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Maurice de Cheveigné, né à Paris 16e le , mort à Saint-Malo le [1], est un résistant français, opérateur radio du BCRA (Forces françaises libres) qui a été déporté.
Naissance | |
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Nom de naissance |
Maurice Henri Marie Le Riche de Cheveigné |
Nationalité | |
Activité |
Maurice Le Riche de Cheveigné est le fils de Jane Augustine Noël Le Riche de Cheveigné, infirmière pendant la Première Guerre mondiale, et d'un père, médecin militaire, qui ne l'a pas reconnu[2]. Son enfance se passe dans des pensionnats, y compris en Angleterre où il passe un an et apprend l'anglais. De retour à Paris, il devient apprenti électricien, puis ouvrier à Montrouge dans une fabrique d'appareils radio TSF[3].
En septembre 1939, Cheveigné a 19 ans et travaille depuis le mois d'avril comme ouvrier aide-riveteur à l'usine d'Aubervilliers du constructeur d'avions Breguet[4]. Le début de la guerre conduit le ministre de l'Air à commander de nombreux avions avec des délais de livraison courts, ce qui fait augmenter les cadences de production chez Breguet et passer de 40 heures à 72 heures de travail hebdomadaire[5].
Le 13 juin 1940, à 7 heures du matin, le patron de l'usine annonce que l'armée allemande avance vers Paris et que les unités de production sont évacuées à Toulouse[6]. Le soir même, une dizaine d'ouvriers de l'usine, dont Cheveigné, quittent Paris à vélo et empruntent les routes départementales, car les nationales sont paralysées par les innombrables réfugiés. Les camarades pédalent et bivouaquent, en passant par Sainte-Geneviève-des-Bois, Étampes, Pithiviers, Jargeau, Selles-sur-Cher, Châteauroux, Limoges, Brive-la-Gaillarde, Cahors, Montauban. Le 20 juin, Cheveigné arrive à Toulouse, après plus de 700 km. à vélo depuis Paris ; peu d'ouvriers sont dans les locaux de l'usine Breguet et la plupart des machines ne sont pas encore arrivées[7]. Sidéré, il entend à la radio le maréchal Pétain - « vieux capitulard chevrotant, pérorant, plastronnant » - expliquant qu'il a été obligé de demander l'armistice à Hitler, car la France est trop faible, les Français étant coupables de n'avoir pas assez travaillé, l'esprit de jouissance l'ayant emporté sur l'esprit de sacrifice[8].
Le 22 juin 1940, apprenant que l'armistice a été signé, Cheveigné et trois camarades décident de quitter la France avant que l'armée allemande n'arrive. Après une centaine de kilomètres à vélo, ils échangent leurs bicyclettes contre une Citroën 5CV « Trèfle », version Torpédo à trois places, et roulent jusqu'à Bayonne à la recherche vaine d'un bateau, puis Saint-Jean-de-Luz, Biarritz, Perpignan[9]. En juillet, les autorités de cette ville répartissent les nombreux réfugiés dans les villages des environs ; Cheveigné et ses camarades sont logés au village de Canohès et gagnent un petit pécule en curant le réseau de fossés tout-à-l'égoût du village[10].
Fin août-début septembre, trois soldats écossais de la 51st Highland Division arrivent au centre d'accueil de Perpignan et, comme Cheveigné parle anglais, lui demandent de les aider à passer en Espagne[11]. Celui-ci décide de les accompagner et, le 5 septembre, tous les quatre prennent le train pour Banyuls ; puis ils marchent jusqu'au col del Torn, où ils dorment à la belle étoile, avant de s'élancer au petit matin sur le versant espagnol[12]. Quelques kilomètres plus bas, une patrouille de soldats espagnols les arrête, puis les accompagne au village de Villamaniscle où ils sont remis à la Guardia Civil ; le lendemain, ils sont conduits à Figueras et internés[13]. Cheveigné prétend que son patronyme est Menzies (nom de famille de sa grand-mère écossaise) et que le passeport au nom de Cheveigné qu'il possède est en fait celui d'un ami ; lorsque que le consul d'Angleterre lui rend visite en prison, il lui avoue la vérité et celui-ci lui promet qu'il le sortira de là[14]. Quelques temps plus tard, les soldats britanniques et Cheveigné sont transférés au camp de Miranda de Ebro ; c'est là que celui-ci tombe malade (pleurésie) et est transféré trois semaines à l'infirmerie, puis à l'hôpital militaire de Pamplona[15]. Le 4 décembre, Cheveigné est transféré à la préfecture de Madrid ; puis, enfin, le 17 décembre 1940, il est libéré et passe Noël à l'ambassade britannique[16]. Le lendemain, c'est le départ pour Gibraltar, puis, le 5 janvier 1941, il embarque sur un navire britannique qui arrive en Ecosse le 15 janvier ; Cheveigné et les autres étrangers sont mis dans le train pour Londres, où ils sont chacun interrogés par la Military Intelligence[17].
Le 18 janvier 1941, il s'engage dans les forces aériennes de la France libre ; le lendemain, Cheveigné et les autres nouvelles recrues sont reçus par le général de Gaulle à son quartier général de Carlton Gardens[18]. Après plusieurs mois dans les bureaux londoniens des Forces aériennes françaises libres, Cheveigné est transféré au camp de Camberley dans le Surrey ; à la fin septembre, il est nommé instructeur radio[19]. Cependant, la monotonie de la vie militaire au camp pousse Cheveigné à se porter volontaire pour les services secrets ; en février 1942, il est affecté au BCRA[20] qui l'envoie à l'école d'opérateurs radio de l'Intelligence Service, à Thames Park[21]. C'est là qu'il rencontre Daniel Cordier dans le courant de la même année[22].
Parachuté en , Maurice Le Riche de Cheveigné (Salm W) est d'abord radio d'un agent du commissariat national à l'Intérieur, Jacques Soulas alias Salmon.
Quand le radio de Jean Moulin, Gérard Brault (Kim W), est arrêté (), Cheveigné travaille avec Moulin et Georges Bidault, parfois avec d'autres services et le réseau Brandy[23].
Surchargé, il est aidé par François Briant (Pal W) puis Daniel Cordier (Bip W). En 1943, Cheveigné assure les liaisons de Raymond Fassin, délégué militaire régional de la zone A (Amiens).
Arrêtés le 4 avril 1944 à Lille, Cheveigné et Fassin sont tous deux déportés, par le « Train de Loos » parti de Tourcoing, le , vers le camp de Sachsenhausen (convoi I.281)[24].
Cheveigné est libéré le 3 mai 1945, tandis que Fassin n'en revient pas[24].
Rentré en France après sa libération, il cherche un emploi, mais les Résistants de la dernière heure pullulent et il ne reconnaît plus sa patrie.
Il trouve alors un travail pendant deux ans, en Allemagne, auprès d’un organisme des Nations unies portant secours aux prisonniers et aux réfugiés.
Il se marie avec Kitty, une jeune anglaise, et, voulant quitter l'Europe, ils partent pour le Canada où ils sont fermiers au nord de Toronto quelques années. Le couple a trois enfants : Suzanne (née en 1950), Alain (né en 1953) et Colin (né en 1954). En 1956, la famille déménage vers le nord, à Elliot Lake, une ville minière, où le couple tient un magasin de téléviseurs et de disques. Mais la crise frappant l'industrie minière, la famille rentre en France et s'installe au sud de Toulouse en se tournant à nouveau vers l'agriculture. Dans les années 1970, les autorités françaises retirent à Cheveigné sa licence de radio amateur, ce qui lui cause une nouvelle blessure morale. En 1980, la mer et la voile le fascinant, il s'installe seul à Saint-Malo et mène une vie très solitaire.
Dès la fin des années 1970, voulant écrire le récit de son expérience de la guerre secrète fondé sur la réalité, il fait des voyages en Angleterre et aux Etats-Unis pour trouver des documents, et rédige des Mémoires intitulés Radio Libre, 1940-1945, qui sont décrits par Cordier comme remarquables et plus proches de la vérité que ceux publiés par les grands noms de la Résistance[25], mais ne trouveront pas d'éditeur avant 2014, soit plus de 20 ans après la mort de Cheveigné. Dans son compte rendu après la parution du livre posthume de celui-ci, Jeannine Verdès-Leroux explique combien ce récit parfois violent est admirable et écrit que « c’est la tension de son écriture qui explique l’adhésion du lecteur »[26].
Son expérience de la déportation, ainsi que la solitude et la tristesse qu'il a ressenties - comme beaucoup de déportés - après sa libération ont causé en Cheveigné une fêlure et une fuite, d'après Cordier[27].
Cheveigné avait un humour, une gentillesse et un « charme envoûtant » et il impressionnait par « son absolue liberté », selon Cordier auquel l'a lié une « amitié indéfectible, semblable à la fraternité », depuis leur rencontre en 1941 à Thames Park, puis au travers de leur travail pour Jean Moulin à Lyon en 1942-1943, amitié qui s'est poursuivie après la guerre jusqu'à la mort de Cheveigné[28]. Souffrant d'une insuffisance cardiaque, il décide de mettre fin à ses jours et se suicide en juin 1992.
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