Loading AI tools
comtesse d'Angoulême, reine d'Angleterre mariée à Jean Sans Terre De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Isabelle d'Angoulême ou Isabelle Taillefer[1] (v. 1188/1192-)[2] est une aristocrate de la haute noblesse aquitaine. Elle est l'héritière de la maison Taillefer, comtesse d'Angoulême de son plein droit (suo jure).
Reine d'Angleterre Dame d'Irlande Duchesse d'Aquitaine Duchesse de Normandie Comtesse d'Anjou, du Maine et de Touraine Comtesse d'Angoulême Dame de Lusignan Comtesse de la Marche |
---|
Naissance | |
---|---|
Décès | |
Sépulture | |
Surnom |
la Comtesse-reine |
Autres noms |
Isabelle d'Angoulême |
Époque |
XIIe – XIIIe siècles |
Période d'activité | |
Famille | |
Père | |
Mère | |
Conjoint | |
Enfants |
Grands-Parents | |
---|---|
Conflit | |
Héritier |
En 1200, elle devient reine d'Angleterre (1200-1216) à la suite de son mariage avec le roi Jean sans Terre (1166-1216). Veuve, elle épouse en secondes noces, en 1220, Hugues X de Lusignan (v. 1182-1249), seigneur de Lusignan, comte de la Marche (1219-1249).
Elle est l'unique enfant d'Aymar II Taillefer (v. 1160-), comte d'Angoulême (v.1186-1202), et d'Alix de Courtenay (v. 1160-), petite-fille du roi de France Louis VI (1081-1137)[2]. Isabelle est issue de la Maison capétienne de Courtenay.
Elle est la nièce des deux précédents comtes d'Angoulême : Vulgrin III (♰ av. ) et Guillaume VII Taillefer (♰ 1186) ; ainsi que de Pierre II de Courtenay[3] (1155-1219) et de Robert Ier de Courtenay (v. 1168-1239), seigneur de Champignelles, nommé bouteiller de France par Louis VIII[4].
Elle est la cousine de Mathilde d'Angoulême (av. 1181-ap. ), comtesse de la Marche (ap. 1200-1219), de Robert (v. 1201-1228) et de Baudouin II de Courtenay (v. 1217/18-1273), empereurs latins de Constantinople[5],[6].
En l'an 1199, alors qu'elle est à peine âgée d'une dizaine d'années, elle est promise au seigneur de Lusignan, Hugues IX le Brun[7] qui reçoit la même année le comté de la Marche du roi d'Angleterre Jean sans Terre[8]. Leur mariage établirait Hugues IX le Brun comme futur comte d'Angoulême. Il pourrait ainsi contrôler un vaste territoire, riche et stratégique, séparant les possessions et les voies de communication en Aquitaine du roi d'Angleterre entre Bordeaux et Poitiers, centré sur la place forte d'Angoulême[2]. Le roi anglais, voyant le danger de cette union, l'enlève à son vassal et épouse la jeune Isabelle Taillefer.
Les chroniqueurs commentant les faits rapportent que Jean sans Terre aurait été si ébloui par la beauté d'Isabelle qu'il l'aurait ravie et épousée[2]. En réalité, ses intentions sont bien moins romantiques et bien plus politiques[2]. En effet, en entrant en possession du comté d'Angoulême, la famille des Lusignan serait devenue si puissante qu'elle aurait pu devenir une sérieuse rivale et déstabiliser l'empire Plantagenêt dans le Nord-Aquitaine. C'est bien pour faire obstacle à cette menace que Jean sans Terre épouse la jeune fille. Le mariage a lieu à Angoulême, le [2]. Les nouveaux époux se rendent ensuite à Chinon, puis partent pour l'Angleterre, où Isabelle est couronnée le [2]. Ce mariage cause un grand émoi en France. Les Lusignan, Hugues IX le Brun, son frère Raoul Ier d'Exoudun, comte d'Eu et leur oncle Geoffroy Ier de Lusignan, seigneur de Vouvant et de Mervent, se soulèvent et attaquent des places fortes du Plantagenêt en Poitou.
Un accord semble avoir été trouvé le avant le retour des hostilités. En , Jean fait saisir par surprise les domaines Lusignan[9]. Les Lusignan en appellent au roi de France, Philippe II Auguste. Ce dernier condamne finalement Jean sans Terre pour forfaiture. La commise est prononcée, le , sur ses biens au sein du royaume de France[10],[11] ; biens qui doivent donc revenir au roi. Il s'ensuit trois années de campagnes militaires contre les possessions du roi Plantagenêt, qui perd la Normandie, le Maine, la Touraine, l'Anjou puis le Poitou[12],[13].
Du mariage d'Isabelle avec Jean sans Terre naissent cinq enfants qui atteignent tous l'âge adulte[2]. Les chroniqueurs contemporains mentionnent qu'elle serait infidèle[2]. Quoi qu'il en soit, elle n'est que rarement en compagnie de son époux après 1205[2]. En 1214, ils vont ensemble à Poitiers, Jean ayant finalement réussi à prendre le contrôle de l'héritage d'Isabelle, le comté d'Angoulême[2] auquel il rattache les seigneuries de Cognac, Jarnac et Merpins.
Durant la première guerre des Barons, qui oppose une partie des barons anglais au roi, elle est mise en relative sécurité dans l'ouest du royaume[2].
À la mort de Jean sans Terre en , son fils aîné devient roi d'Angleterre sous le nom d'Henri III. Il semble que la comtesse-reine ait alors été exclue du cercle restreint des nouveaux conseillers du roi, son fils[2]. Elle se voit aussi confisquer une partie de son douaire, à la suite de quoi elle abandonne ses enfants en Angleterre et part en France pour pouvoir s'occuper de son héritage[2].
Durant les trois années suivantes, elle reprend progressivement le contrôle effectif de ses terres, écartant peu à peu les administrateurs qu'avait nommés son mari[2]. En ou , elle épouse Hugues X de Lusignan, comte de la Marche[14],[15],[16],[17], le fils de son ancien fiancé. Celui-ci vient de succéder à son père en 1219 et leur mariage permet de former un vaste ensemble territorial avec les fiefs Lusignan en Poitou, la Marche et l'Angoumois ce que Jean sans Terre redoutait en 1200.
Hugues X de Lusignan demande immédiatement à entrer en possession du douaire de sa femme[2]. Henri III d'Angleterre lui donne donc les terres anglaises[18], normandes, et surtout les seigneuries de Saintes et Niort[2]. En 1221, après une dispute, ses terres anglaises sont brièvement saisies[2]. Elles sont définitivement confisquées en , lorsque Hugues X de Lusignan s'allie au roi de France Louis VIII, ce qui déclenche l'invasion du Poitou par les armées françaises.
En , Hugues X de Lusignan fait hommage lige à Louis VIII en contrepartie de Saintes[19], des droits comtaux sur la Saintonge[20], d'Oléron[21] et de la vicomté de Châtellerault pour son parent Geoffroy II de Lusignan[22],[23]. Ce changement d'alliance fait passer sous domination capétienne le nord aquitain : Poitou[24], Saintonge, Angoumois, Marche et fragilise Bordeaux et les possessions anglaises de Gascogne. Louis VIII ne conquiert pas réellement le Poitou par cet accord, il en chasse simplement le roi d'Angleterre et ses agents et remplace leur domination lointaine par la sienne. Le traité de Bourges amorce le contrôle capétien du Poitou aux dépens de ses concurrents Plantagenêt.
À cette époque, Isabelle d'Angoulême et Hugues X de Lusignan font partie des grands barons du royaume de France. Le couple possède l'Angoumois, la Marche, la Saintonge, une partie de l'Aunis, Oléron et plusieurs domaines et places fortes en Poitou. Ses possessions sont à la frontière des domaines Plantagenêt et Capétiens. Sans leur autorisation aucun des deux souverains ne peut entrer en Angoumois. Isabelle d'Angoulême et son époux ont créé un État dans l’État, quasi indépendant.
L'effondrement de l'autorité de la couronne anglaise dans le nord-aquitain et la faible influence du pouvoir capétien, permet au couple de mener une politique expansionniste et de surenchère. Cependant, si la domination du couple Lusignan-Taillefer est incontestable sur le "Grand Poitou"[25],[26], l'opportunité qu'il a offert aux Capétiens d'installer leur légitimité sur une partie de l'héritage d'Aliénor d'Aquitaine est annonciateur des évènements de 1241.
Hugues X de Lusignan échoue dans sa conquête de l'Aquitaine et de Bordeaux. La menace d'un débarquement anglais, qui avait pesé sur l'Aunis en , incite le seigneur de Lusignan à renouer diplomatiquement avec le fils aîné d'Isabelle[27]. Durant le siège d'Avignon, pendant l'été 1226, Hugues X de Lusignan s'entend avec deux autres grands seigneurs que sont Pierre Ier Mauclerc, duc de Bretagne et Thibaut IV, comte de Champagne[28],[29]. Par l'entremise du duc de Bretagne, il obtient le l'assurance que s'il acceptait de se rallier au roi d'Angleterre le traité du serait observé[30].
Le décès prématuré de Louis VIII, de dysenterie aiguë à Montpensier le , laisse la couronne à un jeune souverain de douze ans et va bouleverser l'équilibre politique du royaume. Le sacre du jeune Louis IX a lieu le [31] ; Hugues X de Lusignan et Isabelle d'Angoulême en sont absents.
Toutefois, en 1226, la mère et le fils se réconcilient : le , Henri III Plantagenêt propose un nouveau traité qui doit faire revenir à son service le comte de la Marche, le vicomte de Thouars et le seigneur de Parthenay[32]. En échange de l'hommage et de la fidélité du comte de la Marche, le roi d'Angleterre accepte de lui remettre en fief, transmissible à ses héritiers, Saintes et la Saintonge, Pont-l'abbé, la forêt de Baconais, l'île d'Oléron, les châteaux de Merpins et de Cognac[33] et d'autres importantes concessions, comme la ville de Niort[34]. Le , l'ambassadeur d'Henry III, l'archidiacre de Chichester porteur du traité, arrive à Lusignan en même temps que celui de Blanche de Castille. Hugues X de Lusignan informe Henri III qu'il va rencontrer la régente le [35]. Le couple ouvre ainsi une politique des enchères entre Capétiens et Plantagenêt qui va se concrétiser par le traité de Vendôme.
Le , Isabelle Taillefer et son époux, rencontrent la reine Blanche à Vendôme[36]. Le jeune Louis IX, sur les conseils de sa mère, est des plus magnanimes et reçoit leurs hommages. Hugues X de Lusignan se fait octroyer par la reine Blanche de Castille la somme colossale de 10 600 livres tournois par an pendant dix ans. La perte du douaire d'Isabelle d'Angoulême est compensé[37]. Leur fils aîné, le futur Hugues XI le Brun, sera marié à Isabelle de France, unique sœur de Louis IX, et leur fille Isabelle de Lusignan promise à Alphonse de Poitiers, frère cadet du roi. En contrepartie, Hugues X de Lusignan doit rendre à la régente tous les biens qu’il tenait de Louis VIII le Lion. Il promet, en outre, la soumission de ses vassaux et surtout de ne pas s’allier aux ennemis du royaume[38].
Cependant, le projet de mariage entre Alphonse de France avec Isabelle de Lusignan est refusé par la papauté à cause de leur consanguinité au quatrième degré[39]. De plus, de nouvelles priorités politiques, validées lors du traité de Paris le [40],[41], enterrent définitivement ce qui a été décidé à Vendôme. Alphonse de Poitiers épouse en 1234, Jeanne, l’héritière du comté de Toulouse[42].
L'étude des enchères qui opposent les rois de France et d'Angleterre entre 1223 et 1242 montre qu'à partir de 1227, il n'est pas question pour Isabelle et le comte de la Marche, son époux, de remettre en question leur allégeance capétienne.
Hugues X de Lusignan conserve le château et la ville de Saint-Jean-d'Angély ainsi que le grand fief d'Aunis jusqu'en 1241, année où Alphonse, frère cadet de Louis IX, est déclaré majeur et reçoit le comté du Poitou en application du testament de leur père Louis VIII. Cette même année, en juillet à Poitiers, Hugues X de Lusignan prête hommage au comte Alphonse de Poitiers[43]. Cependant, Isabelle et Hugues X de Lusignan n'acceptent pas de perdre l'autonomie qu'ils avaient auparavant : le , Hugues X de Lusignan établit une alliance défensive avec le comte Raymond VII de Toulouse et le roi Jacques Ier d'Aragon[44].
C'est sans doute sous l'influence d'Isabelle qu'Henri III d'Angleterre et Hugues X de Lusignan organisent un front commun contre le roi de France Louis IX et son frère Alphonse de Poitiers afin de ne pas perdre la domination que le couple exerce sur le nord de l'Aquitaine. En , Henri III d'Angleterre renonce à de nombreux droits qu'il possède en Aquitaine, notamment sur les châtellenies de Jarnac, Cognac, Merpins en faveur du couple et de leurs héritiers en échange de leur hommage et de leur service[45],[46]. Le même mois, Hugues X de Lusignan insulte le comte Alphonse de Poitiers dans son palais et retire son allégeance[47]. À la tête d'une partie de la noblesse d'Angoumois et de Saintonge, Hugues et Isabelle se liguent contre leur suzerain. À ce soulèvement s'associent plusieurs seigneurs poitevins et gascons. Hugues X de Lusignan reçoit le soutien de Raymond VII, comte de Toulouse, et l'aide du roi d'Angleterre Henri III et de son frère Richard, comte de Cornouailles.
Le roi anglais organise alors, à grands frais, une intervention armée et débarque à Royan le , avant de rejoindre à Pons son beau-père, Hugues X de Lusignan[48]. Ses troupes sont battues à Taillebourg, le [49] puis le surlendemain à Saintes[50]. C'est à la suite de cette défaite que le couple, vaincu et contraint, se soumet au roi de France.
Le à Pons, Isabelle, son époux et leurs enfants se soumettent à Louis IX. Le règlement de la révolte féodale est sévère : le roi de France garde les terres conquises et les attribue à son frère Alphonse de Poitiers ; soit un tiers des domaines Lusignan est confisqué. Le roi reçoit Hugues X de Lusignan et Isabelle à hommage lige pour le comté d'Angoulême[51].
Le , Louis IX impose en outre à Hugues X la remise pour quatre ans de ses châteaux de Merpins et Château-Larcher, pour huit ans du château de Crozant, à charge pour le couple de payer les frais de garde[52],[53],[54],[55]. De plus, les fils d'Isabelle et d'Hugues X de Lusignan devront prêter hommage au comte de Poitou pour les possessions qu'ils recevront de leurs parents en héritage[56],[57], morcelant encore plus le lignage principal.
En , au couvent des franciscains à Angoulême, Isabelle Taillefer et Hugues X de Lusignan partagent leurs domaines entre leurs enfants[58],[59].
Isabelle d'Angoulême se retire peu après, en 1243, à l'abbaye de Fontevraud[61]. C'est là qu'elle meurt, le [62],[63],[64],[65],[66], après avoir pris le voile sur son lit de mort[2]. Elle est inhumée dans la salle capitulaire de l'abbaye[2]. En 1254, son fils Henri III fait transférer son corps à l'intérieur de l'abbatiale, dans une tombe proche de celles de ses ancêtres Plantagenêt[2]. Toutefois, un historien local angoumoisin mentionne son tombeau dans la chapelle Saint-Nicolas de l'abbaye de La Couronne, près de celui de son père le comte Aymar et d'un de ses fils Vulgrin mort jeune, tombeau qu'on pouvait encore voir à son époque au XVIe siècle, avant la ruine de l'abbaye[67]. Malgré d'importantes tensions familiales, des obsèques sont célébrées en Angleterre, et des dons à des maisons religieuses sont faits en son nom[2].
Pour l'historien britannique Nicholas Vincent, Isabelle d'Angoulême semble avoir été une femme de caractère, puisqu'elle fut capable d'imposer sa domination sur son comté d'Angoulême[2]. Elle manqua néanmoins d'affection maternelle pour ses enfants anglais issus du roi Jean sans Terre, puisqu'elle les abandonna en Angleterre en 1217[2]. Pour Vincent, son caractère difficile, altier, relevé par quelques chroniqueurs, peut peut-être s'expliquer par son mariage précoce.
Après la mort de sa mère, Henri III s'occupe de ses demi-frères et sœurs et contribue à leur enrichissement[68]. En 1247, il en fait venir quatre[69] à Westminster[70]. Aymar de Lusignan se voit proposer un siège épiscopal, étudie à Oxford[71], et devient évêque de Winchester en 1250[72] ; Guillaume de Valence est marié à Jeanne de Montchensy, une cohéritière de la famille le Maréchal qui lui apporte le comté de Pembroke ; enfin, Alix de Lusignan épouse Jean Ier de Warenne, 6e comte de Surrey[71],[73]. Ces rapprochements avec les Lusignan effectués par Henri III ont probablement aussi une vocation politique : en effet, à cette époque, le roi anglais craint une invasion française du duché d'Aquitaine[71].
Elle a cinq enfants de sa première union avec le roi Jean d'Angleterre, tous parvenus à l'âge adulte[2] :
De sa seconde union en 1220, avec Hugues X de Lusignan naissent neuf enfants, tous parvenus à l'âge adulte, qui sont :
Avers : Navette, 94 × 65 mm[76].
Dame debout, de face, coiffée d'un touret, la robe serrée à la taille, portant un manteau posé sur les épaules et plissé aux pieds, tenant de la main droite une branche fleurie et la main gauche portant un oiseau.
Légende : ✠ YSABEL DI GR REGIN • ANGLIE DNA HYBERNIE
Légende transcrite : Ysabel Dei gratia Regina Anglie domina Hybernie
Références[77],[78],[79],[80],[81]
Contre-sceau 1243 : Navette, 94 × 65 mm[82]
Dame debout, de face, coiffée d'une guimpe, la robe serrée à la taille, portant un manteau, tenant de la main droite une branche fleurie et de la main gauche une croix sur laquelle est posé un oiseau.
Légende : ✠ YSABEL DUCISSA NORMANOR' AQUIT COMIT ANDEGAVORUM
Légende transcrite : Ysabel Ducissa Normannorum et Aquitananorum Commitissa Andegavorum
Dans le film Robin des Bois de Ridley Scott, sorti en 2010, son rôle est joué par Léa Seydoux[87].