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organisation féministe libertaire espagnole De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Mujeres Libres (« Femmes libres » en français) est une organisation féministe libertaire[1] espagnole, ainsi qu'une revue éponyme.
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Dissolution |
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30 000 |
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Créée en avril 1936, dans le sillage des premières féministes catalanes telles Teresa Claramunt et Soledad Gustavo, et dissoute en février 1939, Mujeres Libres est active durant la révolution sociale espagnole de 1936 et la guerre d'Espagne.
Mujeres Libres est la première organisation féministe autonome prolétarienne en Espagne. Son but est de mettre fin au « triple esclavage des femmes : l’ignorance, le capital et les hommes ». Si quelques-unes des fondatrices exercent des professions libérales, la vaste majorité de ses membres sont issues des classes ouvrières. Les femmes de Mujeres Libres visent à la fois à surmonter les obstacles de l’ignorance et de l’inexpérience qui les empêchent de participer en tant qu’égales à la lutte pour une société meilleure, et à combattre la domination des hommes au sein même du mouvement libertaire[2].
Mujeres Libres met en place des campagnes d’alphabétisation, des cours techniques et professionnels ainsi que des formations politiques pour les femmes, en plus d’organiser collectivement la production alimentaire pour les milices révolutionnaires qui résistent aux franquistes, de mettre sur pied des cliniques médicales et de participer à la formation des infirmières et des miliciennes.
Avec ses 20 000 adhérentes (en ), provenant majoritairement des milieux populaires, Mujeres Libres défend l’émancipation des femmes et leur participation à la lutte révolutionnaire. L’organisation se réclame d’un « féminisme prolétarien »[3] dans le but de se dissocier du féminisme libéral qui prône l’égalité des femmes sans contester les rapports de domination de classes. Leurs « camarades » n'étaient pas pour autant enclins à les reconnaître politiquement comme une organisation autonome au sein du mouvement libertaire[4].
Malgré l'égalité entre les sexes prônée par les organisations libertaires espagnoles telles que la FAI, la CNT et la FIJL, il était patent que les femmes avaient besoin d'une organisation spécifique afin d'être mieux entendues et plus spécifiquement défendues.
En 1933 est formé à Barcelone le Grupo Cultural Femenino (« Groupe culturel des femmes »), qui publie une revue, Cultura integral y femenina (1933-1936)[5].
Au cours de la première apparition publique de la CNT à la foire du livre de Barcelone, des jeunes femmes vendent à la criée des ouvrages traitant de la maternité consciente. La revue Estudios, à l'avant-garde d'une campagne en faveur de l'éducation sexuelle et de l'émancipation féminine, aura un tirage qui oscillera entre 65 000 et 75 000 exemplaires[5].
Le groupe se développe avec le soutien des femmes de la revue Mujeres Libres, parue à partir d', animée par Lucía Sánchez Saornil[6], Mercedes Comaposada Guillén et Amparo Poch y Gascón[7].
Ces groupes, rejoints par des militantes de la Confédération nationale du travail comme Lola Iturbe, sont à l'origine de l'organisation Mujeres Libres, créée en .
Cette organisation mène une lutte sur deux fronts : pour la révolution sociale, et pour la libération des femmes. Elle est, à ce titre, exemplaire des mouvements libertaires que connut l'Espagne dans ces années.
La militante Anna Delso décrit cette démarche : « La capacité d’organisation des femmes me laisse stupéfaite. Plusieurs d’entre elles ont un rôle prépondérant dans leur syndicat, CNT, et font partie en même temps du comité d’autogestion de leur usine. Elles se trouvent au même niveau d’égalité que les hommes dans une société non hiérarchisée. C’est une transformation totale et radicale de la vie sociale. Les femmes espagnoles en avaient tant besoin ! Elles se sont débarrassées de l’esclavage que leur imposaient le clergé, le mari, le père, les frères et tous les autres. À tous ceux qui nous disent : Oui, nous sommes d’accord avec vos revendications de femmes, mais il faut laisser tout cela pour après, car votre attitude peut créer des divisions. Nous leur répondons : Pour après quoi ?[pas clair] C’est maintenant ou jamais ! […] Leurs idées sont une chose et leur femme et leur famille autre chose. Leur femme est à eux, intouchable. Comme les abeilles vont de fleur en fleur, eux peuvent aller de femme en femme. Et ils trouvent ça très naturel, mais ils ne peuvent accepter qu’une femme puisse en faire autant. La sempiternelle devise de la femme, bonne mère, bonne épouse, fidèle et obéissante, doit changer »[8].
La plupart des Mujeres Libres sont des travailleuses. De 1936 à 1939, elles conduisent les tramways et négocient avec le syndicat des transports de Madrid l'ouverture d'une auto-école pour remplacer les hommes partis au front. Elles ouvrent des centres de formation professionnelle, apprennent à tirer et à sauter en parachute. Elles sont contraintes de mendier auprès des syndicats le moindre local, le moindre subside[5].
Une importante réflexion est menée sur la meilleure éducation à donner aux enfants, privilégiant « la méthode de l'aide permettant l'épanouissement des richesses intrinsèques de chacun », évitant les punitions et les prix, « la mesquine compétition ». Une place importante est accordée à la puériculture, à l'éducation sexuelle, définie selon les termes de l'époque, comme « la connaissance du fonctionnement physiologique de notre organisme, plus spécialement l'aspect eugénique et sexologique »[9].
À Barcelone, Mujeres Libres est notamment à l'origine de la création de la Casa de la dona treballadora et de la campagne en faveur de la réinsertion des prostituées dans les Liberatorios de prostitucion. La prostitution est fermement combattue. Leur but n'est pas de l'aménager mais de l'éradiquer, en rendant les femmes économiquement indépendantes et en réalisant une profonde révolution sociale et morale. Elles se désolent d'ailleurs de voir nombre de leurs camarades hommes fréquenter les maisons de passe[9].
Dans son ouvrage Carnets de la guerre d'Espagne, la poétesse et écrivaine anglo-australienne Mary Low note : « Les prostituées s'occupèrent finalement elles-mêmes de leurs propres intérêts et surent faire valoir leurs droits. Un jour, elles comprirent qu'elles aussi pouvaient trouver leur place dans la révolution. Alors elles flanquèrent à la porte les propriétaires des maisons où elles travaillaient et occupèrent les "lieux de travail". Elles se proclamèrent les égales de tous. Après beaucoup de débats houleux, elles créèrent un syndicat qui fut affilié à la CNT. Tous les bénéfices étaient partagés de façon égale. Sur la porte de chaque bordel, un écriteau remplaça le Sacré Cœur de Jésus. Il disait : VOUS ÊTES PRIÉ DE TRAITER LES FEMMES COMME DES CAMARADES. Sur ordre du Comité. »[10].
Le , se tient à Valence le premier et unique congrès de la Fédération nationale de Mujeres Libres avec des délégations de Barcelone, Cuenca, Elda, Guadalajar, Horche, Lleida, Madrid, Mondejar, Tendilla, Valence, Yebra, etc.[11] Mujeres Libres se veut le quatrième pilier du mouvement libertaire espagnol.
En , la déception est grande quand le Mouvement libertaire et la CNT refusent de considérer la Fédération nationale de Mujeres libres comme une de ses composantes spécifiques[9],[5].
Mujeres libres regroupe à son apogée plus de 20 000 femmes en 1938. Elle s'est auto-dissoute dans les derniers mois de la République espagnole, alors que la déroute de l'armée républicaine ne fait plus de doute, lors de la chute de la Catalogne, bastion de l'association.
Jusqu'au bout, elles refusent de s'intégrer aux comités de l'organisation mise en place par le Parti communiste espagnol, l'Asociacion de Mujeres Antifascistas (AMA), bien que cette attitude intransigeante les prive de tout appui matériel, un appui qu'elles ne peuvent malheureusement pas obtenir non plus de leurs propres camarades libertaires[9].
Dans les années 1970, durant la Transition espagnole, il y eut plusieurs tentatives pour refonder le mouvement. Plusieurs groupes furent formés, mais ils furent pour la plupart assez rapidement auto-dissous.
L'association Mujeres Libres a publié un journal éponyme[12] (disponible en ligne).
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