arbre de vie De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le symbolisme des arbres concerne les arbres dans leur capacité à désigner, à signifier, voire à exercer une influence en tant que symbole. L'arbre en général est symbole (de l'homme, du cosmos, de la vie…), et chaque arbre en particulier est un symbole (le chêne symbolise la majesté, l'aulne, l'humilité).
Les textes des troubadours, des conteurs et des poètes de toutes les époques chantent l'arbre comme l'axe du monde, la flamme de vie, le pont du ciel, l'image de l'éternelle vigueur. De par sa verticalité, l'arbre est le lieu sacré où le ciel s'enracine à la terre. Ses racines fouillent les profondeurs cachées du sol dans lequel elles se développent ; son tronc et ses branches maîtresses fendent l'espace aérien ; c'est dans les hauteurs que se balancent ses fines ramures et ses fleurs. L'arbre met en relation les trois niveaux du cosmos. L'arbre est le symbole par excellence de la vie en perpétuelle évolution. Le déroulement de son cycle annuel l'associe tout naturellement à la succession de la vie, de la mort et de la renaissance.
On rencontre des arbres sacrés, des rites et des symboles végétaux dans les traditions populaires du monde entier, dans les métaphysiques et les mystiques de tous les temps, des époques archaïques jusqu'à nos jours. Parfois, l'univers est représenté par un arbre géant ; dans d'autres traditions, l'humanité naît d'un arbre. L'arbre est toujours associé à ce qui est vivant et créateur[1].
« Jamais un arbre n'a été adoré rien que pour lui-même, mais toujours pour ce qui, à travers lui, se révélait, pour ce qu'il impliquait et signifiait. C'est en vertu de sa puissance, c'est en vertu de ce qu'il manifeste et qui le dépasse, que l'arbre devient un objet religieux »[2].
Une symbolique implique un système, c'est-à-dire une complexité variée (elle comporte plusieurs éléments), interactive (ses éléments agissent les uns sur les autres), organisée (elle obéit à un ordre, tel que succession, priorité), totale (quand on modifie un élément les autres sont modifiés) et finalisée (elle vise un but, en général la signification). Les arbres forment système, dans la nature comme dans l'imaginaire : la Bible associe l'arbre de la vie et l'arbre de la connaissance du bien et du mal (Genèse, II, 9). Certains arbres forment des biogroupes (par exemple : le hêtre, l'épicéa, le sapin, le douglas).
L'historien des religions Mircea Eliade explique que les cultes rendus aux arbres ne relèvent pas d'un sentiment panthéiste d'adoration à l'égard de la nature, mais d'un sentiment profond suscité par le symbolisme de l'arbre : l'arbre en tant que pont entre une réalité spirituelle invisible et une réalité concrète et sensible. L'arbre est un symbole parfait car il réunit tous les niveaux du réel. Il relie le ciel et la terre, la matière et l'esprit, l'inconscient et le conscient, le réel et le rêve. Il relie et harmonise les contraires. Il réalise une synthèse du monde par l'unité fondamentale de ses trois plans souterrain, terrestre et céleste. Tour à tour arbre de connaissance, arbre de vie, arbre familier et protecteur, il se régénère sans cesse. Bénéfique, il est source de fécondité physique, de protection psychologique, de connaissance intellectuelle et d'éveil spirituel.
Pour saisir le symbolisme d'un arbre, il est souvent pertinent de noter les correspondances établies.
Arbres et couleurs. On trouve des arbres à feuilles rouges (l'érable), à fleurs jaunes (le mimosa), à fruits bleus.
Arbres et dieux. Dans la Rome antique, le chêne était consacré à Jupiter, le tilleul à Vénus, le laurier à Apollon.
Arbres et figures géométriques. On connaît des arbres coniques, sphériques...
Arbres et nombres. La disposition des pousses sur les tiges obéit à la suite de Fibonacci. L'angle formé par deux pousses adjacentes, exprimé en fraction de la circonférence de la tige, est généralement une fraction de deux nombres de la suite de Fibonacci : 1/2 pour l'orme et le tilleul, 1/3 pour le hêtre et le noisetier, 2/5 pour le chêne et les arbres fruitiers, 3/8 pour le peuplier et les roses, 5/13 pour le saule et l'amandier[5].
Il y a deux degrés dans l'art de décoder (identifier et interpréter) les symboles, leur code : le déchiffrage et le décryptage. Quand on déchiffre, on connaît le code ; quand on décrypte : on ne le connaît pas.
On peut vouloir traduire, allégoriquement, un arbre sur le plan de la qualité, du sens : par exemple, chêne = majesté. Bien entendu, cet exercice est risqué, peut-être même sans signification, parce que les symboles ont plusieurs sens (parfois même contraires), parce que les symboles changent de sens selon les cultures, parce que le sens d'un symbole n'est jamais indépendant des symboles qui l'entourent (le chêne comme symbole change de sens selon qu'il est confronté au bouleau ou au hêtre).
Voici quelques arbres symboliques, d'après Pierre-Émile Rocray[6], « ingénieur forestier et responsable de la Maison de l'arbre du Jardin botanique de Montréal »[7].
En Inde, le figuier cosmique, Asvattha (ou arbre Pippal, ficus religiosa) est le représentant sur terre de Brihaspati, qui n'est autre que Jupiter. C'est un arbre hautement sacré, car il est dédié à la trimurti (trois dieux) : Brahmâ, Shiva, Vishnu. On l'honore plus particulièrement pendant le mois de Shravana (juillet-août). C'est à l'ombre de son feuillage que Siddhartha, le bouddha historique, atteignit l'Éveil. Il abrite l'âme des défunts, et on lui rend un culte de fécondité et de fertilité. On se sert de son bois pour allumer le feu sacré.
Mircea Eliade évoque[20] un culte des arbres, liés aux dieux Attis et Cybèle, en Grèce antique. Une confrérie dite des « dendrophores » (étymologiquement « porteurs d'arbres ») « amenait de la forêt un pin coupé (arbor intrat). Le tronc était enveloppé de bandelettes, comme un cadavre, et au milieu était attachée une image d'Attis. L'arbre représentait le dieu mort. » Ces processions avaient lieu lors de fêtes à l'équinoxe de printemps, du 15 au 23 mars.
Les Celtes auraient élaboré un zodiaque en corrélation avec les arbres. Mais ce sujet prête à polémiques[21].
Dans le judaïsme et le christianisme, deux arbres imaginaires et sacrés sont importants, et reliés au Paradis : l'arbre de la connaissance du bien et du mal, l'arbre de vie[22].
Quant au sapin de Noël, il est un symbole de renouveau de la vie.
Voir aussi la section plus détaillée : L'Arbre-Monde en littérature de l'article consacré à l'archétype ancien de l'Arbre du Monde.
Célèbre est le passage de Pline l'Ancien sur les druides et le chêne :
« On ne doit pas non plus oublier à ce propos l’admiration qu’ont les Gaulois [pour le gui]. Les druides – c’est ainsi qu’ils appellent leurs mages – n’ont rien de plus sacré que le gui et l’arbre dans lequel il croît, à condition que celui-ci soit un rouvre … Mais celui-ci est extrêmement rare à trouver, et, en a-t-on découvert, on le cueille en grande pompe religieuse, surtout le sixième jour de la lune qui marque pour eux les débuts des mois et des années et du siècles au bout de trente ans, parce qu’elle aurait déjà assez de force, sans être en son milieu. Ils appellent [le gui] dans leur langue « celui qui guérit tout ». Après avoir préparé au pied de l’arbre et selon les rites le sacrifice et le repas religieux, ils amènent deux taureaux de couleur blanche dont les cornes sont attachées pour la première fois. Un prêtre paré d’un vêtement blanc monte dans l’arbre, avec une serpe d’or il coupe le gui : celui-ci est recueilli dans un sayon blanc. Ensuite ils immolent les victimes en priant le dieu de faire ce présent propice à ceux à qui il l’a donné. (Pline, Histoire naturelle, XVI, 250) »
Dans la Grèce antique, Dodone était un sanctuaire oraculaire dédié à Zeus et à la Déesse-Mère, révérée sous le nom de Dioné. C'était le plus vieil oracle grec, d'après Hérodote, remontant peut-être au IIe millénaire av. J.-C., et l’un des plus célèbres avec ceux de Delphes et d’Ammon. Les prêtres et les prêtresses du bosquet sacré interprétaient le bruissement des feuilles de chêne sous le vent.
La kabbale juive représente régulièrement le Tout sous forme d'un Arbre. C'est l'arbre sefirotique. L'arbre des dix Sefirot est l'image symbolique de Dieu et de ses attributs. Il est aussi la représentation de la connaissance permettant de remonter à l'origine de la création. Tel que le présente la tradition juive, l'arbre des Sefirot est un idéogramme qui relie entre elles dix essences d'une importance métaphysique essentielle. C'est le modèle du monde, schéma dynamique des forces productrices de l'univers qui doit devenir visible. Les dix Sefirot sont aussi les dix paroles par lesquelles Dieu a créé le monde. Ce sont les dix aspects sous lesquels l'essence divine se fait connaître, les dix vêtements dont elle se revêt, les dix degrés prophétiques par lesquels elle exprime ses messages. Dans l'ordre de la connaissance, ce sont les dix lumières qui éclairent l'intelligence.
Seamless Wikipedia browsing. On steroids.