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points de vue philosophiques sur le suicide De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le point de vue philosophique sur le suicide dépend du courant, de l'époque et de l'auteur considéré. Cependant, pour les auteurs croyants, il rejoint souvent celui de leur religion.
« Le bonheur est chose absolument impossible, car le corps est accablé de nombreuses souffrances, l’âme qui participe à ces souffrances du corps en est aussi troublée, enfin la Fortune empêche la réalisation de bon nombre de nos espoirs, si bien que pour ces raisons le bonheur n’a pas d’existence réelle. »
Montaigne, dans Les Essais, déclare « Qui apprendrait aux hommes à mourir, leur apprendrait à vivre » car elle « ne vous concerne ni mort, ni vivant : vivant parce que vous existez, mort parce que vous n'existez plus »[3]. Montaigne aborde la question du suicide pour le condamner comme un acte de désespoir.
René Descartes dit, à son tour qu'« il est vrai que la connaissance de l'immortalité de l'âme et des félicités dont elle sera capable étant hors de cette vie pourrait donner sujet d'en sortir à ceux qui s'y ennuient, s'ils étaient assurés qu'ils jouiraient, par après, de toutes ces félicités ; mais aucune raison ne les en assure, et il n'y a que la fausse philosophie d'Hégésias (…) qui tâche à persuader que cette vie est mauvaise ; la vraie enseigne, tout au contraire, que, même parmi les plus tristes accidents et les plus pressantes douleurs, on y peut toujours être content, pourvu qu'on sache user de la raison. »[4]
Baruch Spinoza, contre les stoïciens, ne voit pas le suicide comme l’expression de la liberté, mais comme la conséquence d’un état de servitude de l’homme soumis à des causes externes qui s’opposent au conatus ou effort pour persévérer dans l’être. Un « homme libre ne pense à rien moins qu’à la mort ». Pour reprendre une expression employée par Gilles Deleuze, la mort venant toujours du dehors et jamais du dedans, le concept d’une pulsion de mort est pour Spinoza proprement « grotesque » car selon lui : « nulle chose ne peut être détruite sinon par une cause extérieure. » (Spinoza, 1988 : 215) « C’est par expérience vague que je sais que je mourrai : en effet, je l’affirme parce que j’ai vu d’autres, semblables à moi, avoir trouvé la mort, bien que tous n’aient pas vécu le même espace de temps et ne l’aient pas trouvée à la suite de la même maladie. » (Spinoza, 2002 : 49) L’homme n’étant pas dans la nature « comme un empire dans un empire » (Spinoza, 1988 : 199),
David Hume, « Que le suicide puisse être souvent conforme à l'intérêt et à notre devoir envers nous-même, nul ne peut le contester, qui reconnait que l'âge, la maladie ou l'infortune peuvent faire de la vie un fardeau, et la rendre pire que l'annihilation. Je crois que jamais aucun homme ne se défit d'une vie qui valait la peine d'être conservée ».
Denis Diderot, (1713-1784), encyclopédiste français et auteur présumé de l’article « Suicide » dans l’Encyclopédie, dit que la Bible ne condamne pas les suicides de Samson et d’Éléazar, que les martyres de sainte Pélagie et de sainte Apollonia sont de « vrais suicides », que certains pénitents accélèrent leur mort « à force d’austérités ». Il fait l’analyse du Biathanatos de John Donne qui « ne sera certainement pas approuvé par les théologiens orthodoxes » car « la première obligation où l'homme se trouve par rapport à soi-même, c'est de se conserver dans un état de félicité, et de se perfectionner de plus en plus ». Dans son Essai sur les règnes de Claude et de Néron, il étudie la pensée de Sénèque en faveur du suicide de Caton d'Utique sous le coup de la nécessité : « la noble résolution de Pauline » qui a voulu suivre son mari dans la mort. D’après lui, les Romains ne se donnaient pas la mort par dégoût ou par ennui; c’est qu’ils « craignaient la mort moins que nous et qu’ils faisaient moins de cas de la vie ». Cependant, il trouve « qu’il est rare qu’on ne fasse du mal qu’à soi ». Dans La Marquise de Claye et de Saint-Alban, il s’oppose au suicide dit philosophique, provenant du taedium vitae : « Le dégoût de la vie est faux et n’existe que dans une tête dérangée ou mal organisée. Encore n’est-il que momentané. Si les opérations du gouvernement précipitent dans une misère subite un grand nombre de sujets, attendons-nous à des suicides. On se défera fréquemment de la vie partout où l’abus des jouissances conduit à l’ennui, partout où le luxe et les mauvaises mœurs nationales rendent le travail plus effrayant que la mort, partout où des superstitions lugubres et un climat triste concourront à produire et à entretenir la mélancolie; partout où des opinions moitié philosophiques, moitié théologiques, inspireront un égal mépris de la mort. »[5] (…) « On me dégoûta de presque tous les moyens de m’ôter la vie, parce qu’il me semble que loin de s’y opposer, on me les présentait. Nous ne voulons pas apparemment qu’on nous pousse hors de ce monde, et peut-être n’y serais-je plus si elles avaient fait semblant de m’y retenir. Quand on s’ôte la vie peut-être cherche-t-on à désespérer les autres et la garde-t-on, quand on croit les satisfaire; ce sont des mouvements qui se passent bien subtilement en nous. En vérité je ne vivais que parce qu’elles souhaitaient ma mort »[6].
Selon Emmanuel Kant, l'immoralité du suicide perpétue son idée de morale universelle et d'impératif catégorique : « De même, si la maxime que j'adopte en vue de la libre disposition de ma vie est déterminée, aussitôt que je me demande comment elle devrait être pour qu'une nature, dont elle serait la loi, pût subsister. Il est clair que personne ne pourrait, dans une telle nature, mettre arbitrairement fin à sa vie car un tel arrangement ne serait pas un ordre de choses durable[7]. »
Friedrich Hegel exprime ainsi son refus du suicide fondé sur le statut juridique de la personne et non sur une position morale, naturelle ou religieuse. Notre corps n’étant pas un terme-extérieur, nous ne pouvons en disposer comme d’une Chose qui est séparable de nous. Cependant l’homme « peut » se suicider et ne possède son corps et sa vie que « dans la mesure où c’est sa volonté ». En d’autres termes, il peut se dessaisir de son corps en retirant un des éléments de la possession qu’est l’animus. La question du suicide est donc intimement liée à la volonté qui, dans la conception hégélienne, peut être considérée comme libre, ainsi qu’aux conséquences de son raisonnement juridique[8].
Arthur Schopenhauer, « La négation de la volonté de vivre n’implique nullement la destruction d’une substance mais purement et simplement l’acte de la non-volonté : ce qui jusqu’ici a voulu ne veut plus. »
Montesquieu dans les Lettres Persanes, en 1724, aborde le sujet du suicide à la lettre 76. Il soutient le fait que si on ne trouve plus de plaisir à vivre, on devrait pouvoir mourir sans se faire blâmer. Il ajoute la valeur religieuse en disant que même si Dieu nous a fait un cadeau en nous donnant la vie, nous avons le droit de ne plus en vouloir une fois qu'il nous ennuie.
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