Les gastéropodes (Gastropoda, du grec ancienγαστήρ/ gastếr, «ventre» et πούς/ poús, «pied»: ventre-pied) sont une classe de mollusques caractérisés par la torsion de leur masse viscérale. Ils présentent une très grande diversité de formes mais peuvent se reconnaitre généralement par leur coquille dorsale torsadée et univalve, caractéristique lorsqu’elle est présente. Les gastéropodes constituent le plus grand groupe animal après les insectes: on en dénombre environ 40 000 espèces vivantes, regroupées en 409 familles reconnues, auxquelles s'ajoutent 202 familles disparues, connues à l'état fossile depuis le Cambrien. On les rencontre sur tout le globe, dans tous les milieux à l'exception des régions polaires. Les plus petits gastéropodes sont de taille millimétrique et les larves planctoniques des espèces aquatiques sont microscopiques; le plus grand gastéropode connu est la «Trompette australienne» qui dépasse 90 cm et peut peser jusqu'à 18 kg[1].
Ils possèdent un pied et une tête distincts. Leur pied est aplati en une large sole ventrale, servant à la natation ou la reptation, tandis que leur tête comporte des yeux et une radula. L'écologie des gastéropodes est très variée et les espèces peuvent être marines, d'eau douce ou terrestres. Parmi les gastéropodes terrestres se trouvent notamment les escargots et les limaces.
Le terme Gastropoda est formé à partir des mots grecsγαστήρ (gastêr), «ventre, estomac», et πούς (poús), «pied» (via son génitifποδός (podos), «du pied»). Cela fait référence au fait que le pied des gastéropodes sécrète un mucus proche de la bave, et contient l'ouverture buccale.
Parmi les mollusques, les gastéropodes sont caractérisés par une coquille univalve, à l'opposé de celle des bivalves.
La perte de la symétrie bilatérale est due à trois phénomènes qui se produisent au cours du développement larvaire: d'abord une flexion endogastrique, liée à l'inégalité de croissance de la masse viscérale dans le sens dorso-ventral et l'allongement du tube digestif, qui provoque une courbure de ce tube, ce qui rapproche les ouvertures buccale et anale du côté ventral. Cette flexion entraîne une saillie de viscères dans une bosse dorsale et le déplacement de la cavité palléale qui devient antérieure (elle s'ouvre toujours du côté ventral), facilitant la respiration branchiale (les sens opposés de circulation de l'eau et du déplacement de l'animal autorisent un taux d'extraction du dioxygène plus élevé)[2]. Cette position antérieure de la cavité palléale permet à la tête de trouver protection sous la coquille mais présente le désavantage de l'élimination des déchets du rectum et des reins qui risquent d'encrasser les branchies, ce qui demande des adaptations morphologiques (par exemple chez les archéogastropodes, Pleurotomaria est doté d'une fente et les ormeaux de trous qui permettent à l'eau souillée d'être évacuée à l'arrière de la cavité palléale; réduction ou perte des branchies, la surface respiratoires se développant sur le manteau, comme chez les patelles dotées de branchies palléales)[3]. Dans un second temps, se produisent deux phénomènes indépendants: spiralisation de la masse viscérale hypertrophiée, liée à l'élévation et l'allongement de la bosse dorsale qui s'enroule en hélice, tandis que la pointe de la spire se tourne vers l'avant[4]; torsion de la masse viscérale et du manteau par rapport à l'ensemble tête-pied (de 180° chez les gastéropodes prosobranches, de 90° chez les opisthobranches chez qui le phénomène correspond à une détorsion), ce qui déplace la cavité palléale vers le côté dorsal (les branchies, l'anus, les orifices génitaux et urinaires se retrouvent au-dessus de la tête). Les gastéropodes pulmonés ont conquis le milieu terrestre: leur cavité palléale est transformée en poumon (escargot). Cependant, certains gastéropodes pulmonés vivent en milieu aquatique (planorbes, lymnées, etc.).
Les gastéropodes sont des animaux presque toujours asymétriques, dont le corps est divisé en trois régions distinctes:
En avant, la tête, presque toujours munie de tentacules, portant des yeux à leur extrémité ou à leur base.
Ventralement, un pied élargi en un disque reptateur, ou parfois transformé en organe de natation.
Dorsalement, une masse viscérale, parfois nue mais très généralement enfermée dans une coquille d'une seule pièce.
La coquille des gastéropodes, le plus souvent en spirale (quelques exceptions: la patelle — coquille en forme de chapeau chinois — ou la limace de mer — où la coquille est interne —), est éminemment variable en forme, grandeur et coloris. Il en est dont l'ouverture est fermée par une pièce mobile cornée ou calcaire, l'opercule, pièce absente chez d'autres. Certaines coquilles sont utilisées pour la fabrication d'objets en nacre, et quelques espèces produisent des perles qui ne sont pas sans valeur.
Ces mollusques sont unisexués ou hermaphrodites, ovipares ou vivipares. La plupart des gastéropodes sont hermaphrodites. Les deux individus connectent leurs dards et s'échangent mutuellement des gamètes mâles, qui viendront féconder leurs gamètes femelles.
Le développement comprend généralement un stade pendant lequel la larve, pourvue d'une petite coquille spirale operculée et d'un voile cilié, nage librement. C'est la larve trochophore caractéristique des mollusques, mais qui manque chez les gastéropodes terrestres.
Deux escargots font connaissance avant de s'accoupler.
Connexion des dards au moment de l'accouplement (illustration par Férussac en 1820.)
Les gastéropodes apparaissent dans le registre fossile il y a environ 600 millions d'années. Ce sont les seuls mollusques à avoir aussi colonisé la terre ferme. L'histoire évolutive des gastéropodes est connue par l'évolution des formes de leurs coquilles.
Les études phylogénétiques suggèrent que les convergences évolutives sont très nombreuses au sein du groupe. La phylogénie moderne, basée sur le séquençage de l'ADN, a été proposée en 1997 par Ponder & Lindberg[5]. Puis une autre, plus précise, l'a été par Bouchet & Rocroi en 2005[6].
Anciennes sous-classes
Dans l'ancienne classification, par exemple celle de Johannes Thiele (1929-1935), trois sous-classes étaient définies:
les Prosobranchia essentiellement marins, qui ont les branchies à l'avant du corps, en face du cœur.
Les Cocculiniformia, les Neomphalina et les Heterobranchia basaux ne sont pas inclus dans le cladogramme ci-dessus.
Classification de Ponder & Lindberg (1997)
Cette classification est issue de la volonté de faire concorder au sein du même arbre la classification traditionnelle et les avancées en termes de génétique. Elle est polémique, car des choix de positionnement relatifs de ces groupes doivent être faits.
Classification de Ponder & Lindberg
Dans la classification de Ponder & Lindberg décrite ci-après, les développements sont effectués en général d'après l'ancienne classification (ce qui signifie que de nombreuses modifications devront intervenir ultérieurement)
Cette classification regroupe les 611 familles reconnues, parmi lesquelles 202 sont exclusivement fossiles. Lorsque la phylogénie n'est pas connue, le taxon est noté «groupe informel». Cette nouvelle classification a essayé de concilier les dernières avancées en génétique en utilisant le système des clades, avec positionnement des taxons au-dessus du rang de super-famille (en remplacement des rangs sous-ordre, ordre, Super-ordre et sous-classe), tout en utilisant la méthode linnéenne pour tous les taxons en dessous du rang de superfamille. Chaque fois que la monophylie n'a pas été testée ou est connue pour être paraphylétiques ou polyphylétique, le terme «groupe» ou «groupe informel» a été utilisé. La classification des familles en sous-familles est cependant souvent mal résolue et devrait être considérée uniquement comme la meilleure hypothèse possible.
Classification de Bouchet & Rocroi
mollusque du Paléozoique à la position systématique incertaine
Clade Patellogastropoda
Super-famille Patelloidea
Superfamily Nacelloidea
Super-famille Neolepetopsoidea
Clade Vetigastropoda
Diverses familles non assignées à une super-famille
Super-famille Amberleyoidea
Super-famille Eotomarioidea
Super-famille Fissurelloidea
Super-famille Haliotoidea
Super-famille Lepetelloidea
Super-famille Lepetodriloidea
Super-famille Murchisonioidea
Super-famille Neomphaloidea
Super-famille Pleurotomarioidea
Super-famille Porcellioidea
Super-famille Scissurelloidea
Super-famille Seguenzioidea
Super-famille Trochoidea
Super-famille Turbinoidea
Clade Cocculiniformia
Super-famille Cocculinoidea
Clade Neritinimorpha
Neritimorpha du paléozoïque à la position systématique incertaine
Super-famille Nerrhenoidea
Super-famille Oriostomatoidea
Super-famille Palaeotrochoidea
Super-famille Platyceratoidea
Clade Cyrtoneritimorpha
Clade Cycloneritimorpha
Super-famille Helicinoidea
Super-famille Hydrocenoidea
Super-famille Neritoidea
Super-famille Neritopsoidea
Super-famille Symmetrocapuloidea
Clade Caenogastropoda
Caenogastropoda à la position systématique incertaine
Super-famille Acteoninoidea
Super-famille Dendropupoidea
Super-famille Palaeostyloidea
Super-famille Peruneloidea
Super-famille Pseudomelanioidea
Super-famille Subulitoidea
groupe des Zygopleuroid
Groupe informel des Architaenioglossa
Super-famille Ampullarioidea
Superfamily Cyclophoroidea
Super-famille Viviparoidea
Clade Sorbeoconcha
Sorbeoconcha à la position systématique incertaine
Super-famille Cerithioidea
Clade Hypsogastropoda
Hypsogastropoda à la position systématique incertaine
Clade Littorinimorpha
Super-famille Calyptraeoidea
Super-famille Capuloidea
Super-famille Cingulopsoidea
Super-famille Cypraeoidea
Super-famille Ficoidea
Super-famille Littorinoidea
Super-famille Naticoidea
Super-famille Pterotracheoidea
Super-famille Rissooidea
Super-famille Stromboidea
Super-famille Tonnoidea
Super-famille Vanikoroidea
Super-famille Velutinoidea
Super-famille Vermetoidea
Super-famille Xenophoroidea
Groupe informel des Ptenoglossa
Super-famille Epitonioidea
Super-famille Eulimoidea
Super-famille Triphoroidea
Clade Neogastropoda
Neogastropoda à la position systématique incertaine
Super-famille Buccinoidea
Super-famille Muricoidea
Super-famille Olivoidea
Super-famille Pseudolivoidea
Super-famille Conoidea
Super-famille Cancellarioidea
Clade Heterobranchia
groupe informel des "bas" Heterobranchia ou Allogastropoda
Allogastropoda à la position systématique incertaine
Nathan J. Kenny, Marta Truchado-García et Cristina Grande, «Deep, multi-stage transcriptome of the schistosomiasis vector Biomphalaria glabrata provides platform for understanding molluscan disease-related pathways», BMC Infectious Diseases, vol.16, no1, , p.618 (ISSN1471-2334, PMID27793108, PMCID5084317, DOI10.1186/s12879-016-1944-x)
Bibliographie
Sander Rang, «Notice sur le Litiope, nouveau genre de mollusque gastéropode», Annales des sciences naturelles, Paris, Éd. Crochard, vol.16, , p.303-307 (lire en ligne[PDF]).
Bouchet, P. & Rocroi, J.-P., «Classification and Nomenclator of Gastropod Families», Malacologia, vol.47, nos1-2, , p.1–397, elle inclut un code associé aux 2400 taxons supra-génériques qui vont de la sous-tribu à la super-famille. Pour chaque taxon, un bibliographie complète est donnée, avec le nom de l'auteur, la date de publication, et le statut vis-à-vis de la commission internationale de nomenclature zoologique.
Lydeard C, Cowie RH, Ponder WF, Bogan AE, Bouchet P, Clark SA, Cummings KS, Frest TJ, Gargominy O, Herbert DG, Hershler R, Perez KE, Roth B, Seddon M, Strong EE & Thompson F (2004) The global decline of nonmarine mollusks. BioScience, 54, 321-330.