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œuvre d'Hérodote De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'Enquête ou les Histoires (en grec ancien : Ἱστορίαι / Historíai) est la seule œuvre connue de l'historien grec Hérodote. Le titre signifie littéralement « recherches, enquêtes » (du grec ἵστωρ / histôr, « celui qui sait, qui connaît »). C'est le plus ancien texte complet en prose que nous ayons conservé de l'Antiquité[1]. Hérodote y expose le développement de l'Empire perse, puis y relate les guerres médiques qui opposèrent les Perses aux Grecs.
L'Enquête
Titre original |
(grc) Ἱστορίαι |
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Comprend | |
Langue | |
Auteur | |
Genres |
Récit de voyage Historiographie (d) |
Date de création |
Vers les années 440 av. J.-C. |
Les Histoires ont probablement été rédigées vers 445 av. J.-C., où la tradition de la philosophie antique mentionne qu'Hérodote fit une lecture publique de son travail à Athènes, pour lequel il reçut une récompense officielle qui se serait élevée à dix talents, une somme considérable[2]. Cependant, la composition de ce texte s'étala sur plusieurs années, du fait des longs voyages nécessaires à l'époque pour concrétiser un tel témoignage et de la complexité du propos.
Les Histoires se composent de neuf livres, chacun portant le nom d'une muse. Ce découpage n'est pas le fait de l'auteur : la première mention en est due à Diodore de Sicile au Ier siècle, et ce sont probablement des grammairiens alexandrins qui, au IIe siècle, organisèrent ainsi l'ouvrage. La taille de l'ouvrage devait s'adapter au livre d'alors — un rouleau de papyrus qui, pour ne pas s'enrouler ou se dérouler trop difficilement, ne devait pas être d'une taille excessive. Attestée pour la première fois de manière formelle chez Lucien de Samosate (IIe siècle), elle est probablement le fait des Alexandrins[3],[4].
Dans le premier livre, Hérodote établit le cadre du conflit entre Grèce et Asie. Dans sa préface, il commence par retracer les origines légendaires de ce conflit (enlèvements de Io, Europe, Médée et Hélène). Le premier livre est dédié aux origines historiques: la domination de Crésus, roi de Lydie, sur les peuples grecs d'Asie mineure. Puis l'agrandissement du pouvoir de la Perse, avec la victoire de Cyrus II (Cyrus le Grand) sur Crésus.
Hérodote débute son livre avec une brève histoire des rois lydiens de la dynastie des Memnades, dont la défaite après la cinquième génération a été prédite par la Pythie (l'oracle d'Apollon à Delphes). Le règne des Memnades comporte :
Hérodote décrit les enchaînements qui conduisent le roi lydien Crésus à mener une campagne militaire contre la Perse, d'une part en raison de sa croyance aux prophéties de l'oracle de Delphes (qu'il interprète de façon erronée, croyant qu'elles prédisent sa victoire), d'autre part dans le but de venir au secours d'Astyage, un roi Mède qui a été fait prisonnier par le roi perse Cyrus. Crésus établit des alliances militaires avec différents peuples grecs, notamment avec Sparte. Toutefois, elles ne lui sont en définitive d'aucune utilité, à cause de la rapidité de la riposte militaire de Cyrus. Après 14 jours de siège, la ville de Sardes (capitale de la Lydie) est prise, et Crésus est fait prisonnier. Une intervention miraculeuse d'Apollon lui évite la mort sur le bûcher.
Hérodote glisse dans son récit de nombreuses histoires, comme le dialogue entre Crésus et le sage Solon, à propos de la notion de bonheur, ou l'histoire du fils de Crésus, Atys, qui meurt dans des circonstances tragiques.
Hérodote retrace la généalogie de Cyrus, remontant la lignée des rois des Mèdes, qui sont ses ancêtres du côté maternel (Déiocès, Phraorte, Cyaxare et Astyage). Le règne de Cyaxare est particulièrement mouvementé: alors qu'ils veulent soumettre et raser la ville assyrienne de Ninive, les Mèdes sont attaqués par une imposante armée scythe. Les Scythes remportent la victoire, et règnent sur l'Asie pendant 28 ans. Finalement, Cyaxare et les Mèdes parviennent à vaincre les Scythes par une ruse, récupèrent leur empire, et prennent Ninive.
Hérodote fait ensuite un récit légendaire de l'enfance de Cyrus.
Astyage, le roi des Mèdes, a des rêves prémonitoires qui lui font craindre que l'enfant de sa fille Mandane (mariée à un Perse) règnerait un jour à sa place. Il donne à l'un de ses parents les plus dévoués, Harpage, la mission de tuer le nouveau-né. Harpage décide de ne pas tuer l'enfant, mais ordonne à un bouvier, Mitradatès, de l'abandonner dans une région montagneuse, pour qu'il soit dévoré par les bêtes fauves. La femme du bouvier venant de mettre au monde un enfant mort-né, le couple décide de garder le fils de Mandane en vie, en le faisant passer pour leur propre enfant. Lorsqu'il est âgé de dix ans, le comportement du garçon attire l'attention d'Astyage, qui découvre la vérité.
Le bouvier et Harpage font leurs aveux. Pour se venger de Harpage, Astyage force celui-ci à manger la chair de son propre fils. Il convoque les Mages (tribu Mède) pour décider du sort de Cyrus. Sur leurs conseils, il renvoie le garçon auprès de sa famille en Perse.
Pendant les années suivantes, Harpage parvient à convaincre les plus puissants des Mèdes à se retourner contre Astyage, et à soutenir Cyrus. Cyrus ayant atteint l'âge adulte, Harpage lui fait parvenir un message secret, l'incitant à conduire les Perses à la révolte contre leur oppresseur Astyage.
Lorsque Cyrus mène ses tribus perses contre Astyage, celui-ci met Harpage à la tête des troupes mèdes. C'est une grave erreur, car une grande partie des troupes font partie du complot et prennent la fuite. Astyage est vaincu et fait prisonnier, et les Mèdes sont mis sous le joug des Perses. Cyrus devient par cette victoire maître de l'Asie, et débute la domination des Achéménides.
Hérodote donne quelques précisions sur les coutumes des Perses (les sacrifices religieux à leurs divinités, les festivités, les relations hiérarchiques, la justice, les rites funéraires). Hérodote considère les Perses comme "le peuple le plus ouvert aux coutumes étrangères" (I 135).
Après sa victoire contre Astyage (vers 550) et Crésus (vers 547), Cyrus envoie Harpage en tant que général mener ses armées en Ionie et en Asie Mineure. Hérodote raconte les destinées des différents peuples, notamment les Phocéens, les Cariens, Cauniens et Lyciens.
Cyrus lui-même dirige la conquête de l'Assyrie, et parvient à prendre Babylone, en l'an 539. Hérodote décrit la cité de Babylone, raconte le règne de la reine Nitocris, et décrit la prise de Babylone. La ville étant préparée à supporter un long siège, Cyrus a recours à une ruse. Il fait creuser un canal pour détourner l'Euphrate dans un lac artificiel, ce qui permet à son armée de pénétrer dans la ville par le lit du fleuve, et de prendre les Babyloniens par surprise.
Hérodote livre ensuite une description de l'Assyrie, et des mœurs et coutumes des Babyloniens.
Cyrus veut ensuite soumettre le peuple des Massagètes, un peuple nomade vivant au-delà de l'Araxe, dans la région de la Caspienne, dirigé par la reine Tomyris. Au terme d'une bataille acharnée, l'armée perse est vaincue, et Cyrus perd la vie, après vingt-neuf ans de règne. Le livre I s'achève sur une description du mode de vie des Massagètes.
Dans le deuxième livre, Hérodote dresse le portrait de l'Egypte, avant sa conquête par Cambyse, le fils de Cyrus. Il décrit la géographie, le fleuve Nil. Les coutumes des Égyptiens, leur religion (II, 37). Les animaux sacrés (II, 65): chat, crocodile, hippopotame, phénix, serpents, ibis. Les mœurs des Égyptiens, leurs rites funéraires, leur nourriture, leurs bateaux. Hérodote précise que jusqu'ici, il a rapporté ce que "ses yeux, ses réflexions et ses enquêtes" lui ont appris.
Dans cette partie, Hérodote retrace la lignée des rois (pharaons) égyptiens:
L'histoire des rois continue avec Nécôs, Psammis, Apriès, et Amasis.
Dans son récit, Hérodote établit les correspondances suivantes entre les divinités:
Nom égyptien | Nom grec |
---|---|
Amon (dieu à tête de bélier) | Zeus |
Osiris | Dionysos |
Horus (le faucon) | Apollon |
Bubastis (la déesse-chat Bastet) | Artémis |
Neith (déesse vierge et guerrière) | Athéna |
Thot (dieu-ibis) | Hermès |
Seth | Typhon |
Apis (dieu-taureau de Memphis) | Épaphos |
Onouris (dieu combattant) | Arès |
Ptah (dieu des artisans, des artistes) | Héphaistos |
Règne de Cambyse, fils de Cyrus (III 1-38) ; conquête de l'Égypte (en 525). Expéditions lancées par Cambyse contre les Éthiopiens et Carthage. Cambyse blesse le bœuf incarnant Apis, folie et crimes de Cambyse.
En Grèce, affaire de Samos (III 39-60), histoire de Polycrate, Sparte contre Samos, Corinthe contre Samos, Périandre et son fils, siège de Samos.
En Perse, révolte de Smerdis, mort de Cambyse (en 522), le complot des sept. Darius reçoit la royauté. L'empire de Darius, les satrapies, l'Inde, l'Arabie, l'Éthiopie. Règne de Darius.
Révolte de Babylone, deuxième prise de Babylone par les Perses (III 150-160).
L'œuvre mêle des éléments ethnographiques à d'autres proprement historiques. Felix Jacoby reconnaît dans ce mélange l'influence d'Hécatée et insiste sur le caractère dispersé des développements[7]. D'autres commentateurs (Henry R. Immerwahr) ont au contraire insisté sur l'unité profonde de l'œuvre.
On peut être surpris par les digressions d’Hérodote : un développement peut être mis temporairement de côté parce que l'auteur veut préciser tels ou tels propos ; ainsi pour expliquer la prise de Babylone par Cyrus, Hérodote décrit d'abord la ville, ses habitants, leurs mœurs, et il cite les grands rois et les grandes reines qui lui ont permis de devenir ce qu'elle était à cette époque ; tout cela effectué, il rend finalement compte de la prise de la ville. Cela s'explique par le fait que le livre, à l'époque, était écrit non pour être lu, mais pour être entendu par un public. Il n'a ainsi pas été fait pour être consulté d'une manière linéaire, comme le lecteur a l'habitude de le faire aujourd'hui, mais pour que certains fragments puissent être expliqués et compris par des auditeurs lors d'une lecture publique[4].
Hérodote, au cours de sa vie, a toujours eu la volonté de structurer le monde avec un centre et des limites. En outre, sa vision du monde est bien différente de celle des géographes d'aujourd'hui. En effet, la Terre est pour lui constituée de seulement trois continents : l'Europe, l'Asie et la Libye. L'Ionie est un pays civilisé et aucune autre nation ne peut être comparée à elle. Hérodote place cette région au centre du monde connu tel qu'il se l'imagine. Mais, grand voyageur, ayant vu vivre les Grecs aux côtés des Scythes sur les rives de la mer Noire, il n'est pas choqué par les coutumes scythes et se garde bien d’opposer les Scythes aux Grecs civilisés : le mot « barbare » n'avait du reste pour lui que la signification d’« étranger », pour désigner le non-Grec que l’on ne comprend pas quand il parle[8].
Tout d’abord, l’Ionie serait un centre climatique puisqu'Hérodote est persuadé que toutes les villes construites hors de ce pays s'exposent, soit au froid et aux averses, soit à des chaleurs insoutenables et à des sécheresses, alors qu’en Ionie le climat serait toujours agréable.
Ensuite, l’historien voit cette région comme un centre moral, politique et militaire. Effectivement, il estime que les Spartiates agissent comme des guerriers idéalistes, ne combattant que pour l’arété (ἀρετή), dans le sens de « gloire ou honneur », et en aucune façon pour les biens matériels. D’ailleurs, une de leurs devises pourrait être « Vaincre ou mourir ». D'après lui, ils obéissent aveuglément à la loi. Elle représenterait leur maître absolu puisqu'elle ne peut être tuée ou détrônée, contrairement à un roi. Ils vivraient dans le respect tandis que les étrangers, comme les Perses, ne rechercheraient que le profit notamment dans la guerre ou dans les jeux. Pour toutes ces raisons, Hérodote considère l'Ionie comme un pays respectable.
Enfin, Hérodote s’intéresse à ce qu’il pense être les extrémités du globe terrestre et étudie des pays comme la Libye, l’Inde ou encore la Scythie. Selon lui, ces contrées regorgeraient d’arbres ou d’animaux sauvages inconnus et merveilleux à la fois. Leurs habitants posséderaient des cultures différentes et intéressantes. Cela n’empêche pas Hérodote de trouver ces étrangers également sauvages, pratiquant des coutumes grossières[9].
La première édition du texte grec des Histoires paraît sur les Presses aldines en 1502[10]. Une sélection de textes choisis et présentés par l'helléniste André Bonnard est disponible aux Éditions de L'Aire sous le titre de Découverte du Monde (L'Aire, Vevey, 1981).
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