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principe fondamental d'éthique De Wikipédia, l'encyclopédie libre
La Règle d'or est une éthique de réciprocité dont le principe fondamental est énoncé dans presque toutes les grandes religions et cultures : « Traite les autres comme tu voudrais être traité » ou « Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse ». Cette forme de morale universelle se retrouve aussi bien dans les préceptes philosophiques de l'Égypte antique et de l'Antiquité grecque que dans les religions orientales (hindouisme, bouddhisme, taoïsme, confucianisme...), proche-orientales ou occidentales (judaïsme, christianisme, islam) ou encore dans l'humanisme athée.
La formulation la plus répandue de la Règle d'or en Occident est « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », commandement de la Bible hébraïque (ou Ancien Testament) exprimé dans le Lévitique (Lv 19,18), développé par Hillel et par les milieux pharisiens puis par Jésus de Nazareth, qui le cite (Mt 22 37-40) comme étant l'essence des six commandements du Décalogue qui se rapportent aux relations humaines (Ex 20 12-17).
Cette règle constitue une source d’inspiration essentielle pour l’approfondissement du concept moderne des droits de l'homme.
La « Règle d'or » peut se comprendre à plusieurs niveaux :
La relation de l'homme à son prochain pose la question de la limite sociale : « Qui est mon prochain ? » (Lc 10:29).
La signification du mot « proche » ou « prochain » n’est pas explicitée dans le commandement du Lévitique. Le terme utilisé provient de la racine רעה. Il signifie proche, ami ou encore l’autre, l’interlocuteur. Cependant, la définition de celui qu'il faut aimer comme soi-même selon le Lévitique s'étend à l'hôte étranger quelques versets plus loin : « Vous traiterez l’étranger en séjour parmi vous comme un indigène du milieu de vous ; vous l’aimerez comme vous-mêmes, car vous avez été étrangers dans le pays d’Égypte[1]. »
Dans le Nouveau Testament, Jésus répond indirectement à cette question par la parabole du Bon Samaritain.
Sous une forme primitive, « Ne fais aux autres que ce qu'ils t'ont fait », la loi du talion, ordonnée dans le Pentateuque, est une loi de progrès, dans la mesure où elle s'oppose à la vengeance incontrôlée et disproportionnée. La vengeance n'est pas condamnée, mais doit être « juste ». La Règle d'or élémentaire qui en est le pendant, « Ne fais pas ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse », est une formulation que l'on trouve dans le Livre de Tobie (4:15).
Le judaïsme radical insiste sur le strict respect de la Loi, au point de vouloir « faire une haie autour de la Torah » (Pirké Avot 1,1), pour reprendre une parole du Talmud[2]. La Torah invite cependant en parallèle à dépasser ce principe d'une juste proportion, pour déboucher sur l'idée de l'action dépourvue de toute idée de retour, et guidée par l'altruisme.
Cette prescription est la formulation de référence de ce qu'on appelle « Règle d'or »[3] :
La Règle d'or a progressivement pris une importance fondamentale dans le judaïsme. Avant même les enseignements de Jésus de Nazareth, Hillel, au Ier siècle, en fait la source du principe de réciprocité, qui résume toute la Torah, s’il est complété par l’étude[4]. C'est cette règle qui est commentée par Hillel, à un homme qui lui demande de lui expliquer le sens de la Torah, « le temps de rester debout sur un pied » : « Ce que tu ne voudrais pas que l'on te fît, ne l'inflige pas à autrui. C'est là toute la Torah, le reste n'est que commentaire. Maintenant, va et étudie. »
Rabbi Akiva commente, au IIe siècle, cette Règle d'or : ce « principe de base de la Torah » est la « loi la plus importante », lors de la discussion qui l’oppose à Shimon ben Azzai (en), et compare l’emplacement central de ce précepte — au centre du Lévitique, lui-même au centre des cinq Livres de la Torah — à l’emplacement du Tabernacle au centre du cortège des Hébreux[5].
Depuis Origène, la théologie chrétienne interprète le principe de la Règle d'or comme le fondement d'une morale universelle que Dieu destine à l'ensemble de l'humanité[6].
La Règle d'or est reprise en ces termes dans le Nouveau Testament : « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux, car c’est là la loi et les prophètes. » (Matthieu 7:12[7]), et aussi Matthieu 22:39, Luc 6:31, Luc 10:27. Elle est développée par Jésus par la parabole du Bon Samaritain dans l'Évangile selon Luc (6:31)[3], par laquelle il montre que l'amour du « prochain » va au-delà de l'application stricte de la loi, et s'étend à tout homme.
Cette règle constitue la seconde partie du Grand Commandement. L'Épître de Jacques la qualifie de « Loi royale » ou « Loi du Royaume »[8]. Elle est la base de la vie chrétienne, et Jésus en confirme le caractère nécessaire et suffisant : « Si tu veux entrer dans la vie, applique les commandements » (Mt 19:17).
Au-delà, « si tu veux être parfait » (Mt 19:21), Jésus propose en outre dans son enseignement un christianisme radical pour ses disciples. Dans ce cadre, la règle d'or est complétée par des règles de vie qui visent à refuser l’usage de la violence ; la loi du talion est alors abolie au profit de la non-vengeance, de la non-résistance au méchant[9] :
Pour ceux qui ne cherchent pas à l'appliquer littéralement, l'esprit de ce principe de non-agression, « Si quelqu'un te frappe sur la joue droite, tends-lui la joue gauche », est un appel à ne pas se mettre au même niveau moral que l'agresseur, mais elle ne prétend pas exclure une auto-défense ou une sanction pénale[10].
La règle d'or n'apparaît pas dans le Coran, mais on trouve son équivalent dans des Hadîths :
Selon le commentaire du muhaddith (collecteur de traditions attribuées au prophète de l'islam) chafi'ite, An-Nawawi et dans l'esprit d'un autre propos attribué à Ali ibn Abi Taleb, quatrième calife de l'islam : « Respecte l'être humain, car s'il n'est pas ton frère dans la religion, il est ton frère dans l'humanité. »
En ce qui concerne le Coran, cependant, cette règle n'est applicable qu'entre croyants, car le Coran précise parmi de nombreux passages similaires : « Mohamed est le Messager de Dieu et ceux qui sont avec lui sont fermes envers les mécréants, miséricordieux entre eux. » (Coran, 48:29).
Toutefois, on trouve aussi des passages qui vont dans le sens d'une bienveillance envers les non-musulmans : « Il se peut qu'Allah établisse de l'amitié entre vous et ceux d'entre eux dont vous avez été les ennemis. Et Allah est Omnipotent et Allah est Pardonneur et Très Miséricordieux. Allah ne vous défend pas d'être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Allah aime les équitables. Allah vous défend seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. » (Coran 60.7-9).
Ou encore : « Le bien et le mal ne sont pas équivalents. Repousse donc le mal par le bien jusqu'à ce que ton ennemi devienne un ami chaleureux. » (Coran 41.34).
Les philosophies et religions de l'Histoire ont contribué depuis longtemps à la réflexion et à la formulation de concepts proposant une approche de l'éthique de réciprocité selon différentes approches :
L'expression « Golden Rule » (Règle d'or) est formulée au XVIIe siècle en Angleterre :
Hans Reiner (de) (1896-1991), philosophe allemand, propose de distinguer différentes formulations de la Règle d'or :
L'interprétation du terme s'enrichit :
La « Golden Rule » est utilisée comme un slogan anti-esclavagiste par les quakers, lorsqu'ils découvrent le sort des Noirs en Amérique. Cela explique peut-être son succès ultérieur aux États-Unis où elle donne lieu à une abondante littérature, y compris dans le domaine du management (Arthur Nash, J.C. Penney) et même de la politique [voir les discours présidentiels de John Fitzgerald Kennedy contre la ségrégation raciale (1963) et de Barack Obama au Caire (juin 2009) ou à Oslo (décembre 2009)].
Dans les années 1970, le philosophe américain Thomas Nagel[15] propose de penser l'altruisme de façon objective, sur la base d'une éthique de la réciprocité : la formulation « ce que tu ne veux pas qu'on te fasse, ne le fais pas à autrui »[16] semble restreindre le champ de l'éthique à une considération de prudence : « Si je veux éviter représailles et sentiment de culpabilité, il vaut mieux que j'évite de faire subir à autrui des comportements dont je ne souhaiterais pas moi-même être la victime. » Nagel ajoute : « Au lieu de mettre autrui à notre place en lui prêtant nos sentiments, il s'agit bien pour nous de nous mettre à sa place en appliquant la règle de réciprocité. […] Autrement dit, quand nous compatissons aux malheurs d'autrui, nous prêtons à ce dernier notre capacité de sentir. Quand nous jugeons en termes de réciprocité, nous jugeons nos actions comme autrui le ferait. » Ainsi, l'égoïste est « celui qui reformule toutes les maximes de ses actions à la première personne du singulier. » L'altruiste, « à l'inverse reformule toutes ses actions à la troisième personne du singulier. »
Dans son roman La Voix du maître[17], l'écrivain Stanislas Lem souligne cependant une limite inhérente à la règle d'or qui est la définition, nécessairement arbitraire, des « autres », par la façon dont on place ce qu'il nomme la barre de solidarité. Ainsi, le nationalisme pourrait-il se réclamer de la règle d'or en ce qui concerne les seuls ressortissants d'une nation. L'esprit de corps la limite même à son seul groupe. Et prendrait-on en compte toute l'espèce humaine qu'il importerait de définir à quelles autres espèces nous décidons qu'il est immoral de faire ce que nous n'accepterions pas qu'on nous fît.
Le serious game The Evolution of Trust s'inspire de la théorie des jeux et du dilemme du prisonnier pour mettre en scène les conditions de la confiance dans l'interaction avec différents personnages obéissant à des comportements particuliers, et qui réagissent également aux actions du joueur. Il propose une réflexion sur l'éthique de réciprocité ou règle d'or[18],[19].
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