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médecin, physicien, journaliste et homme politique français De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Jean-Paul Marat, né le à Boudry (Principauté de Neuchâtel) et mort le à Paris, est un médecin, physicien, journaliste et homme politique français. Usurpateur de noblesse avant la chute du régime monarchique, il devient député montagnard à la Convention à l’époque de la Révolution. Il joue un rôle de premier plan dans les premières années de la Révolution, grâce à son journal, L'Ami du peuple. Fréquemment accusé d'inciter à la violence, il est l'un des principaux instigateurs des Massacres de Septembre.
Jean-Paul Marat | |
Joseph Boze, Portrait de Marat (1793), Paris, musée Carnavalet. | |
Fonctions | |
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Député de la Seine | |
– (10 mois et 4 jours) |
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Législature | Assemblée nationale législative Convention nationale |
Groupe politique | Montagnard |
Biographie | |
Nom de naissance | Jean-Paul Marat |
Surnom | « L'Ami du peuple » |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Boudry, Principauté de Neuchâtel |
Date de décès | (à 50 ans) |
Lieu de décès | Paris, France |
Nature du décès | assassiné dans sa baignoire |
Nationalité | Français et Neuchâtelois |
Profession | Journaliste, médecin, physicien |
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Son assassinat par Charlotte Corday permet aux hébertistes et aux robespierristes de faire de lui un martyr de la Révolution, d'installer pendant quelques mois ses restes au Panthéon et de justifier la Terreur.
Marat naît à Boudry, dans la Principauté de Neuchâtel (dont le territoire correspond à celui de l'actuel canton de Neuchâtel en Suisse) ; il est le fils de Jean-Baptiste Marat, un prêtre mercédaire défroqué d'origine sarde[1] né à Cagliari en 1704 et dessinateur en indiennes converti au calvinisme, et de la Genevoise Louise Cabrol[2] dont la famille calviniste était originaire du Rouergue ; la famille Mara (francisé Marat), originaire d'Italie[3], a donné plusieurs personnalités remarquables comme son frère cadet David (1756-1821) qui fut professeur de littérature française au lycée impérial de Tsarskoïe Selo.
En 1759, après ses études au collège, le futur conventionnel quitte Neuchâtel et sa famille, et devient pendant deux ans le précepteur des enfants de Pierre-Paul Nairac, grand armateur négrier bordelais. Marqué par la thématique de l'esclavage, il produira plus tard, en 1785, pour l'Académie de Bordeaux, une dissertation à l'éloge des idées anti-esclavagistes du philosophe Montesquieu[4].
Après un séjour à Paris de 1762 à 1765, où il complète ses études et acquiert en autodidacte[réf. nécessaire] une formation de médecin, il se fixe à Londres, puis à Newcastle en 1770, où il exerce comme médecin et peut-être comme vétérinaire[5]. Entre 1770 et 1772, il écrit Les Aventures du jeune comte Potowski, un roman épistolaire dans le goût du temps, qui demeure inédit. En 1772, il publie anonymement An Essay on the Human Soul, puis, après son retour dans la capitale britannique, en 1773, un second écrit philosophique, A Philosophical Essay on Man, qui est réédité en 1775[3]. Disciple de Rousseau, il attaque plusieurs fois Helvétius, traité d'« esprit faux et superficiel », dans cet ouvrage, mais aussi Voltaire, qu'il qualifie d'« inconséquent » et qui lui répond par le persiflage dans un petit article[6],[7] paru dans le Journal de politique et de littérature le [8].
En , Marat fait paraître à Londres les Chains of Slavery, qui s'inscrit dans le contexte de la campagne électorale qui voit l'élection de John Wilkes comme alderman, puis lord-maire de Londres[3].
Pendant son séjour en Angleterre, il est reçu franc-maçon dans une loge londonienne se réunissant en la taverne King’s Head, située Gerrard Street à Soho, sans doute l'Espérance, une loge francophone qui initiera Cagliostro le 12 avril 1777[9]. Son élévation au grade de maître est datée du selon son diplôme maçonnique retrouvé et vendu en 1906 à l’Hôtel Drouot. Si des traces de visites dans une loge hollandaise sont documentées, il ne semble pas fréquenter de loge française[10].
Après un court séjour dans les Provinces-Unies (1774-1775)[2] et l'obtention de son diplôme de médecin à l'université de St Andrews (Écosse) le , il s'installe à Paris, où il publie en 1776 une édition française de son traité De l'homme[2]. Le comte d’Artois lui octroie le , le brevet de médecin de ses gardes du corps[11]. Il ouvre un cabinet d'expériences où il fait des recherches en physique expérimentale, en particulier sur la nature du feu, la lumière et l'électricité médicale. En , ce dernier thème lui vaut d'être couronné par l'Académie de Rouen[2].
En 1779, Benjamin Franklin est invité par son ami Jean-Baptiste Le Roy à assister chez le marquis Maximilien de Châteauneuf de L'Aubespine[n 1], dans son grand hôtel de la rue de Bourgogne, aux expériences de Marat, qui veut faire ses preuves aussi bien en physique qu'en médecine[12]. En 1778, celui-ci a présenté un mémoire sur la nature du feu, et Jean-Baptiste Le Roy qui a été nommé membre de la commission chargée d'enquêter sur le bien-fondé des théories de Marat, a réussi à y attirer Franklin :
« Ayant exposé sa tête chauve au foyer du microscope solaire (instrument inventé par Marat), nous l’aperçûmes ceinte de vapeurs ondulantes qui se terminaient en pointes torses ; elles représentaient l'espèce de flamme que les peintres ont fait l'attribut du génie[13]. »
Ces recherches lui valent des critiques défavorables de l'Académie des sciences de Paris[14].
En 1780, dans son Plan de législation criminelle, il fustige les inégalités et soutient que le droit à l'existence est supérieur au droit de propriété :
« Le droit de posséder découle de celui de vivre : ainsi, tout ce qui est indispensable à notre existence est à nous, et rien de superflu ne saurait nous appartenir légitimement tandis que d’autres manquent du nécessaire. Voilà le fondement légitime de toute propriété et dans l’état de société et dans l’état de nature. »
Tombé malade en 1782, outre ses démêlés scientifiques, il connaît des revers de fortune, avant de perdre en 1784, sa charge de médecin auprès du comte d'Artois[2],[15],[16]. Dans les années 1780, Marat continue de soigner Claire de Choiseul, marquise de l'Aubépine de Châteauneuf (1751-1794) qui le soutient financièrement et avec laquelle il aurait eu une liaison intéressée, si l'on en croit les éditeurs de Jacques-Pierre Brissot[17].
Un autre contemporain qui connaissait particulièrement bien Marat et sa famille, l'ex-abbé Jean-Louis Giraud-Soulavie, un républicain qui est envoyé comme ambassadeur « résident » à Genève en 1793 et 1794, confirme[18] ces informations plus tard corroborées par Barère de Vieuzac :
« Marat sorti de Genève en 1782 et fanatisé à Londres où il retourne en 1790 car poursuivi par La Fayette, revint en 1791 se mettre à la tête des cordeliers, principaux agitateurs de la populace. Ses deux collègues sont Gasc[19], associé de d'Yvernois[20] dans l'administration des subsides anglais, et Jannot-Lançon. C'est près de ces aventuriers que je fus envoyé par la République française et c'est contre eux que j'eus à lutter, surtout quand je leur prouvai que, sous le voile trompeur de leur démocratie, ils étaient le canal de la distribution dans Lyon des sommes envoyées par la cour de Londres aux chefs patriotes et aux chefs royalistes qui dévastèrent en 1793 ce point central de notre commerce[n 2],[21]. »
Marat est un temps pressenti, sans succès, pour fonder une académie à Madrid par le ministre Floridablanca[2], en 1788. Souffrant de graves crises inflammatoires et croyant ses jours en danger, il rédige même son testament l'été de cette année, qu’il confie à l’horloger suisse Abraham Breguet[22].
Lorsqu'il était médecin de l'écurie et des pages du comte d'Artois, frère du roi, Marat essaya vainement de faire reconnaître sa (fausse[réf. nécessaire]) noblesse espagnole et enregistrer un blason[23] que l'on retrouve sur sa correspondance entre 1778 et 1789[24].
« Au 1er de (émail inconnu) à un demi-aigle de (émail inconnu) au vol abaissé mouvant du parti ; au 2e tranché en chef de (émail inconnu), à la bande ou demi-chevron de (émail inconnu), et en pointe de pourpre. »
Le , le comité de Constitution présentait à l’Assemblée, par la voix du député Mounier, un premier projet. À ce moment précis, Marat publie, début août, une feuille in-8° de 8 pages Le Moniteur patriote[26], entièrement consacrée à la critique du projet de Constitution, critique nourrie, entre autres par son expérience du modèle constitutionnel anglais. Il s'adresse également en ce sens, à la fin du mois d'août, à l'Assemblée nationale dans une lettre intitulée « Tableau des vices de la Constitution Anglaise, présenté en aux États-Généraux comme une série d’écueils à éviter dans le Gouvernement qu’ils voulaient donner à la France ».
Le , Marat publie le premier numéro du Publiciste parisien, journal politique, libre et impartial journal quotidien connu sous le titre L’Ami du peuple. Il comporte normalement 8 pages in-8°, parfois 10 ou 12, quelquefois 16. De septembre 1789 à septembre 1792, Marat fait ainsi paraître 685 numéros. Sous la Constituante, il défend la cause des citoyens passifs, des victimes du marc d'argent. En effet, pour être « citoyen actif », il fallait payer un minimum d'impôt annuel correspondant à trois journées de travail et pour être éligible, il fallait payer une contribution annuelle directe d’au moins un marc d'argent (soit environ 50 livres)[27]. De plus, les impositions directes de Paris étaient calculées sur le prix du loyer selon la loi du . Pour pouvoir être éligible à l'Assemblée nationale, il fallait donc avoir non seulement un loyer, mais un loyer d'au moins 750 livres pour payer les 50 livres d'imposition requises[28]. Le , on trouve dans le journal de Marat une « supplique du citoyen passif » où l'on peut lire : « Qu'aurons-nous gagné à détruire l'aristocratie des nobles, si elle est remplacée par l'aristocratie des riches ? Et si nous devons gémir sous le joug de ces nouveaux parvenus […]. »
Il prend même position sur les questions coloniales, entre et . Imprégné de la pensée de Montesquieu, auquel il a rendu hommage dans un concours pré-révolutionnaire pour l'ironie de son texte De l'esclavage des Nègres[29] en , il défend la cause des gens de couleur libérés, regrette l'amendement Rewbell du qui reconnaît la citoyenneté à certains, mais en discrimine d'autres. Après la révocation totale de leurs droits par Barnave le , il prédit : « À la différence des Parisiens les hommes de couleur ne sont pas des lâches, ils ne se laisseront pas faire. » Ceux-ci se soulèveront en effet peu après et imposeront à l'assemblée législative, avec l'aide de son groupe brissotin, le décret égalitaire du , devenu loi le après la sanction royale. Sur l'esclavage, Marat publie le un plan d'abolition progressive de l'esclavage des Noirs avec indemnisation des planteurs. À l'automne 1791, à l'annonce de l'insurrection d'esclaves à Saint-Domingue, il radicalise sa pensée, prenant fait et cause pour les insurgés, dont il prédit le l'accès à l'indépendance[30]. Juste avant son assassinat, ayant reçu une lettre d'un ami créole, Philippe Rose-Roume, emprisonné après une intrigue de colons blancs, il s'apprête à reparler de la situation à Saint-Domingue dans une lettre à la Convention[31]. Roume sera libéré peu après sur initiative de Chabot[32].
Marat fait deux voyages en Angleterre au temps de la Révolution. Le premier a lieu dans les années 1790, et le second au printemps 1792. Lorsqu'il revient à Paris, Marat s'est détaché du duc d'Orléans, qu'il a vivement défendu sous l'Assemblée constituante, jusqu'en , pour contribuer à développer désormais le mouvement encore embryonnaire de l'exagération révolutionnaire, qui débute de façon spectaculaire avec les massacres de septembre 1792, se poursuit toute l'année 1793 et se termine avec la fin de la Grande Terreur.
Après la journée du 10 août 1792, il incite à la poursuite du mouvement en prônant l’élimination des royalistes emprisonnés. À la différence de ses précédents appels au meurtre, il est cette fois suivi par une partie de la presse, notamment girondine. La publication de l’Ami du peuple cesse au , et son dernier appel au meurtre date du 19 ; il est cependant probable qu’au moins un placard anonyme du soit de sa main[33].
Le , il entre au Comité de surveillance de la Commune de Paris[34]. Dans son journal, il raconte quelque deux jours plus tôt que le[réf. souhaitée] peuple était en grande ébullition[réf. nécessaire] et que les responsables de la journée du 10 août 1792 étaient restés impunis[réf. souhaitée]. Il évoque ceux qui ont assuré la défense du château des Tuileries et la protection de la famille royale. En fait, le tribunal du a déjà commencé à fonctionner et trois serviteurs des Tuileries ont été exécutés, en particulier Arnaud de La Porte, l’intendant de la liste civile et l'écrivain Farmian du Rosoy. Les sectionnaires extrémistes trouvent cependant que ce tribunal acquitte trop facilement, et juge trop lentement. À la fin août, les visites domiciliaires effectuées pour trouver des armes aboutissent à de nombreuses arrestations ; le , les prisons de Paris sont pleines.
Les révolutionnaires se rendent alors aux prisons, et y massacrent du 2 au , d’abord prêtres insermentés, puis gardes suisses et gardes du corps du roi, aristocrates suspectés de complot, enfin de nombreux prisonniers de droit commun (au total, il y a environ 1 500 morts). Dès le , il signe, et probablement rédige, la circulaire du 3 septembre imprimée sur ses presses et envoyée aux départements et municipalités de toute la France, et appelant à la généralisation des massacres[35]. Cette circulaire et ses écrits violents ont fortement contribué à le faire tenir pour le principal responsable des massacres, mais cette vision des choses est abandonnée par les historiens depuis les années 1930 et les ouvrages de Louis Gottschalk[36] et Gérard Walter[37].
Les commissions d'enquête parlementaire réclamées par les girondins tardèrent à se mettre en place.
Le durcissement de la Révolution débouche aussi sur des décisions pour réglementer la spéculation. Au mois de septembre 1792, les élections de la Convention nationale qui doit succéder à la Législative ont lieu, à deux niveaux, selon les prescriptions de la Constitution de 1791.
Le , Marat est choisi par sa section pour être député de Paris à la Convention. Marat, en septembre 1792 dans le Conseil Général de la Commune, estime par approximation à 40 000 le nombre de têtes qu'il faut abattre. Six semaines plus tard, l'abcès social ayant prodigieusement grossi, le chiffre enfle à proportion : c'est 270 000 têtes qu'il demande, toujours par humanité pour « assurer la tranquillité publique », à condition d'être chargé lui-même de cette opération et de cette opération seulement, comme justicier sommaire et temporaire[38].
Paradoxalement, il se montre très légaliste sur le sort à infliger à Louis XVI. Au contraire de Robespierre, de Saint-Just, de Jeanbon Saint-André, il veut un vrai procès qui permettrait de mettre en lumière les crimes du roi. Il entend aussi expurger les crimes et délits antérieurs à (fuite du roi à Varennes et fusillade du Champ-de-Mars) dans la mesure où ils ont été amnistiés. Seule la journée des Tuileries peut donc être retenue contre Louis XVI comme un crime dûment établi. Il n'en vote pas moins la mort du roi dans les 24 heures et rejette bien sûr l'appel au peuple et le sursis. Peu après, il prend l'offensive contre la faction dite des « hommes d’État », c'est-à-dire les partisans de Brissot qu'il dénonce sans répit. Il s'en prend particulièrement à Lebrun-Tondu qu'il accuse d'entretenir des liens avec des « agents de l'étranger », notamment le banquier Édouard de Wackiers, sa famille et les représentants de la banque internationale[39]. Depuis qu'il a été élu à la présidence des jacobins, le , une circulaire appelant à l'insurrection et au coup d'État est publiée sous sa signature. « La contre-révolution, affirmait-il, est dans la Convention nationale (…) Levons-nous, oui levons-nous tous ! Mettons en état d'arrestation tous les ennemis de notre Révolution et toutes les personnes suspectes. Exterminons sans pitié tous les conspirateurs si nous ne voulons pas être exterminés nous-mêmes (…) Dumouriez marche sur Paris pour rétablir la royauté (…) Aux armes ! »
Le 12 avril, Élie Guadet (député de la Gironde) lit à la tribune un extrait du manifeste. Jean-Baptiste Boyer-Fonfrède (député de la Gironde) demande que Marat soit décrété d'accusation devant le tribunal révolutionnaire. Il est décrété d'arrestation et incarcéré à la prison de l'Abbaye[40].
Le 13 avril, le scrutin sur sa mise en accusation a lieu par appel nominal, le département le Meuse étant tiré au sort pour commencer à voter. Marat est décrété d'accusation devant le tribunal révolutionnaire par 220 voix contre 93, tandis que 373 députés sont absents lors du scrutin, et que 55 se sont abstenus de voter, se sont récusés ou ont demandé un ajournement du scrutin[41]. L'historien Michel Biard estime que cette mise en accusation est possible non parce qu'un grand nombre de députés Montagnards sont alors envoyés en mission, mais parce que bon nombre de des députés de la Montagne s'absentent le jour du scrutin et que « Marat est très loin de faire l’objet d’un soutien unanime au sein d’un groupe politique déjà hétérogène »[42].
Le , l'acte d'accusation contre Marat arrive au ministère de la Justice et celui-ci se constitue prisonnier[43]. Confronté le à ses accusateurs et à ses défenseurs, Marat bénéficie d’un jury qui lui est acquis d'avance. Acquitté le , Marat, couronné de lauriers, est porté en triomphe.
Marat dénonce avec vigueur le coût de la dette publique française induit par l'engouement pour les rentes viagères, sous la direction du ministre des Finances de la fin des années 1770, Jacques Necker.
Sous la Législative, dès la première quinzaine de — et parmi les premiers futurs montagnards engagés dans cette lutte — Marat combattit vigoureusement le bellicisme girondin dans L'Ami du peuple. Le , il publie un plan de guerre défensive[44]. Après cette date, pour des raisons financières, il doit suspendre sa publication jusqu'au début , mais dès lors, plus radicalement que Robespierre[45], il reprend le cap, tenant même un discours défaitiste après le ; la crainte de voir la guerre profiter à La Fayette que les députés girondins ne veulent pas destituer, motive sa décision et l'expose à de nouvelles poursuites judiciaires[46]. En , presque seul il s'abstient dans le vote sur l'annexion de la Savoie à la France ; et en ce qui concerne les territoires occupés par la France, il prêche à l'hiver 1792-1793, la modération à l'égard des forces aristocratiques et du clergé que les brissotins veulent exclure de la vie politique[47]. Tout cela n'était pas contradictoire avec sa plaidoirie pour la guerre à outrance contre les puissances coalisées, dans la mesure où elle était devenue défensive. Juste avant sa mort le , à l'occasion d'un renouvellement, il demande l'éviction de Bertrand Barère du Comité de salut public[48] qui, montagnard non jacobin, est toujours partisan de la guerre d'attaque. Ce sont toutes ces données qui le font apparaître par Thomas Paine et les conventionnels dits « modérés » (mais comme Barère et la Gironde, d'anciens bellicistes) comme l'allié objectif de William Pitt qui se félicite du « soutien » de Marat à « sa politique guerrière » et à son rôle actif dans la première « saignée » — la proscription des girondins — pratiquée au sein de la Convention. Et pour cause : ce sont eux qui à nouveau font déclarer la guerre à l'Angleterre, le (sur rapport de Brissot). Au Parlement britannique, le Premier ministre argue de l'instabilité du gouvernement français. Il est imprudent, prétend-il, de traiter avec un comité « qui est changé et renouvelé tous les quinze jours », et dont les membres, à supposer qu'ils veulent conclure un arrangement, se trouvent dans le cas d'être guillotinés ou pendus avant l'arrangement des ratifications. Le cabinet britannique rejette donc dans l'immédiat toute tentative d'accommodement. « Si nous traitions avec Marat, avant la fin de la négociation, il retomberait dans la lie populaire dont il est sorti et laisserait la place à un scélérat encore plus désespéré que lui[49]. » Pour autant du 31 mai au , Marat demande et obtient une indulgence relative pour la Gironde : Jean-Baptiste Boyer-Fonfrède, François Lanthenas, Jean Dussaulx et Jean-François Ducos sont rayés, sur sa demande, des listes de proscription de la Gironde par la nouvelle convention montagnarde.
Depuis le , Marat ne se présente plus à la Convention. L’évolution de sa maladie l’empêche de paraître en public. D’après le docteur Souberbielle, l’origine du mal était herpétique. Le docteur Cabanès a avancé la probabilité d’une forme grave d’eczéma ou des conséquences d’un diabète[50]. D'autres maladies sont évoquées : dermatite herpétiforme, scabiose, dermite séborrhéique[51]. Les dernières recherches privilégient l'hypothèse de la dermatite séborrhéique[52],[53]. Sa maladie de la peau a commencé à l’aine et s’est ensuite répandue sur tout son corps, causant de terribles démangeaisons et des ulcères douloureux. À partir du , son état s’aggrave et l’oblige à prendre continuellement des bains curatifs au soufre dans sa baignoire sabot en cuivre, ainsi qu'à envelopper sa tête d'un mouchoir trempé de vinaigre pour soulager ses migraines. Mais, de cette baignoire équipée d'une écritoire, il envoie régulièrement des lettres à la Convention qui ne sont jamais discutées[54].
Marie-Anne Charlotte de Corday d’Armont, issue de la noblesse de Caen et descendante en droite ligne de Pierre Corneille, prend connaissance des événements révolutionnaires en rencontrant plusieurs députés girondins qui se sont réfugiés à Caen après leur mise en accusation par la Convention. Bien qu'ouverte aux idées nouvelles, la jeune femme est indignée par les excès de la Révolution. Considérant Marat comme un tyran et le principal instigateur des massacres révolutionnaires, elle décide de l'éliminer.
Le , elle arrive à Paris dans l’intention d’assassiner Marat dans l’assemblée, mais doit revoir ses plans en ayant appris son absence à la Convention[56]. Le , Marat reçoit la visite de députés jacobins, dont le peintre Jacques-Louis David, qui sont les derniers à le voir vivant. Le , Charlotte Corday se présente une première fois au domicile du tribun, au 30 rue des Cordeliers, en fin de matinée mais Simone Évrard, sa compagne, refuse de la laisser entrer. Elle essaye une deuxième fois d’entrer en contact sans succès, mais elle fait communiquer une lettre qu’elle a écrite donnant des informations sur un prétendu complot[56]. À la troisième tentative, c’est Marat lui-même qui demande qu’on la laisse entrer. Après un entretien qui, selon Simone Évrard, dure environ un quart d’heure, Charlotte Corday sort un couteau et frappe Marat à la poitrine, le trajet de la lame qui traverse le poumon droit, l’aorte et le cœur, entraîne sa mort dans sa baignoire[57].
Charlotte Corday est arrêtée sur les lieux du meurtre et, après son jugement par le Tribunal révolutionnaire, guillotinée le .
Le peintre et conventionnel Jacques-Louis David est chargé de préparer les funérailles de Marat qui, surtout uni à Lepeletier de Saint-Fargeau, est présenté comme martyr de la Liberté, avec toute la phraséologie chère à l’époque. Cet épisode de communication intense ne dure que quelques mois, mais a un fort impact, y compris historiographique. Le , David prépare l’exposition du corps aux Cordeliers, mais l’état de décomposition, dû à une chaleur intense, ne permet pas de montrer Marat au public, le peintre décide de le recouvrir entièrement d’un drap, sauf la plaie causée par l’assassinat[58]. Grand organisateur des cérémonies, David prévoit pour le mardi un impressionnant cortège qui part vers 18 heures. Le convoi part de la rue des Cordeliers, passe par la rue de Thionville (actuelle rue Dauphine), le pont-Neuf, le quai de la Ferraille et remonte jusqu’au Théâtre-Français, pour se rendre aux Cordeliers, où a lieu l’inhumation. La réalisation du tombeau est confiée à son ami le sculpteur François Martin[59]. Un peuple immense défile toute la nuit, à la lueur des flambeaux. Le Club des cordeliers a demandé à déposer dans le lieu de ses séances le « cœur » de Marat, il rejoint celui de Buirette de Verrières qui y est déjà exposé. Dans les semaines qui suivent, des centaines d’hommages seront faits à l’Ami du peuple à travers la France et des statues des « martyrs » sont inaugurées un peu partout[réf. souhaitée]. Plusieurs villes de France, comme Saint-Nazaire-sur-Charente[60] ou Le Havre[61] se baptisent « Marat ». C'est l’affaire de quelques mois. Aujourd’hui encore, quelques rues (Bordeaux, Ivry-sur-Seine, Décines-Charpieu) portent son nom.
Le , la rue des Cordeliers, où a été assassiné Marat à son domicile, est baptisée rue Marat, en même temps que l'on renomme la rue de l'Observance, place de l’Ami du Peuple[62]. Marat est « panthéonisé » en et entre au Panthéon le [63], mais dès le [64], un nouveau décret le dépanthéonise en précisant que l’image d’aucun citoyen ne figurera plus dans l’Assemblée ou en un lieu public quelconque que dix ans après sa mort. Le Moniteur du 16 pluviôse an III (), relate comment, deux jours plus tôt, « des enfants ont promené » un buste de Marat « en l’accablant de reproches [et] l’ont ensuite jeté dans l’égout, en lui criant : « Marat, voilà ton Panthéon ! »[65] » Le , le monument élevé a sa mémoire sur la place du Carrousel est détruit. Puis un vaste mouvement d'autodafés et de bris de bustes gagne les départements[66].
Les restes du cadavre sont inhumés dans le cimetière de Sainte-Geneviève (disparu aujourd'hui, recouvert en partie par les immeubles de la bibliothèque Sainte-Geneviève), près de l'église Saint-Étienne-du-Mont. Le [67], son tableau est rendu à David qui le conserve jusqu’en 1820, date à laquelle il est confié à Antoine-Jean Gros qui le cache à Paris jusqu'à la mort du peintre[68].
En hommage à Marat, plusieurs communes ont été rebaptisées Marathon sous la Terreur : Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs...
En mars 1921, le cuirassé russe Petropavlovsk est renommé Marat jusqu'à son démantèlement en 1952[69]. En 1989, à l'occasion du bicentenaire de la Révolution, un téléfilm intitulé Les Jupons de la Révolution : Marat est consacré à la vie du révolutionnaire. Le rôle de Marat adulte étant tenu par l'acteur Richard Bohringer.
En 2012, une sculpture en bronze de Jean-Paul Marat est réalisée par la fonderie Barthélemy Art, d'après le second modèle en plâtre de Jean Baffier de 1883, afin d'être installée sur le parvis du musée de la Révolution française à Vizille[70]. Une première version en bronze de 1883 avait été achetée par la ville de Paris et installée dans différents parc publics, le parc Montsouris puis les jardins du musée Carnavalet et enfin le parc des Buttes-Chaumont avant d'être fondue sous le régime de Vichy, dans le cadre de la mobilisation des métaux non ferreux. Sur l'énorme bloc de pierre supportant la sculpture, une citation extraite du journal de Marat, L'Ami du peuple, est gravée : « Tu te laisseras donc toujours duper, peuple babillard et stupide. Tu ne comprendras jamais qu'il faut te défier de ceux qui te flattent ».
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