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sociologue française De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Florence Bergeaud-Blackler, née le à Bordeaux, est une anthropologue française, chargée de recherche au CNRS, en poste au laboratoire Groupe Sociétés, Religions, Laïcités de l'EPHE, habilitée à diriger des recherches depuis 2019.
Chargée de recherches au CNRS (depuis 2013) Habilitée à diriger des recherches (depuis 2019) |
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Ses travaux portent sur les questions de la normativité islamique dans les sociétés sécularisées, les procédés d’endoctrinement salafiste[1], le marché halal et l'influence qu'elle juge croissante des Frères musulmans en Europe.
Ayant commencé sa carrière professionnelle en tant qu'informaticienne dans l’aéronautique, Florence Bergeaud-Blackler réoriente sa carrière en suivant des études en sciences sociales à l'université de Bordeaux, qui aboutissent à un DEA en anthropologie, en 1995, et se poursuivent avec un doctorat en sociologie[2]. Elle rédige sa thèse sous la direction de Didier Lapeyronnie avec, comme sujet, « L'institutionnalisation de l'Islam à Bordeaux : enjeux sociaux, politiques et économiques de l'implantation du culte musulman dans un espace urbain ». Elle obtient son doctorat en 1999[3].
Elle devient chercheuse à l'université d'Aix-Marseille, puis à l'université de Manchester. Elle est lauréate d'une bourse Marie-Curie à l'université libre de Bruxelles.[réf. nécessaire]
Depuis 2000, Florence Bergeaud-Blackler participe à des projets de recherche sur le marché halal et sur l'abattage rituel, dont elle assure la coordination[4]. Elle est la représentante française du projet européen DIALREL, qui mobilise des chercheurs de plusieurs pays européens, de Turquie, d'Israël, de Nouvelle-Zélande[5]. Elle est recrutée au CNRS en 2013. Ses recherches portent principalement sur les normativités islamiques et sur l’étude des conditions sociales et juridiques de production des aliments compatibles avec la religion, dans un contexte industriel européen. Ses travaux concernent les marchés des viandes dites « rituelles » (halal et casher) et plus largement le consumérisme religieux[5].
En 2019, elle soutient une thèse d'habilitation à diriger des recherches à l'EHESS[6].
Elle est directrice du conseil scientifique de l'Observatoire des fondamentalismes[7], créé à Bruxelles en 2020 par la militante laïque Fadila Maaroufi avec la présidente Fabienne Rouvroy, Chantal Gilbart et Bernard Pauwels[8],[9].
Elle participe également à la création à Bruxelles d'un « Café laïque » en collaboration avec l'homme d'affaires et académicien Laurent Minguet[10].
En mai 2023, une conférence à la Sorbonne de Florence Bergeaud-Blackler sur les Frères musulmans est reportée à la demande de la doyenne de la Faculté des Lettres. La décision fait polémique et, à la suite d'une vague d'indignation qui rappelle notamment les menaces et les invectives dont la chercheuse fait l'objet en raison de ses travaux, l'intervention est programmée en juin[11].
En novembre 2023, le président directeur général du CNRS, Antoine Petit, lui adresse un rappel à l'ordre pour des attaques qu'elle a portées via les réseaux sociaux[12].
Elle participe en 2024 au cycle de conférences organisé par Louis Aliot, maire Rassemblement national de Perpignan, et l’écrivain Éric Naulleau, le « Printemps de la liberté d'expression », à Perpignan[13].
En 2015, elle publie un livre, Les Sens du Halal, résultat de ses recherches sur les normativités islamiques, et dans cas précis : le halal[14]. Le marché halal était d’abord limité au contrôle de l’abattage rituel, puis à l’aube des années 2000, avec l’aide de la Malaisie par le biais du codex Alimentarius (organe de normalisation alimentaires de référence des pays de la FAO et de l'OMS ), il s’est étendu à toute l’alimentation, puis aux autres produits de consommation : les cosmétiques, les médicaments, les vaccins, etc.[14]. En parallèle est né le marketing islamique, la mode charia compatible (dont le burkini est issu), les hôtels et le tourisme halal, sous l’influence d’entrepreneurs turcs issus de la vague de réislamisation qu’a connue la Turquie dans les années 1980-1990[15].
En 2017, Florence Bergeaud-Blackler publie un ouvrage, Le marché halal ou l’invention d’une tradition, fruit d’un travail de recherche sur le marché halal[16]. Dans ce livre, l’anthropologue développe le résultat de ses recherches : le halal ne serait pas une ancienne tradition religieuse prescrite par le Coran, mais un phénomène récent, datant du début des années 1980, qui serait davantage une stratégie marketing[17]. Pour démontrer sa thèse, sur le plan théologique, elle s’appuie notamment sur la sourate 5, verset 5 du Coran.
Elle dit constater que le marché halal, pesant ± 635 milliards $ par an dans le monde, est une coproduction entre l'économie néolibérale mondialisée d’une part et les mouvements fondamentalistes de l’islam d’autre part[16]. L’émergence du marché halal changea la définition du concept « halal », qui indiquait à l'origine « ce qui est autorisé ». Aujourd'hui, il a une connotation exclusive : ce qui n'est pas halal (autorisé) est haram (pas autorisé)[16].
Selon Florence Bergeaud-Blackler, le halal comme « tradition inventée », est le résultat d’un deal entre des pays islamique et des « marchands capitalistes »[18]. Elle attribue l’impulsion de cette normativité islamique à l’Iran, après la prise de pouvoir de l’ayatollah Khomeini et la révolution iranienne[18]. Soucieux de son exigence de pureté révolutionnaire, la République islamique d’Iran a envoyé des délégations religieuses chez les fournisseurs étrangers pour exiger des abattages rituels, créant de fait une normativité islamique d’une pratique profane[16]. À ce titre, elle s’inspire de l’économie des conventions sur cette question et fait l’hypothèse que « c’est le marché qui fixe la qualité et non pas la qualité qui fixe le marché »[18],[19].
Son ouvrage fait l'objet d'une sévère recension par Mohammed Hocine Benkheira, directeur d'études à l'École pratique des hautes études et spécialiste de la normativité islamique, qui indique que « selon une mode qui s’est répandue dans le monde académique, l’enquête se métamorphose vite en réquisitoire. Il s’agit moins de comprendre une série de phénomènes que de porter sur eux un jugement évaluatif, pour les déclarer incompatibles avec la République »[20].
Dans le cadre d'une collaboration avec Blandine Chelini-Pont, GSRL/LID2MS, elle codirige le programme RELINUM[21], qui questionne l’impact de l’usage croissant des outils numériques sur les institutions et les normes, en particulier juridiques et religieuses.
En 2023, elle publie chez Odile Jacob Le Frérisme et ses réseaux, l'enquête sur les Frères musulmans, dont la préface, « Frérisme d'atmosphère », est signée de Gilles Kepel. Elle y dénonce une forme d'« islamisme qui s’est déployée à partir des pays non musulmans dès les années 1960 et qui cherche, non pas uniquement à conquérir le pouvoir par le politique, mais aussi et surtout par l’économie et la culture », notamment dans les démocraties occidentales[22]. L'ouvrage reçoit le prix de la Revue des deux mondes, la directrice de la revue, Aurélie Julia, soulignant que « les membres du jury ont voulu récompenser la qualité d’un travail fouillé et érudit sur le mouvement frériste ainsi que le courage d’une femme menacée pour ses recherches »[23].
Ouvrage polémique, Le Frérisme et ses réseaux a été diversement accueilli par la presse et souvent critiqué au sein du monde académique.
Selon Judith Waintraub, journaliste au Figaro Magazine, « l'immense mérite de l'enquête que publie Florence Bergeaud-Blackler est de montrer que ces événements sans lien tangible les uns avec les autres servent un même objectif : soumettre l'Europe aux normes du fondamentalisme islamique (...). »[24]. Pour Philippe de Lara, le livre offre « une réponse claire et convaincante » à la double question du « séparatisme islamiste » et de son but[25].
Le compte rendu publié par Le Monde est plus critique et met en avant la définition trop large du frérisme qui conduit l'auteur à « rater son objet ». Plus grave encore est, selon Christophe Ayad, la liste qu'elle « dresse des « alliés objectifs » du frérisme : militants décoloniaux, écologistes, gauchistes, universitaires »[26].
Dans un texte intitulé « Islamophobie. Le complotisme d’atmosphère de Florence Bergeaud-Blackler » publié sur le site Orient XXI, Rafik Chekkat[27] considère que « Florence Bergeaud-Blackler partage avec Drumont une intention, une forme, et une méthode : dénouer dans la société l’élément "frériste" — qui était naguère l’élément juif. » et que, « [...] présenté comme une recherche universitaire sérieuse, "Le Frérisme et ses réseaux" est un ouvrage polémique (...) au service d’une vision répressive de l’islam, où l’analyse des textes fondateurs de la confrérie des Frères musulmans le dispute à la confusion la plus totale. »[28].
Plusieurs autres chercheurs et spécialistes sont critiques[29] concernant la qualité de cet ouvrage, comme Olivier Hanne, agrégé, docteur en histoire (HDR), chercheur à l’université de Poitiers[30] ou Omero Marongiu-Perria, chercheur et théologien, spécialiste de l'islam en France critiqué dans l'ouvrage pour ses « attaches affectives et idéologiques » avec le mouvement[31] ou encore Haoues Seniguer, maître de conférences en science politique à Sciences Po Lyon, chercheur au laboratoire Triangle (CNRS, ENS), directeur adjoint de l'Institut d'études de l'islam et des sociétés du monde musulman (EHESS/CNRS)[32], dernière critique à laquelle elle a répondu[33].
L'ouvrage fait l'objet d'un examen détaillé publié dans la Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée (2024) de l'IREMAM dont la conclusion est extrêmement sévère. Selon Margot Dazey , cette « discussion critique » pointe des « faiblesses méthodologiques et épistémologiques » et « des inexactitudes et approximations empiriques ». En outre, le « registre d’écriture de l’ouvrage, entre comparaisons animalières et descriptions dénigrantes des groupes étudiés, souligne l’ambition polémique plutôt qu’analytique du propos, et les libertés prises avec la déontologie des sciences sociales »[34]. Pour autant, selon cette chargée de recherche au CNRS, la discussion scientifique s'avère difficile tant « contester les prémisses scientifiques de l’ouvrage reviendrait à corroborer sa thèse », car si on suit la thèse de l'ouvrage, « les chercheurs en sciences sociales, consciemment ou non, participent au plan frériste de subversion intellectuelle et idéologique du monde ». Dans ces conditions, l'ouvrage échapperait à toute discussion scientifique permettant d'en souligner les limites[34].
À l'inverse, lors d'une recension de l'ouvrage dans la revue Politique étrangère, de l'IFRI, Anne-Clémentine Larroque, maîtresse de conférence à Science Po Paris et spécialiste de l'idéologie islamiste, conclut qu'« à l’aune de la recrudescence des dérives narratives au nom de l’identitarisme, la légitimité de l’immense travail de Florence Bergeaud-Blackler s’impose aujourd’hui aux attaques et menaces d’individus ne concédant aucune considération au travail scientifique critique. La démarche demeure critique, sans conteste, tout au long de l’ouvrage, n’hésitant pas à cibler les ex-frères et les ambiguïtés de certains chercheurs et institutions »[35].
En mars 2023, elle porte plainte pour menaces de mort, à la suite de la parution de son ouvrage. Selon Causeur, qui fournit des extraits de tweets, le directeur de recherche honoraire au CNRS, François Burgat, qualifié de « soutien affiché des réseaux des Frères musulmans » se trouverait « en première ligne » des attaques subies par Florence Bergeaud-Blacker sur les réseaux sociaux[36]. Elle est placée sous protection policière[37].
Elle reçoit le soutien d'un collectif qui publie dans Le Point une tribune affirmant qu'elle est « la cible d'une cabale par l'entremise d'articles de presse » et qu' « elle est insuffisamment soutenue par les laboratoires de sciences humaines et sociales, qui évitent d'aborder le frérisme »[38],[39]. Quelques jours plus tard, « le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche et la ministre Sylvie Retailleau condamnent fermement les menaces de mort » à son encontre[37].
Dans un article paru après les menaces, la philosophe et islamologue Razika Adnani apporte son soutien à l'anthropologue et dénonce les attaques dont elle fait l'objet. Adnani souligne que l'acharnement contre Bergeaud-Blackler est incompréhensible et étonnant : « Les islamistes, ceux qui pensent l’islamisme et pas uniquement les Frères musulmans, n’ont jamais caché leur intention et cela non seulement au sujet de la France ou de l’Occident mais de toute l’humanité »[40],[39]. Une controverse quant à la pertinence conceptuelle de la distinction « Islam-Islamisme » apparait ultérieurement entre les deux femmes[41],[42].
Le , le Tribunal Judiciaire de Pau condamne un homme à 15 mois de prison ferme pour avoir notamment appeler sur Twitter à la tuer ou à lui faire subir un viol de masse. Florence Bergeaud-Blackler est représentée dans cette procédure par Thibault de Montbrial[43].
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