Tibet sous le contrôle administratif de la dynastie Yuan
gouvernance du Tibet par la dynastie sino-mongole des Yuan (1234-1368) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
De 1270 à 1350, le Tibet se trouve sous le contrôle administratif de la dynastie Yuan à la suite de sa conquête par les chefs mongolsKödan Khan et Möngke Khan et l'unification de ses principautés religieuses et laïques. Fondée par Kubilaï Khan, la dynastie Yuan s'appuie sur la lignée des sakyapa du bouddhisme tibétain pour administrer le Tibet, recevant en échange ses enseignements spirituels. Depuis Pékin, un conseil général (xuānzhèngyuàn) administre les affaires religieuses et séculières du Tibet sous la houlette du tuteur ou précepteur impérial (dishi帝師) nommé par l'empereur. Les régions de l'U et du Tsang sont divisées en 13 myriarchies (trikkor tchousoum), qui doivent chacune verser un tribut aux Mongols et leur fournir des soldats. À leur tête se trouvent treize myriarques (tripeun) nommés parmi les familles nobles ou les lignées religieuses.
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Pour certains auteurs, toutefois, la relation du Tibet à l'Empire mongol n'est pas que celle de vassal à suzerain, mais comporte des échanges religieux, culturels, ethniques et politiques, comme le font les Mongols avec toutes leurs colonies.
Le premier précepteur impérial tibétain apporte aussi une nouvelle philosophie de gouvernance, et crée en 1268 une écriture basée sur l'écriture tibétaine, dont l'alphabet est choisi par Kubilai Khan, pour la communication universelle de l'empire, contribuant ainsi à son unification.
En 1207, devant le déferlement des armées mongoles de Gengis Khan, des chefs tibétains – le chef des Tselpa et un roitelet de U – décident de se soumettre et de payer tribut à ce dernier pour éviter à leurs territoires d'être envahis. Cependant, à la mort du chef mongol en 1227, les chefs tibétains cessent de payer ce tribut[1],[2].
Avant 1240, il n'y a pas de contacts entre le Tibet central (Ü et Tsang) et les Mongols[4]. Mécontent que les Tibétains aient pris prétexte de la mort de Gengis Khan pour ne plus payer le tribut convenu, Ködan Khan, petit-fils de Gengis Khan et fils d'Ögedaï Khan, décide d'envahir le Tibet en 1240. Une armée de 30 000 hommes, sous la conduite du général Doorda Darquan, atteint Phanpo au nord de Lhassa et détruit deux monastères kadampa[5],[6]. Ködan Khan renonce cependant à ses projets et fait venir à sa cour, en 1244, Sakya Pandita, le chef de l'école dite sakyapa du bouddhisme tibétain, dont la renommée est parvenue jusqu'à lui, pour lui enseigner les préceptes du bouddhisme. En contrepartie, il lui confie l'autorité temporelle sur le U et le Tsang[7],[8]. Selon Elliot Sperling, Sakya Pandita demande par lettre, en 1249, aux différentes personnalités tibétaines, de se soumettre à l'autorité mongole. Pour Sperling, c'est l'époque généralement considérée comme le début de la tutelle des Mongols sur le Tibet[9]. Cependant, pour Thomas Laird, il est impossible de déterminer combien de principautés tibétaines se soumirent, l'accord de Sakya Pandita et de Ködan Khan ayant pu rester théorique[10].
La deuxième invasion, entre 1251 et 1253, décidée par Möngke Khan et visant à soumettre à la domination mongole toute la région jusqu'à Damxung (Dangquka), au nord-est de Lhassa, voit deux armées, l'une commandée par Khortaï[11], l'autre commandée par Dupeta[12], attaquer le pays en tenaille, tuant, pillant, incendiant des maisons, détruisant des temples[13],[14]. Dandar est chargé des troupes du Sichuan et Khortaï de celles du Tibet[15].
En 1253, Möngke Khan envoie son frère Kubilaï Khan conquérir le royaume de Dali (aujourd'hui province du Yunnan) au Sud-Est du Tibet[16],[17],[18]. Duan Xingzhi (段兴智), roi de Dali, se soumet, Kubilaï le laisse en liberté et lui donne le titre de Maharaja (chinois: 摩诃罗嵯,móhēluócuó, également écrit mo-ho-lo-ts'o)[19].
Kubilai Khan succède à Möngke en 1260, conquiert la Chine de la dynastie Song du Sud en 1279 et, sacré empereur, y fonde la dynastie Yuan. Il renforce la tutelle mongole sur le Tibet en s'appuyant sur la lignée sakyapa[20],[21].
Selon Warren W. Smith, les relations du Tibet avec la dynastie Yuan lui évitèrent d'être conquis et permirent la promotion du bouddhisme tibétain[22].
Mise place d'une administration centralisée
Kubilaï met en place une organisation administrative centralisée pour unifier principautés religieuses et laïques. À Sakya, siège un chef administratif et militaire, le gouverneur (peuntchen ou pönchen), dont la juridiction s'étend sur les provinces de l'U et du Tsang. Les provinces de l'Amdo et du Kham sont elles aussi pourvues d'un peuntchen. Chaque peuntchen est subordonné au tuteur ou précepteur impérial ou dishi (帝师,dìshī) qui est nommé par l'empereur et qui siège à Khanbalik (capitale de la dynastie Yuan, aujourd'hui Pékin). À partir de 1268, un conseil général(en) (宣政院,xuānzhèngyuàn) administre les affaires religieuses et séculières du Tibet sous la houlette du dishi, généralement un membre du clan Kheum qui dirige la lignée sakyapa. Au dishi, sont subordonnés treize myriarques ou tripeun disposant chacun d'une région militaire. Ils sont nommés parmi les familles nobles ou parmi les lignées religieuses. Le U et le Tsang sont divisés en 13 myriarchies ou trikkor tchousoum, qui doivent chacune verser un tribut aux Mongols et leur fournir des soldats[23]. Les monastères de la principauté sakyapa en sont exemptés[24],[25]. «En 1271, quand les Mongols instaurent la dynastie des Yuan, le Tibet des Sakyapa est donc une des dépendances théoriques du nouvel empire»[23].
La première mesure administrative prise par les Mongols est un recensement couvrant le Tibet central (le Tibet oriental et la presque totalité du Tibet occidental étant exclus). La deuxième mesure est l'instauration d'un service postal permettant au gouvernement impérial à Pékin de recevoir des nouvelles en temps opportun et de transmettre rapidement ses ordres au Tibet: 24 relais sont créés depuis la frontière chinoise jusqu'à Sakya. Ces mesures et d'autres concernant les impositions et les milices, sont instaurées en 1268-1269[26]. Les Yuan instaurent également l'usage du calendrier et des lois qui prévalent dans l'ensemble des provinces chinoises. Il interviennent directement dans les grandes décisions administratives comme la nomination et le renvoi des hauts fonctionnaires. «Une nouvelle phase d'unification commence»[27].
Instauration de la régence sakyapa
Le moine tibétain Drogön Chögyal Phagpa (1235-1280), chef de l'école sakyapa, rejoint la cour mongole de Kubilaï Khan et devient le précepteur spirituel de ce dernier. Kubilaï le nomme régent (dishi) de la région et lui donne le «pouvoir de régence sur les treize myriarchies du Tibet»[28]. Drogön Chögyal Phagpa assure alors le «gouvernement religieux et temporel du Tibet»[29].
Phagpa est un des deux principaux acteurs de la relation «maître religieux-protecteur laïc», dite chö-yon, entre les Tibétains et les Mongols[28]. Les rapports entre l'empereur et le moine seront délicats. En vertu de cette relation, Phagpa estime être davantage qu'une potiche mise sur le trône du Tibet central. Il exige ainsi que Kubilaï soit assis un degré plus bas que lui lorsqu'il dispense ses enseignements en privé à l'empereur, quitte à ce que lui-même soit assis un degré plus bas que son protecteur dans les autres contextes[30].
À la demande de Kubilaï de disposer, pour la communication universelle de l'empire, d'une écriture officielle pouvant servir à la fois à la langue mongole et à la langue chinoise, il crée l'écriture phags-pa, fondée sur l'écriture tibétaine[14],[31]. Cette écriture, dont l'usage sera rendu obligatoire dans les documents officiels dès le deuxième mois de 1269[32], finira par tomber en désuétude et se limitera aux sceaux des religieux après la fin de la dynastie Yuan en 1368. Au même moment, dans l'empire, se développe l'écriture Han'er, qui fait appel à des caractères chinois pour l'écriture de la langue mongole et se trouve utilisée elle aussi dans les écrits impériaux, lois et autres documents officiels.
Selon Melvyn Goldstein, si l'historiographie chinoise contemporaine considère cette période comme celle où le Tibet fit, pour la première fois, partie de la Chine, les nationalistes tibétains en revanche reconnaissent uniquement que le Tibet, comme la Chine, a été soumis par les Mongols et incorporé à l'Empire mongol ayant pour centre la Chine[35].
Dans l'ouvrage Le Tibet est-il chinois?, les auteurs affirment que si le Tibet se soumit à l'empire mongol et qu'il fut gouverné, en majeure partie, par la branche de l’empire mongol qui s’établit en Chine, l'histoire dynastique de l'empire Yuan (c'est-à-dire le Yuan Shi, écrit la première année de la dynastie Ming par Song Lian) exclut les territoires tibétains de la Chine[36],[37].
Relation de «maître spirituel» à «protecteur laïc»
Selon Michael van Walt van Praag, le lien du Tibet à l'Empire mongol n'était pas de nature féodale, car il ne comportait pas d'élément de supériorité et de subordination caractéristique de la relation d'un suzerain à son vassal[38]. Bien que le Tibet fût lié à l'empire mongol, ce lien procédait non pas d'une simple soumission à la domination mongole, mais d'une combinaison de relations religieuses, culturelles, raciales et politiques propres à cet empire[39].
La tibétologue Katia Buffetrille caractérise les relations entre la Mongolie et le Tibet comme des liens entre un «maître spirituel et un protecteur laïc» où le maître donne enseignements et initiations, et le laïc assure sa protection et fait des dons[40]. Ce concept n'est pas compris de la même manière par les deux puissances. Pour les Tibétains le protecteur et le maître religieux sont égaux. L'un apporte une protection spirituelle et l'autre assure ce rôle de mécène [41].
L'ethnologue des religions Philippe Cornu précise que Sakya Pandita devint le maître spirituel de Godan Khan. De même Chögyal Phagpa sera le «maître impérial» du grand Khan et recevra en retour le gouvernement du Tibet. «Cette relation particulière de maître à disciple permettra au Tibet de préserver son indépendance tout en bénéficiant de la protection des chefs mongols pendant un siècle.»[42].
Le poète Jean Dif, qui a voyagé en région autonome du Tibet et dans des régions tibétaines, indique que l'empereur mongol protège le Tibet et en contrepartie le clergé tibétain assure le «pouvoir spirituel» sur l'ensemble de l'empire. Les Tibetains jouissent d'une «large autonomie»[43].
Fin du règne des Sakyapa sur le Tibet
Les sakyapa régnèrent sur le Tibet pendant environ un siècle jusqu'à ce qu'ils soient renversés par un de leurs gouverneurs, Changchub Gyaltsen, en 1358. La dynastie Yuan était alors trop faible pour inverser le cours des événements. Dix ans plus tard, elle est à son tour renversée du pouvoir central chinois, et remplacée par une dynastie gouvernée par l'ethnie Han, la dynastie Ming[44].
(zh) 西藏社會科學院 (trad.: Académie des sciences de la société du Tibet), 西藏地方是中國不可分割的一部分(史料選輯)》(trad.: La Région du Tibet est une région indivisible de la Chine, compilation de fac-similés de documents historiques), 西藏人民出版社 (trad.: Éditions populaires du Tibet), (ISBN7-223-00312-X)
(en) Du Yuting, Chen Lufan, «Did Kublai Han's conquest of the Dali Kingdom give rise to the mass migration of the Thai people to the south?», Journal of the Siam Society, Bangkok, Institute for Southeast Asian Studies, vol.77, (lire en ligne)
H.R Davis, «Yunnan, the Link between India and the Yangtze», Bulletin of the American Geographical Society, vol.41, , p.651-652 (DOI10.2307/199212)
(en) W.A.R. Wood, A History of Siam, Londres, Réimpression de 1959, (lire en ligne), p.35
(en) W.C. Dodd, «The Relation of Chinese and Siamese», Journal of the North-China Branch of the Royal Asiatic Society, (lire en ligne)
Herbert Franke, «Multilinguisme dans la Chine des Yüan: le comité de rédaction du canon bouddhique (1285-1287)», Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol.138, (lire en ligne)
Henri Cordier, Histoire générale de la Chine et de ses relations avec les pays étrangers: depuis les temps les plus anciens jusqu'à la chute de la dynastie Mandchoue, vol.Tome 2, Paris, P. Geuthner, 1920-1921 (BNF37453441, lire en ligne)
(en) Melvyn Goldstein, The Snow Lion and the Dragon, 1997, pp. 2-3: «The unification of the diverse Mongol tribes by Genghis Khan in the late twelfth century led to one of the greatest explosions of conquest the world has ever seen. Mongol armies swept out of the Mongolian plains and mountains and conquered immense spans of territory, including Tibet, which submitted bloodlessly to the Mongols in 1207. Tibet paid tribute to Genghis Khan, and Mongol forces did not invade Tibet or interfere in the administration of its principalities.»
Laurent Deshayes, Histoire du Tibet, Fayard, 1997, p.102-104 («Les envahisseurs mongols»): «Les chroniqueurs relatent que pour éviter l'invasion de leurs principautés le chef des Tselpa et un roitelet de U préfèrent offrir la soumission du Tibet au grand khan et déclarent spontanément le pays tributaire. Les conquêtes de Genghis leur donnent vire raison.»
Herbert Franke, «Multilinguisme dans la Chine des Yüan: le comité de rédaction du canon bouddhique (1285-1287)», in Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 138, 1994: «On connaît, en dehors des textes en chinois, des impressions de textes bouddhiques en mongol, en vieux turc (ouigour) et en tangout, la langue du royaume Hsi-hsia annihilé en 1227 par les armées de Cinggis Qan.», p. 605.
(en) Luciano Petech, Tibetan Relations with Sung China and with the Mongols, pp. 173-203, in China among Equals. The Middle Kingdom and its neighbours, 10th-14th centuries, Morris Rassaki (ed.), University of California Press, Berkeley, Los Angeles, London 1983, p. 194: «There was no contact between Central Tibet and the Mongols before 1240.»
(en) W.D. Shakabpa, Tibet: A Political History, 1967, Yale University Press, p. 61: «thirty thousand troops, under the command of Leje and Dorta, reached Phanpo, north of Lhasa.»
(en) Alan J. K. Sanders, Historical dictionary of Mongolia, 2003, Scarecrow Press, p. 309: «his grandson Godan Khan invaded Tibet with 30,000 men and destroyed several Buddhist monasteries north of Lhasa.»
(en) Elliot Sperling, «The Yuan Dynasty (1279–1368)» [archive du ] p. 13: «Assuredly, Tibet was incorporated into the Mongol dominions, but this was in a manner distinct from the Mongol conquest of China. In the late 1240s, the Tibetan lama Sakya Pandita (Sapan), leader of the Sakyapa sect of Tibetan Buddhism traveled with his nephews to the court of the Mongol prince Godan and sent a letter back to other leading figures in Tibet urging that they submit to Mongol authority. The letter that he is held to have sent (in 1249) and the acquiescence that other Tibetans accorded to the imposition of Mongol domination, as described in it, are generally considered to have marked the beginning of Mongol rule over Tibet» - (Assurément, le Tibet fut incorporé dans les territoires mongols mais cela se fit d'une façon distincte de celle de la conquête de la Chine par les Mongols. À la fin des années 1240, le lama tibétain Sakya Pandita (Sapan), chef de la secte sakyapa du bouddhisme tibétain, se rendit, accompagné de ses neveux, à la cour du prince mongol Godan, d'où il envoya une lettre aux autres chefs tibétains, incitant ces derniers à se soumettre à l'autorité des Mongols. La lettre qu'il est censée avoir écrite (en 1249) et l'assentiment que les autres Tibétains manifestèrent à l'égard de l'imposition de la domination mongole, sous la forme où celle-ci y est décrite, sont considérés en règle générale comme ayant marqué le commencement de la tutelle mongole sur le Tibet).
(en) Luciano Petech, Tibetan Relations with Sung China and with the Mongols, pp. 173-203, in China among Equals. The Middle Kingdom and its neighbours, 10th-14th centuries, Morris Rassaki (ed.), University of California Press, Berkeley, Los Angeles, London 1983, p. 182: «[...] Soon after his election, Möngke appointed one Khoridai to command the the Mongol and Chinese troops in T'u-fan region (northeastern Tibet).48 In the same year or in 1252, Köden sent another army from Liang-chou led by Du-pe-ta or Do-be-ta (Dörbetei?).49 This two-pronged invasion wrought havoc in Tibet. [...] The invaders penetrated as far as 'Dam, "killing, looting, burning houses, destroying temples and injuring monks."»
Henri Cordier, 1920-1921, Histoire générale de la Chine, p.263: «Mangkou procéda également à la nomination des grands fonctionnaires de l'Etat: [...] à Dandar, celui des troupes dans le Se Tch'ouan et Khortaï, dans le Tibet. Tandis que K'ai Youen était placé à la tête du clergé bouddhiste, Taoca-li-tcheng l'était à la tête des Taoïstes; « mais ce fut le lama tibétain Namo, qu'il [Mangkou] créa chef de la religion de Buddha dans tout l'Empire, en lui donnant le titre de Ho chi, ou d'Instituteur du Monarque. »»
(en) W.A.R. Wood, 1926: «In A.D. 1253 Nanchao (or Yunnan) was conquered by Kublai Khan. This finally put an end to the Tai kingdom, and resulted in a wholesale emigration of the inhabitants southwards, with important effects upon the history of Siam, as will be seen later.»
W.C. Dodd, 1920: «The seventh and last great wave of migration of the Tai from China southward followed the overthrow of the Ai-Lao Kingdom at Talifu in A.D. 1234. This kingdom had existed for over 600 years. And it was overthrown not by the Chinese but by the Mongols under Kublai Khan. That cataclysm marks the end of autonomous Tai rule in territory governed at the time by the Chinese. And our detailed historical study».
Henri Cordier, Histoire générale de la Chine, 1920-1921, p. 267: «En 1253, K'oublaï marcha sur Yun Nan; Touan Hing-tche se soumit humblement; laissé en liberté il reçut le titre de Mo ho Lo ts'o (Maha Radja) et on lui adjoignit Lieou Che-Tchoung pour administrer la nouvelle possession mongole.»
Hugues-Jean de Dianous, «Le Tibet et ses relations avec la Chine», Politique étrangère, p.45: «Ainsi qu'on l'a vu, il y avait eu antérieurement des rois au Tibet; mais à partir de 1275, le pouvoir politique et l'autorité suprême religieuse ne firent plus qu'un dans ce pays, quand l'empereur mongol Koubilaï eut reconnu le chef de la secte bouddhiste sa-skay-pa, Phagspa, comme chef du Tibet».
(en) Luciano Petech, P'ags-pa in In the Service of the Khan: Eminent Personalities of the Early Mongol-Yüan Period (1200-1300), édité par Igor de Rachewiltz(en), Volume 121 de Asiatische Forschungen, (ISSN0571-320X), Otto Harrassowitz Verlag, 1993, (ISBN3447033398 et 9783447033398), p. 648.
(en) Rahul Ram, Central Asia: An Outline History, Concept Publishing Company, 1997, 170 p., chap. « Tibet: Snows and Lamas », p. 36: «The system excluded the Sakya domain and the appanages of the Mongol princes in Central Tibet».
Christian Deweirdt, Monique Masse et Marc Monniez, Le Tibet, coll. « Les guides Peuples du Monde », troisième édition, Les éditions de l'Adret, Paris, 2008, section 5: L'influence mongole et l'essor de la théocratie, p. 58.
Alice Travers (chargée de recherche, CNRS (Section 33), Chronologie de l'histoire du Tibet«1260: Phagpa (tib. ’Phags pa; 1235-1280), neveu de Sakya Pandita, se rend sur ordre à la cour du Grand Khan Khubilaï (1215-1294), futur empereur de Chine et fondateur de la dynastie mongole des Yuan (1271-1368). Phagpa reçoit de Khubilaï le pouvoir de régence sur les treize myriarchies du Tibet (réorganisation territoriale et administrative du Tibet par les Mongols, comprenant le Tibet central ou U (tib. Dbus), le Tsang (tib. Gtsang), le Tibet de l’Ouest, le Kham (tib. Khams) et l’Amdo (tib. A mdo). Il est l’un des principaux artisans de la relation «maître religieux-protecteur laïc» entre religieux tibétains et dirigeants mongols.»
Melvyn C. Goldstein, The Snow Lion and the Dragon. China, Tibet, and the Dalai Lama, op. cit., p. 4: «In keeping with the "priest-patron" ideology, Phagpa was much more than a conquered subject put on the throne. An amazing disagreement between the two, documented in both Tibetan and Mongolian records, illustrates the great stature that Tibet's lamas held among the Mongols. When Kublai asked Phagpa to serve as his spiritual tutor, Phagpa agreed but insisted that Kublai show deference to his superior religious stature. Kublai initially refused, but eventually relented and agreed to sit on a throne lower than the lama when he was receiving private instruction, as long as the lama sat lower in all other settings».
Luciano Petech, Tibetan Relations with Sung China and with the Mongols, op. cit., p. 187: «Khubilai had requested that the abbot devise a new script to be used both for Mongolian and for Chinese. 'Phagspa based his script on the Tibetan alphabet. In the second month of 1269 it was declared to be the national script, and its use was made compulsory in official documents.»
(en) Melvyn C. Goldstein, The Snow Lion and the Dragon. China, Tibet, and the Dalai Lama, University of California Press, Berkeley, Los Angeles, Oxford, 1997, version en ligne, chap. « The Imperial Era », rubrique « Tibet and the Mongols », pp. 2-4): «Contemporary Chinese scholars and officials consider this the period when Tibet first became part of China. Nationalistic Tibetans, by contrast, accept only that they, like China, were subjugated by the Mongols and incorporated into a Mongol empire centered in China».
Fabienne Jagou, Lecture critique: Anne-Marie Blondeau, Katia Buffetrille éd., Le Tibet est-il chinois?: «les Tibétains se soumirent à l’empire mondial mongol et le Tibet fut gouverné, en majeure partie, par la branche de l’empire mongol qui s’établit en Chine. Il est expliqué cependant que l’idée chinoise selon laquelle les Mongols des Yuan, conquérants de la Chine, se soient considérés comme chinois et aient établi leur empire comme un empire chinois ne tient pas. Enfin, l’histoire dynastique des Yuan (1271-1368) et, plus tard, celle des Ming (1368-1644) excluent le Tibet du territoire de la Chine, d’où la difficulté pour les sources chinoises de s’accorder sur la date à laquelle le Tibet est devenu une partie de la Chine sous la dynastie mongole des Yuan.»
(en) Elliot Sperling dans Le Tibet est-il chinois?, p. 33: «Toutefois, l'indication la plus significative du statut du Tibet est que l'histoire officielle de la dynastie Yuan (le Yuanshi, compilé un an après l'effondrement de la dynastie, en 1368), lorsqu'elle détaille la géographie des royaumes mongols, exclut le Tibet dans les chapitres concernés.»
(en) Michael van Walt van Praag 1987: The Status of Tibet: History, Rights and Prospects in International Law, Westview Press / Wisdom Press, Boulder / London, 1987; reimprimé en 1992, (ISBN0-8133-0394-X), p. 120: «The Mongol-Tibetan bond was markedly different from the feudal counterparts, however, in that it lacked the element of superiority and subservience characteristic of suzerain-vassal relations.»
(en) Michael van Walt van Praag, op. cit., p. 121: «Although Tibet was bound to the Mongol Empire, it was so bound not by simple subjection to Mongol rule but by a combination of religious, cultural, racial, and political relationships unique to that Empire.»
Katia BuffetrilleChine et Tibet, une si longue histoire: «Sous les Yuan, une relation très particulière avait été scellée entre des religieux tibétains et Kubilaï Khan, qui allait régner sur l'Empire mongol dans lequel la Chine et le Tibet étaient intégrés au même titre. Il s'agissait d'une relation politico-religieuse entre un maître spirituel et un protecteur laïc dans laquelle le maître donnait enseignements et initiations, et le laïc assurait sa protection et faisait des dons.»
Jean Dif, Chronologie de l'histoire de la Mongolie«Les Yuan et les religieux sakyapas créent la relation chapelain donateur ou de maître religieux à protecteur laïc. Le clergé tibétain dispose du pouvoir spirituel sur l'ensemble de l'empire et, en échange, l'empereur protège le Tibet. On pense à une sorte de protectorat miroir dont la dualité rappelle celle qui existe aux niveaux des territoires tibétains entre les abbés et les princes. Koubilaï khan reconnaît le sakyapa Phagpa, son précepteur, qui a doté les Mongols d'une nouvelle écriture, comme chef du Tibet. Le monarque mongol procède à une réorganisation administrative et territoriale du Pays des Neiges mais laisse une large autonomie à ses habitants. En réalité, le prince et l'abbé s'appuient mutuellement l'un sur l'autre afin d'asseoir leur autorité contestée; c'est ce schéma qui s'appliquera avec les différents chefs mongols qui interviendront au Tibet et aussi plus tard, mais dans une moindre mesure, avec les empereurs chinois de la dynastie mandchoue. Kubilaï khan envisage de choisir le bouddhisme tibétain, moins sophistiqué que le bouddhisme chinois, comme religion officielle de l'empire des Yuan, avec le souci d'unifier pouvoir politique et pouvoir religieux.»
(en) Melvyn C. Goldstein, The Snow Lion and the Dragon. China, Tibet, and the Dalai Lama, University of California Press, Berkeley, Los Angeles, Oxford, 1997, chap. «The Imperial Era», rubrique «Tibet and the Mongols», p. 4: «The Sakya ruled in Tibet for roughly a century, until they were overthrown in 1358 by one of their governors. The Yuan dynasty was too weak to do anything but quietly accept this turn of events. In fact, just ten years later the Yuan dynasty itself was overthrown and replaced by an ethnically Chinese dynasty known as the Ming».