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Le terme de Neue Rechte (Nouvelle Droite) ou Neue Kultur (Culture nouvelle) désigne, en Allemagne, plusieurs mouvances politiques considérées comme de droite, apparues à partir des années 1960.
Les dénominateurs communs de ces courants sont, d'une part, des formes de contestation d'un ou de plusieurs plusieurs principes de la constitution allemande actuelle, et d'autre part, une volonté de marquer clairement leurs distance par rapport ce qu'ils appellent la « vieille Droite », c'est-à-dire le national-socialisme.
Ils sont parallèles à la Nouvelle droite française en tant que mouvement politique, quelque peu similaire dans leur position politique générale, y compris le sentiment anti-américain prôné par Alain de Benoist.
Cependant, les penchants néo-païens de la Nouvelle droite française sont à l'opposé de la fondation chrétienne de nombreux membres de la Nouvelle droite allemande. De plus, les racines de la Nouvelle droite allemande sont national-révolutionnaires tandis que celle de la Nouvelle Droite française est le néopaganisme identitaire.
On peut parler de trois vagues de la Neue Rechte. La première est née dans les rangs des organisations de jeunesse des partis de la droite allemande, s’inscrivant en opposition à l'émergence de la nouvelle gauche des années 1960 et 1970, mais en estimant que les partis comme le NPD n'apportaient plus de réponses appropriées. Ces jeunes militants ont alors fondés de nombreux groupes de tendance national-révolutionnaire, remettant au goût du jour l'héritage de certains courants de la Révolution conservatrice allemande des années 1920 et 1930.
La deuxième vague de la Neue Rechte est à rapprocher des Nouvelle Droite française ou italienne. Il s'agit de cercles intellectuels, privilégiant le combat culturel ou métapolitique. Ces théoriciens se basent essentiellement sur la redécouverte des différents courants de la Révolution conservatrice allemande des années 1920, dont notamment la tendance Völkisch, que l'on peut rapprocher du nationalisme ethnique. Contrairement aux nationaux-révolutionnaires, et conformément à ses homologues en Europe, cette Neue Rechte a cherché à devenir un carrefour intellectuel entre le centre-droit, les milieux conservateurs, la droite radicale et les mouvements d'extrême droite.
Enfin, certains politologues utilisent le terme de Neue Rechte pour désigner une vague de partis de type populiste qui tranche nettement avec les autres partis de droite par ses références et ses méthodes. Elle prend son essor à la fin des années 1980 avec les Republikaner et s'incarne, à partir de 2013, dans l'Alternative für Deutschland.
Après la fondation du Parti national-démocrate d'Allemagne (NPD) en 1964, de nombreux jeunes adhérents, souhaitant se démarquer de l'image du national-socialisme à laquelle leur parti était associé, et désirant marquer une nouvelle dynamique, propre à contrer les mouvements étudiants de la nouvelle gauche, crée un mouvement de jeunesse qu'ils nomment Junge Rechte[1].
Les résultats des élections fédérales de 1969 ne permettent pas au NPD d'entrer au Bundestag. Cette défaite est l'occasion pour de nombreux cadres des Junge Nationaldemokraten de donner une impulsion à un mouvement de renouvellement des structures, de la doctrine et du discours du parti. En 1972, une fraction des jeunes démissionne du NPD pour fonder l'Aktion Neue Rechte (ANR). Son leader, Henning Eichberg, affirme qu'il est temps de passer au « nationalisme de libération anti-impérialiste ». Il considère que l'Allemagne est une colonie victime de l'« impérialisme » comme un pays du tiers-monde. La « renaissance et la réunification allemandes » exigent l'expulsion des « forces d'occupation » des deux Allemagnes[2].
À partir de 1974, une vague de nouveaux petits mouvements de tendance nationale-révolutionnaire se développe dans toute l'Allemagne de l'Ouest, mais ces organisations suivent souvent des lignes assez divergentes. Le Solidaristische Volksbewegung, dirigé par Lothar Penz, réactualise l'idée de Volksgemeinschaft (Communauté populaire) et s'engage activement dans le mouvement écologiste naissant[3].
Henning Eichberg devient le principal théoricien des nationaux-révolutionnaire allemands. Avec ses partisans, il fonde la Sache des Volkes/NRAO (Cause du Peuple/ Organisation des structures nationales-révolutionnaires), dont les principaux axes de combat sont la lutte contre la surpopulation étrangère et les super-puissances, l'affirmation de l’identité nationale et l'élaboration d'une troisième voie entre capitalisme et communisme. Ils tentent de prendre influence sur certains groupes de gauche, sur les mouvements écologistes et sur la mouvance pacifiste[3].
Cette ligne inspire ensuite la parution de la revue Wir Selbst, qui va paraître de 1978 jusqu'en 2002[4]. Fondée par Siegfried Bublies, cette dernière revue, en affirmant sa filiation directe avec les nationaux-révolutionnaire des années 1920 et 1930, va théoriser un nouveau « nationalisme de libération », lié intimement à un combat écologiste et tiers-mondiste. Elle va tenter, tout au long de son existence, de réunir les « forces démocratiques de droite et de gauche », et de jeter des ponts vers la gauche et l'extrême gauche[5]. Des membres du SPD, des Verts et même du PDS ou d'autres organisations de gauche collaboreront ponctuellement avec Wir Selbst[6].
Au-delà des mouvements national-révolutionnaires se développe, à partie de 1980, un nouveau courant intellectuel, influencé par les idées d'Alain de Benoist et du GRECE français. Ce courant ne s'intéresse plus tant à la libération nationale qu'à un combat culturel, métapolitique, à l'échelle européenne. On crée la revue Elemente, pendant de la revue françaises Éléments. En 1980, le franco-allemand Pierre Krebs fonde à Cassel le Thule-Seminar sur le modèle du GRECE, avec pour but de préparer les bases théorique pour le « combat pour l'avenir de l'Europe ».
On trouve aussi d'autres courants, comme celui qui donne naissance à l'hebdomadaire Junge Freiheit, de tendance nationale-libérale.
Après la réunification allemande se sont multipliés dans tout le pays des groupes, cercles, associations et publications que l'on peut considérer comme appartenant à la mouvance de la Neue Rechte. Ils se caractérisent par la volonté de traiter les thèmes sociaux et politiques de manière novatrice et d'influencer le monde politique par un discours renouvelé[7].
En 1989, des politologues comme Claus Leggewie ont qualifié le parti Die Republikaner de Neue Rechte. Il est clair que le nouveau parti tient à se différencier de la « vieille droite », représentée selon lui par les partis comme le NPD ou la DVU. D'autres comme Richard Stöss analysent la montée des Republikaner comme la manifestation allemande d'une nouvelle vague politique de droite en Europe, représentée en Italie par Alleanza Nazionale (AN), le FPÖ en Autriche, le Front National en France ou l'UDC en Suisse[8].
L'historien Volker Weiss montre, dans son ouvrage Deutschlands Neue Rechte, que des personnalités venues de la gauche comme Thilo Sarrazin et Peter Sloterdijk sont parvenus à réintroduire dans toute la société des thématiques et des concepts traditionnels de la droite, ce que le NPD, par exemple, n'avait jamais réussi à faire. Selon Weiss, la contribution d'anciens représentants de la culture critique de gauche est une marque typique de cette nouvelle droite[9], qui va s'incarner désormais dans l'Alternative für Deutschland à partir de 2013[10].
Les représentants de la Neue Rechte se réfèrent souvent aux courants intellectuels qui se sont développés sous la république de Weimar, et que, depuis la thèse d'Armin Mohler publiée en 1949, on regroupe sous le nom de Konservative Revolution. La plupart des théoriciens de ces courants rejetaient la philosophie des Lumières, le libéralisme, le marxisme et la démocratie parlementaire. S'ils se rejoignaient sur ces points, ces courants étaient très différents les uns des autres. C'est ce qui a amené Armin Mohler et, à sa suite Louis Dupeux, à les classer en cinq groupes distincts: les Völkischen, les Jungkonservativen (comme Oswald Spengler, Moeller van den Bruck, von Gleichen, Wilhelm Stapel, Edgar Julius Jung, Othmar Spann), les Nationalrevolutionäre (comme Franz Sauwecker et Ernst Jünger, mais aussi les « nationaux-bolchéviques » comme Ernst Niekisch, Karl-Otto Paetel, les frères Otto et Gregor Strasser), les Bündischen (comme les Wandervogel) et le Landvolksbewegung (mouvement paysan)[11].
Les tenants de la Neue Rechte, comme ses homologues des nouvelles droite françaises et italiennes, affirment mener avant tout un combat culturel, ou métapolitique, inspirée par les théories du communiste italien Antonio Gramsci. Selon celui-ci, toute tentative de prendre le pouvoir est vaine, si elle n'est pas précédée par la conquête de l'hégémonie culturelle et idéologique dans la société[12].
Dans leurs travaux, les auteurs de la Neue Rechte réactualisent aussi de nombreux auteurs et philosophes extérieurs à l'Allemagne, comme Georges Sorel, Vilfredo Pareto, Robert Michels, Julius Evola et José Antonio Primo de Rivera.
Les intellectuels de la Neue Rechte soutiennent aussi que la « renaissance de l'Allemagne » présuppose un travail d'affirmation et une redéfinition de l'« identité nationale » et une remise en question de la « culpabilisation du peuple allemand » et de sa « rééducation par les vainqueurs »[13].
Le corpus idéologique et doctrinal de la Neue Rechte n'est pas monolithique et cette diversité se reflète, tant par leurs références que par leurs objectifs, sur les cercles, les revues et les mouvements qui s'en réclament. Ces différents courants rappellent ceux qu'Armin Mohler avait distingués dans la Révolution conservatrice, avec lesquels ils ont une certaine filiation. On peut mentionner :
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