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ensemble de pratiques pseudo-scientifiques ou religieuses visant à traiter un individu pour convertir son orientation ou identité sexuelle De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Une thérapie de conversion, parfois appelée thérapie de réorientation sexuelle ou bien encore thérapie réparatrice par ses défenseurs, est un ensemble de traitements pseudo-scientifiques, d'origines diverses, utilisés dans le but controversé de tenter de changer l'orientation sexuelle d'une personne de l'homosexualité ou de la bisexualité à l'hétérosexualité ou de changer l'identité de genre d'une personne de la transidentité à la cisidentité. Elle se passe parfois du consentement éclairé, et du droit de refus[1] éclairé de la personne et se base sur l'hypothèse (non étayée) que les sexualités non hétéroxexuelles seraient des maladies ou des troubles mentaux, et que l'on pourrait volontairement, ou de manière imposée, changer l'orientation sexuelle d'un individu, souvent par des moyens violents (électrochocs, jeûnes sévères et autres privation, de sommeil notamment), injections d'hormones, prières obligatoires...
Il n'existe aucune preuve fiable que l'orientation sexuelle ou l'identité de genre puissent être changées. Et des études, organisations médicales et organisations internationales signalent que ces thérapies sont potentiellement dangereuses[2],[3],[4].
En 2018, une résolution de l'Union européenne s'est opposée aux thérapies de conversion et la France les a interdites le 31 janvier 2022. Le « transsexualisme » autrefois considéré comme une maladie mentale a été retiré de la liste des affections psychiatriques, codifiée par le Code de la santé publique[5].
Développé au XIXe siècle en littérature, le concept d'homosexualité a été rapidement repris par la psychiatrie et la psychanalyse pour en faire une maladie mentale[6],[7]. Diverses thérapies ont été mis en place dans le monde pour tenter de « soigner » l'homosexualité, par exemple par les sexologues William Masters et Virginia Johnson aux États-Unis[8].
L'homosexualité n'est retirée des classifications psychiatriques qu'en 1973 à la suite d'importantes pressions du mouvement LGBT[9],[10]. Elle réapparaît dans la révision du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM)[N 1] sous le terme de « désordre de l'orientation sexuelle ». Pour des raisons politiques[11] l'Association américaine de psychiatrie a alors proposé de substituer au diagnostic d'homosexualité celui de « perturbation de l'orientation sexuelle » (incluant les personnes perturbées par leur orientation sexuelle, en conflit avec celle-ci ou désirant la modifier). Dans la prise de position initiale de son Conseil d'administration, l'Association précise[12] :
« Considérant que l'homosexualité en soi n'implique aucune altération du jugement, de la stabilité, de la fiabilité ou des capacités sociales ou professionnelles générales, il est résolu que l'Association américaine de psychiatrie déplore toute discrimination publique et privée à l'encontre des personnes homosexuelles dans des domaines tels que l'emploi, le logement, l'hébergement public et l'octroi de licences, et déclare qu'aucune charge de la preuve ne doit être imposée aux personnes homosexuelles plus lourde que celle imposée à toute autre personne. »
— p. 497
Une nouvelle classification apparaît alors (« homosexualité ego-dystonique ») avant de disparaître en 1984 du DSM, à la suite de nombreuses contestations (58 % des psychiatres membres consultés ont demandé la suppression de cette mention). Depuis, cette classification n'est plus répertoriée parmi les pathologies du DSM. L'Organisation mondiale de la santé ne retire l'homosexualité de sa Classification internationale des maladies mentales qu'à la fin des années 1980, par la 10e révision de la classification adoptée par l'Assemblée mondiale de la santé le 17 mai 1990 et mise en œuvre à partir de 1993. La Chine, qui dépénalise l'homosexualité en 1997[13], la retire également des maladies mentales le [14].
En 1983, la théologienne Elizabeth Moberly affirme, dans son ouvrage Homosexuality: A New Christian Ethic, que l'homosexualité ne dépend ni d'une prédisposition génétique ni d'un déséquilibre hormonal, mais de difficultés dans la relation parent-enfant. Ces difficultés aplanies, il serait possible de « réorienter » sexuellement les personnes concernées dans un cadre chrétien approprié. Elle est parmi les premièrs à lier la thérapie de conversion à la religion chrétienne[15].
À partir de 1976, des organisations laïques, axées sur des formes de développement personnel, proposent aussi des thérapies de conversion, essentiellement aux États-Unis[16].
Les psychologues Ole Ivar Løvaas, qui utilisa l'ABA (Applied Behavior Analysis) dans la prise en charge de l'autisme, et George Alan Rekers (en), membre de la National Association for Research & Therapy of Homosexuality (en), ont également étudié la thérapie de conversion en cas de « brouillage de l'identité de genre pendant l'enfance » (childhood cross-gender identity)[17].
L'Union européenne a, en 2018, adopté une résolution visant à faire interdire les thérapies de conversion. Et depuis le 31 janvier 2022, le Code pénal français interdit[18] ces « thérapies » (sans atteindre le droit des individus à bénéficier d'opérations de réassignation sexuelle, qui sont des actes médicaux modifiant l'identité de la personnes mais non l'identité de genre, pour traiter l'incongruence de genre (discordance marquée et persistante entre le genre auquel une personne s'identifie et le sexe qui lui a été assigné) ; opérations dont les justifications sont clairement établies par la médecine. Cependant, dans le monde, divers mouvements fondamentalistes religieux et politiques freinent les débats sur la sexualité, l'éducation à la sexualité et les politiques de santé sexuelle[19].
Jusqu'au milieu des années 1990, les techniques utilisées dans les thérapies de conversion ont suivi mimétiquement celles utilisées dans le traitement des paraphilies.
De rares thérapies « douces » ont été utilisées aux XIXe et XXe siècles (telles que la mise au repos, la prière). Le plus souvent selon Haldeman (2002), bien que cette pratique soit peu décrite dans la littérature scientifique, car conduite par des non-médecins, un peu à la manière des alcooliques anonymes mais avec une connotation plus religieuse, des groupes de pratiquants religieux, éventuellement composés d'« ex-gays » recourent à « des interventions spirituelles visant à débarrasser d'autres personnes de leur orientation sexuelle par le biais de la prière, du soutien de groupes et de pressions »[20].
D'autres méthodes appliquées étaient fortement contraignantes et intrusives (ex. : rencontre obligatoire de prostituées et/ou mariage imposé)[21].
Comme pour certains troubles psychiatriques, des techniques médicales agressives telles que la lobotomie et la sismothérapie auraient été expérimentées[10], durant la première partie du XXe siècle, pour tenter de changer l'orientation sexuelle de patients et de patientes avec sensiblement la même inefficacité. Du côté de la psychanalyse, qui a dominé la psychothérapie durant la même période, Sigmund Freud entretenait une ambivalence face à l'homosexualité car selon son analyse théorique, l'homosexualité constituait selon lui une composante normale de la sexualité humaine et l'attirance exclusive pour les personnes de même sexe n'apparaissait pas toujours cliniquement intriquée dans des conflits précoces. Cette ambivalence s'exprimait déjà en 1903 (voir Menahem 2003[22]), mais en 1935, Freud l'écrit de sa propre main dans une lettre, aujourd'hui célèbre[23], à la mère d'un jeune homosexuel où il dédramatise explicitement le diagnostic en invitant sa correspondante à ne pas considérer l'homosexualité de son fils comme une « maladie ».
Les modalités apparues dans les années 1960 reposent essentiellement sur les techniques aversives qui semblent inspirées des théories pavloviennes et d'expériences de laboratoires sur les animaux.
Il s'agit de coupler un stimulus négatif à tout contenu homosexuel (par exemple des images d'hommes nus). Les stimuli négatifs utilisés sont des sensations déplaisantes (douleur, nausée induite par un médicament[20], etc.). Après un certain nombre de répétitions, le stimulus sexuel à contenu homosexuel est supposé devenir un stimulus conditionnant déclenchant automatiquement une réponse d'anxiété et/ou de stress physique élevé chez le patient. Le stimulus aversif le plus souvent utilisé était l'électrochoc[24] (de faible intensité) administré sur la main[20], les organes génitaux[20] ou le mollet, mais des stimuli olfactifs (ammoniaque) leur sont préférés par certains expérimentateurs[25]. Des techniques aversives ont parfois été combinées à des techniques de rétroaction biologique consistant à équiper le sujet d'un instrument de mesure de son excitation sexuelle et à intercaler un signal lumineux pour avertir le patient que son niveau d'excitation était trop élevé avant de l'exposer au stimulus aversif. De façon concomitante, le procédé consiste ensuite à présenter des stimuli sexuels alternatifs (par exemple des images de femmes nues) et de les associer à des sensations plaisantes soit par simple disparition de la douleur, soit, le plus souvent, en invitant le patient à se masturber jusqu'à l'orgasme. D'autres variantes visant à augmenter l'excitation face à des stimuli hétérosexuels ont été expérimentées, notamment sur les « agresseurs sexuels »[26],[27].
Au-delà des enjeux éthiques, bioéthiques et déontologiques[28], la mesure de l'efficacité de ces techniques a été très contestée.
En 1970, certains auteurs s'entendent pour reconnaître que ces techniques se sont montrées capables de réduire l'excitation sexuelle déclenchée par des stimuli à contenu homosexuel[29],[30],[31], mais d'autres études concluent ensuite qu'elles n'ont pas efficacement entraîné d'augmentation de la réponse à des stimuli hétérosexuels et certainement pas transformé des homosexuels exclusifs en hétérosexuels[32].
Les personnes qui promeuvent les thérapies de conversion s'appuient même sur ce qu'elles présentent comme un solide argument scientifique, issu de la psychanalyse qui considère les personnes homosexuelles comme bloquées à un stade infantile et qui n'aurait pas atteint la phase ultime de développement adulte mature que représenterait l'hétérosexualité[33].
Depuis les années 1990, de nombreux travaux de recherches ont considéré ces pseudo-thérapies comme relevant des pseudosciences[2] et inadaptées aux problèmes des personnes homosexuelles et transgenres[34] (d'autant que le consensus scientifique est maintenant que l'homosexualité n'est pas une maladie). De plus, elles génèrent souvent des conséquences négatives et durables sur les personnes homosexuelles[35] (notamment par un taux de suicide encore plus élevé). Enfin, ces traitements, outre le fait qu'ils renforcent le sentiment de honte des personnes qui y sont exposées, renforcent aussi les préjugés d'intolérance homophobe prônant l'anormalité de l'homosexualité[36].
Les jeunes se définissant comme hétérosexuels mais ayant une attirance pour les personnes de même sexe ou des conduites sexuelles avec des personnes de même sexe ne font pas plus de tentatives de suicide que ceux qui sont exclusivement hétérosexuels[37]. On sait en revanche que ce n'est pas le cas pour les jeunes se définissant comme gays : en 1989, David R. Gibson (en) a démontré que ces derniers présentent un risque de tentatives de suicide de 2 à 3 fois plus élevé que les jeunes hétérosexuels. D'autres études ont ensuite montré qu'il en va de même chez les lesbiennes et les personnes bisexuelles (2 à 7 fois plus de risques de réaliser une tentative de suicide que les hétérosexuels selon les auteurs[38],[39],[40],[41],[42]). Les causes de ces suicides les plus citées sont les stigmatisations, violences, préjudices et discriminations homophobes, à l'école, dans la rue, au travail ou dans la famille mais il apparaît que les thérapies de conversion peuvent fortement contribuer à ce risque.
Ceci est confirmé par une étude publiée en 2019, qui porte sur les effets des traitements dit de conversion sur les personnes trans. C'est la première étude de ce type, et la plus vaste jamais réalisée (basée sur un panel de 28 000 personnes trans interrogées en 2015). Elle confirme que les thérapies de l'identité sexuelle présentent de graves risques pour la personne trans quand ces thérapies tentent de modifier son identité de genre en l'orientant vers une nouvelle identité supposée correspondre au sexe assigné. Un de leurs effets est de pousser une partie de ceux qui les subissent au suicide[43]. Les personnes ayant suivi ou subi une telle thérapie étaient plus de deux fois plus nombreuses à avoir déjà tenté de se suicider que leurs pairs ayant suivi ou subi un autre type de traitement[43].
Les patients qui avaient moins de 10 ans lorsque des praticiens ont tenté d'« aligner leur identité de genre sur le sexe attribué à la naissance » présentent un risque relatif de tentative de suicide quadruplé[43]. En outre, les personnes transgenres ayant dans le passé suivi ou subi une thérapie de conversion étaient 1,5 fois plus susceptibles que leurs pairs ayant subi une autre forme de thérapie d'avoir subi une « détresse psychologique grave » lors du mois précédant l'enquête[43]. Cette étude n'a pas pu identifier de différence significative de risque entre les personnes ayant été orientées vers un traitement de conversion par des conseillers religieux ou celles ayant été orientées par des thérapeutes séculiers[43].
En 2019 l'Association pour la prévention de la torture (en) publie un guide de monitoring concernant la sécurité des personnes LGBTIQ privées de liberté indiquant explicitement l'existence d'un consensus mondial reconnaissant la nocivité et l'inefficacité de ces traitements[44].
L'évolution du droit tend à protéger les personnes (personnes vulnérables notamment), contre des pratiques pouvant nuire à leur santé (santé sexuelle y compris) ; elle renforce aussi la protection de l'identité et de l'orientation sexuelle de tous et chacun, en imposant notamment une prise en compte du consentement éclairé[45] dès et tant qu'il est possible.
« Même si une personne consent à subir une thérapie de conversion, cela n'annule pas l'illégalité de la pratique »[45]. Or, ces thérapies portent atteinte à l'intégrité psychologique des individus, et parfois à leur dignité et/ou à leur intégrité physique ; ce que la loi interdit dans la plupart des juridictions, qu'il y ait consentement ou non.
En effet, les pratiques visant à modifier ou réprimer l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, et ayant pour effet une altération de la santé physique ou mentale, sont punies de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende.
Ces traitements sont une source de controverse dans de nombreux pays. Le fait de parler de thérapie sous tend clairement le principe de pathologisation des identités homo- et transsexuelles, principe qui n'a plus de consistance scientifique, médicale ni juridique. Depuis 1999, un mouvement vise à interdire ces traitements de conversion dans le monde[46]. L'île de Malte[47],[48], le Brésil et la Chine l'interdisent déjà, de même que certaines provinces canadiennes[49] et certains états américains. Le Royaume-Uni[50], l'État fédéral américain[51] et Israël[52] débattent également de l'interdiction de ces thérapies. Elles sont illégales pour les mineurs en Allemagne[53],[54].
L'Église d'Angleterre fut l'un des premiers groupes religieux britannique a demander formellement une interdiction des thérapies de conversion en juillet 2017[55]. Jayne Ozanne (en), membre du synode ayant proposé la motion, avance un chiffre de 40 % de répondants ayant subi une forme de thérapie de conversion parmi 553 personnes interrogées sur le web[55].
Après la publication le d'une étude sur les conditions de vie des personnes LGBT au Royaume-Uni, Theresa May promet d'éradiquer la pratique[56] dans le cadre d'un grand plan d'égalité LGBT+ financé à hauteur de 45 000 000 livres sterling.
À l'occasion de l'ouverture de la session parlementaire, le discours prononcé par la reine d'Angleterre le mardi , annonce leur interdiction prochaine en Angleterre et au Pays de Galles, après consultation afin de prendre en considération la liberté religieuse et la protection des professionnels de santé y compris des thérapeutes[57].
Le , le gouvernement de Boris Johnson annonce abandonner ses plans d'interdiction pour explorer d'autres voies législatives avant d'annoncer quelques heures plus tard[58] que le plan est maintenu mais uniquement sur les questions d'orientation sexuelles[59].
D'après Paul Brand, un journaliste d'ITV, la loi est en cours d'examen depuis juillet 2023 par le bureau du premier ministre, Rishi Sunak[60]. À la suite de l'annonce de l'état de la loi, les associations LGBTQ+ renouvellent leur demande pour une adoption rapide sans contournement[61] tandis que l'organisation caritative britannique Christian Institute (en) met en garde le premier ministre contre l'impact de la loi sur les croyants[62].
En novembre 2023, Kemi Badenoch, ministre des femmes et des égalités, annonce vouloir faire avancer l'adoption de la loi, et indique que les thérapies d'affirmation de genre pour mineurs transgenres pourraient être considérées comme une nouvelle forme de thérapie de conversion[63].
En , Keir Starmer, alors chef du Parti travailliste, promet de mettre en place une interdiction des thérapies de conversion en cas de victoire aux prochaines éléctions[64]. À la suite de sa nomination comme premier ministre en , 50 associations LGBTQ+ publient une lettre ouverte l'incitant à tenir sa promesse[65].
Une loi interdisant les pratiques de conversion est votée au Parlement le 20 juillet 2023[66].
D'après Radio-Canada, « le gouvernement Trudeau a déposé un projet de loi, le projet de loi C-6, qui vise à modifier le Code criminel afin d'interdire les thérapies de conversion »[67] en janvier 2021.
En décembre 2021, la loi est passée à l'unanimité devant la chambre des Communes[68]. Un an après son entrée en vigueur, le ministère fédéral de la Justice indique ne pas avoir constaté de plainte durant l'année 2022[69].
Le , le ministre de la justice du Québec, Simon Jolin-Barrette, présente le projet de loi No 70 visant à protéger les personnes contre les thérapies de conversion dispensées pour changer leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre sous peine d'amende. D'aucuns demandent une définition précise de ces thérapies afin d'éviter que sous couvert d'autres appellations, elles soient mises en œuvre en prétendant cibler uniquement les comportements et non pas l'identité ou l'orientation sexuelle[70],[71]. L'association Exodus international reconnaît avoir participé à « un régime de peur et de honte »[72] qui a fait 47 000 victimes canadiennes[72].
La loi modifie l'article 2926.1 du Code civil du Québec pour affirmer que la thérapie de conversion constitue une violence subie pendant l'enfance. Cela a comme effet de rendre imprescriptible une poursuite d'une personne LGBT qui a subi une thérapie de conversion[73]. D'autre part, puisque dans cette disposition, la thérapie de conversion est assimilable à un préjudice corporel, il n'est pas possible de limiter sa responsabilité pour le préjudice corporel par un avis de non-responsabilité, en vertu de l'art. 1474 al.2 C.c.Q[74].
La loi statutaire québécoise sur les thérapies de conversion contient des règles additionnelles qui entre autres limitent les moyens de défense d'un défendeur ayant mené une telle thérapie[75]. Toutes les thérapies de conversion sont réputées porter atteinte à la dignité de la personne qui la subit, ce qui signifie qu'il n'est pas possible d'affirmer qu'une thérapie de conversion est moins attentatoire qu'une autre. L'utilisation du mot « réputé » dans la loi crée une présomption irréfragable à cet effet, donc il est impossible d'apporter une preuve contraire à l'atteinte. En outre, la loi prévoit une amende de 5 000 à 50 000 $ pour la personne physique qui mène une thérapie de conversion. Il est interdit de faire de la publicité pour la thérapie de conversion et celle-ci ne peut pas être couverte par l'assurance.
Cela dit, dans la définition de thérapie de conversion, la loi statutaire crée une exception pour « l'accompagnement d'une personne dans le cadre de sa démarche autonome d'acceptation, d'adaptation et d'affirmation à l'égard de son orientation sexuelle, de son identité de genre ou de son expression de genre ».
Le gouvernement publie une proposition de loi visant à interdire les thérapies de conversion le , et une consultation est ouverte sur le sujet jusqu'au [76].
Aux États-Unis, les tentatives de « guérison » de l'homosexualité se situent souvent dans le cadre d'associations chrétiennes charismatiques, liées à l'évangélisme ou au catholicisme, ou encore interconfessionnelles[16]. Parmi ces dernières, Exodus International (1976-2013) était l'organisation la plus importante du pays en matière de thérapie de conversion[16]. Exodus International a fermé ses portes lorsque ses dirigeants ont reconnu les torts qu'ils avaient causés, allant de la honte et de la peur jusqu'au suicide des personnes qu'ils entendaient « sauver »[16]. L'association reconnaît avoir participé à « un régime de peur et de honte »[72].
L'Association américaine de psychiatrie a condamné le « traitement psychiatrique, tel que la thérapie de réparation ou de conversion, basé sur l'hypothèse que l'homosexualité en soi est une maladie mentale ou basé sur l'hypothèse que le patient doit changer son orientation sexuelle[77] ». Elle ajoute que « les psychanalystes éthiques n'essaient pas de changer l'orientation sexuelle d'un individu[78] ». En , une étude de l'institut Williams de l'université de Californie à Los Angeles évalue à près de 700 000 personnes les victimes de thérapies de conversion, parmi lesquelles 350 000 adolescents[79]. La Californie vote solennellement en une résolution dénonçant les méfaits psychologiques de la thérapie de conversion en soulignant qu'elle « est inefficace sur des adolescents, contraire à l'éthique et nuisible ». L'État de Californie rappelle qu'il procède « d'un intérêt majeur de protéger le bien-être physique et psychologique des mineurs, y compris les jeunes LGBTQ, et de protéger ces mineurs contre l'exposition à de graves préjudices causés par le rejet de la famille et de porter atteinte au changement de l'orientation sexuelle ou l'identité de genre ». In fine, l'État en appelle aux « chefs religieux à conseiller sur les questions LGBTQ dans l'amour, la compassion et la connaissance des méfaits psychologiques et autres de la thérapie de conversion » et s'adresse aussi aux éducateurs, législateurs, universités, collèges et autres écoles, centres de conseil, groupes d'activistes et centres religieux pour s'attaquer à la stigmatisation des personnes LGBTQ en donnant l'exemple d'un traitement équitable à tous les habitants de l'État[80],[81],[82],[83].
Une étude menée par des chercheurs de Harvard démontre que tenter de changer l'identité de genre des jeunes trans augmenterait de près de trois fois leur risque suicidaire. Lorsque l'enfant est âgé de moins de 10 ans, il augmente de quatre fois. Le préjudice causé par les thérapies de conversion liées au genre est net sur la santé mentale à l'âge adulte, notamment par une détresse psychologique grave, des idées suicidaires et des tentatives de suicide à vie[84],[85] (voir plus haut les conclusions similaires pour la France).
À partir de 2023, certaines municipalités ayant mis en place des interdictions ont décidé de revenir sur leur décision à la suite de pressions du groupe Liberty Counsel (en)[86].
Ces pratiques n'ont pas été juridiquement clairement interdites ou condamnées en France avant 2022, et leur implantation reste difficile à évaluer[48]. Décrites comme des dérives sectaires, elles incluent électrochocs, jeûnes sévères, injections d'hormones[87] ou pratiques d'exorcisme suivant les cas[88]. Un directeur de la Miviludes, Serge Blisko, a vainement tenté de faire réagir le gouvernement[16].
En , les journalistes Jean-Loup Adénor et Timothée de Rauglaudre révèlent dans le livre Dieu est amour : infiltrés parmi ceux qui veulent « guérir » les homosexuels (Flammarion), au terme de deux ans d'enquête et d'infiltrations, l'existence et la progression des « thérapies de guérison » sur le territoire français[89]. Importées des États-Unis depuis les années 1990, elles prospèrent à travers certaines associations comme « Torrents de vie » (protestante évangélique), qui propose une « restauration de l'identité » hétérosexuelle, ou « Courage » (catholique), qui s'inspire des Alcooliques anonymes et incite ses participants à vivre dans l'abstinence sexuelle[89].
Une pétition a été lancée par l'internaute Aurélien Heiligenstein en décembre 2016, qui dénote l'urgence de la situation, en exigeant l'interdiction des thérapies de conversion en France[90]. Il parvient à alerter, en 2018, une députée de La République en marche, Laurence Vanceunebrock du problème, qui s'engage à légiférer là-dessus[90]. Sa pétition franchit les 90 000 signatures en juillet 2019[91].
Laurence Vanceunebrock et Bastien Lachaud, député de La France Insoumise, rendent publics le leurs travaux dans le cadre d'une mission parlementaire de plusieurs mois[92] sur les pratiques prétendant modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne. Une mission d'information a notamment permis à une soixantaine de victimes et d'associations LGBT d'être auditionnées entre octobre et novembre 2019 (Adénor et Rauglaudre ayant également été entendus[89]). Les rapporteurs ont notamment établi que ces pratiques ne permettent pas de modifier l'orientation sexuelle des participants, mais contribuent en revanche à accentuer leurs souffrances : dépression, troubles de la personnalité voire développement d'idées suicidaires. Une centaine de faits concernant ces pratiques ont été recensés[93].
Conséquemment, Vanceunebrock dépose en la proposition de loi prévue par cette mission[88], définissant une nouvelle infraction : « les pratiques, les comportements ou les propos répétés visant à modifier ou à réprimer l'orientation sexuelle ou l'identité de genre vraie ou supposée d'une personne et ayant pour effet une altération de sa santé physique ou mentale ». Le projet de loi prévoit également, entre autres, d'introduire une circonstance aggravante sur des infractions existantes, de renforcer l'enseignement des identités de genre et leur respect dans les établissements scolaires, et de faire produire au gouvernement un état des lieux précis de ces pratiques sur le territoire français[93]. Le 5 octobre 2021, la loi est examinée à l'Assemblée nationale, et est adoptée à l'unanimité[94]. Le 7 décembre 2021, le Sénat approuve le projet de loi, avec quelques modifications[95].
Le 25 janvier 2022, la loi d'interdiction des thérapies de conversion est adoptée, modifiant le code pénal : « Les pratiques, les comportements ou les propos répétés visant à modifier ou à réprimer l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, vraie ou supposée, d'une personne et ayant pour effet une altération de sa santé physique ou mentale sont punis de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende » »[96],[97].
Circonstances aggravantes : si les faits sont commis sur une personnes vulnérable (mineur en particulier), en présence d'un mineur, par un ascendant ou toute personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait, une pluralité d'auteur ou par l'utilisation d'un service de communication au public en ligne, par le biais d'un support numérique ou électronique, alors les peines sont aggravées (trois ans d'emprisonnement et 45 000 €)[96].
Fin août 2023, un reportage de BFM TV, en caméra cachée, au sein de l'association évangélique « Torrents de vie » révèle l'organisation illégale d'une session de thérapie de conversion, un an et demi après l'adoption de la loi[98].
En , une proposition de loi poussé par plusieurs sénateurs du parti Les Républicains est accusé d'être un retour des pratiques de conversions par plusieurs associations LGBT+[99].
En 2020, un projet de loi interdisant les thérapies de conversion est adopté en première lecture par l'assemblée[52], le projet devant passer encore 2 fois devant l'assemblée avant son adoption[100]. Le projet ne progresse pas, et est finalement abandonné en 2023 après que de nombreux députés de la coalition au pouvoir aient voté contre[101].
En février 2022, Nitzan Horowitz, ministre de la santé, annonce l'interdiction des pratiques de thérapies de conversion par les professionnels de santé[102].
Le groupe français Torrents de vie est présent depuis 1997[103] dans le pays, et organise les mêmes types de séminaires qu'en France.
En Suisse, les autorités considèrent les thérapies de conversion illégales, mais aucune loi spécifique ne les interdit[104],[105]. Ces thérapies sont reconnues depuis 2016 par le parlement suisse comme contraire au droit de l'enfant et sont illégales pour les mineurs[33].
En 2022, l'Assemblée fédérale commence à débattre l'interdiction des thérapies de conversion[106], à la suite d'une proposition des Vert'libéraux et du PS. L'UDC estime qu'il n'y a pas de « problème avéré »[106]. Pour le Réseau évangélique suisse, il n'y a pas besoin de légiférer plus, car les participants sont volontaires[107]. Les associations LGBT locales craignent alors que la Suisse serve de refuge pour les organismes proposant des thérapies de conversion [108],[109].
Plusieurs cantons et villes adoptent des lois. Le canton de Neuchâtel est le premier à légiférer sur l'interdiction en mai 2023[110]. Le , le parlement du canton du Valais vote une loi interdisant ces pratiques, avec le soutien de la majorité des groupes politiques, hors Union démocratique du centre[111].
L'Organisation des Nations Unies se prononce en 2015 contre ces thérapies de conversion, et contre d'autres traitements indignes auxquels sont soumises les personnes LGBT[112].
Le dixième principe des principes de Yogiakarta sur l'application du droit international relatif aux droits de l'homme en matière d'orientation sexuelle et d'identité de genre pour la protection et pour l'interdiction absolue de la discrimination contre les personnes LGBT et intersexuées selon la Déclaration universelle des droits de l'homme stipule que les États se doivent d'interdire toute thérapie de réparation ou de conversion non librement consentie par les personnes concernées[44].
Le rapport annuel sur les droits fondamentaux dans l'Union européenne adopté en 2018 « se félicite des initiatives interdisant les thérapies de conversion pour les personnes LGBTI »[113]. Un rapport du Conseil de l'Europe de 2023 incite les états membres à interdire les pratiques[114] pointant qu'au minimum « 2% des personnes LGBTI ont subi de telles pratiques et 5 % se sont vu proposer une conversion »[115] dans l'Union européenne.
Les États et territoires dans la liste suivante interdisent ce type de thérapie, mais certaines de ces lois/décrets ne s'appliquent qu'aux professionnels de santé. D'autres, en revanche, s'étendent également aux groupes religieux. De plus, un grand nombre de villes et comtés américains et canadiens ont promulgué des ordonnances interdisant les thérapies de conversion (entre autres, New York, Miami, Philadelphie, Vancouver, Cincinnati, Pittsburgh, Rochester, le comté d'Érié, etc.).
État/Territoire | Date d'interdiction |
---|---|
Brésil | [117] |
Samoa | [118] |
Argentine | [119] |
Fidji | [120] |
New Jersey | [121] |
Californie | [122] |
Équateur | [123] |
Chine | [124] |
Washington D.C. | [125] |
Oregon | [126] |
Manitoba | [127] |
Ontario | [49] |
Illinois | [128] |
Murcie | [129] |
Vermont | [130],[131] |
Malte | [132] |
Communauté de Madrid | [133] |
Victoria | [134],[135],[136] |
Nouveau-Mexique | [137] |
Communauté valencienne | [138] |
Connecticut | [139],[140] |
Rhode Island | [141] |
Uruguay | [142] |
Nevada | [143] |
Andalousie | [144] |
Taïwan | [145] |
Washington | [146] |
Hawaï | [147] |
Delaware | [148] |
Maryland | [149] |
Nouvelle-Écosse | [150],[151] |
New Hampshire | [152] |
New York | [153],[154] |
Porto Rico | [155] |
Massachusetts | [156] |
Maine | [157] |
Colorado | [158] |
Virginie | [159] |
Allemagne | [54],[53] |
Albanie | [160] |
Inde | [161] |
Canada | [68] |
France | [95],[162] |
Espagne | [163] |
Neuchâtel | [110] |
Islande | [164],[165] |
Portugal | [166] |
Mexique | [167] |
Kentucky | [168] |
La déontologie des psychologues veut que toute personne ait le droit à une aide psychologique sans discrimination liée à son identité raciale, religieuse ou sexuelle. Le thérapeute informe son patient du fait que l'homosexualité n'est pas une maladie, mais ce dernier dispose d'un droit à l'autodétermination. Le psychologue est donc parfois confronté à des individus qui, par exemple pour des raisons religieuses ou spirituelles souhaitent fortement un « traitement » de leur homosexualité ou de leur identité transgenre (le traitement qu'ils attentent peut être une thérapie de conversion)[20].
Pour de telles circonstances, les organisations de santé mentale ont adopté des politiques de conseil[N 2] en matière de thérapie de conversion. Ces politiques affirment le droit des clients LGBT à un traitement impartial en psychothérapie et elles rejettent les traitements fondés sur le principe que l'homosexualité est un trouble mental traitable. « Cependant, ils n'interdisent pas totalement la pratique de la thérapie de conversion par souci de l'individu dont les préoccupations personnelles, spirituelles ou religieuses, peuvent primer son orientation sexuelle »[20].
Haldeman rappelle que toute personne ou organisation prônant la coercition des jeunes LGBT ou en questionnement à la thérapie de conversion, est non seulement en situation de probable violation éthique, mais est également susceptible de commettre des abus ou violences sur enfants[20].
Les plus fervents partisans de la thérapie de conversion sont principalement des groupes de fondamentalistes chrétiens et d'autres organisations religieuses d'extrême droite[170]. Lors d'un vote du au Parlement européen, 29 députés européens français, majoritairement du Front national, n'ont pas voté en faveur de l'interdiction de ces méthodes (plusieurs eurodéputés Les Républicains, dont Nadine Morano et Rachida Dati, se sont abstenus[171]).
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