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hymne latin chrétien De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le Te Deum est une hymne latine chrétienne. L'expression complète est Te Deum laudamus qui signifie « Nous te louons, ô Dieu ». Dans les manuscrits anciens, il s'intitule parfois Laus angelica (louange angélique), Hymnus in die dominica (hymne pour le dimanche)[1] ou Hymnus ambrosianus (hymne ambrosien), par allusion à l'un de ses auteurs présumés, Ambroise de Milan. Il date probablement de la fin du IVe siècle ou du début du Ve siècle[2].
Dans l'Église catholique, le Te Deum est chanté à l'office monastique romain des matines ou des laudes. En dehors de la liturgie des Heures, il est chanté à l'occasion de services solennels d'action de grâce : victoires, fêtes nationales, naissances princières, saluts, processions... Il figure avec différentes prières du matin dans la Communion anglicane ainsi que dans de nombreuses Églises réformées.
Le Te Deum a fait l'objet de multiples créations musicales.
Dans les anciens livres liturgiques, ce chant est souvent appelé Hymnus ambrosianus[3] (hymne ambrosien), par référence à Ambroise de Milan[4] ; une légende de la fin du VIIIe siècle voudrait qu'il ait été spontanément composé et chanté par trois saints la nuit du baptême de saint Augustin[2].
Des analyses des mélodies grégoriennes notées, toutes tardives, permettent de distinguer plusieurs étapes rédactionnelles. Les spécialistes considèrent que la dernière rédaction fut achevée par Nicétas de Rémésiana († vers 414)[5].
Grâce à l'analyse selon les cordes-mères, modes archaïques avant les huit modes grégoriens, l'ancienneté du Te Deum est établie. Sa mélodie remonte au VIIIe siècle ou plus tôt[5]. À la différence du texte, il n'est pas facile de discerner la mélodie la plus ancienne. En effet, comme les neumes n'ont été inventés qu'au IXe siècle, toutes les notations furent copiées plus tard.
Les mentions les plus anciennes se trouvent dans la Règle de saint Benoît (vers 530)[2],[6],[7], dans la Règle de saint Césaire (début du VIe siècle)[2],[7] et dans une lettre de Cyprien de Toulon († 546) adressée à l'évêque de Genève (texte partiellement cité)[2].
En admettant que la pratique du Te Deum ait toujours été gardée au sein de monastères durant tout le Moyen Âge, la trace de sa notation reste pauvre, vraisemblablement en raison de son attribution à la tradition ambrosienne, qui n'était pas officielle dans le rite romain jusqu'au XIIIe siècle[8].
En raison de nombreuses variantes dans les manuscrits, on a pu définir cinq tons selon la classification établie par dom Jean Claire de l'abbaye Saint-Pierre de Solesmes. Parmi ces cinq tons, la mélodie ambrosienne possède une couleur musicale différente tandis que le ton romain se trouve dans les manuscrits les moins anciens[9] : tonus solemnis, tonus simplex, tonus monasticus, tonus ambrosianus et tonus more romano.
En français, le mot hymne est du genre féminin lorsqu'il désigne une composition à sujet religieux[10], d'auteur inconnu, désignée par les premiers mots de sa première strophe (Te Deum laudamus (« Dieu, nous te louons »)[4].
Dans la règle de saint Benoît, datable des années 530-560, Benoît de Nursie demande de chanter le Te Deum pour l'office solennel des vigiles du dimanche ; il doit être entonné par l'abbé et suivi par la lecture de l'Évangile[11]).
Dans la plupart des liturgies de rite romain, restaurées après le concile Vatican II, le Te Deum est chanté lors de l'office des matines, des dimanches et des jours de fêtes et des solennités, après la proclamation de l'Évangile[4]. Dans l'Église anglicane, il est chanté tous les jours de l'année, mais aussi comme hymne d'action de grâce lors de circonstances particulières, au choix de l'ordinaire du lieu.
Le Te Deum n'est pas chanté durant la Semaine sainte ni dans les offices des morts[12].
L'hymne Te Deum peut être exécutée de différentes manières. Dans la liturgie des Heures, celui-ci est psalmodié par deux chœurs qui alternent les versets, comme dans la psalmodie, sur une mélodie grégorienne. Dans les services d'actions de grâce civils ou extérieurs à la liturgie des heures, il peut être chanté en polyphonie savante à plusieurs voix, parfois accompagnée d'un orchestre et entrecoupé d'intermèdes instrumentaux. Les musiciens pour l'œuvre de Giovanni Paisiello, chantée en 1802 et 1804 à Notre-Dame de Paris, se composaient de deux orchestres, double chœur et quatuor de solistes, afin d'amplifier la gravité des célébrations, à savoir un concordat et un sacre[c 1]. Toutefois, les ecclésiastiques de haut rang avaient tendance à donner la priorité au chant grégorien. Ainsi, pour le sacre du roi Louis XV exécuté le à Reims, Michel-Richard de Lalande préparait son motet Te Deum. Au dernier moment, « vint un ordre de le chanter en plain chant. »[b 1].
Par ailleurs, on chante parfois dans les paroisses le Te Deum à l'occasion du 31 décembre, par imitation de la liturgie des Heures qui le prescrit logiquement à l'office de nuit de la fête du 1er janvier (octave de Noël, ou Circoncision du Seigneur, ou sollenité de Marie Mère de Dieu). On observe des coutumes particulières différentes en fonction des traditions locales ou des familles religieuses[13]).
Il est aussi exécuté en remerciement d'une faveur particulière comme un baptême, l'élection d'un pape (comme de fut le cas le lors de la messe d'entrée en fonction du pape Francois[14]), la consécration d'un évêque, la profession d'un religieux, la publication d'un traité de paix, un couronnement, une victoire militaire.
À la cour de France, il fallait que le Te Deum soit chanté lors de la célébration du sacre des rois[15],[b 1]. Déjà en 816, celui-ci fut exécuté lorsque Louis le Pieux fut sacré à Reims par le pape Étienne IV[16].
Tout comme son ancienneté, de nombreuses traditions se trouvent dans toute l'Europe depuis le Moyen Âge.
Ainsi, en 1212, après la bataille de Las Navas de Tolosa, l'archevêque de Tolède et les croisés entamèrent un Te Deum pour rendre grâce à Dieu de cette victoire[17]. De même, le roi de France Philippe le Bel n'oublia pas de faire chanter, après la victoire de Mons-en-Pévèle en 1304, le Te Deum et des antiennes et oraisons de la Sainte Vierge et de saint Denis[18].
Le Te Deum est également le symbole de la paix. En 1482, le roi de France Louis XI expédia un certain nombre de lettres, après avoir rétabli la paix avec la maison de Habsbourg, plus précisément le traité d'Arras. Il s'agissait de son dernier cadeau afin de rétablir un royaume florissant, avant son décès. L'exécution du Te Deum était symbolique.
En 1686, un Te Deum fut chanté après le siège de Buda, en Hongrie, où les Turcs furent vaincus par l'armée chrétienne[19].
Aux XVIIe siècle et XVIIIe siècle, la composition de Te Deum connut en Europe une grande vogue. Cette mode était due à la signification clairement politique que prit ce chant religieux. Il était systématiquement chanté lors de fêtes en l'honneur du souverain : la célébration d'une Te Deum était alors clairement identifiée avec la volonté d'honorer le souverain en place. Ainsi, sous le règne de Louis XIV, cette hymne était très fréquemment exécutée.
Avant tout, l'hymne fut chantée avec tous les ecclésiastiques de la cour dans la chapelle du château de Saint-Germain-en-Laye, aussitôt que la reine Anne d'Autriche eût donné naissance à ce prince le :
« Dans la même chambre & dans le même moment le Dauphin fut ondoyé par M l'Evêque de Meaux Premier Aumosnier ; l'après-dînée on chanta le Te Deum dans la Chapelle.... on remarqua que la Reine étant accouchée à onze heures[20]; »
— Abbé Louis Archon, même document, p. 780
L'évolution de l'exécution en 1677 de cette hymne est due à un musicien italien. Il s'agissait d'un motet, c'est-à-dire le Te Deum en ensemble instrumental. À peine terminée la célébration de baptême de son fils aîné Louis, dont le parrain était le roi, à la chapelle du château de Fontainebleau, Jean-Baptiste Lully, surintendant de la Musique de la Chambre, fit chanter, sans aucune annonce, cette œuvre. Son effet était immense. « Croiroit-on que cette considération particulière dont le Monarque honorait les talens du plus grand Musicien qu'il y eût alors, » écrivit l'abbé Oroux en 1777, « a servi de prétexte dans la suite aux successeurs de Lully, Michel-Richard de Lalande, Henry Desmarest, Élisabeth Jacquet de La Guerre, Louis-Nicolas Clérambault, Nicolas Bernier, André Campra, Charles Levens pour soutenir que dans toutes les cérémonies extraordinaires, telles que les sacres & les mariages des Rois, les actions de grâces pour la naissance des Enfans de France, pour la paix, c'est aux Surintendant de la Musique de la Chambre & non aux Sous-maîtres de la Musique de la Chapelle de diriger l'exécution du Te Deum[21]. » Alors, deux ans plus tard, lors des noces de Marie-Louise d'Orléans, nièce du roi, « Son Éminence étant ensuite retournée à son fauteuil proche d'Autel, entonna le Te Deum qui fut continué par la Musique de la Chapelle & de la Chambre[22]. »
À la suite de la guérison du Roi Soleil en 1686, celles de grands compositeurs parmi lesquels Lully furent solennellement chantées à Paris[a 1]. Ensuite, les années 1690 - 1693 s'illustraient des victoires de l'armée française après une longue période difficile. Des 6 Te Deum composés par Marc-Antoine Charpentier, 4 nous sont parvenus, deux furent composés durant ces années. Le célèbre Te Deum (H.146) aurait été exécuté à la suite de la victoire de Steinkerque (1692) tandis que le Te Deum à quatre voix (H.147) pourrait être attribué à la reddition de Charleroi (1693)[a 2]. Louis XIV avait rencontré de grosses difficultés. L'exécution du motet Te Deum à Messine lors des événements militaires avait provoqué un conflit considérable avec les Espagnols, le roi dut alors retirer les troupes françaises de la Sicile en 1678[23].
Après leur victoire lors de la bataille de Turin en 1706 sur les troupes de Louis XIV, le duc Victor-Amédée II de Savoie et le prince Eugène, à leur entrée en tant que libérateurs dans Turin, firent célébrer, suivant l'usage, un Te Deum pour commémorer cette victoire[24],[25]. Enfin, le traité d'Utrecht fut conclu en 1713 ; sitôt la paix revenue, Georg Friedrich Haendel composa son œuvre Utrecht Te Deum et jubilate (HWV 278/279).
Après avoir été sacré avec un Te Deum en grégorien en 1722, le jeune roi Louis XV entendit celui de Nicolas Bernier, lorsqu'il épousa Marie Leszczynska en 1725[b 1].
Ce siècle connut un changement historique, car dorénavant le Te Deum était pareillement exécuté sans sa fonction, à savoir pour les concerts. Il s'agissait du Concert Spirituel à Paris[b 2]. Entre 1725 et 1770, le motet Te Deum de Michel-Richard de Lalande (S 32) y était l'une des œuvres les plus appréciées dans les programmes et il y compta au moins 30 représentations. Après cette popularité absolue, les Te Deum de François-Joseph Gossec (1779) et de François-André Danican Philidor (1786) aussi y eurent le vent en poupe[c 2].
Certains historiens pensaient qu'à la suite de la Révolution de 1789, une difficulté apparut lorsque les nouveaux citoyens demandèrent la célébration d'un Te Deum, censé célébrer un heureux événement royal, le retour du roi à Paris. Les citoyens contestèrent le monopole royal de cet usage et l'accord fut donné par les députés[26]. En fait, le , un nouveau Te Deum en latin de Gossec composé pour l'État avait été exécuté en plein air, car cette cérémonie nationale restait chrétienne[c 3]. C'était dès 1793 que la célébration manquait de Te Deum ainsi que de chant latin[c 4]. De plus, le Te Deum était déjà devenu l'un des principaux répertoires du concert, par le Concert Spirituel.
La Réforme calviniste supprima, quant à elle, le Te Deum au XVIe siècle alors que l'Église anglicane le maintint, mais pour un temps en langue vulgaire. Il fut réintroduit dans les Églises de Suisse romande à la suite des modifications de la liturgie initiées par Jean-Frédéric Ostervald au début du XVIIIe siècle. Il s'imposa ensuite sous la forme du cantique Grand Dieu, nous te bénissons, inspiré de la version allemande qu’en donne Ignaz Fränzl en 1768 (Großer Gott, wir loben dich).
À Paris, le Te Deum de Giovanni Paisiello était finalement un témoin de deux événements importants au début du XIXe siècle. Le dimanche de Pâques , ce Te Deum fut exécuté au cours d'une messe à Notre-Dame de Paris, à la suite d'un concordat adopté dix jours auparavant[c 5]. Au même endroit, celui-ci fut à nouveau chanté, avant que le pape Pie VII ne se rende à l'autel afin de célébrer une messe, lors du sacre de Napoléon Ier le dimanche [c 1].
Entre ces deux cérémonies, il alla à la chapelle palatine d'Aix-la-Chapelle. Le , après un Te Deum, les reliques de Charlemagne lui furent présentées[27].
Le dimanche , lors du couronnement de Napoléon Ier comme roi d'Italie dans la cathédrale de Milan, un Te Deum composé par Francesco Pollini est joué[28].
Les [29] et [30], un Te Deum fut célébré dans la cathédrale de Notre-Dame de Paris sans que cela ait un caractère de légitimité religieuse du pouvoir impérial[31]. Pour la cérémonie d’inauguration de l’Exposition universelle de 1855, un Te Deum créé par Hector Berlioz fut joué[32].
Le , au lendemain de la libération de Paris, un Te Deum devait être chanté en présence du général Charles de Gaulle à la cathédrale Notre-Dame de Paris. Toutefois, sans archevêque, sans orgues, et à cause de tirs à l'extérieur, il fut remplacé par un Magnificat, plus connu et plus bref. Le Te Deum fut donc finalement chanté le lendemain de la capitulation de l'Allemagne : le [33].
En Belgique, un Te Deum est chanté deux fois par an, lors de la fête nationale (le ) ainsi que lors de la fête du Roi (le )[34]. Cette hymne est chantée dans de nombreuses communes pendant que la famille royale assiste au Te Deum en la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule de Bruxelles[35]. On y prie pour le souverain, et la cérémonie se termine par l'hymne national, La Brabançonne.
Au Luxembourg, lors de la fête nationale (le 23 juin), un Te Deum est chanté dans la cathédrale Notre-Dame de Luxembourg en présence de la famille grand-ducale, du gouvernement, des représentants de la Chambre des députés, du Conseil d'État, du collège échevinal de la ville de Luxembourg, de la magistrature, du corps diplomatique et des institutions européennes présentes au Luxembourg. Il est suivi d'un tir de 21 coups de canon depuis le Fetschenhaff.
Dans plusieurs pays d'Amérique latine, tels que l'Argentine, la Colombie, le Guatemala, Panama, le Paraguay ou le Pérou, on chante un Te Deum lors de la fête nationale. En Équateur, et plus particulièrement dans la ville de Cuenca, on le chante deux fois par an, lors des fêtes de la fondation et de l'indépendance, en présence du maire, et des principales autorités civiles, religieuses et militaires de la ville.
Au Chili, les fêtes patriotiques du 18 septembre ont un caractère œcuménique, avec le « Te Deum œcuménique des Fêtes patriotiques » chanté dans la cathédrale de la capitale, Santiago du Chili, à 11 heures, en présence du président de la République, de l'archevêque et des principaux représentants des églises chrétiennes - catholiques ou non - du pays.
Texte latin original | Texte français (version littérale) | Texte français (traduction officielle)[36] |
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Te Deum laudamus, |
Dieu, nous Te louons, |
À Toi, Dieu, notre louange ! |
De nombreux compositeurs, tels que Lully, Purcell, Campra, Graun, Mozart, Berlioz, Liszt, Dvořák, Bruckner, Bortniansky (en slavon) ont mis cette prière en musique. C'est le Te Deum H.146 de Marc-Antoine Charpentier qui reste cependant la version la plus connue. Le prélude a servi de générique à certaines émissions de l'Union européenne de radio-télévision, indicatif de l'Eurovision[a 3] [écouter en ligne].
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