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mouvement artistique et philosophique De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Postmodernisme a pris deux significations antagonistes :
Le postmodernisme introduit une distance critique par rapport au discours moderniste devenu hégémonique. C'est un courant majeur de la création architecturale, et plus généralement artistique, de la fin du XXe siècle. Considéré aux États-Unis comme un terme purement stylistique, le postmodernisme est la réintroduction de l'éclectisme en architecture, mais en englobant aussi le Modernisme et le Style international, reconsidérés comme de simples moments de l'histoire de l'architecture avec lesquels on a pris ses distances. Mais en Europe, ce discours critique porte aussi sur la décontextualisation sociale, politique[9] et géographique de l'urbanisme moderne admettant des contre-propositions comme celles de Christopher Alexander ou de François Spoerry[10].
Le postmoderne est à l'origine un paradigme esthétique, conceptualisé au tournant des années 1970 par le philosophe américain Ihab Hassan, qui identifie le « tournant postmoderne », en analysant l'évolution formelle de certaines œuvres littéraires qui émergent à partir du milieu du XXe siècle. Le mot postmoderne, dont on trouve d'autres précurseurs, a également été repris par le philosophe Jean-François Lyotard, avec la publication en 1979 de La Condition postmoderne. Rapport sur le savoir puis de lettres ouvertes recueillies dans Le Postmoderne expliqué aux enfants. Avec l'essai de Habermas (La Modernité, un projet inachevé, 1981, écrit en réponse à la Biennale de Venise de 1980, marquée par l'influence de Jencks), ces deux derniers textes ont contribué à donner une épaisseur philosophique au terme. De nombreux autres essais leur ont succédé, notamment celui de Fredric Jameson en 1984, qui définit le postmodernisme comme la « logique culturelle du capitalisme tardif », en référence à la périodisation établie par l'historien marxiste Ernest Mandel, ce qui donne à la notion une extension civilisationnelle beaucoup plus large que le seul usage dans le champ architectural.
Bien qu'ils soient souvent employés indifféremment, il importe de distinguer le Postmodernisme (architecture) en tant que mouvement artistique, du postmoderne au sens philosophique ou littéraire, lesquels ont souvent des sens contradictoire ou opposés, ainsi que de la réalité postmoderne, et de l'esthétique de la postmodernité.
Bien que généalogiquement toutes liées, les différentes acceptions philosophiques et littéraires du paradigme postmoderne sont foisonnantes, en venant souvent à se corriger voire à s'exclure mutuellement. Il convient donc d'être toujours attentif à l'auteur auquel on se réfère pour éviter les contresens[11].
Perry Anderson, dans Les Origines de la postmodernité (1998, 2010), montre que les termes de « postmodernité » et de « post-modernisme » avaient déjà été utilisés dans le domaine de la poésie, notamment par l'Espagnol Federico de Onís (en 1934[12], selon Anderson, il l'utilise pour « décrire un reflux conservateur au sein même du modernisme ») ou le poète Charles Olson (en 1951), mais également de l'histoire (Arnold Toynbee), de la sociologie (Charles Wright Mills en 1959) et de la critique (Irving Howe en 1959)…
Le postmodernisme est-il une ère nouvelle liée au développement du capitalisme postindustriel ou un aspect qui a toujours existé ? On peut en effet constater que de nombreuses caractéristiques de l'esthétique postmoderne se retrouvent dans des œuvres du passé, ou le retour à un emploi décalé des figures du classique et du baroque, une sorte d'esthétique du mauvais goût qui permet de ressaisir sans lyrisme des valeurs esthétiques démodées.
En littérature, si les prémices du postmodernisme apparaissent dans Le chiendent de Raymond Queneau (1933) ou dans At Swim-two-Birds de Flann O'Brien (1939), ces auteurs continuent une tradition qui remonte au XVIIIe siècle avec des œuvres comme Jacques le fataliste, de Diderot ou Le voyage sentimental de Sterne, en passant par Alfred Jarry (Gestes et opinion du docteur Faustroll, pataphysicien).
En architecture, on retrouve rétrospectivement des éléments du postmodernisme dans l'architecture de la Sécession viennoise, celle de Constantin Melnikov, celle du slovène Jože Plečnik, des principes déjà existants chez Robert Mallet-Stevens, ou beaucoup plus avant au XVIIIe siècle dans les œuvres les plus étranges de Boullée et Ledoux.
Si le modernisme se caractérise par la recherche de l'originalité et la volonté de création de formes nouvelles, inédites, insolites, le postmodernisme admet qu'il réutilise des formes préexistantes, y compris les plus familières. Là où Le Corbusier veut renouveler complètement non seulement le style des bâtiments, mais la conception même de l'habitat, un architecte tel que Ricardo Bofill utilise des principes de composition et des éléments décoratifs empruntés à l'art classique ou antique (colonnes, frontons, etc.). L'innovation moderne se fonde toujours sur l'oubli ou l'ignorance des traditions propres à chaque art, lesquelles sont considérées comme un frein à une véritable création. Ce qui caractérise au contraire l'artiste postmoderne, et son originalité, c'est qu'il a su acquérir une maîtrise assez parfaite de l'histoire et des techniques les plus académiques de son art.
Les références à l'art du passé peuvent prendre des formes très diverses, depuis l'utilisation de détails stylistiques jusqu'à l'application rigoureuse de règles formelles anciennes, telles que la composition, la symétrie, l'ordonnancement, etc. Les modalités peuvent également varier, de l'hommage à la citation ironique. Mais le plus caractéristique de l'attitude postmoderne est l'« hommage ironique » qui joue sur l'ambiguïté : ainsi l'hommage à Nijinski du sculpteur Barry Flanagan présente un lièvre burlesque dans une pose du danseur.
L'œuvre postmoderne se présente souvent comme un collage d'éléments hétéroclites sans souci d'harmonie. On prendra pour exemple le roman At swim-two-birds de l'Irlandais Flann O'Brien qui met bout à bout des textes de genres aussi divers que le western et l'épopée médiévale, en passant par le conte de fées et le vaudeville.
Les procédés du collage et du détournement ne sont pas en eux-mêmes des spécificités du postmodernisme puisque c'est le surréalisme qui les a proposés. Les romans modernistes de la trilogie U.S.A. de John Dos Passos ou ceux de la trilogie Les somnambules de Hermann Broch se présentent également sous forme de collages de textes appartenant à des genres divers. Mais dans ces deux cas, le but recherché est d'effectuer une synthèse entre ces éléments pour appréhender une réalité complexe : les États-Unis pendant la grande dépression pour Dos Passos, la perte des valeurs en Europe occidentale pour Broch.
L'artiste postmoderne recherche au contraire le contraste entre les différents éléments et l'effet de distanciation qui en résulte.
Si le postmodernisme efface le temps et l'espace pour rendre toute la culture immédiatement présente, il prétend aussi effacer la hiérarchie entre culture élitaire et culture populaire. On peut citer par exemple l'adoption et le détournement de genres populaires par des écrivains : roman policier dans Cosmos de Witold Gombrowicz, roman d'espionnage dans Lac de Jean Echenoz, etc.
Un exemple particulièrement frappant de cet effacement est la convergence entre l'art contemporain et la publicité. Ainsi de l'Américain Andy Warhol, chef de file du pop art, qui fut publicitaire avant de devenir artiste et dont l'œuvre repose sur l'imaginaire populaire (marques, stars, clichés, etc.). À l'inverse, on voit de nombreuses publicités détourner des œuvres de l'histoire de la peinture.
De fait, la seconde moitié du XXe siècle est marquée par l'explosion de la culture de masse, relayée par une industrie des médias toujours plus puissante. Cette culture médiatique touche toutes les classes sociales et devient l'un des fondements de l’imagination collective.
L'ironie est considérée comme la caractéristique essentielle du postmodernisme. Plus généralement, on peut considérer que là où le modernisme place l'auteur et la création au centre de son esthétique, le postmodernisme fait jouer ce rôle à l'interprétation et au public. C'est pour cette raison qu'on lui a reproché de se conformer aux impératifs de la mercatique[13], ce qui serait juste s'il n'existait pas le décalage ironique qui assume tout aussi bien le fait de déplaire ou d'irriter.
Le simple fait d'apporter un regard nouveau sur un texte ou une œuvre picturale amène à en faire une œuvre nouvelle. Le plasticien Jeff Koons s'est ainsi rendu célèbre en transformant des objets kitsch en œuvres d'art. Ce regard ironique se pose aussi naturellement sur l'œuvre postmoderne elle-même, et aboutit à l'autocommentaire. On pourra citer l'exemple de Feu pâle de Vladimir Nabokov, formé d'un récit poétique et du commentaire de ce récit, ou de L'œuvre posthume de Thomas Pilaster d'Éric Chevillard qui fonctionne sur le même principe. On est proche ici de l'effet de distanciation théorisé par Bertolt Brecht ou Victor Chklovski.
Ce qu'il y a de commun aux artistes postmodernes, c'est la faculté de reprendre et de faire revivre les codes traditionnels les plus sérieux, en évitant de se prendre au sérieux, sans toutefois les déconsidérer en tombant dans des formes de dérision.
Le critique Brian McHale (en) compare la différence existant entre le modernisme et le postmodernisme à celle qui sépare l'épistémologie (théorie de la connaissance) et l'ontologie (théorie de l'être). Ainsi, le modernisme cherche à construire une image fidèle du monde réel, en dépassant les limites de la perception humaine. Le postmodernisme s'interroge plutôt sur le statut du monde fictionnel créé par l'œuvre d'art et son rapport au monde réel. L'exemple par excellence en est la vertigineuse nouvelle Tlön, Uqbar, Orbis Tertius publiée dans le recueil Fictions de Jorge Luis Borges dans laquelle le monde réel est peu à peu colonisé par le monde fictionnel de Tlön. Il est clair que le postmodernisme se veut ainsi bien éclectique.
Nous présentons ci-dessous une liste succincte d'œuvres caractéristiques du postmodernisme, sans prétendre à l'exhaustivité. Des articles spécialisés ou des catégories permettent d'approfondir les différents aspects du postmodernisme.
La philosophie du postmodernisme dans les arts est à l'opposé de la philosophie postmoderne de La condition postmoderne de Jean-François Lyotard[réf. souhaitée].
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