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formation militaire de combat De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Un carré d'infanterie est une formation militaire de combat qu'une unité d'infanterie forme en ordre serré quand elle est menacée d'une attaque de cavalerie[1].
La formation fut décrite par Plutarque et utilisée par l'armée romaine. Elle fut développée à partir d'une formation circulaire. Plus précisément, un imposant carré d'infanterie fut formé par les légions romaines lors de la bataille de Carrhes contre les Parthes, et dont les armées continrent une grande partie de la cavalerie adverse[2].
Les forces montées d'infanterie de l'empire des Han utilisèrent avec succès des tactiques mettant en œuvre des formations de carrés d'infanterie mobile conjointement avec de la cavalerie légère dans leurs nombreux affrontements, à l'origine contre les armées nomades de cavalerie Xiongnu au Ier siècle apr. J.-C. Les carrés d'infanterie furent utilisés lors du siège des installations nomades situées dans les montagnes près de la région de Gobi, où les armées Han repoussèrent les attaques de lanciers nomades.
Par la suite apparurent les carrés de piquiers écossais (le schiltron), suisse (le Gewalthaufen[3] ) et espagnol (le tercio), qui furent renforcés d'arquebusiers pour les rendre encore plus efficaces.
Il s'agissait d'un carré (ou parfois d'un rectangle) au centre vide, dont les côtés étaient formés par 2 (ou plus) rangs de soldats armés de leur fusil à un coup, baïonnette au canon. Le carré pouvait être formé rapidement lors de la progression en colonne, alors que la ligne, si elle donnait une grande puissance de feu, était beaucoup plus longue à transformer en carré.
La plus petite unité pouvant former un carré d'infanterie était en général un bataillon, soit 500 à 1 000 hommes. Les étendards et le commandant étaient placés au centre du carré, de même que les réserves, qu'on pouvait envoyer en renfort à l'endroit où le carré était soumis à une attaque. Un carré de 500 hommes sur 4 rangs, comme ceux que les troupes de Wellington formèrent lors de la bataille de Waterloo, réalisait une formation compacte de 20 m de côté environ.
Les fantassins formés en carré déchargeaient leurs salves sur la cavalerie qui les chargeait à un moment précis. Il était en effet recommandé, pour avoir le maximum d'efficacité, d'attendre pour donner l'ordre de tirer que les cavaliers ennemis soient arrivés à environ 30 m du carré : les chevaux et les hommes tués ou blessés qui s'accumulaient alors devant le front formaient au carré un rempart contre de nouveaux attaquants.
Le choix du moment opportun pour déclencher le feu était important. En effet un feu commandé trop tôt laissait les fantassins à la merci de l'ennemi, avec un fusil vide dont le rechargement était long : les cavaliers ennemis pouvaient alors les attaquer au sabre, au pistolet ou à la lance, selon leur armement. Et si le feu était commandé trop tard (alors que la charge ennemie arrivait à 20 m du front) les chevaux, même touchés, pouvaient, emportés par leur élan, effondrer les lignes de fantassins, créant une brèche à travers laquelle les suivants pouvaient pénétrer à l'intérieur du carré.
Un carré devait être inébranlable face à une charge de cavalerie, mais n'était pas statique pour autant : des chefs habiles ont utilisé cette formation pour décimer la cavalerie ennemie, soit en l'accablant sous des feux de salve, soit en la prenant au piège. C'est ce que les Français réussirent contre les Ottomans à la bataille du Mont-Thabor (1799), en les soumettant à un feu croisé.
S'ils étaient nombreux, les carrés d'infanterie étaient ordonnés en damier les uns par rapport aux autres, afin d'éviter les accidents du type tir ami.
Lors de la bataille de Waterloo (1815), les carrés d'infanterie (sur quatre rangs d'hommes) des Alliés tinrent contre 11 charges de cavalerie française (laquelle n'était soutenue ni par l'artillerie montée ni par l'infanterie).
Lors de la bataille de Lützen (1813), des carrés de troupes françaises non aguerries soutinrent les charges de la cavalerie Alliée, qui pourtant était soutenue par son artillerie montée et son infanterie.
Autres exemples de l'efficacité défensive impressionnante du carré d'infanterie : la bataille d'Iéna-Auerstedt (1806), la bataille de Pultusk (1806), la bataille de Fuentes de Oñoro (1811) et la 1re bataille de Krasnoï (). Lors de la bataille d'Albuera (1811), la cavalerie française (uhlans et hussards) lancée par Latour-Maubourg avance cachée par un orage de pluie et de grêle (qui de plus rend les fusils des redcoats inefficaces) et détruit presque complètement la colonne Colborne; seul le 31st (Huntingdonshire) Regiment of Foot, qui a pu former le carré, échappe au massacre.
Les charges de cavalerie contre un carré d'infanterie étaient menées en formation serrée, de façon à essayer de semer la panique dans les rangs de fantassins peu aguerris, provoquant leur débandade – ou d'arriver au contact pour provoquer un maximum de pertes chez l'ennemi.
La cavalerie se lançait souvent contre les coins du carré, qui étaient connus comme étant les points faibles de la formation. Elle utilisait aussi des feintes ou de fausses attaques, en espérant que les fantassins lâcheraient leur volée trop tôt, et seraient ensuite vulnérables, n'ayant plus en main que des fusils vides, qui, avec leur baïonnette, n'étaient plus que de courtes piques.
En fait, si les fantassins étaient disciplinés et tenaient bon, la cavalerie n'avait pratiquement aucune chance de « culbuter un carré et de le transformer en une ruine sanglante ». Cela arriva pourtant, exceptionnellement : ainsi lors de la bataille de Medina de Rioseco (au nord de Valladolid, le 14 juillet 1808), les fantassins navarrais résistèrent longtemps, puis lâchèrent pied.
L'arme la plus efficace contre le carré d'infanterie n'était pas la cavalerie, mais l'artillerie. Cependant celle-ci devait approcher à courte distance pour être vraiment efficace contre une formation de 20 m de côté : cette cible était difficile à atteindre pour l'artillerie de campagne qui tirait généralement à des distances de 600 m ou plus. Les attaquants utilisaient donc l'artillerie montée : des canons légers de calibre moyen ou petit, que leurs attelages pouvaient approcher tout près du carré d'infanterie. Les fantassins à l'approche de la cavalerie formaient le carré, et devenaient alors une cible compacte et facile pour l'artillerie montée ; et une fois démantelé par les canons, le carré devenait une proie facile pour la charge de cavalerie.
Faute d'artillerie montée, l'association cavalerie-infanterie était efficace contre un carré d'infanterie : l'attaque par l'infanterie poussait le carré à se mettre en ordre dispersé pour répondre au tir ennemi, et il devenait alors vulnérable à la charge de cavalerie. Il y eut au moins un cas connu de carré d'infanterie chargé par des fantassins : lors de la bataille des Quatre-Bras, le capitaine Jean Baptiste Fidèle Bréa, à la tête de 140 carabiniers du 1er régiment d'infanterie légère, mena l'attaque à la baïonnette contre un carré d'Écossais (il y eut 42 morts chez les attaquants français).
Il était aussi possible que la cavalerie surprenne l'infanterie avant qu'elle n'ait eu le temps de former le carré : lors de la bataille des Quatre-Bras (1815) plusieurs corps britanniques furent ainsi pris au dépourvu par la cavalerie française qui s'était dissimulée derrière un repli de terrain.
Le carré d'infanterie pouvait donc voir son efficacité fortement diminuée dans certaines circonstances. Par exemple, quand un orage détrempait sa poudre, il était réduit à un bataillon de piquiers, dépendant pour sa survie de son courage et de sa discipline : ainsi lors de la campagne d'Allemagne, le 23 août 1813, à Goldberg, les soldats du 150e régiment d'infanterie résistent à la baïonnette contre les charges de cavalerie des Coalisés bien qu'une pluie torrentielle ait détrempé leur poudre ; d'où la devise du régiment : « Par le fer quand le feu manque ».
Autres circonstances critiques : quand les soldats étaient fatigués ou démoralisés, la solidité du carré était diminuée – et quand le feu était commandé trop tôt ou trop tard… Dans ce dernier cas, un cheval mortellement blessé pouvait effondrer un de ses murs, donnant accès aux ennemis. Cela arriva lors de la bataille des Arapiles (23 juillet 1812)[4] : « Les dragons lourds de la King's German Legion commandés par Bock chargent un carré formé par le 6° d'infanterie légère. Les Français tirent trop tard, et certes leur salve tue un bon nombre de cavaliers, mais un cheval mortellement blessé tombe sur le front français. Il rue, se débat, et renverse au moins une demi-douzaine d'hommes, créant une brèche dans laquelle s'engouffre le capitaine Gleichen. Ses hommes le suivent, le carré est brisé, les Français se rendent en masse. Un 2nd carré, démoralisé par le spectacle, perd pied et se désagrège dès que les dragons le chargent. »
le carré d'infanterie fut utilisé en particulier
Mais, comme l'a écrit Roger Ayers, le carré d'infanterie devint aussi une formation d'attaque "vaste et compacte, de 1 000 à 1 500 hommes, capable d'avancer lentement, avec des rangs d'infanterie ou de cavalerie formant les 4 côtés, et au centre l'artillerie, les mitrailleuses sur affuts à roues, les chariots de transport, les animaux de trait et leur personnel. Ce genre de carré ne pouvait tenir que contre des ennemis dépourvus d'armes à feu"[7].
D'ailleurs quand le le jeune Arthur Fremantle, officier anglais en visite sur le front de l'armée du Tennessee, demande (il est capitaine des Coldstream Guards) si les recrues sudistes savent former le carré d'infanterie, on lui répond : « Inutile, ici il n'y a pas de charges massives de cavalerie : le terrain ne le permet pas, et la cavalerie yankee n'aurait pas l'estomac de charger ainsi… ». Fremantle constatera (et déplorera) par la suite que les cavaliers américains sont le plus souvent en fait des fantassins montés.
Le capitaine George A. Armes attribua ce succès US au courage de ses Buffalo Soldiers noirs[9],[10],[11].
Le carré d'infanterie tomba en désuétude lorsque la cavalerie hippomobile disparut comme arme d'attaque[12] - et qu'apparurent par ailleurs les armes à feu modernes à répétition : un groupe dense de fantassins était trop exposé à leur feu.
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