Artemisia est devenue si habile que je n'ai aucun mal à affirmer qu'elle est aujourd'hui sans égal. En effet, elle a produit des œuvres qui démontrent un degré de compréhension que même les grands maîtres de la profession n'ont peut-être pas atteint.
«
Artemisia Gentileschi, la première grande peintre de l'Histoire
», Alessandra Pagano (propos rapportés par),
National Geographic, 1
er juillet 2024 (
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J'ai la chance d'avoir la chance d'avoir d'elle 4 feuillets que la dame avait faits à Venise et vous pouvez voir un bouton de rose, un bouquet de violettes, une feuille de vigne et des petits animaux si minutieux et si diligents que la nature elle-même n'aurait pu faire mieux.
- (it) e fu fortuna che ne hebbi da quella pezzi n. 4 in carta pécora che feci insoazzare in Venetia e si vede un boccolo di rosa, un mazzetto di viole, gialle un pampino di vite e certi animaletti cosi minuti e diligenti che piü non puó fare la natura stess.
- Lettre du poète et collectionneur d'art vénitien Girolamo Gualdo écrite en 1649
«
Artemisia Gentileschi in Venice
», Patrizia Costa,
Notes in the History of Art, nº
Vol. 19, No. 3,
printemps 2000, p.
33 (
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En peignant le visage des uns et des autres
Je me suis acquise dans le monde une gloire infinie
Pour ciseler des cornes à mon mari
J'ai lâché le pinceau et pris le ciseau
- (it)
Co'l dipinger la faccia a questo, e a quello
Nel mundo m'acquistai merito infinito
Nell intagliar la corna al mio marito
Lasciai penello e presi lo scalpello
Il Cimiterio, Epitafi Giocosi, Giovan Francesco Loredan et Pietro Michiele, éd. (2ème édition), 1653, p.
60
(
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A vingt-huit ans, elle avait conquis une position sociale. Mais surtout une existence juridique, des droits et un pouvoir légal.[...] Libre de toute tutelle, maître de son
destin, Artemisia ne relevait que d'elle même. Dans les registres de recensement, elle figurait désormais comme
padrona di casa. Artemisa Gentileschi, peintre.
En choisissant
Naples plutôt que
Londres, Artemisia avait préféré l'
autonomie à la dépendance. [...] Quelle place pouvait occuper une femme de trente-sept ans - l'âge de la
maturité au XVII
e siècle - dans cet univers disparate, plein d'excès et de
violences ? Une
femme sans
fortune personnelle
? Sans mari, sans
père, sans
frère - sans homme- pour la défendre, elle et ses filles
? Une femme, une étrangère, sans aucun lien familial qui la rattachât à Naples ou à
Madrid ?
La réputation de galanterie d'Artemisia Gentileschi la suivra jusqu'au tombeau. Quelques vers en guise d'épitaphe publiés en 1653 par deux de ses amis vénitiens, le littérateur
Gian Francesco Loredano et le collectionneur Pietro Michiele, lui assureront une gloire posthume de grande séductrice et de femme lascive.
Bon nombre de tableaux de son immense production semblent aujourd'hui perdus. Ces disparitions pourraient s'expliquer par le fait que les historiens d'art hésitent à attribuer à Artemisia Gentileschi de œuvres qui ne représentent ni des femmes demi-nues, ni des héroïnes bibliques, ni des sujets violents, tous les thèmes auxquels son pinceau nous a habitués.
De chair et de sang, ses héroïnes restent tellement vivantes qu'elles traversent les siècles avec une humanité qui continue de vibrer. Mais encore une fois
: Artemisia ne cantonne pas son pinceau à des sujets violents. Elle peut tout faire et le prouve. La constante imagination dont elle fait preuve dans chacune de ses compositions, sa façon de réinventer les thèmes qu'on lui impose, sa maîtrise de la technique et la puissance dramatique de ses personnages rendent sa manière unique et sa vision immédiatement reconnaissable. L'artiste qui se décrira un jour par ces mots
: «
Vous trouverez en moi l'âme de César dans un corps de femme », se connaît.
«
Je viens d’un monde où le poignard, le poison et le pinceau se rencontrent dans les mêmes mains
»,
Alexandra Lapierre, dans
Artemisia, 1593-1654 : pouvoir, gloire et passions d'une femme peintre, Roberto Contini et Francesco Solinas, éd. Gallimard/Musée Maillol, 2012
(ISBN 978-2-07-013680-3), p.
25
L'engouement dont elle jouit aujourd'hui est tel qu'en juillet, une Allégorie de la sculpture, de facture moyenne, a caracolé à 1,8 million de livres sterling (2,1 millions d’euros) sur une estimation de 300 000 livres.
«
Tableaux anciens
: place aux artistes femmes.
», Roxana Azimi,
Le Monde, 2023-12-09 (
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À l’époque, la
souffrance des victimes de viol passe au second plan. Ce qui importe aux yeux de la
justice, c’est le déshonneur infligé à la
famille – ici par la perte de la
virginité et le rapport sexuel hors mariage, non rattrapé par une union devant
Dieu…
- Au sujet des chefs d'accusation de stupro violente et de promesse de mariage non tenue retenus lors du procès du viol de l'artiste.
«
Le terrible procès de la peintre Artemisia Gentileschi contre son violeur
: le martyre d’une icône du féminisme.
», Joséphine Bindé,
BeauxArts, 7 août 2024 (
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