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Le paracétamol, aussi appelé acétaminophène, est un composé chimique utilisé comme antalgique (anti-douleur) et antipyrétique (anti-fièvre), qui figure depuis le début des années 1950 parmi les médicaments les plus communément utilisés et prescrits au monde.
Paracétamol | ||
Représentations plane et 3D d'une molécule de paracétamol | ||
Identification | ||
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DCI | Paracétamol[1] | |
Nom UICPA | N-(4-hydroxyphényl)acétamide | |
Synonymes |
acétaminophène |
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No CAS | ||
No ECHA | 100.002.870 | |
No CE | 203-157-5 | |
No RTECS | AE4200000 | |
Code ATC | N02 | |
DrugBank | DB00316 | |
PubChem | 1983 | |
ChEBI | 46195 | |
SMILES | ||
InChI | ||
Apparence | poudre blanche cristallisée inodore[2] | |
Propriétés chimiques | ||
Formule | C8H9NO2 [Isomères] |
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Masse molaire[3] | 151,162 6 ± 0,007 8 g/mol C 63,56 %, H 6 %, N 9,27 %, O 21,17 %, |
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pKa | 9,38[4] | |
Propriétés physiques | ||
T° fusion | 169 à 171 °C[2] | |
T° ébullition | décomposition | |
Solubilité | 14 g L−1[2] à 20 °C ; bien plus soluble dans l'eau chaude. Soluble dans l'acétone, l'éthanol, le méthanol, le diméthylformamide, le dichlorure d'éthylène, l'acétate d'éthyle. Peu soluble dans le chloroforme, l'éther. Presque insoluble dans l'éther de pétrole, le pentane, le benzène. |
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Masse volumique | 1,293 g cm−3[2] à 21 °C | |
T° d'auto-inflammation | 540 °C[2] (inflammation brève sans propagation) | |
Point d’éclair | 177 °C[5] | |
Cristallographie | ||
Classe cristalline ou groupe d’espace | P21/n[6] | |
Paramètres de maille | a = 7,094 Å b = 9,232 Å |
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Volume | 753,94 Å3[6] | |
Précautions | ||
SGH[2] | ||
H302, H315, H317 et H319 |
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SIMDUT[7] | ||
Produit non contrôlé |
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Classification du CIRC | ||
Groupe 3 : Inclassable quant à sa cancérogénicité pour l'Homme[8] | ||
Écotoxicologie | ||
DL50 | 1 940 mg/kg[2] (souris, oral) 800 mg/kg souris i.p. 825 mg/kg chien i.v. |
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LogP | 0,49[9] | |
Données pharmacocinétiques | ||
Biodisponibilité | Proche de 100 % | |
Métabolisme | Hépatique à 95 % | |
Demi-vie d’élim. | 1 à 4 heures | |
Excrétion | ||
Considérations thérapeutiques | ||
Classe thérapeutique | Antalgique • Antipyrétique | |
Voie d’administration | Orale, IV, intrarectale | |
Grossesse | Autorisé | |
Précautions | Toxicité hépatique à fortes doses | |
Antidote | N-acétylcystéine | |
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | ||
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Il est indiqué dans le traitement des douleurs d'intensité faible à modérée, seul ou en association avec d'autres analgésiques (opioïdes entre autres). Il est très populaire car il a moins de contre-indications que les autres antalgiques et jouit d'une bonne image auprès du public.
Son mécanisme est très complexe ; en effet, il diminue la fièvre, mais pas par le même mécanisme que l'aspirine ou l'ibuprofène, qui agissent sur l'inflammation[a],[10].
Le paracétamol est le médicament le plus prescrit en France, et même la base des trois médicaments les plus prescrits (noms commerciaux : Doliprane, Dafalgan, Efferalgan), qui totalisent plus de 500 millions de boîtes en 2013[11].
Toutefois, au-delà de 6 g/j, ou en cas d'usage au long cours, le paracétamol présente une sévère toxicité pour le foie par production d'un métabolite hépatotoxique, la N-acétyl-p-benzoquinone imine (NAPQI). En cas de surdose ou d'interactions médicamenteuses, le paracétamol est très toxique pour le foie et peut entraîner la mort par hépatite fulminante. C'est pourquoi il est fortement contre-indiqué chez les personnes souffrant d'insuffisance hépatique. La N-acétylcystéïne est un précurseur du glutathion qui diminue la toxicité du paracétamol en inactivant le métabolite toxique du paracétamol NAPQI (N-acétyle-p-benzoquinone imine). Cet antidote est plus efficace s'il est administré dans les huit heures qui suivent l'ingestion de paracétamol. Après 24 heures, le bénéfice de l'antidote est discutable, mais il doit cependant être administré. Si le degré de toxicité est incertain, de la N-acétylcystéïne doit être administrée jusqu'à ce qu'une intoxication soit exclue. Une dose de charge de 150 mg/kg en 200 mL de glucosé à 5 % administrée en 15 min est suivie par des doses d'entretien de 50 mg/kg dans 500 mL de glucosé à 5 % administrés en quatre heures, puis 100 mg/kg dans 1 000 mL de glucosé à 5 % administrés en seize heures. Chez l'enfant, il faut parfois ajuster le dosage pour diminuer le volume total de liquide qui est administré ; une consultation dans un centre antipoison est recommandée[12].
Le nom « paracétamol » vient de la contraction de para-acétyl-amino-phénol. Acétaminophène quant à lui provient de N-acétyl-para-aminophénol. Il est appelé acétaminophène dans les pays utilisant la dénomination USAN (United States Adopted Name) : au Canada, aux États-Unis, au Mexique, en Colombie, au Japon, en Corée du Sud, à Hong Kong et en Iran. Dans les pays utilisant la dénomination commune internationale, on emploie le nom « paracétamol ».
L'usage d'antipyrétiques remonte à l'Antiquité. Il s'agissait alors de préparations à partir de composés naturels d'écorces de cinchona[13] dont dérive la quinine, ou d'écorce de saule, soit du salicylate dont dérive l'aspirine. Ce genre de principe actif est aujourd'hui fabriqué en laboratoire par de synthèse chimique et non plus extrait directement de substances naturelles.
Ainsi, Harmon Northrop Morse (en) synthétisa dès 1878 une substance baptisée acétylaminophénol[14], sans toutefois lui attribuer une quelconque propriété médicale, et c'est seulement presque quatre-vingts ans plus tard qu'elle fut commercialisée comme médicament sous le nom de paracétamol.
Dans les années 1880, d'autres produits sont utilisés comme remède contre la douleur et la fièvre. En 1883, Hoechst commercialise la kaïrine découverte par Wilhelm Fisher[15]. BASF ne pousse guère son antipyrétique, la thalline, mise au point vers 1885. L'acétanilide (1886) et la phénacétine (1887) sont utilisées avant qu'on ne constate les graves effets secondaires de leur administration. En 1897, l'aspirine est synthétisée par Felix Hoffmann et est un grand succès des Laboratoires Bayer alors que ses inconvénients ne sont pas encore connus. L'acétylaminophénol, futur paracétamol a réapparu dans le sillage de ces découvertes et les premières études sur ses propriétés antipyrétiques et antalgiques sont conduites à la fin du XIXe siècle.
En 1886, le professeur Adolf Kussmaul, de l'université de Strasbourg, étudie l'effet antiparasitaire du naphtalène. Ses deux jeunes assistants, Arnold Cahn et Paul Hepp, à court de produit pour leurs expériences, décident de se ravitailler auprès d'un pharmacien de la ville, qui leur fournit par erreur de l'acétanilide. En reprenant leur étude, ils sont intrigués par les effets antipyrétiques qu'ils obtiennent avec ce produit. C'est donc grâce à une erreur providentielle — autrement dit par sérendipité — que les propriétés de l'acétanilide contre la fièvre sont découvertes[16].
(En 1861, Schuchardt avait découvert les propriétés antipyrétiques de l'aniline, substance servant à la production d'acétanilide. Mais du fait d'effets toxiques prononcés, l'aniline n'eut alors pas d'utilisation en thérapeutique. Ses propriétés antalgiques furent découvertes plus tard. L'acétanilide est en effet l'ancêtre de la phénacétine et du paracétamol[17].)
Paul Hepp a un frère qui travaille pour une petite compagnie, Kalle, qui fabrique de l'acétanilide[18]. Il propose à celle-ci d'utiliser sa découverte et de lancer sur le marché l'acétanilide afin de concurrencer l'antipyrine[19],[20] et l'acide salicylique. Et l'acétanilide devient le principe actif d'un médicament commercialisé sous le nom d'antifébrine[21].
À la fin des années 1880, la fabrication des colorants était accompagnée de celle d'un produit dont on ne connaissait pas d'usage et qui était disponible à bas prix : le paranitrophénol, avec une structure chimique assez similaire à l'acétanilide. Carl Duisberg, responsable de la recherche et des brevets chez Bayer AG demanda à son équipe de trouver un moyen d'exploiter le paranitrophénol. Oscar Hinsberg eut l'idée de le transformer[b] en acétophénitidine[16]. La démarche de création de cette substance fut purement commerciale mais par chance des tests montrèrent qu'elle semblait avoir des effets similaires quoique plus puissants que l'antifébrine et provoquait moins d'effets indésirables. Duisberg décida de mettre la nouvelle molécule en production et de la commercialiser à partir de 1888[22] sous le nom de marque « phénacétine »[23].
L'acétanilide et la phénacétine, n'ayant pas la même rapidité ni la même durée d'action, permettaient aux praticiens d'ajuster leurs prescriptions[24]. Cependant, l'acétanilide était très toxique et de nombreuses recherches furent consacrée à l'élaboration de molécules mieux tolérées.
Le paracétamol ou acétaminophène avait été isolé dans les urines des personnes ayant consommé de la phénacétine. En 1889, le scientifique allemand Karl Morner découvrit que ce métabolite de la phénacétine semblait être un produit efficace contre la douleur et la fièvre. Cette hypothèse formulée dès 1894 fut cependant largement ignorée à l'époque[25].
En effet, en 1893, un médecin allemand, Joseph von Mering, avait comparé les propriétés antalgiques et antipyrétiques du paracétamol et de la phénacétine ainsi que leurs toxicités respectives et avait tiré de cette étude la conclusion, erronée, que le paracétamol était plus néphrotoxique que la phénacétine. Sa notoriété avait alors fait que ce jugement n'a pas été contesté, et que le paracétamol fut encore délaissé pendant un demi-siècle.
La phénacétine était quant à elle largement employée dans les névralgies sous le nom de Veganine[26]. Sa toxicité pour les reins fut démontrée plus tard et cela entraîna son retrait du marché.
L'acétanilide et la phénacétine ont été en concurrence avec l'aspirine jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale. En 1938, la Food and Drug Administration, qui appliquait des règles plus strictes à la suite de l'adoption, cette même année, du Federal Food, Drug, and Cosmetic Act, avait retiré brièvement du marché la phénacétine, suspectée d'être cause d'agranulocytose[27]. Puis les travaux de David Lester et Léon Greenberg de l'université Yale[28] et ceux de Flinn et Brodie de l'université de New York confirmèrent l'hypothèse de 1894 de Karl Morner selon laquelle l'acétaminophène ou paracétamol était un produit efficace contre la douleur et la fièvre[25],[29].
En 1946, l'Institute for the Study of Analgesic and Sedative Drugs propose une bourse au New York City Department of Health afin d'étudier les problèmes associés aux agents analgésiques. Bernard Brodie et Julius Axelrod sont désignés pour étudier le lien présumé entre les agents non dérivés de l'aspirine et le développement de la méthémoglobinémie. En 1948, ils publient leur étude[30] qui démontre que l'acétanilide est dégradé dans l'organisme en N-acétyl p-aminophénol, et que seul ce métabolite est actif contre la douleur[31].
Ils démontrent également que l'administration d'acétanilide est responsable de la formation de méthémoglobine, mais ils ajoutent que l'agent responsable est peut-être la phénylhydroxylamine, et non pas le paracétamol comme on le croyait auparavant[32]. Ils suggèrent donc aux industriels de remplacer l'acétanilide, responsable de la méthémoglobinémie, par l'acétaminophène[33]. Il y a alors un regain d'intérêt pour le paracétamol, du fait de ses propriétés antalgiques et antipyrétiques, et de sa bonne tolérance apparente.
En , ces résultats et d'autres furent présentés à New York lors d'un symposium organisé par le Institute for the Study of Analgesic and Sedative Drugs. Peu de temps avant, au vu des études des équipes de Yale et de New York, des sociétés pharmaceutiques américaines commencent à produire quelques spécialités à base de paracétamol sans chercher toutefois à en pousser la vente, car elles vendent déjà de l'aspirine. En 1950, le Triagesic est commercialisé aux États-Unis. Ce mélange de paracétamol, d'aspirine et de caféine est la cause de trois cas graves d'agranulocytose. le Triagesic est retiré du marché en 1951 avant que l'on ne s'aperçoive que le paracétamol n'y était pour rien[34]. En 1953, les laboratoires Sterling-Winthrop Co sont les premiers à commercialiser le paracétamol sous l'appellation Panadol sur le marché britannique[35] ; producteurs d'aspirine, ils ne cherchent pas à introduire le Panadol aux États-Unis. Ce sont les laboratoires MacNeil qui vont saisir l'importance des découvertes et déposer une demande d'autorisation de mise sur le marché qui leur sera accordée par la Food and Drug Administration en 1955[c]. En 1955[36], les McNeil Laboratories, une entreprise de Pennsylvanie, lancent le Tylenol Children's Elixir : c'est un sirop pour enfant contre la fièvre et la douleur, présenté dans une boîte rouge en forme de camion de pompier[37] et qui était disponible sans ordonnance à partir de 1960[34],[38].
Le symposium de New York avait souligné un effet secondaire de l'aspirine jusqu'alors non remarqué – que ne provoque pas le paracétamol : l'irritation de l'estomac. C'est cet avantage comparatif en faveur du paracétamol qui avait décidé les laboratoires MacNeil (qui ne produisaient pas d'aspirine) à lancer ce nouveau médicament dont la promotion sera précisément axée sur cette particularité[39]. Le produit devient ensuite populaire chez les adultes pour la même raison. En 1956, au Royaume-Uni, le paracétamol est vendu — seulement sous ordonnance — sous le nom de Panadol en dose de 500 mg, produites par Frederick Stearns & Co, une filiale de Sterling Drug Inc. En 1958 apparaît Panadol Elixir, une version destinée à l'usage des enfants[40]. Le suffixe -dol à la fin du nom du médicament provient du latin dolor, qui signifie « douleur ». Le Panadol intègre la Pharmacopée britannique en 1963[34].
En France, le paracétamol, associé à un antihistaminique, apparaît dans la spécialité Algotropyl, réservée à l'usage pédiatrique en 1957, commercialisée par les Laboratoires Bottu. Puis, la même firme pharmaceutique met sur le marché le Doliprane en 1964[41]. Le succès de ce produit, aujourd'hui propriété de Sanofi, ne sera pas immédiat dans les pharmacies françaises : il viendra après le choix d'un mode de distribution en direct (pharmacies et hôpitaux) et par le lancement de la gamme pédiatrique (suspension buvable aromatisée à la fraise, administrée par une pipette graduée) en 1981[42]. De nos jours, de nombreux médicaments contenant du paracétamol ont été développés et commercialisés dans beaucoup de pays.
En 1984, une prodrogue injectable de paracétamol est mise au point, offrant un traitement analgésique en postopératoire pour les patients ne pouvant recourir à la voie orale. Ce Pro-Dafalgan doit cependant être préparé au lit du malade. le Perfalgan, qui ne présente pas cet inconvénient, sert à faciliter l'emploi de cette molécule pour cet usage. Associé à la morphine, il permet d'en diminuer notablement la consommation[43] (une récente étude vient toutefois relativiser l'utilité de cet emploi en association[44]).
Le paracétamol est entièrement synthétique, sa formule brute est C8H9NO2. Dans les conditions ordinaires, le paracétamol est une poudre blanche avec un léger goût, soluble[45] dans 70 parts d'eau, 7 parts d'alcool à 95 %, 13 parts d'acétone, 40 parts de glycérol ou 50 parts de chloroforme. Cependant, il est insoluble[45] dans l'éther et le benzène. Le paracétamol est stable dans l'eau, mais sa stabilité diminue en milieu acide ou basique. Les mélanges de paracétamol sont stables dans des conditions humides. Cependant, les comprimés qui contiennent de la codéine ou du stéarate de magnésium se dégradent en diacétyl-p-aminophénol dans une atmosphère humide[45].
La molécule est constituée d'un cycle benzénique, substitué par un groupe hydroxyle et par un groupe amide en position para. Le paracétamol ne comporte pas de centre stéréogène et n'a pas de stéréoisomère. Un des deux doublets libres de l'atome d'oxygène du groupe hydroxyle, le cycle benzénique, le doublet libre de l'atome d'azote et l'orbitale p du carbone du carbonyle forment un système conjugué. Cette conjugaison réduit la basicité des oxygènes et de l'azote et rend le groupe hydroxyle plus acide (comme les phénols) car la délocalisation des charges s'effectue sur un ion phénolate.
La présence de deux groupes activants rend le cycle hautement réactif pour une substitution électrophile aromatique, les substituants étant ortho et para directeurs. Toutes les positions du cycle sont plus ou moins activées de la même manière et il n'y a donc pas de site privilégié dans le cas d'une substitution électrophile. Le paracétamol est le métabolite actif de l'acétanilide et de la phénacétine : le paracétamol est produit par la décomposition de ces deux produits dans l'organisme. Ces espèces chimiques sont de la même famille chimique et ont une structure chimique très proche.
Le paracétamol ne comprend pas de centre stéréogène et n'a aucun stéréoisomère. La synthèse n'a pas besoin d'être stéréocontrôlée et elle est plus simple que les synthèses asymétriques d'autres substances pharmaceutiques.
Le paracétamol fut synthétisé pour la première fois en 1878 par Harmon Northrop Morse. La première étape est la réduction du paranitrophénol en para-aminophénol en présence d'étain dans de l'acide acétique glacial[46]. Le para-aminophénol obtenu est ensuite acylé par l'acide acétique pour obtenir du paracétamol. Vignolo simplifia cette synthèse en utilisant le para-aminophénol comme produit de départ[46]. Une seule étape d'acylation est nécessaire pour obtenir le produit désiré, ce qui raccourcit la synthèse. Plus tard, Friedlander modifia la synthèse en faisant l'acylation du para-aminophénol à partir de paranitrophénol avec de l'anhydride acétique[46] au lieu de l'acide acétique, ce qui donne un meilleur rendement.
Équation de la synthèse : C4H6O3 + C6H7NO → C8H9NO2 + CH3COOH.
L'intérêt du paracétamol a été réduit lors des premières années de commercialisation en raison d'une contamination par le para-aminophénol à cause du procédé de fabrication[25]. Cette impureté était, comme l'acétanilide, méthémoglobinisante[25].
De nos jours, il existe différentes méthodes de synthèse industrielle[46], la plupart utilisant l'acylation du para-aminophénol avec de l'anhydride acétique.
Le mécanisme d'action complet du paracétamol reste inconnu, un siècle après sa découverte[47]. Cependant, il a été démontré qu'il agit principalement au niveau du système nerveux central[48]. Selon une étude de 2006, le paracétamol agirait en inhibant au niveau central la production de prostaglandines, impliquées dans les processus de la douleur et de la fièvre, par le biais d'une action inhibitrice sur l'enzyme prostaglandine H2 synthase (PGHS), qui comporte notamment un site actif « cyclooxygénase » (ou COX), cible de la majorité des anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS), et un site « peroxydase » (ou POX), sur lequel agirait le paracétamol[49]. Le paracétamol n'aurait pas d'action directe sur le COX-1 et le COX-2[50], les deux formes de cyclooxygénase (COX) sur lesquelles agissent les anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) comme l'aspirine ou l'ibuprofène. On soupçonne l'existence d'une nouvelle isoenzyme, le COX-3 (enzyme produite par épissage successif de la COX-1 entraînant un décalage de lecture des bases par le corps humain), sur laquelle agirait spécifiquement le paracétamol[51] et qui expliquerait pourquoi le paracétamol réduit la fièvre et la douleur tout en étant dénué d'activité anti-inflammatoire et antiplaquettaire. Pour l'instant, cette hypothèse n'a pas été prouvée chez l'humain[48]. D'autres mécanismes d'action ont été évoqués pour expliquer l'activité analgésique et antipyrétique du paracétamol. Un mécanisme d'action sérotoninergique central est suspecté depuis quelque temps[52]. Le paracétamol potentialiserait l'effet des neurones sérotoninergiques descendants de la moelle épinière exerçant un contrôle inhibiteur sur les voies de la douleur. Par ailleurs, le paracétamol pourrait agir en limitant la libération de Béta-endorphines[53].
Les recherches récentes montrent que l'ion peroxynitrite pourrait être la source oxydante permettant aux COX de transformer l'acide arachidonique en prostaglandine[54],[55]. De même que la nitrotyrosine (en)[56] est un marqueur spécifique de l'excès de peroxynitrites agissant comme agent nitrant sur le cycle phénolique activé de la tyrosine, le nitroparacétamol[57] formé par nitration directe du paracétamol par les peroxynitrites les consommerait et permettrait d'annihiler la synthèse des prostaglandines. Ces hypothèses ont été confirmées par Schildknecht et al.[58]
L'absorption du paracétamol par voie orale est complète et rapide : le maximum de concentration plasmatique est atteint entre 15 minutes (comprimé effervescent) et 30–60 minutes (comprimé et poudre) après ingestion.
Le paracétamol se distribue rapidement dans tous les tissus. Les concentrations sont comparables dans le sang, la salive et le plasma. Le paracétamol est métabolisé essentiellement au niveau du foie. Les deux voies métaboliques majeures sont la glycuroconjugaison et la sulfoconjugaison. Il existe une voie métabolique moins importante catalysée par le Cytochrome p450 (plus précisément par les isoenzymes CYP2E1, CYP1A2, CYP3A4)[59], qui aboutit à la formation d'un intermédiaire réactif toxique, la N-acétyl-p-benzoquinone imine ou NAPQI. Il est normalement rapidement éliminé par réaction avec le glutathion réduit puis évacué dans les urines après conjugaison à la cystéine et à l'acide mercaptopurique.
L'élimination du paracétamol est essentiellement urinaire : 90 % de la dose ingérée est éliminée par le rein en 24 heures, principalement sous forme glycuroconjuguée (60 à 80 %) et sulfoconjuguée (20 à 30 %) et moins de 5 % est éliminé sous forme de paracétamol. La demi-vie d'élimination est d'environ deux heures.
En cas d'insuffisance rénale sévère, avec une clairance de la créatinine inférieure à 10 mL/min, l'élimination du paracétamol et de ses métabolites est retardée. La glycuroconjugaison est immature chez le nourrisson et l'enfant, le paracétamol est donc essentiellement sulfoconjugué. Le passage à une voie métabolique identique à celle de l'adulte intervient entre 9 et 12 ans[60].
Le paracétamol entre dans la composition d'une soixantaine de spécialités pharmaceutiques et peut se présenter sous différentes formes ou conditionnements. Le paracétamol seul est vendu sous de nombreuses formes galéniques[61] comme des comprimés, en poudre, des comprimés effervescents, des comprimés orodispersibles, des gélules, du sirop, des suspensions buvables, des suppositoires pour adultes ou enfants, ou des lyophilisats. Il est aussi disponible sous forme intraveineuse.
Le paracétamol peut être associé à d'autres antalgiques au sein d'un même médicament, dans le but principal d'améliorer l'efficacité globale et d'optimiser le rapport bénéfice/risque en diminuant les posologies, mais aussi afin d'allonger la durée d'action, d'élargir le spectre d'efficacité, de diminuer l'accoutumance, d'améliorer l'observance et de minimiser le risque d'usage détourné. Le but des associations de médicaments étant de produire des interactions pharmaceutiques bénéfiques, c'est-à-dire une synergie, permettant d'augmenter l'efficacité et d'améliorer la tolérance tout en utilisant les doses les plus faibles possibles. L'association doit permettre d'élargir le spectre d'efficacité en combinant des antalgiques agissant simultanément sur des cibles différentes, mais impliqués dans des mécanismes physiopathologiques identiques[62].
Le paracétamol est utilisé en association avec d'autres substances actives pour profiter de ses propriétés antalgiques et antipyrétiques. L'un des problèmes des associations est l'accumulation des effets secondaires ; cependant, le paracétamol étant très bien toléré, il est particulièrement intéressant dans le cadre des associations, et c'est pourquoi les laboratoires pharmaceutiques ont développé de très nombreuses formules comprenant du paracétamol. Un dérivé lipidique, le palmitostéarate de glycérol atomisé est parfois ajouté aux mélanges pour masquer le goût du paracétamol[63].
Le paracétamol non associé est vendu en nom générique ou sous de nombreuses marques dont certaines très connues :
On le retrouve associé à d'autres substances actives dans certains remèdes contre les états grippaux (Actifed, Dolirhume, Fervex, Humex Rhume, Rhinofébral), où il est efficace à la fois sur la fièvre et la douleur. Il est parfois mélangé avec de la caféine (Dalféine, Prontadol, Claradol caféiné, Exidol, Theinol), substance qui pourrait augmenter son effet analgésique, mais cette notion reste très controversée[66],[67],[68]. Il peut également être associé à d'autres antalgiques tels que l'aspirine (Novacétol) et on le retrouve souvent associé à un opiacé comme la codéine (Dafalgan Codéine, Codoliprane), le dextropropoxyphène (spécialités retirées), la poudre d'opium (Lamaline), le tramadol (Ixprim, Zaldiar), ce qui permet d'augmenter son action antalgique et de traiter les douleurs moyennes ou fortes[69].
Depuis 2011, le dextropropoxyphène, seul ou en association, a été retiré du marché français[70]. Il existait de nombreuses présentations de l'association paracétamol-dextropropoxyphène (Dialgirex, Di-antalvic). L'efficacité clinique antalgique (en termes de synergie de l'analgésie) de l'association paracétamol + dextropropoxyphène reste mal évaluée (à la différence de celle utilisant la codéine). Il n'est pas démontré que l'association paracétamol + dextropropoxyphène est supérieure au paracétamol seul[71]. Ce retrait est également lié à des surdosages, lors d'intoxications volontaires (tentatives de suicide) et non à une toxicité à dose thérapeutique[72].
Les présentations de l'association paracétamol-tramadol comportent 37,5 mg de tramadol et 325 mg de paracétamol par comprimé, ce qui permettrait d'obtenir une efficacité antalgique équivalente à 50 mg de tramadol mais avec une meilleure tolérance. L'association du paracétamol avec un opiacé peut poser des problèmes de dépendance et de détournement d'usage.
Le paracétamol est utilisé pour[73] :
Le paracétamol est utilisé depuis le début des années 2020 pour la fermeture du canal artériel persistant chez les nouveau-nés prématurés, comme c'est le cas pour l'ibuprofène ou l'indométacine[81]. Le mécanisme d'action n'est pas encore élucidé, mais le profil d'effet indésirable plus favorable du paracétamol par rapport aux AINS et sa non infériorité par rapport à ces derniers justifie son utilisation croissante en première intention[81],[82].
La dose, ou posologie, maximale peut varier d'un pays à l'autre selon la recommandation des produits de santé. En France, la recommandation est de[73],[83]:
Les facteurs de risques pouvant amener à un surdosage en paracétamol sont les insuffisances hépatiques légère à modérée (une insuffisance hépatique sévère contre indiquant le traitement), l'alcoolisme, le déficit en glutathion hépatique (comme lors de la malnutrition, le jeûne prolongé, l'anorexie...), la déshydratation et le syndrome de Gilbert (jaunisse familiale non-hémolytique)[84].
Dans le cas de présence d'un ou de plusieurs de ces facteurs de risques, il est recommandé de réduire la dose et d'augmenter l'intervalle entre deux prises. La dose quotidienne recommandée de paracétamol est alors en général de 2 000 mg/jour chez l'adulte[84].
Les contre-indications absolues sont[73] l'hypersensibilité au paracétamol, l'insuffisance hépatocellulaire sévère et la porphyrie.
On peut retrouver de l'aspartame dans certaines formes commerciales ; dans ce cas le médicament est contre-indiqué en cas de phénylcétonurie.
Le paracétamol est autorisé en cas de grossesse et d'allaitement. Cependant plusieurs études ont mis en cause cette molécule. En 2016, une étude publiée dans JAMA Pediatrics (en) a mis en évidence un lien entre prise de paracétamol pendant les second et troisième trimestres de la grossesse et l'augmentation du risque de certains troubles du comportement comme l'hyperactivité[86]. Les auteurs restent toutefois très prudents et n'écartent pas l'hypothèse qu'un autre facteur, lié à la prise de paracétamol, pourrait expliquer l'effet neurologique observé.
Il pourrait aussi exister une relation entre la prise de paracétamol pendant la grossesse et plus spécialement au cours du premier trimestre, et le risque pour les enfants de souffrir de problèmes respiratoires ou d'asthme avant l'âge de 7 ans[87]. L'effet serait toutefois faible, avec une augmentation de risque de 11 à 22 % et ne concerne que la prise durant la grossesse ou la petite enfance[88]. Comme dans le cas des troubles du comportement les scientifiques ne peuvent exclure que cette augmentation du risque d'asthme ne soit pas liée aux infections motivant la prise de paracétamol.
Perturbateur endocrinien de par un effet anti-androgène[89], la prise de paracétamol, d'autant plus sur de longues périodes (une à quatre semaine selon différentes études[90]) et en association avec d'autres analgésiques, pourrait constituer durant la grossesse un facteur de risque d'anomalies du développement de l'appareil reproducteur masculin (cryptorchidisme)[91],[92].
Pendant la période d'allaitement, le paracétamol passe dans le lait maternel. Toutefois, les quantités excrétées dans la lactation sont inférieures à 2 % de la quantité ingérée et le paracétamol n'est donc pas contre-indiqué pendant la période d'allaitement[73]
À part avec certains anticoagulants oraux et les sétrons (antiémétiques), il n'y a aucune interaction médicamenteuse particulière répertoriée pour le paracétamol.
La prise de paracétamol peut fausser[73] le dosage de l'acide urique sanguin par la méthode à l'acide phosphotungstique, ainsi que le dosage de la glycémie par la méthode à la glucose oxydase-peroxydase.
Il n'y a aucune interaction alimentaire rapportée pour le paracétamol[73].
Pour éviter tout risque de surdosage, il faut vérifier l'absence de paracétamol dans la composition d'autres médicaments pris de façon concomitante.
Habituellement le paracétamol est très bien toléré lorsqu'il est pris à des doses thérapeutiques[96]. Des effets indésirables ont néanmoins été rapportés sans que l'imputabilité (le fait que l'effet indésirable soit bien causé par le médicament) ait été établie la plupart du temps. Les principaux effets indésirables retrouvés dans la littérature sont :
Une toxicité sur le foie à dose thérapeutique ne peut également être exclue chez certaines personnes à risques[116],[117].
Chez le très jeune enfant, l'administration de paracétamol pourrait augmenter le risque de survenue d'un asthme[118],[119].
A la dose de 4 grammes par jour, le paracétamol semble augmenter légèrement la pression artérielle, sans preuve d'une conséquence médicale[120].
In vitro, le paracétamol pourrait présenter un effet tératogène[121] qui n'est pas présent in vivo. La molécule n'est donc pas contre-indiquée chez la femme enceinte.
Devant l'apparition d'un effet indésirable, il est nécessaire d'arrêter le médicament incriminé et de consulter son médecin.
Le paracétamol est un médicament utilisé couramment et disponible dans les pharmacies. Les cas de surdose sont courants — plus de 100 000 par an aux États-Unis, une centaine en Suisse[122] — et ont des conséquences graves. Ils peuvent entraîner, si le surdosage est au long terme (environ 10 g/jour pendant deux semaines), une nécrose hépatique ; dans le cas d'un surdosage rapide (25–30 g en un jour), une hépatite fulminante, qui nécessite une transplantation immédiate pour éviter le décès du patient. En France, la mention « surdosage = danger - dépasser la dose peut détruire le foie » est obligatoire sur les boîtes de paracétamol depuis 2020[123].
La dose toxique du paracétamol est hautement variable selon les individus. En une prise unique, elle est de l'ordre de 10 g ou 150 mg/kg chez l'adulte et de 150 mg/kg chez l'enfant[124],[125]. Certains ne parlent d'intoxication aiguë que pour des doses élevées supérieures à 200 mg/kg, soit plus de 14 g pour un humain de 70 kg[126].
Cependant, le paracétamol peut être toxique pour le foie même à 4 g/24 h, soit des doses thérapeutiques[127]. Administrées sur de longues périodes, ces doses se rapprochent des doses toxiques pouvant entraîner des lésions hépatiques permanentes voire mortelles, surtout chez des patients à la fonction hépatique préalablement altérée[126],[128],[129]. C'est notamment le cas de personnes souffrant de maladies hépatiques ou d'alcoolisme chronique provoquant une diminution des réserves de glutathion[130],[131]. Par contre, seuls quelques rapports font état d'une toxicité du paracétamol lors de situations diminuant les réserves de glutathion, comme une infection par le VIH, une hépatite chronique C ou une cirrhose hépatique par exemple[132].
Christophe Bureau, secrétaire général de l'Association française pour l'étude du foie (Afef) explique que pour les personnes à risque, « dépasser de façon très légère les doses journalières peut être mortel… C'est la première cause d'hépatite fulminante dans le monde, c'est-à-dire de destruction massive du foie, qui nécessite une greffe d'urgence, il a tué 400 personnes aux États-Unis en 2009. Je ne comprends pas qu'il soit encore en vente libre »[133].
Ainsi sur de longues durées, la différence entre une dose thérapeutique et une dose toxique serait faible. Depuis que le paracétamol est présent dans de nombreux médicaments, mélangé à d'autres molécules, le risque de surdosage involontaire est majoré[126]. Les prises de paracétamol doivent toujours être espacées de quatre heures au minimum. Pour éviter le surdosage, il est utile de discuter avec un pharmacien pour connaître les médicaments contenant du paracétamol ou bien de regarder la composition des médicaments pour détecter la présence de paracétamol.
Une des étapes de la métabolisation du paracétamol produit une molécule toxique, la N-acétyl-p-benzoquinone imine (ou NAPQI), via les cytochromes P450 (CYP2E1, CYP1A2, CYP3A4). Ce métabolite peut provoquer la mort des cellules hépatiques. Il est éliminé, dans le foie, par une réaction avec le glutathion (donneur de SH) qui capte les radicaux. Aux doses thérapeutiques recommandées, la NAPQI est éliminée par l'organisme et ne représente pas un danger. Par contre, lorsque la dose de paracétamol est trop importante, la NAPQI est produite en grande quantité, les réserves de glutathion s'épuisent et le foie n'arrive plus à l'éliminer ; il subira des dommages plus ou moins importants selon la quantité de paracétamol absorbée. Un risque accru de toxicité est provoqué par un manque de glutathion (malnutrition, anorexie, éventuellement maladies du foie) ou une formation accrue du métabolite toxique.
Le surdosage en paracétamol peut ainsi entraîner une hépatite avec de graves lésions du foie (cytolyse hépatique), conduisant à une nécrose dans les cas extrêmes. Les conséquences d'un surdosage sont graves, parfois mortelles. Les dommages causés au foie sont irréversibles, une greffe de foie devenant nécessaire lorsque les dommages sont très importants. La NAPQI entraîne la création d'adduits fixés aux protéines hépatiques, dégradation des lipides membranaires, perturbations de l'homéostasie calcique, provoquant une nécrose et une hépatite cytolytique. Le rein est touché par le même mécanisme.
La toxicité sur le foie est prédictible à l'aide de deux paramètres : la dose ingérée et le taux plasmatique du paracétamol (ou paracétamolémie). Les prises intentionnellement abusives de paracétamol peuvent être détectées rapidement et les dommages peuvent être limités par l'administration de N-acétylcystéine. Ce n'est pas le cas de surdosages non intentionnels et chroniques qui se détectent plus tardivement alors que des dommages importants ont déjà pu se produire.
De plus, il est possible de calculer la demi-vie d'élimination du paracétamol. Dans les cas d'intoxication, la nécrose hépatique empêche l'élimination et la demi-vie augmente. Une demi-vie supérieure à quatre heures témoigne d'une hépatite. Une demi-vie supérieure à douze heures indique une insuffisance hépatocellulaire.
Les individus qui ont pris trop de paracétamol n'ont généralement pas de symptômes pendant les vingt-quatre premières heures[134]. Bien que des nausées ou des vomissements apparaissent en premier, ces symptômes disparaissent après quelques heures. Les sujets se sentent mieux et croient que le pire est passé. Si la dose absorbée est toxique, après cette période de bien-être, le sujet a une défaillance hépatique. Dans les cas extrêmes, le sujet tombe dans le coma avant d'avoir une défaillance du foie[134].
Les enfants supportent mieux le paracétamol, car ils possèdent un foie et des reins plus larges par rapport à la taille de leur corps, et ils sont plus tolérants à ce produit[135]. La demi-vie sera plus importante chez l'enfant qui possède des capacités de glucuronoconjugaison inférieures à celles de l'adulte[61]. Les preuves à l'heure actuelle sont insuffisantes pour conclure que l'utilisation régulière de paracétamol est associée à un risque accru d'insuffisance rénale chronique[50].
Une surdose massive de paracétamol, habituellement plus de 40 g, peut également entraîner une acidose lactique métabolique ; celle-ci s'installe avant la cytolyse hépatique[136]. Le paracétamol et certains de ses métabolites inhibent la respiration cellulaire, conduisant à l'accumulation de lactates.
Toute personne ayant ingéré une dose supérieure à la dose toxique théorique ou ayant ingéré une dose inconnue supposée supérieure, doit être immédiatement transférée dans un service d'urgences hospitalier[137] où le traitement peut être l'administration en intraveineuse ou orale de N-acétylcystéine.
L'absorption du paracétamol par voie gastro-intestinale est complète au bout de deux heures en conditions normales, donc une décontamination gastro-intestinale n'est utile que pendant ce laps de temps. L'absorption du paracétamol peut être retardée en cas d'ingestion de nourriture. L'absorption est plus rapide lorsque le paracétamol est sous forme soluble que sous la forme solide.
Le lavage gastrique n'est pas recommandé[73], tout comme les vomissements provoqués, par l'utilisation d'un vomitif[138]. Le sirop d'ipéca doit notamment être considéré comme obsolète[139].
Le charbon activé, qui réduit l'absorption digestive du paracétamol et présente moins de risques que le lavage gastrique, est indiqué uniquement lorsque la quantité de paracétamol absorbée est potentiellement mortelle et que l'ingestion a eu lieu moins d'une heure avant[140]. Dans ce cas, on recommande une dose unique de 1 à 2 g/kg d'une suspension aqueuse de charbon actif administrée par voie orale[59]. Auparavant, les médecins étaient réticents à administrer du charbon activé puisqu'en cas de surdosage, celui-ci peut absorber aussi l'antidote et donc diminuer son efficacité. Mais des études ont montré que l'adsorption d'une partie de la N-acétylcystéine orale par le charbon activé n'a pas de conséquences significatives[73], l'une d'entre elles a déterminé que seulement 39 % de la N-acétylcystéine est absorbée lorsqu'elle est administrée en même temps que le charbon[141]. Sinon, l'utilisation d'acétylcystéine par voie intraveineuse est efficace en combinaison avec du charbon activé. S'il est prévu de donner la N-acétylcystéine par voie orale, il est recommandé de différer le traitement de une à deux heures après l'administration de charbon activé[59].
En pratique clinique, la prise en charge est la suivante : recherche d'intoxications associées[142], prise des signes vitaux (pouls, pression artérielle, température, score de Glasgow, fréquence respiratoire) et prélèvement veineux (paracétamolémie, transaminases, taux de prothrombine, créatinine, ionogramme)[142], pose d'une voie veineuse périphérique avec une solution polyionique type B26 : 2 l/24 h[142], charbon activé si la prise est inférieure à deux heures[142]. Puis l'administration de N-acétylcystéine dépend de la dose ingérée :
Le transfert en unité de réanimation est indiqué en cas de troubles hémodynamiques, neurologiques, respiratoires, de co-intoxication avec une substance exigeant une prise en charge en réanimation, d'hépatite cytolytique grave, et a fortiori, d'insuffisance hépatique[142]. En fin de traitement il faut contrôler le taux de prothrombine, les transaminases, la créatinine et la glycémie[142]. La sortie est possible si la paracétamolémie arrive dans les zones non toxiques, en l'absence de toxiques associés et après accord du psychiatre (en cas d'intoxication volontaire)[142].
Le métabolite responsable de la toxicité du paracétamol est la N-éthanoyl-4-hydroxyphénylhydroxylamine. Elle réagit de manière irréversible avec les thiols tels le glutathion[144] dont le foie a besoin. C'est la diminution de ce glutathion hépatique qui crée cette insuffisance hépatique. La protection apportée par la N-acétylcystéine, précurseur de la cystéine, ou diverses autres molécules comportant un groupe SH telles la méthionine ou la cystéamine, provient de ce que le métabolite toxique va réagir avec eux plutôt qu'avec le glutathion, qui sera ainsi épargné. Ces produits permettent de réduire le risque de toxicité sur le foie et de prévenir la nécrose hépatique par le paracétamol et s'ils sont absorbés moins de huit heures après l'ingestion du paracétamol[59].
Après huit heures, une série d'évènements toxiques dans le foie commence et le risque de nécrose hépatique et de décès augmente de façon critique. Bien que la N-acétylcystéine soit plus efficace lorsqu'elle est administrée tôt, le produit a cependant des effets bénéfiques jusqu'à 48 heures après l'ingestion[145]. Elle n'endommage pas les cellules et peut être excrétée sans danger.
La N-acétylcystéine s'administre comme antidote soit par voie buccale (Fluimucil granulé ou Mucomyst soluté, disponibles en pharmacie), soit en perfusion intraveineuse (Fluimucil 20 % (Inpharzam), amp. à 25 ml, 1 g = 5 ml). Aux États-Unis, l'administration orale est la méthode de référence alors qu'en Europe, l'administration par voie intraveineuse est préférée[59]. L'acétylcystéine par voie orale peut entraîner à cause de son goût et de son odeur soufrée, des vomissements et des nausées. Par voie intraveineuse, surtout en cas de perfusion trop rapide, elle peut entraîner des réactions anaphylactoïdes[73]. Le choix de la voie d'administration, orale ou intraveineuse, dépend avant tout de l'existence ou non de vomissements[146].
Il existe trois schémas thérapeutiques différents, un par voie orale, deux par voie veineuse, d'efficacité équivalente tant qu'ils sont instaurés dans les dix heures suivant l'ingestion[59],[146] :
Si le traitement est commencé plus de dix heures après l'ingestion, le schéma d'administration orale de Rumack et le schéma d'administration intraveineuse de Smilkstein donnent de meilleurs résultats que le schéma de Prescott[59].
Le paracétamol, contrairement à l'aspirine et à l'ibuprofène, est dépourvu de propriétés anti-inflammatoires. Il ne fait pas partie de la classe des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), n'étant pas un bon inhibiteur des COX et notamment de la COX-2. Les AINS eux, ont en commun la propriété de pouvoir diminuer la production des prostanoïdes en inhibant l'activité des deux isoformes de cyclooxygénases (COX-1 et COX-2)[151].
En ce qui concerne le traitement de la douleur, l'activité antalgique du paracétamol est comparable à celle de l'aspirine, pour des posologies identiques de 1 à 3 g/jour et pour des douleurs de causes diverses[151],[61].
Des études renforcent la notion qu'il faut continuer à envisager le paracétamol comme traitement de première intention pour le soulagement de la douleur d'intensité légère à modérée[152] d'après des évaluations effectuées relativement à l'innocuité, à l'efficacité et au coût[152]. Le paracétamol a très peu d'effets secondaires. Les associations avec d'autres produits, plus puissantes ou mieux adaptées ne seront envisagées que dans un second temps, ou dans des cas spécifiques. Dans les doses recommandées, le paracétamol n'irrite pas la paroi de l'estomac, n'affecte pas la coagulation du sang autant que les AINS, et n'affecte pas le fonctionnement du rein. L'utilisation des AINS peut être à l'origine de cas d'hémorragies gastro-intestinales ; le paracétamol, par contre, n'est pas associé à l'augmentation du risque d'épisodes gastro-intestinaux dans les doses normales. Cependant, certaines études ont montré que pour des doses élevées (plus de 2 000 mg/j) le risque de complications intestinales augmente[153].
Le paracétamol ne présente pas de contre-indications pour les femmes enceintes et n'affecte pas le développement du fœtus comme le font les AINS (traitement de la persistance du canal artériel). L'utilisation des AINS par les femmes enceintes est associée, de façon importante, à l'hypertension pulmonaire persistante chez les nouveau-nés[154]. Le paracétamol est actuellement très utilisé, notamment en pédiatrie. Il peut être administré aux enfants car il n'est pas associé au risque du syndrome de Reye pour les enfants possédant une déficience immunitaire. Une étude clinique faite chez des enfants montre qu'une dose standard d'ibuprofène provoque un plus grand soulagement de la douleur qu'une dose standard de paracétamol ou de codéine[155]. Comme les AINS et contrairement aux opiacés, le paracétamol n'a pas été reconnu comme la cause d'euphories ou de modification d'humeur mais contrairement aux opiacés, il peut endommager le foie. Le paracétamol et les AINS présentent un faible risque d'assuétude ou d'addiction, contrairement aux opiacés.
En ce qui concerne le traitement de la fièvre, il ne semble pas exister de différence d'efficacité anti-pyrétique entre le paracétamol et les AINS[151],[61]. Concernant l'enfant, deux méta-analyses de 2004[156],[157] retrouvent que l'ibuprofène aurait une rapidité d'action légèrement supérieure au paracétamol. Mais c'est le paracétamol qui permettrait le mieux d'améliorer le confort de l'enfant, notamment au niveau de l'activité et de la vigilance[158]. Au total on peut conclure que chez l'enfant, le paracétamol, l'ibuprofène et l'aspirine ont une efficacité antipyrétique identique mais que leurs effets indésirables sont sensiblement différents, ce qui finalement justifie amplement de privilégier le paracétamol en première intention[159].
Le surdosage involontaire en paracétamol est la première cause de défaillance du foie au Royaume-Uni et aux États-Unis[160]. Les intoxications involontaires au paracétamol représentent tous les ans aux États-Unis plus de 13 000 passages aux urgences, plus de 2 000 hospitalisations et près de 100 décès selon la Food and Drug Administration[161]. Ces chiffres importants sont expliqués par le fait que de nombreux produits sont disponibles aux États-Unis en vente libre sans ordonnance et contiennent du paracétamol sans que cela soit indiqué sur la boîte, et par le fait que les conditionnements des antalgiques à base de paracétamol dépassent souvent la dose potentiellement mortelle de huit grammes par boîte. En France dans les années 1980, l'Agence du médicament, ancien nom de l'Afssaps, avait réduit le conditionnement des antidouleurs à base de paracétamol pour qu'ils ne dépassent pas cette dose. Depuis ce changement de conditionnement, les décès par intoxication n'ont pas augmenté alors que la consommation n'a pas cessé de croître. Ainsi en 1990, 177 420 000 boîtes de paracétamol ont été vendues en France, et 5 335 intoxications et six décès ont été recensés. Ces chiffres restent stables depuis cette année. En Angleterre, à l'époque où le conditionnement n'était pas limité à un maximum de huit grammes, les décès étaient compris entre 200 et 600 selon les sources, ce qui a mené les autorités à adopter des mesures similaires à la France à partir de 1998[162].
Le paracétamol est parfois utilisé lors de suicides ou de tentatives de suicides. Cependant, plus de la moitié des morts par surdosages sont des accidents. Les défaillances hépatiques aiguës consécutives à un surdosage non intentionnel donnent souvent des tableaux plus sévères et ont un pronostic moins bon que chez les patients ayant un surdosage intentionnel. En effet, les victimes de surdoses accidentelles sont souvent prises en charge plus tard, et les risques sont donc plus élevés. Cependant, comparés aux nombres de doses de paracétamol consommées chaque jour, les surdosages accidentels ne touchent qu'une minorité des utilisateurs. En France, les suicides au paracétamol sont bien moins courants mais aussi plus difficiles à évaluer car il n'existe pas de registre national des intoxications volontaires[163]. Bien que le taux d'intoxication au paracétamol soit faible par rapport aux millions de tablettes utilisées chaque année, certains auteurs proposent de changer le mode de vente du paracétamol. Les conditionnements actuels limitent le risque de surdosage accidentel, la quantité de paracétamol par boîte a été diminuée et les prescriptions de médicaments combinant des narcotiques au paracétamol ont été restreintes pour réduire les accidents. Les enfants sont victimes de surdoses accidentelles en cas d'absorption massive sous la forme de sirop. Par contre, les formes effervescentes du paracétamol limitent le risque de prise accidentelle, car elles imposent de boire une grande quantité de liquide. L'association d'une substance et de son antidote dans le même médicament permet de diminuer les risques de surdose. Le Paradote est un médicament sous forme de tablettes contenant 100 mg de méthionine et 500 mg de paracétamol. La méthionine est utilisée pour remplacer le glutathion et permet de protéger le foie en cas de surdose.
Le nom acétaminophène est utilisé aux États-Unis, au Canada, au Japon, en Corée du Sud, à Hong Kong et en Iran[164]. En Colombie et au Mexique on l'appelle « acetaminofén ». Dans les autres pays, on emploie le nom « paracétamol ».
Le paracétamol est le médicament le plus prescrit en France, et même la base des trois médicaments les plus prescrits (noms commerciaux : Doliprane, Dafalgan, Efferalgan), qui totalisent plus de 260 millions de doses[165].
Selon le rapport de 2005 de la Caisse nationale d'assurance maladie, la famille de médicaments la plus prescrite en France est celle des antalgiques, qui progresse encore de façon importante (+ 9,2 % par rapport à 2004) pour atteindre 340 millions de boîtes vendues[166],[167].
On retrouve en tête de liste des dix médicaments les plus prescrits en quantité en France en 2005 trois antalgiques à base de paracétamol seul : le Doliprane (1er), l'Efferalgan (2e) et le Dafalgan (3e)[168]. Deux antalgiques avec du paracétamol associé se placent aussi dans les dix produits les plus prescrits : Propofan (6e) et Di-Antalvic (8e)[168].
Cinq des huit produits les plus prescrits en France sont des antalgiques contenant du paracétamol, avec une très forte progression pour certains comme le Doliprane (+15 %) et Dafalgan (+11 %). Selon un rapport de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS)[169], appelée Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) depuis 2012, les prescriptions de paracétamol en France ont été multipliées par deux en dix ans. Cette forte croissance signifie que l'usage de ces antalgiques s'est banalisé, ce qui pourrait être dommageable à terme.
En termes de coût, le Doliprane qui est la spécialité la plus prescrite en quantité, ne se situe qu'au 15e rang des dépenses (96,3 millions d'euros, en progression de 11,7 % depuis 2004). L'Efferalgan est 42e avec 57,5 millions et +3,0 % et le Dafalgan 52e avec 47,5 millions et +7,9 %. L'ensemble des spécialités à base de paracétamol seul représente 236 millions d'euros (+12 % depuis 2004) et le 5e rang des dépenses[167].
Jusqu'en 2002, l'apparition de paracétamol générique en France a été bloquée pour sauvegarder l'emploi de l'usine Doliprane de Sanofi à Lisieux[g], dont les deux députés-maires successifs de 1953 à 1989 étaient pharmaciens. Le paracétamol était dans le domaine public mais son « généricage » était bloqué au prétexte de l'absence d'un dépôt de brevet spécifique[171]. Depuis, les ventes de paracétamol progressent plus vite que d'autres médicaments de la même classe (les antalgiques)[172], laissant supposer que certains prescripteurs et certains patients (auto-médication) ont changé leurs habitudes, passant de l'aspirine générique (ou de l'ibuprofène) au paracétamol générique.
On peut noter que dans le rapport de 2006 de la Caisse nationale d'assurance maladie les antalgiques conservent une croissance soutenue (+4 %) et restent en tête du classement des familles de médicaments les plus prescrites, avec 358 millions de boîtes prescrites et remboursées[173]. Ils demeurent les médicaments les plus prescrits, avec pour 2006, une croissance qui reste supérieure à +5 % pour Doliprane et Dafalgan[173]. Les antalgiques à base de paracétamol seul ou associé représentent 4 des 10 produits les plus prescrits et l'importante baisse du Propofan (-45,8 %) n'est que fictive quand on prend en compte le marché du groupe générique correspondant[173].
Le paracétamol fait partie de la liste modèle des médicaments essentiels de l'Organisation mondiale de la santé (liste mise à jour en )[174].
En 2015, les médicaments à base de cette molécule sont retirés des supermarchés suédois en raison de la hausse des intoxications depuis l'autorisation de leur vente en grandes surfaces en 2006[175].
En France, à compter du , le médicament n'est plus disponible en libre accès, mais doit être délivré par le pharmacien[176] (sans ordonnance).
Dans le cas d'une ingestion supposée pour les chats ou d'une surdose pour les chiens, il est important de consulter un vétérinaire immédiatement pour une désintoxication[177].
Le paracétamol est une substance extrêmement toxique pour les chats qui ne doivent en absorber dans aucun cas. Les chats ne possédant pas l'enzyme glucuronyl transferase, de petites quantités peuvent leur être fatales. La toxicité apparaît pour des doses journalières aussi faibles que 10 mg/kg[178]. Les symptômes initiaux sont le vomissement, la salivation et la décoloration de la langue et des gencives. Au bout de deux jours, les dommages corporels sont évidents et apparaît une jaunisse. Contrairement à ce qui se passe chez l'humain, ce ne sont pas les dommages hépatiques qui causent la mort mais c'est la production de méthémoglobine et de corps de Heinz dans les globules rouges qui empêche le transport de l'oxygène dans le sang, provoquant une mort par asphyxie. Des traitements efficaces sont possibles pour les faibles doses mais ils doivent être administrés très rapidement.
Pour les chiens, le paracétamol est un antalgique utile avec un bon résultat en matière d'efficacité, qui cause moins d'ulcères gastriques que les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Mais il ne doit être administré que sur les conseils d'un vétérinaire. En effet, le surdosage, potentiellement mortel, est rapidement atteint même avec de faibles doses. La toxicité hépatique peut survenir à partir de 100 mg/kg et une méthémoglobinémie à partir de 200 mg/kg[178].
Le paracétamol est létal pour certains serpents et son utilisation dans le but de contrôler la prolifération du serpent brun arboricole (Boiga irregularis) dans l'île de Guam à l'aide de fausses souris imprégnées a été validée lors d'une étude[179].
D'après une étude[180], le paracétamol pourrait se transformer en produit toxique, lorsque les usines de traitement des eaux usées utilisent le procédé de javellisation. Le paracétamol se transformerait, sous l'action de l'ion hypochlorite ClO−, en N-acétyl-p-benzoquinone imine et en 1,4-benzoquinone. La première molécule est toxique pour le foie tandis que la seconde est suspectée d'être génotoxique et mutagène. Des études supplémentaires doivent être effectuées pour savoir quelle est la concentration de ces substances à la sortie des eaux usées et pour connaître la persistance de ces produits dans l'environnement.
Le 30 septembre 1982, la première victime d'une série macabre meurt à Chicago après avoir absorbé une gélule d'acétaminophène (commercialisé sous le nom de Extra Strength Tylenol). Au total, sept personnes furent victimes de cet empoisonnement aux États-Unis[181],[182]. Ces gélules contenaient du cyanure en quantité suffisamment importante pour être létale pour un adulte. La société Johnson & Johnson proposa alors d'échanger toutes les gélules de Tylenol en circulation par des comprimés de Tylenol. Dans cette affaire, la société eut une perte d'un million de dollars et fut condamnée à payer de lourdes indemnités aux victimes. Le responsable n'a jamais été arrêté et cette affaire n'a jamais été élucidée[183].
En février 1986, une nouvelle affaire d'empoisonnement éclate aux États-Unis, à la suite de la mort d'une jeune femme de 23 ans, Diane Elsroth, à Yonkers dans la région de New York, le . Elle avait absorbé une gélule de Tylenol Extra-Fort. La gélule avait été empoisonnée au cyanure, ce qui a relancé la psychose survenue après la vague de morts de Chicago, trois ans et demi auparavant[184]. À ce jour, tout comme pour la vague de crimes de 1982, cette affaire n'a pas été résolue.
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