Le Bananier, contrairement aux apparences, n'est pas un arbre mais une plante herbacée[1]. En effet, il ne possède pas de vrai tronc, mais un stipe, comme les palmiers (un empilement de gaines foliaires qui s'accumulent)
Ce genre comprend environ soixante espèces, toutes tropicales, dont plusieurs sont largement cultivées pour la production de bananes. Certaines espèces ont un intérêt ornemental et sont cultivées en serres dans les pays tempérés[2].
Le terme «bananier» peut aussi être utilisé pour des espèces n'appartenant pas au genre Musa. Les espèces du genre Ensete comme la fausse «banane» (Ensete ventricosum) sont aussi regroupées sous le terme de «bananiers». Globalement, tous appartiennent à la famille des Musaceae.
Les bananiers peuvent atteindre sept mètres de haut (jusqu'à 15 mètres chez Musa ingens) mais ne possèdent pas de vrai tronc. Leur tige souterraine ressemble à un gros bulbe à partir duquel naissent les feuilles.
On observe un simple développement en hauteur de la base massive des pétioles des grandes feuilles insérées en spirale. Les feuilles, très grandes, droites ou retombantes (jusqu'à trois mètres de long et 60 centimètres de large) sont longuement pétiolées. La taille démesurée des feuilles du bananier leur permet de capter suffisamment de lumière quand elles poussent naturellement dans la strate arbustive de la forêt tropicale[3], très sombre.
Lorsque le bananier a produit entre 25 et 30 feuilles, au cœur de celles-ci se développe un bourgeon floral évoluant en une inflorescence qui, dans la majorité des espèces, retombe sur le côté. L'inflorescence, appelée «régime», est formée d'une série de spathes (feuilles colorées) disposées en spirale qui porte, à sa base, des fleurs femelles qui produiront les bananes, et à son extrémité des fleurs mâles. La floraison se produit au bout de sept mois et les fruits mûrissent quatre mois plus tard. Ensuite, la tige meurt. Dans la plupart des variétés cultivées, les fleurs mâles sont stériles et les fruits sont donc parthénocarpiques car ils ne sont pas issus de la fécondation.
Concernant son cycle biologique, le bananier est une espèce monocarpique (il ne possède qu'un seul bourgeon terminal ou apex méristématique s'exprimant dans l'auxèse et la mérèse du végétal) et monoblastique (le végétal meurt après la floraison). Un bananier ne produit donc qu'un seul régime, d’où l’importance de le couper après la récolte pour laisser la place au suivant[4]. Les bananiers cultivés se multiplient donc de manière végétative.
La région d'origine de la banane se trouve entre l'Inde et les îles mélanésiennes du Pacifique en passant par l'Indonésie et la Nouvelle-Guinée. Elle se diffuse au Moyen-Orient et dans le bassin méditerranéen au moment de la conquête islamique. La banane de culture fut introduite dans les Amériques dès le début de la colonisation européenne vers 1500. Le bananier se diffuse si rapidement en Amérique qu'il est très rapidement considéré, de façon erronée, comme une espèce originaire du continent. Alexander von Humboldt est ainsi persuadé d'une origine américaine du fruit[5].
Aujourd'hui, la banane est cultivée dans toutes les régions tropicales de la planète comme en Colombie, au Honduras.
Le bananier vit dans les pays tropicaux, sous un climat chaud et humide.
Les bananiers souffrent notamment de l'action des vers nématodes, tels Radopholus similis, Helicotylenchus multicinctus, Meloidogyne, etc. qui détruisent les racines de cette herbacée.
Avant 2002, le genre Musa était divisé en cinq sections: Eumusa, Rhodochlamys, Callimusa, Australimusa, Ingentimusa.
En 2002, des études génétiques ont ramené le nombre de sections à trois selon leur numération chromosomique: section Eumusa regroupant Rhodochlamys x = 11, section Callimusa regroupant Australimusa x = 10, section Ingentimusa x = 7 pour la seule espèce M. ingens.
Musa zebrina Van Houtte ex Planch., (1855) Musa acuminata subsp. acuminata
Musa zebrina f. cerifera Backer, (1924) Musa acuminata subsp. acuminata
Musa zebrina f. rutilipes Backer, (1924) Musa acuminata subsp. acuminata
Le génome du bananier a été séquencé en 2012. Depuis, de nombreuses recherches d'amélioration génétique se sont développées. Les chercheurs du monde entier étudient cette plante géante afin de déterminer les caractéristiques des espèces (résistance à la sécheresse, aux maladies, etc. ). Avant d'être distribuées aux laboratoires, les plantes doivent disposer d'une certification phytosanitaire qui les garantit exemptes de tout virus. Cette étape se déroule dans le Virus Indexing and Sanitation Center de Gembloux Agro-Bio Tech (Université de Liège, Belgique).
Le processus dit de domestication des bananes aurait commencé il y a 7 000 ans dans le sud-est asiatique, aidé par les migrations humaines au travers des différentes îles, et la sélection humaine pour l'obtention d'hybrides sans graines, parthénocarpiques (production de fruits sans fécondation de l'ovule) qui se sont reproduits par multiplication végétative via des repousses[8]. Ces hybrides peuvent être diploïdes mais, le plus souvent, ils sont triploïdes[9]. Actuellement, l'histoire évolutive et les modalités des processus de domestication sont en cours de précision, en particulier à travers des études moléculaires en utilisant les nouvelles technologies de biologie moléculaire.
Dans la même section Eumusa, il existe aussi quelques hybrides de distribution restreinte issus de M. schizocarpa. La section Callimusa a donné des variétés cultivées seulement en Polynésie avec l'espèce M. troglodytarum L. (groupe Fe'i) et quelques hybrides d'autres espèces (par exemple M. jackeyi) de la même section ainsi que M. textilis, cultivée aux Philippines pour la production de fibres.
Le M. basjoo ou bananier japonais, originaire des montagnes de Chine, montre une tolérance au froid particulièrement élevée; la souche dans le sol résiste à des températures pouvant être inférieures à −12°C. Son fruit est grenu et n'est pas comestible.
Découvert récemment, le 'Helen's Hybrid' un hybride M. sikkimensis et M. 'Ney Poovan' produit des fruits comestibles bien qu'avec des graines, et a une souche qui résiste à des températures inférieures à −12°C. (M. sikkimensis serait aussi résistant au froid que basjoo)
Certaines variétés de M. cavendishii ont une taille à maturité inférieure à 2 m et peuvent ainsi être cultivées en pots. Elles sont souvent proposées comme bananiers d'intérieur (température minimale, 5°C).
Typologie
Il existe de très nombreuses variétés de bananes comestibles formant trois groupes d'usage différents:
Banane dessert: la banane fruit classique, sucrée; elle est consommée crue comme un fruit. La très grande majorité des bananes exportées provient d'une monoculture d'un clone nommé Cavendish issu de croisements entre 3 sous-espèces M. Acuminata. Ce clone triploïde (c'est-à-dire disposant de 3 versions de génome M. acuminata) représente à lui seul la quasi-totalité des échanges commerciaux mondiaux et approximativement 50% de la production mondiale [10]. Cette monoculture représente un risque important et éminent pour la production mondiale face à l’adaptation des pathogènes et des maladies des bananiers comme la maladie de la cercosporiose noire[11] et le champignon responsable de la fusariose [12].
Banane à cuire: dans ce groupe, les principales sont les Banane plantain. Plus grosse et plus longue que la banane dessert. Sa chair est un peu rosée, plus pauvre en sucre et plus riche en amidon, ce qui la rend plus ferme, lui conférant une bonne tenue à la cuisson. Elle est de ce fait beaucoup utilisée comme légume. Les Banane plantain sont triploïdes et issues de croisements entre des sous-espèces M. acuminata et l'espèce M. balbisiana.
Banane à bière: comprenant des variétés petites, un peu amères. Mises à fermenter, elles servent à faire de la bière ou du vin.
Autres utilisations
Une espèce, l'abaca(Musa textilis), est cultivée aux Philippines pour la production de fibres; elle est appelée «chanvre de Manille». Cette fibre est principalement employée pour la fabrication de cordes. C'est la plus durable des fibres naturelles.
Dans beaucoup de régions, les feuilles de bananier ont des usages domestiques: toiture, emballage, contenant de cuisson, fibres tressées, etc. Les feuilles de bananier servent à fabriquer des imitations de papyrus, vendues aux touristes en Égypte ou ailleurs. D'autres espèces ont une utilisation ornementale.
Musa a une grande importance économique aux Antilles notamment en Martinique.
Les bananes alimentaires
C'est à la fin du XIXesiècle que la culture de la banane se développe aux Caraïbes puis en Amérique centrale pour devenir une culture industrielle contrôlée par deux grandes firmes nord-américaines: Dole et Chiquita.
La banane représente un aliment de base vital pour des millions de personnes issues de pays en voie de développement; elle était, en 2011, le fruit le plus consommé au monde avec une production mondiale de plus de 100 millions de tonnes (Production 2011, Données de FAOSTAT (FAO)). Elle représente ainsi la 4eproduction mondiale pour l'alimentation humaine après les 3 céréales riz, blé et maïs.
Les principaux pays producteurs sont en Amérique du Sud: Brésil, Colombie, Équateur, Venezuela, et en Amérique centrale: Honduras, Panama, Mexique, en Asie: Chine, Inde, Philippines, Indonésie, Thaïlande, Viêt Nam ou en Afrique: Burundi, Tanzanie.
Le commerce international de la banane a fait l'objet d'un conflit à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) entre l'Union européenne d'une part, et les pays producteurs d'Amérique et les États-Unis d'autre part, en raison des accords préférentiels (quotas et droits de douane réduits) qui liaient cette dernière aux pays dits ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique).
Le commerce de la banane est atypique puisque près de 90% de la production est consommée «sur place» (au sein du pays producteur). L'Inde, la Chine et le Brésil, qui appartiennent au cinq premiers pays producteurs, n'exportent quasiment pas leur production. Le commerce de la «banane d'export» est essentiellement réalisé par trois sociétés américaines dont Chiquita Brands International (anciennement United Fruit Company).
Les principales zones exportatrices sont l'Afrique, les Philippines et l'Amérique centrale et latine tandis que les zones importatrices sont principalement l'Amérique du Nord et l'Europe.
Symbolique
Le bananier est la plante au cœur de la vision hindoue du paradis perdu datant au moins du VIesiècle avant notre ère. Bouddha a fait du bananier le symbole de la vanité des biens, de la fragilité et de l'instabilité des choses, parce que sa partie aérienne meurt après avoir fructifié.
En Thaïlande, nombreux sont ceux qui croient en la présence d'un "esprit" bienfaisant ou malfaisant appelé Dame de l'arbre (Nang Mai /นางไม้ ou ผีต้นไม้) dans certains arbres: ainsi Dame Tani ( นางตานี / Nang Tani) habite un bananier et punit les hommes infidèles (c'est pourquoi elle est crainte et que les thaïlandais refusent de planter des bananiers dans l’enceinte d’une maison)[14].
Richard C. Vogt (trad.Valérie Garnaud-d'Esru), La forêt vierge à la loupe [«Rain Forest»], Larousse, , 64p. (ISBN978-2-03-589818-0), Les étages de végétation pages 8 et 9
Alexander von Humboldt, Essai politique sur le royaume de la Nouvelle-Espagne, Chez Antoine-Augustin Renouard, (lire en ligne), chap.IX (livre IV) («État de l’agriculture de la Nouvelle-Espagne»)
De Lapeyre de Bellaire, L., Fouré, E., Abadie, C. & Carlier, J. Black leaf streak disease is challenging the banana industry. Fruits 65, 327–342 (2010)
Dita, M. A., Waalwijk, C., Buddenhagen, I. W., Souza, M. T. & Kema, G. H. J. A molecular diagnostic for tropical race 4 of the banana fusarium wilt pathogen. Plant Pathol. 59, 348–357 (2010)
Marie Laureillard et Vincent Durand-Dastès, Fantômes dans l'extrême-orient d'hier et d'aujourd'hui - Tome 2, Presse de l'Inalco, , 453p. (ISBN978-1-78831-141-0, lire en ligne), Amour, vengeance, mort: les fantômes dans la littérature et le cinéma contemporains thaïlandais (par Theeraphong Inthano) / Love, revenge, death: ghosts in Thai contemporary literature and cinema / ความรัก ความแค้น ความตาย: ผีในวรรณกรรมและภาพยนตร์ไทยร่วมสมัย note 4 paragraphe 1
Le Bananier et sa culture, André Lassoudière, éditions Quae 2007.
Jenny, Ch., Carreel, F., Tomekpé, K., Perrier, X., Dubois, C., et al. (1999). «Les Bananiers». In Diversité génétique des plantes tropicales cultivées, ed. P. Hamon, M. Seguin, X. Perrier, J. C. Glaszmann. p.113-139. Repères. Montpellier: CIRAD
Paul Hubert, Le bananier: établissement de bananeries, bananes, fruits, bananes sèches, farine de bananes, fibres, devis raisonnés, étude industrielle, exportation, commerce, problème économique, Paris, H. Dunod et E. Pinat, , 1 vol. (X-222 p.): fig.; in-8 (BNF30622890)
(en) Jenuwein, H. (1988) Avocado, Banana, Coffee. How to grow useful exotic plants for fun. British Museum Natural History.
(nl) Pijpers, D., Constant, J.G.& Jansen, K. (1985) Fruit uit alle windstreken. Het Spectrum.