l’apostrophe dactylographique ne devrait pas être employée[6],[7] et, par exemple, pour Lacroux, ce « n’est pas une apostrophe. […] Ce n’est typographiquement rien »[2].
Unicode distingue bien les différents œils de l’apostrophe ainsi que ses différentes fonctions : signe typographique d’élision, signe diacritique ou lettre. Il recommande d’utiliser le guillemet-apostrophe « ’ » (U+2019) comme apostrophe typographique[8],[9]. Patrick Andries, expert Unicode, fait la même recommandation[10]. Le caractère apostrophe dactylographique hérité de l’ASCII conserve les sens qu’il a dans ce codage, c’est-à-dire « apostrophe, guillemet anglais fermant, accent aigu »[11] ; le caractère guillemet-apostrophe, recommandé pour l’apostrophe, ayant été codé pour enlever certaines ambiguïtés[12].
Signe neutre ou ambigu | Signes courbés à gauche | Signes inclinés à gauche | Signes droits | Signes courbés à droite | Signes inclinés à droite | |||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Apostrophe dactylographique | Apostrophe typographique | Demi-anneau droit | Signe prime | Signe accent aigu | Ligne verticale | Saltillo | Apostrophe culbutée | Demi-anneau gauche | Signe prime réfléchi | Signe accent grave |
o' | o’ | oʾ | o′ | oˊ | oˈ | oꞌ | o‘ | oʿ | o‵ | oˋ |
Il existe plusieurs signes proches de l’apostrophe. Il est fréquent qu’on emploie, dans une composition typographique moins appliquée, l’apostrophe au lieu d’un demi-anneau à droite dans la transcription des langues sémitiques. L’utilisation d’une apostrophe « droite » est à déconseiller car il existe pour la transcription de ces langues deux consonnes qu’on note par les demi-anneaux, l’un tourné à droite, l’autre à gauche : l’apostrophe droite ne permet plus de différencier les deux. Ainsi, شَيْء [ʃajʔ], « chose » (arabe), peut être transcrit šayʾ (anneau à droite) ou, moins conseillé, šay’ (apostrophe) mais, de préférence, pas šay' (apostrophe droite), qui ne permet pas de savoir si l’on a affaire à la consonne [ʔ], notée par ʾ (parfois remplacée par ’) ou à ʿ (anneau à gauche, parfois remplacé par ‘, une apostrophe culbutée), notant [ʕ] (selon l’analyse traditionnelle ; on peut voir dans l’article phonologie de l’arabe que le cas est plus complexe).
À l’inverse, l’okina hawaïenne, une apostrophe culbutée, note bien un coup de glotte. Enfin, on utilise pour l’alphabet phonétique international une ligne verticale courte en hauteur proche de l’apostrophe droite précédant la syllabe portant un accent tonique (il existe aussi une ligne verticale basse, mais qu’on ne peut confondre avec une apostrophe). En pandunia, l’apostrophe droite est précisément utilisée dans le but de signaler un accent tonique sur la syllabe finale d’un mot. Exemple : heroˈ est prononcé en appuyant sur ro.
L’apostrophe est initialement un signe diacritique de l’alphabet grec[7], qui a donné naissance à un diacritique de cet alphabet[Quoi ?], la corônis, de forme similaire, indiquant la crase (contraction de deux voyelles en hiatus entre deux mots liés par le sens). On le retrouve en latin populaire et notamment dans des manuscrits de Virgile ou Priscien[7]. Selon Weil et Benloew, il aurait évolué à partir du sicilicus pour indiquer une lettre supprimée[13]. Au Moyen Âge, il apparaît en ancien français, par exemple dans le roman manuscrit Lancelot ou Chevalier de la charrette de Chrétien de Troyes vers 1180 ; et au XVe siècle[14] dans la première grammaire italienne, aussi en manuscrit, Regole della lingua fiorentina de Leon Battista Alberti[7].
En imprimerie, la première utilisation de l’apostrophe remonte au XVIe siècle en Italie. Alde Manuce l’utilise en 1501 dans l’ouvrage Le cose volgari di messer Francesco Petrarcha[7],[15]. En France, Balthazard de Gabiano l’utilisera à Lyon dès 1502, et Geoffroy Tory l’utilisera de manière anecdotique en 1529 puis systématique en 1533[7]. En Angleterre, il faut attendre 1559 pour que William Cuningham (en) l’emploie dans The Cosmographical Glasse[16].
L’adoption de l’apostrophe dans l’imprimerie se fait donc relativement rapidement. Aussi rapidement les grammairiens recommandent son utilisation. Jacques Dubois, dit Jacobus Sylvius, publie en 1532 une grammaire en latin nommée In linguam gallicam isagoge préconisant l’usage de l’apostrophe pour l’élision. Étienne Dolet puis Robert Estienne feront de même en 1540 et 1569[7].
Sa pratique s’élargit aux XVIe et XVIIe siècles puis connaît un recul progressif de ses domaines d’application qui sont actuellement relativement restreints[17].
C’est en français que l’apostrophe est la plus fréquente, et dans les grands textes traduits en plusieurs langues on retrouve toujours ces proportions[18] :
Langue | Français | Italien | Anglais | Allemand | Espagnol |
---|---|---|---|---|---|
Nombre de points de fin de phrase | 9 000 | 9 000 | 9 000 | 9 000 | 9 000 |
Nombre d’apostrophes | 10 000 | 6 000 | 500 | Quelques-unes | Quelques-unes |
En français, l’apostrophe sert de signe typographique marquant l’élision des voyelles finales a et e de certains mots, et i pour ce qui est de la conjonction si suivie du pronom il[19]. L’élision se fait lorsque ces mots sont suivis d’un mot commençant par une voyelle ou un h muet. Ainsi on a : la + apostrophe → l’apostrophe, le + oiseau → l’oiseau, si + il → s’il, que + elle/il → qu’elle/qu’il, presque + île → presqu’île, le + homme → l’homme, le + hôtel → l’hôtel, le + hôpital → l’hôpital. Dans le langage populaire, l’élision de la voyelle finale i du pronom relatif sujet qui est aussi représentée par l’apostrophe par certains auteurs[19], et, dans le langage familier, pour l’élision de la voyelle finale u du pronom personnel tu[19]. Par exemple : qui est → qu’est en langage populaire, tu es → t’es en langage familier. L’élision peut aussi porter sur une partie du mot, en particulier pour restituer certaines prononciations populaires défectueuses. Par exemple pauvre con → pauv’ con.
En ce qui concerne les mots commençant par un h, il est nécessaire de savoir s’il est muet ou aspiré. Avec les mots commençant par un h aspiré, l’élision ne se fait pas et par conséquent on n’utilise pas d’apostrophe. Ainsi on a : la haie, le haricot, la hâte, le hibou, la housse, la hutte, etc. L’apostrophe n’est qu’une marque de confort, tant à l’oral qu’à la lecture. Cet usage, très courant en français, s’applique seulement à certains mots, le plus souvent monosyllabiques. Toutefois, l’emploi de l’apostrophe n’est pas seulement permis dans certaines circonstances, mais obligatoire : *« je te ai dit que il me aimait » est fautif. On doit dire et écrire : « je t’ai dit qu’il m’aimait ».
Des mots dont la voyelle finale peut être élidée incluent :
L’élision du e muet final n’est pas soulignée par l’apostrophe dans les autres cas. On écrit en effet la cuisine est vaste et lumineuse.
Quelques mots notables ne pouvant être précédés d’une apostrophe incluent (dont l’élision ne peut se faire devant) :
Les voyelles a et e, de même que i pour ce qui est de la conjonction si suivie du pronom sujet il, étant les seules à pouvoir être élidées, il est à noter que :
Dans certains cas, l’emploi de l’apostrophe est erroné bien qu’entré dans l’usage au début du XXe siècle par hypercorrection. Il n’y a aucune élision dans prud’homme (prud, anciennement prod, c’est-à-dire preux, + homme) ou grand’rue (grand, forme de féminin en ancien français écrite normalement grant, + rue). Aujourd’hui, dans ce cas, on écrirait plutôt prudhomme, grand rue ou grand-rue. En revanche, si grand’mère a été employé jusqu’au début du XXe siècle, on n’est jamais allé jusqu’à écrire mère grand’ ou Rochefort’.
Si les usages autres que l’élision sont considérés comme fautifs, on observe cependant de façon anecdotique d’autres utilisations. Il subsiste de façon archaïque, avec la fonction d’un trait d’union, dans des termes comme grand’mère, grand’voile ou grand’chose, dont l’élision semble absente (ce qui n’est en fait pas le cas ; les termes qualifiés par grand’ étant toujours féminins, il s’agit d’une élision du e final de grande). La huitième édition (1932-1935) du Dictionnaire de l’Académie française entérine le remplacement de cette apostrophe par un trait d’union[20]. Grand’ était alors invariable et l’on écrivait par exemple « les grand’mères » et « les grands-pères ». Les milieux proches de l’ordre national de la Légion d’honneur semblent attachés contre l’Académie à la graphie « grand’croix »[21].
L’apostrophe simple ou double peut aussi être utilisée comme substitut du guillemet (la première est renversée ou une virgule renversée), notamment quand une citation ou un discours direct sont insérés dans une autre citation ; cet usage provient des guillemets anglais[22]. On la trouvait dans la typographie française XVIIe - fin XVIIIe siècle pour remplacer un accent aigu en la plaçant après un E majuscule pour accentuer des lettres capitales : E' était alors équivalent à É .
Dans l’usage suisse, quelle que soit la langue (allemand, français, italien, romanche), l’apostrophe droite est souvent utilisée comme séparateur de milliers, quoique le Guide du typographe préconise une espace fine insécable.
Exemple : 100'000 (cent-mille)
Équivaut à « 100 000 » selon la norme du BIPM (SI) et l’usage de l’Imprimerie nationale française, qui recommandent une espace insécable fine et non justifiante comme séparateur des milliers[23] ; ou « 100 000 » selon l’usage sur Wikipédia en français (qui ne justifie jamais les lignes) et l’usage au Canada francophone[24].
L’apostrophe est communément utilisée pour indiquer les caractères omis en raison d’un amuïssement :
L’utilisation la plus courante de l’apostrophe, cependant, est liée au génitif anglais (encore appelé cas possessif), qui se marque normalement par une désinence « ’s » ajoutée au mot voulu. Autrefois le génitif et le pluriel étaient marqués à l’identique -(e)s, l’introduction de l’apostrophe a permis de distinguer le génitif du pluriel.
Enfin, l’apostrophe est utilisée par certains écrivains dans une fonction similaire de séparation des morphèmes pour des pluriels d’abréviations ou de symboles dans lesquels n’ajouter que la désinence -s (homophone du -s de génitif) serait ambigu, comme dans mind your p’s and q’s plutôt que mind your ps and qs (« surveillez vos p et q », c’est-à-dire « comportez-vous correctement », expression idiomatique intraduisible telle quelle). Ce procédé n’est pas nécessaire quand il n’y a pas d’ambiguïté : CDs, videos et 1960s suffisent, CD’s, video’s et 1960’s n’ayant pas de justification liée à la lisibilité. De même, l’emploi systématique actuel de l’apostrophe pour des mots n’ayant normalement pas de pluriel (verbes, adverbes…) est souvent erroné : le titre du film Dating Do’s and Don’ts devrait être écrit Dating Dos and Don’ts.
Le bon placement d’une apostrophe, en anglais, peut significativement changer le sens d’un énoncé. On prendra particulièrement garde aux cas suivants.
L’apostrophe de it’s (« c’est » ou « cela a ») marque une contraction de it is ou bien it has. Le possessif (adjectif ou pronom) its (« son, sa », « le sien, la sienne », quand le possesseur est neutre) n’a pas d’apostrophe. On peut se souvenir qu’il n’y a pas d’apostrophe dans les pronoms possessifs his (masculin), hers (féminin) et its.
Who’s signifie « qui est » ou « qui a ». On ne le confondra pas avec le possessif de who, whose « dont » / « à qui » : the person whose responsibility it is is the member who’s oldest (littéralement « la personne dont c’est la responsabilité est le membre qui est le plus âgé »).
You’re signifie « vous êtes [tu es] », qu’on ne confondra pas avec le possessif your (« votre [ton/ta] »). « Your nuts » signifie « tes noix » alors que « you’re nuts » peut se traduire par « espèce de noix ! », idiotisme familier pour « tu es fou ».
Quand un nom est mis au pluriel en -s, le génitif ne prend pas de -s supplémentaire mais l’apostrophe est conservée : lady’s hat, « le chapeau de dame » (singulier) mais ladies’ hats, « le(s) chapeau(x) des dames » (pluriel). Les pluriels irréguliers sans -s sont construits normalement au génitif : child’s hat, « le chapeau de l’enfant », children’s hats, « le(s) chapeau(x) des enfants ».
Un nom terminé au singulier par un -s peut ne pas recevoir un -s supplémentaire au génitif. Encore une fois, l’apostrophe est conservée : Jesus’ parables (« les paraboles de Jésus »). Cet usage est le plus courant aux États-Unis d’Amérique, surtout avec les noms anciens : Eros’ statue (« la statue d’Éros »), Herodotus’ book (« le livre d’Hérodote »). Des noms modernes se terminant par -es (prononcé avec /z/ et non /s/) suivent parfois cette règle : Charles’ car (« la voiture de Charles ») alors que la norme enseigne qu’il faudrait écrire Charles’s car. Par extension, on fait aussi de même avec des mots terminés par -x ou -z. (À l’oral, on prononce le ’s, par exemple « Jesus’ » se prononce souvent /dʒi:zəsəs/.)
Il existe des irrégularités, qu’on rencontre surtout dans les toponymes : si on trouve à Londres un St James’s Park (James est un singulier terminé par -s), il y a à Édimbourg une Princes Street, qu’il faudrait écrire avec une apostrophe puisque Princes est au pluriel ;
Des apostrophes mal placées, en particulier avec un « s » de pluriel, sont nommées Greengrocers’ apostrophes (ou, ironiquement, Greengrocers apostrophe’s), « apostrophes de l’épicier » (littéralement, du primeur), en raison des occurrences erronées censées être fréquentes sur les panonceaux écrits à la main qu’on peut trouver dans leur magasin, indiquant des potatoe’s (« pommes de terre ») ou des cabbage’s (« choux »).
En breton le trigramme « cʼh » note une consonne fricative vélaire voisée, [ɣ], ou sourde, [x], ou encore une consonne fricative glottale sourde, [h]. Par exemple dans les noms familles : Falcʼhun, Boulc'h, Créac'h, Floc'h, Guyonvarc'h, Le Cléac'h, Lozac'h, Pencreac'h ou Vourc'h. Autrefois, le digramme ʼf notait un son intermédiaire entre f et v. Ce digramme est toutefois encore employé dans l’orthographe dite universitaire, mais cette orthographe est de plus en plus minoritaire.
L’utilisation de la lettre modificative apostrophe (ʼ, U+02BC) est recommandée par l’Office public de la langue bretonne[25], mais l’usage de l’apostrophe dactylographique (U+0027) ou de l’apostrophe typographique (U+2019) reste courant.
L’usage de l’apostrophe typographique en espéranto est limité à la seule élision de la finale des noms. Tout substantif se finit par -o et il est possible de retirer cette finale et de la remplacer par une apostrophe. L’article défini la est également concerné par cette règle. Par exemple :
En principe, cette élision est toujours correcte, mais en pratique elle est réservée à la poésie et est quasi inexistante dans la langue parlée[26].
L’apostrophe droite, quant à elle, était suggérée par Louis-Lazare Zamenhof sous l’appellation « petit trait » dans le Fundamento de Esperanto pour séparer les groupes de lettres formant une idée : mal'san'ul'ejo est un hôpital, « lieu pour personne qui n’est pas en bonne santé » ; on rencontre plus souvent la barre oblique ou le trait d’union, de nos jours.
L’amuïssement de certains phonèmes (apocope et aphérèse) se marque avec l’apostrophe en gaélique (où il existe des amuïssements obligatoires et facultatifs, comme en anglais). Par exemple, en gaélique écossais : is toil leam a bhith ag dannsadh → ’s [facultatif] toil leam a bhith a’ [obligatoire] dannsadh « j’aime danser »).
L’apostrophe peut servir à séparer des morphèmes, surtout dans des mots sentis comme étrangers ou spécifiques. Ainsi, en néerlandais, elle peut être utilisée dans certains pluriels étrangers pour séparer le radical de la terminaison de pluriel irrégulière : foto’s, taxi’s. Le procédé se retrouve en turc : elle sert surtout dans les noms propres et joue là aussi un rôle séparateur (entre le radical et les suffixes). On trouvera donc souvent écrit İzmir’de, « à Izmir » au lieu de İzmirde. On a aussi vu que l’anglais fait parfois de même, dans des cas plus rares, cependant.
Dans certaines transcriptions, dont le pīnyīn (romanisation du mandarin) et plusieurs transcriptions du japonais (nippon-shiki, méthode Hepburn, par exemple), l’apostrophe permet de lever des ambiguïtés en séparant des syllabes qu’on pourrait sinon lire de plusieurs manières dans des mots polysyllabiques.
Par exemple, en pīnyīn changan est une graphie ambiguë : faut-il lire chang an ou chan gan ? L’ambiguïté disparaît une fois que l’on écrit chang’an, l’apostrophe indiquant la séparation virtuelle entre les deux syllabes chang et an. Dans les faits, changan doit se lire chan gan et c’est chang an qu’on distingue par l’apostrophe (on n’écrit pas chan’gan).
Pour le japonais, c’est avec la nasale moraïque qu’on peut trouver des ambiguïtés : dans cette langue, en effet, il existe une consonne comptant pour une more et ne pouvant se trouver qu’en fin de syllabe et s’opposant à une consonne nasale simple n’existant qu’en début de syllabe. Dans un mot polysyllabique, la coupure entre les syllabes n’est pas toujours évidente dans la transcription : ainsi kan’i (avec trois mores : ka+n+i) peut être différencié de kani (en deux mores : ka+ni) dès que l’on utilise l’apostrophe. Ce détail prend toute son importance quand on sait que l’orthographe en kanas change radicalement. Par exemple, kan’i s’écrit かんい tandis que kani s’écrit かに (hiragana).
Il est fréquent que l’apostrophe serve, soit dans une orthographe latine, soit dans les transcriptions et translittérations, à noter la présence d’une palatalisation. Elle joue là un rôle diacritique adscrit (l’apostrophe ne se place normalement pas sur ou sous une lettre ; c’est dans ce cas un autre type de diacritique, comme une virgule sous- ou suscrite).
Le cas du slovaque et du tchèque est notable : alors que dans ces langues la palatalisation est normalement indiquée par le háček, il est d’usage, pour les textes imprimés, de le remplacer par une apostrophe après les consonnes à hampe, soient t, d, l et la capitale L. Cet usage permet d’améliorer la lisibilité mais n’est pas obligatoire avec toutes les lettres ; ainsi, on trouve les couples suivants :
Selon la police de caractères à utiliser pour afficher cette page, il est possible que le háček soit utilisé à la place de l’apostrophe, surtout pour L ~ l.
Pour Unicode, ces caractères sont dits « avec háček », quel que soit l’œil du glyphe. L’apostrophe, le cas échéant, n’est pas un caractère supplémentaire mais fait bien partie de la lettre. Il serait maladroit d’écrire dostʼ (ou, pire, dost') au lieu de dosť. Cette erreur est encore plus visible avec le Ľ slovaque : Ľ n’est pas identique à Lʼ ou L' (pour peu que votre navigateur affiche bien un L avec apostrophe adscrite). Le Ľ ne doit pas non plus être confondu avec le Ĺ, l long, qui existe également dans cette langue.
L’apostrophe est aussi utilisée pour marquer la palatalisation dans certaines transcriptions de mots russes. Dans l’alphabet cyrillique, c’est souvent un « signe mou » qui joue ce rôle. Ainsi, on pourra transcrire объя́ть par ob”ât’ « embrasser », où t’ transcrit le т palatalisé (indiqué par ь). Le signe dur (indiquant l’absence de palatalisation et la présence d’un phonème /j/ intercalaire) est rendu par un guillemet fermant courbe. En biélorusse et en ukrainien, l’apostrophe est utilisée dans l’orthographe cyrillique entre une consonne et une voyelle molle pour indiquer la présence d’un phonème /j/ intercalaire au lieu du signe dur du russe.
Dans diverses orthographes et transcriptions ou translittérations, l’apostrophe indique un coup de glotte ([ʔ]) : cheyenne ma’eno [maʔɪno̥], « tortue » (orthographe) ou amharique ስብአ säbʾä [sɜbʔɜ], « peuple » (transcription). L’apostrophe est dans ce cas une lettre à part entière. Il est notable qu’elle est aussi utilisée à cet effet en turc, langue dans laquelle le coup de glotte n’est cependant pas pertinent (et rarement prononcé) : tel’in [telʔin], « dénonciation ». Le turc utilise donc ce signe de deux manières différentes (séparation des morphèmes et coup de glotte).
L’utilisation de l’apostrophe pour marquer le coup de glotte est aussi très répandue dans la transcription des langues sémitiques. Le caractère attendu dans une bonne composition typographique pour ces dernières langues, cependant, est un demi-anneau à droite, ʾ (voir plus haut). À l’inverse des conventions sémitiques, c’est une apostrophe culbutée, dite okina, qui note le coup de glotte propre à beaucoup de langues polynésiennes.
En alphabet phonétique international ainsi que dans l’orthographe latine de certaines langues d’Afrique, la lettre apostrophe placée après une consonne sourde indique qu’il s’agit d’une éjective. Dans certaines langues d’Afrique (mais pas en API dans les cas les plus courants, où l’on utilise des lettres à crosse : /ɓ, ɗ/), elle peut aussi précéder une consonne sonore pour en indiquer le caractère injectif ; inversement, la graphie consonne sourde + lettre apostrophe est assez rare dans les orthographes africaines, des graphies avec un caractère à crosse étant préférées (ƙ, ƭ). Il faut donc là considérer la lettre apostrophe comme une consonne (notant en dernière analyse un coup de glotte) faisant partie d’un digramme.
Ainsi, en API [pʼ] note une éjective bilabiale et on trouve dans les orthographes de quelques langues d’Afrique les combinaisons suivantes (le nom du pays indiqué entre parenthèses n’est pas tant celui où la langue est parlée — certaines étant étendues sur plusieurs nations — que celle où l’orthographe indiquée est suivie) :
Remarque : le symbole de glottalisation simple, [ˀ], n’est pas non plus une apostrophe.
Dans certains cas, l’apostrophe ne joue qu’un rôle diacritique sans lien avec une éventuelle glottalisation : ng’ en souahéli (Kenya) note /ŋ/ tandis que ng note ŋg. Seul ng’ est un digramme, ng étant une suite de consonnes.
On remarque que, dans ces deux derniers emplois, coup de glotte et glottalisation, l’utilisation de l’apostrophe est graphiquement liée (une consonne éjective pouvant être vue comme une consonne suivie d’un coup de glotte ou précédée d’un coup de glotte quand c’est une injective). Les graphies sont, dans les orthographes africaines, parfois plus analytiques qu’en API (k’ = k + ’ = /k/ + /ʔ/ = /k’/ et inversement ’b = ’ + b = /ʔ/ + /b/ = /ɓ/).
Dans la transcription traditionnelle de l’arménien, c’est le demi-anneau gauche qui note l’aspiration d’une consonne, souvent remplacé pour des raisons de commodité typographique par une apostrophe culbutée courbe, symbole qui s’utilise exclusivement pour la même fonction dans la transcription des langues chinoises. Ainsi, les digrammes kʿ ou k‘ se liront [kʰ].
Dans la transcription de certaines langues tonales africaines (comme l’attié, le bakwé, le bété, le dan, le godié, le grebo, le karaboro (en), le kouya, le kroumen plapo, le kroumen tépo, le muan, le nyabwa, le wan, le wè méridional, le wobé, ou le yaouré), l’apostrophe est utilisée comme diacritique pour indiquer un ton spécifique. Le caractère Unicode ʼ (U+02BC lettre modificative apostrophe) est préféré aux autres apostrophes ' (U+0027) ou ’ (U+2019).
En attié, grebo, nyabwa, wobé et yaouré, la double apostrophe ˮ (U+02EE lettre modificative double apostrophe) est utilisée pour indiquer le ton haut et le différencier du ton mi-haut, indiqué avec la simple apostrophe.
L’apostrophe droite est souvent utilisée pour représenter le signe mathématique prime, le symbole des mesures en pieds (en concurrence avec ft) et des minutes d’arc : A' (ou A′ idéalement) se lit donc « A prime » et 12' (ou 12′ idéalement) vaut « 12 pieds » ou « 12 minutes d’arc » (″ signifie alors respectivement « pouces » ou « secondes d’arc »). Il convient cependant de ne pas l’utiliser pour les minutes temporelles (dont l’abréviation est min). Unicode prévoit cependant un caractère distinct (voir plus bas dans le tableau : #Codage du caractère apostrophe).
Certains logiciels de calcul scientifiques savent interpréter l’apostrophe droite comme un prime. Ainsi Mathematica (mais pas Maple) lit f' comme la dérivée de la fonction f (cela ne fonctionne que si f est une fonction d’une seule variable).
nom | glyphe | Unicode | Version Unicode | Windows-1252 | MacRoman | entité HTML | Anglais |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Apostrophe dactylographique (ou apostrophe droite) |
Oo'Oo | U+0027 = 39 | Unicode 1.1.0 | 0x27 = 39 | 0x27 = 39 | ' | apostrophe |
Guillemet-apostrophe |
Oo’Oo | U+2019 = 8217 | Unicode 1.1.0 | 0x92 = 146 | 0xD5 = 213 | ’ | right single quotation mark |
Lettre modificative apostrophe |
OoʼOo | U+02BC = 700 | Unicode 1.1.0 | ||||
Lettre modificative virgule culbutée |
OoʻOo | U+02BB = 699 | Unicode 1.1.0 | ||||
Lettre modificative virgule réfléchie |
OoʽOo | U+02BD = 701 | Unicode 1.1.0 | ||||
Lettre modificative demi-anneau à droite |
OoʾOo | U+02BE = 702 | Unicode 1.1.0 | ||||
Lettre modificative demi-anneau à gauche |
OoʿOo | U+02BF = 703 | Unicode 1.1.0 | ||||
Lettre modificative ligne verticale |
OoˈOo | U+02C8 = 712 | Unicode 1.1.0 | ||||
Diacritique virgule en chef |
Oo◌̓Oo | U+0313 = 787 | Unicode 1.1.0 | ||||
Diacritique virgule en chef à droite |
Oo◌̕Oo | U+0315 = 789 | Unicode 1.1.0 | ||||
Apostrophe arménienne |
Oo՚Oo | U+055A = 1370 | Unicode 1.1.0 | ||||
Guillemet-apostrophe culbuté |
Oo‘Oo | U+2018 = 8216 | Unicode 1.1.0 | 0x91 = 145 | 0xD4 = 212 | ‘ | left single quotation mark |
Guillemet-virgule inférieur |
Oo‚Oo | U+201A = 8220 | Unicode 1.1.0 | 0x82 = 130 | 0xE2 = 226 | ‚ | single low quotation mark |
Guillemet-virgule supérieur culbuté |
Oo‛Oo | U+201B = 8221 | Unicode 1.1.0 | ||||
Virgule |
Oo,Oo | U+002C = 44 | Unicode 1.1.0 | 0x2C = 44 | 0x2C = 44 | ||
Accent grave (avec chasse) |
Oo`Oo | U+0060 = 96 | Unicode 1.1.0 | 0x60 = 96 | 0x60 = 96 | ||
Accent aigu (avec chasse) |
Oo´Oo | U+00B4 = 180 | Unicode 1.1.0 | 0xB4 = 180 | 0xAB = 171 | ´ | acute accent |
Prime | Oo′Oo | U+2032 = 8242 | Unicode 1.1.0 | ′ | prime | ||
Lettre modificative prime | OoʹOo | U+02B9 = 697 | Unicode 1.1.0 | ||||
Prime réféchi | Oo‵Oo | U+2035 = 8245 | Unicode 1.1.0 | ||||
Letter latin majuscule saltillo |
OoꞋOo | U+A78B = 42891 | Unicode 5.1.0 | ||||
Letter latin minuscule saltillo |
OoꞌOo | U+A78C = 42892 | Unicode 5.1.0 |
Note : Les codes Unicode sont identiques aux codes ASCII jusqu’à 127, et identiques aux codes ISO/CEI 8859-1 jusqu’à 255.
Unicode recommande l’utilisation du guillemet-apostrophe (U+2019) pour représenter l’apostrophe[8],[9].
Le caractère apostrophe ‹ ' › U+0027, codé dans le standard ASCII comme apostrophe, guillemet anglais fermant, accent aigu, et repris comme tel dans Unicode est ambigu. Des caractères supplémentaires ont été codés pour lever certaines ambiguïtés car celui-ci peut être courbe, droit ou oblique. Il est principalement utilisé pour représenter l’apostrophe mais il peut être utilisé pour représenter plusieurs signes ou lettres lorsque ceux-ci ne sont pas disponibles :
En raison de leur contemporanéité relative, les apostrophes ASCII sont utilisées dans de nombreux langages informatiques pour délimiter les chaînes de caractères.
Dans certains langages, les apostrophes et les guillemets sont équivalents. Ainsi, on peut entourer sans ambiguïté de guillemets une chaîne contenant des apostrophes, et inversement, sans devoir utiliser un caractère d’échappement. C’est par exemple le cas des langages respectant la syntaxe XML, comme XHTML :
<img src='cui cui.jpeg' alt="l'oiseau" />
Certains langages font la distinction entre un simple caractère et une chaîne de caractères. Dans ce cas, les simples caractères sont entourés d’apostrophes et les chaînes de guillemets. Exemple en langage C qui affiche « ABCD » :
putchar('A');
puts("BCD");
Des langages de script utilisent les apostrophes pour entourer les chaînes, les guillemets pour entourer les chaînes qui subissent une interpolation des variables, et l’accent grave pour entourer les chaînes qui sont remplacées par la sortie de la commande informatique qu’elles contiennent. Par exemple, le script shell Unix suivant :
A=`date` # A vaut le résultat de la commande date
echo 'la date : $A'
echo "la date : $A"
affiche :
la date : $A la date : ven déc 31 19:39:43 CET 2004
Les apostrophes sont utilisées pour marquer l’emphase typographique dans la syntaxe wiki du logiciel MediaWiki. Ainsi, entourer un mot de deux apostrophes le met en italique, de trois le fait représenter en gras : ''italique''
→ italique, '''gras'''
→ gras.
Types de guillemets | Langages |
---|---|
apostrophes et guillemets équivalents | SGML, XML, JavaScript |
apostrophes pour les caractères, guillemets pour les chaînes | C, C++, OCaml, Java |
apostrophes pour les chaînes, guillemets pour interpoler les variables, accent grave pour les commandes | Shell Unix, Perl, PHP |
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