Droit de la chasse en France
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En droit français contemporain, la chasse est définie (par la loi dite « Verdeille ») comme « tout acte volontaire lié à la recherche, à la poursuite ou à l'attente du gibier ayant pour but ou pour résultat la capture ou la mort de celui-ci[1]. »
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Le droit de chasse impose aussi des devoirs et engage de plus en plus à mettre en œuvre certaines mesures de protection ou de gestion de l'environnement. Dans ce but, le législateur et l'administration ont en France :
- instauré la notion de territoire de chasse et de plan de chasse ;
- fixé des périodes et certaines conditions à la chasse ;
- prévu que les chasseurs (via une redevance notamment) contribuent à une gestion pérenne des populations de gibier,
- encadré la vente des produits de la chasse ;
- imposé un permis de chasse et une réglementation de la chasse.
Émergence d'un droit de la chasse en France au Moyen Âge
Résumé
Contexte
Ce droit semble avoir beaucoup évolué selon les lieux et les périodes du Moyen Âge.
Les contrevenants sont sévèrement punis. Avant le XVIIe siècle, la « braconnerie » est relativement tolérée : les études archéologiques des fosses à déchets montrent que les paysans chassaient le cerf et le chevreuil à l'arc ou le sanglier piégé dans des fosses.
De manière générale, plus le temps passe et plus la population grandit, plus le grand gibier semble avoir été plutôt réservé ou exclusivement réservé aux seigneurs.
Les religieux qui possédaient souvent de vastes espaces forestiers et cultivés avaient aussi ce privilège de chasse. À titre d'exemple, le moine Abélard (1079-1142) nommé supérieur d'une abbaye bretonne (Abbaye Saint-Gildas de Rhuys) s'indigne de la vie de ses moines qui passent plus de temps à la chasse qu'à la prière :
« Les portes de l’abbaye n’étaient ornées que de pieds de biche, d’ours, de sanglier, trophées sanglants de leur chasse. Les moines ne se réveillaient qu'au son du cor et des chiens de meute aboyant. Ils étaient cruels et sans frein dans leur licence[2],[3]. »
Histoire du droit de la chasse en France durant la Renaissance
Résumé
Contexte
Pour les XVe et XVIe siècles, les archives nationales ont conservé divers textes (plusieurs dizaines d'ordonnances, édits et déclarations publiés de 1318 à 1669 (et notamment rassemblés par l'agronome Jacques Joseph Baudrillart en 1821[4]), réglementant la chasse depuis le début du XIVe siècle, tous concernant peu ou prou les privilèges de la monarchie en matière de chasse et la protection des territoires de chasse royaux contre le braconnage.
On cite généralement comme étapes importantes :
- une ordonnance de Charles VI de 1396, qui met fin à plusieurs siècles de relative tolérance de la chasse pour les roturiers (qui bénéficiaient du droit coutumier), mais en continuant à autoriser la chasse pour les gens d'Église et les bourgeois vivant de leur rente.
« Que dorénavant aucun noble de notre royaume, s’il n’est privilégié ou s'il n’a aveu ou expresse commission d’une personne qui la puisse donner, ou s’il n’est personne d'Église, ou bourgeois vivant de ses possessions et rentes, ne s’enhardisse de chasser, ni de tendre aux bêtes grosses ou menues, ni aux oiseaux, en garenne ou au dehors, ni de tenir pour ce faire, chiens, furets, cordes, lacs, filets ou autres harnais. »
— Extrait de l’ordonnance du 10 janvier 1396
Les droits des seigneurs comportent alors deux limites ; Il leur est interdit, sauf permission royale, de chasser le cerf et la biche ou de chasser à moins d’une lieue des « plaisirs du roi »[5].
- une ordonnance royale de François Ier de mars 1515, portant règlement général des chasses et des forêts, complétée par l'ordonnance d'août 1533, aout 1547, avril 1548, décembre 1581 ; Ces textes rappellent qu'à part les nobles, personne n'a le droit de chasser les « grosses bêtes » et il formalisent sévèrement l'interdiction pour tous et chacun de chasser tout gibier et de quelque manière que ce soit dans les forêts, buissons ou garennes royales, sauf muni d'une autorisation donnée par lettres-patentes. Il est en outre alors strictement interdit de posséder des armes à feu, arc et flèche, arquebuse, arbalète, ainsi qu'engins, filets et autres pièges pour prendre le gibier, à moins de deux lieues des terrains de chasses royales ; Le privilège du roi est élargi à certains de ses sujets (Princes, Seigneurs, Gentilshommes… qui sont autorisés à chasser sur leurs propres terres et à les protéger ainsi que fait le roi sur ses chasses royales. Les non-nobles n'ont pas le droit de chasser « En quoi faisant, aussi perdent leur temps qu'ils devraient employer à leurs labourages, arts méchaniques ou autres » précise l’introduction de l'ordonnance[6]… même sur les terres qu'ils occupent — sauf comme rabatteurs ou collaborateurs au service du roi ou de leur seigneur, ou muni d'une autorisation royale, sous peine de confiscation des engins de chasse, du gibier et d'une amende arbitraire.
- une ordonnance de Henri IV de juin 1601 sur le fait des chasses ; Cet édit confirme l'amende et promet le fouet pour la première infraction, le fouet et le bannissement après la première récidive, puis les galères et la confiscation des biens à la seconde récidive, et enfin la peine de mort à la troisième récidive, mais introduit aussi une notion de protection du gibier ainsi que des récoltes (les loups et prédateurs sont partout poursuivis par les chasses ou les battues organisées par les lieutenant de louvetiers, et là où il n'y a pas de chasse, les sangliers plus nombreux ou d'autres animaux peuvent faire des dégâts dans les cultures, ainsi d'ailleurs que le passage des chasses se plaignent les paysans ; cet édit précise (et cela restera en vigueur jusqu'en 1790) que l'instruction et le jugement des délits de chasse sont du ressort des Maîtrises des Eaux et Forêts (sauf quand le délit est commis sur les terres des Justiciers). Dans tous les cas les faits de braconnage sur cerf ou biche demeurent de la compétence des Maîtrises des Eaux et Forêts. De manière générale, les garde-chasse n'ont pas le droit au fusil. Les lieutenants de louveterie ont un grand pouvoir. Les moines et religieux peuvent chasser eux-mêmes sur leurs propres terres.
- une ordonnance de Henri IV de juillet 1607 est éditée 6 ans après la précédente, plus sévère en raison d'abus constatés dans les forêts royales, le port d'armes, arquebuses notamment y est plus largement et plus sévèrement réprimé (peut-être également en raison des guerres de Religion) ;
Le seigneur haut-justicier a ce droit dans l'étendue de sa haute-justice, le seigneur local dans sa seigneurie. Les roturiers n'ont pas ce droit sauf s'ils ont acheté un fief, une seigneurie ou une haute-justice (ordonnance sur les eaux et forêts de 1669).
Les seigneurs ecclésiastiques, les dames hautes-justicières, les nobles âgés sont tenus de faire chasser afin de réduire le surplus de gibier nuisible aux cultures (ordonnance de juillet 1701). Ce droit seigneurial, justifié par l'entraînement militaire que le roi exige de ses nobles, n'est pas toujours exclusif : à certaines périodes, des bourgeois ou hobereaux anoblis peuvent chasser ; les habitants des provinces annexées conservent le privilège du droit de chasse ; les provinces frontalières gardent leur permis de port d'arme pour aider l'État en cas d'invasion et ont également le droit de chasse[7].
Curieusement ces ordonnances n'évoquent pas ou peu la louveterie, responsable des « huées » et battues aux loups [8].
Histoire du droit de la chasse sous l'Ancien Régime
Résumé
Contexte
Sous l'Ancien Régime, la chasse reste un plaisir de gentilhomme et un privilège seigneurial[9].
Depuis le haut Moyen Âge, les rois sont réputés être de grands chasseurs. Ils entretiennent des équipages importants. Être admis aux chasses du roi est un des plus grands honneurs de la Cour.
Pour permettre l'existence du gibier sans se l'approprier, il est interdit de moissonner avant la Saint-Jean, d'enlever les chardons, d'enclore une parcelle par des murs les terres. Il faut planter des haies d'« épines » auprès des forêts royales. Il est interdit de détruire les lapins sauf sous la direction des agents des eaux et forêts (les « capitaineries »).
- Afin de protéger le travail des paysans et les récoltes, les chasseurs ne doivent pas passer dans les terres ensemencées et lorsque les céréales sont en "tuyaux". Les vignes sont interdites de chasse du 1er mai jusqu'aux vendanges. Mais ces interdictions sont peu observées. Le droit de chasse est alors un des plus haïs par les paysans.
- une ordonnance de Louis XIV reprécise en 1659 l'interdiction du port d'arme à ceux qui ne sont pas dûment autorisés à chasser[10] ;
- Une Ordonnance de Louis XIV « sur le fait des Eaux et Forêts », considérée comme l'ancêtre de l'actuel code forestier, écrite par le secrétaire d'État Colbert pour le roi du 16 août 1669 conserve dans un chapitre XXX intitulé « des Chasses » (qui comprend 41 articles) un régime de punitions sévères pour ceux qui braconneraient sur les terres royales, mais en supprimant la peine de mort par pendaison et en développant un chapitre sur la destruction des animaux nuisibles en réponse aux protestations des paysans qui voyaient des espèces-gibier détruire une partie de leur récolte sans avoir le droit de les chasser, alors que les loups, ours, lynx et autres prédateurs jouaient moins leur rôle de prédateur. Cette ordonnance précise les modes de chasse autorisés, confirme la réglementation antérieure pour tout ce qui n'est pas contraire aux dispositions de cette ordonnance. Plusieurs versions d'un Code des chasses seront éditées, ainsi qu'une jurisprudence qui évoluera avec le temps[9]. Une disposition sera ressentie par les non-nobles comme particulièrement injuste jusqu'à la révolution ; les Hauts-Justiciers peuvent, à titre personnel, chasser sur toute l'étendue de leur juridiction même sur des terres ne leur appartenant pas et sévèrement punir tout acte de chasse sur leurs terres, alors que l'article XXVIII du titre XXX fait :
« Défenses aux marchands, artisans, bourgeois et habitants des villes, bourgs, paroisses, villages et hameaux, paysans et roturiers de quelque état & qualité qu'ils soient, non possédans fiefs, Seigneurie & haute-Justice, de chasser en quelque lieu, force et manière, & sur quelque gibier de poil ou de plume que ce puisse être, à peine de cent livres d'amende pour la première fois, du double pour la seconde, & pour la troisième d'être attachez trois heures au carcan du lieu de leur résidence à jour de marché, & bannis durant trois années du ressort de la Maïtrise, sans que pour quelque cause que ce soit, les juges puissent remettre ou modérer la peine à peine d'interdiction. et le texte de l'ordonnance motive ainsi sa sévérité : Nos Rois en défendant la chasse aux roturiers, ont eu en vue de bannir du Royaume l'oisiveté qu’ordinairement elle engendre, lorsqu'ils s'y addonnent, & qu'ils en font leur principale occupation. »
L'Ordonnance cite à l'appui Horace, Cicéron et Virgile (Géorgiques) selon lesquels les paysans passaient beaucoup de temps à la chasse.
Libéralisation à la Révolution
Le droit de chasse fut l'un des privilèges abolis par la Révolution française.
La « démocratisation » du droit de chasse à la Révolution a entraîné une chasse généralisée, parfois avec l'accord tacite des propriétaires qui considéraient le gibier comme nuisible aux cultures, à une époque où la notion de protection des espèces et des équilibres naturels n'existait pas ou peu : la Révolution a été suivie d'une vague d'extermination du gibier[11],[12]. Napoléon Ier décide alors en 1810 de juguler cette extermination en mettant en place des « passeports de chasse » et « permis de chasse »[13], ce qui rend la démocratisation du droit de chasse rampante et développe le braconnage au XIXe siècle.
Droit contemporain de la chasse en France
Voir aussi
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