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peintre belge (1898–1967) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
René Magritte, né le à Lessines (Belgique) et mort le à Schaerbeek, est un peintre surréaliste belge.
Naissance | |
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Décès | |
Sépulture |
Tombeau de Georgette Berger et René Magritte (d) |
Nom de naissance |
René François Ghislain Magritte |
Pseudonyme |
Emair |
Nationalité | |
Domicile |
Maison René Magritte (d) (- |
Formation | |
Activités | |
Période d'activité |
- |
Fratrie |
Paul Magritte (d) |
Conjoint |
Georgette Berger (à partir de ) |
Parti politique |
Parti communiste de Belgique (à partir de ) |
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Mouvement | |
Représenté par | |
Personne liée |
Anne-Marie Gillion Crowet (inspirateur) |
Genres artistiques |
Art animalier, représentation figurée (d), paysage, nu, portrait, paysage urbain, nature morte, scène d'intérieur (d), surréalisme |
Influencé par | |
Site web |
La Trahison des images, Les Mystères de l'horizon (d), Golconde, Les Amants, L'Empire des lumières |
René François Ghislain Magritte, né à Lessines le [1] est le fils de Léopold Magritte, tailleur[alpha 1], et de Régina Bertinchamps, modiste[2]. La famille emménage d'abord à Soignies puis à Saint-Gilles et à Lessines, là où naît René Magritte, et en 1900 retourne chez la mère de Régina à Gilly[3], où naissent ses deux frères Raymond (1900-1970) et Paul (1902-1975). En 1904, ses parents s'installent à Châtelet où, après avoir exercé divers métiers, le père du peintre s'enrichit en devenant l'année suivante inspecteur général de la société De Bruyn qui produit huile et margarine[4]. René Magritte y fréquente pendant six ans l'école primaire et la première année de ses études secondaires, y suit aussi en 1910 un cours de peinture[alpha 2] dans l'atelier de Félicien Defoin (1869-1940), artiste né à Doische et établi à Châtelet[5]. Il s'intéresse particulièrement aux aventures de Zigomar, Buffalo Bill, Texas Jack, Nat Pinkerton, des Pieds nickelés, et se passionne à partir de 1911 pour le personnage de Fantômas. À l'Exposition de Charleroi, il découvre la même année le cinéma, impressionné par les affiches des films mais également des publicités, ainsi que la photographie[6].
Le père de René Magritte est coureur, violemment anticlérical, dépensier, alors que sa mère est une catholique fervente. Dépressive, elle se suicide par noyade dans la Sambre en [alpha 3]. Mais René Magritte, contrairement à ses fréquentations surréalistes ultérieures, notamment Salvador Dalí et André Breton, sera toujours opposé, pour ne pas dire résistant, à la psychanalyse. L'art n'ayant pas besoin selon lui d'interprétations mais de commentaires, l'enfance de l'artiste ne saurait donc être convoquée pour comprendre ses productions.
Tous quatre tenus par leur entourage pour responsables de ce drame du fait de leurs frasques, Magritte et ses deux frères quittent avec leur père Châtelet pour s'installer en à Charleroi. L'éducation des enfants est alors confiée à une gouvernante, Jeanne Verdeyen, que Léopold Magritte épousera en 1928[7]. René Magritte poursuit médiocrement ses études à l'athénée de la ville et lit Stevenson, Edgar Allan Poe, Maurice Leblanc et Gaston Leroux. Son père lui ayant offert un appareil Pathé, il crée de petits films dessinés[8]. Lors de ses vacances dans la famille de son père qui tient une boutique de chaussures à Soignies, il aime y jouer avec une petite fille dans un cimetière désaffecté dont ils visitent les caveaux souterrains[9]. À la foire de Charleroi, il fait la connaissance en d'une fille de douze ans, Georgette Berger, dont le père est boucher à Marcinelle. Ils se rencontrent régulièrement sur le chemin de l'école mais se perdent de vue au début de la guerre 1914-1918[10].
Charleroi étant occupée par l'armée allemande, la famille retourne à Châtelet où le père de Magritte poursuit des activités de représentant pour le bouillon Kub de Maggi. C'est sur la fin de 1914 ou au début de 1915 que Magritte réalise une première peinture de plus d'un mètre cinquante sur près de deux mètres d'après un chromo représentant des chevaux fuyant une écurie en flammes, offrant ses tableaux ultérieurs à ses amis[11]. En il abandonne ses études et s'installe à Bruxelles, rue du Midi, non loin de l'Académie des beaux-arts dont il a le projet de suivre les cours en auditeur libre. Avant d'y entrer, il peint alors des tableaux de style impressionniste.
D' à 1919, Magritte fréquente plus ou moins régulièrement l’Académie royale des beaux-arts de Bruxelles où il suit les cours d'Émile Vandamme-Sylva, du symboliste Constant Montald et de Gisbert Combaz, affichiste du style Art nouveau. Parmi les élèves figure Paul Delvaux. Magritte participe également aux cours de littérature donnés par Georges Eekhoud, qu'il soutiendra après son renvoi. Sa famille installée à Bruxelles en , il travaille, après un retour en 1917 de quelques mois à Châtelet, en 1919 et 1920 dans un atelier loué avec Pierre-Louis Flouquet qu'il a connu, tout comme Charles Alexandre, à l'Académie.
Disposant de beaucoup d'argent grâce aux activités plus ou moins douteuses de son père et aux peintures décoratives ou affiches dont il décroche les commandes, il le dépense, multipliant aventures, blagues et frasques, avec ostentation, dans un climat bohème et anarchiste[12]. Avec Flouquet et les frères Pierre Bourgeois et Victor Bourgeois, il collabore aux quatre numéros, d'avril à , de la revue Au volant que dirige Pierre Bourgeois. Auprès de ses amis il découvre le cubisme et le futurisme. Des œuvres de Flouquet et des affiches puis des peintures non figuratives de Magritte sont exposées en 1919 et 1920 au Centre d'art de Bruxelles dirigé par Aimé Declercq. À cette seconde exposition Magritte rencontre en janvier E. L. T. Mesens, qui sera engagé comme professeur de piano pour son frère Paul.
Au printemps 1920, René Magritte retrouve par hasard au Jardin botanique de Bruxelles Georgette Berger qu'il n'a pas revue depuis 1914. De à il effectue son service militaire au camp de Beverloo, près d'Anvers, où se trouve également Pierre Bourgeois, puis de Bourg-Léopold, plus tard au ministère de la Guerre. Son père désargenté et poursuivi pour escroquerie[13], Magritte travaille à partir de , et jusqu'en 1924, comme dessinateur, avec le peintre Victor Servranckx qu'il a connu à l'Académie, dans l'usine de papier peint Peters-Lacroix à Haren[alpha 4]. Le Magritte épouse Georgette Berger et en août le couple s'installe à Laeken.
En 1922, Magritte rencontre Marcel Lecomte et en Camille Goemans qui, avec E. L. T. Mesens, l’introduisent dans le milieu dada. Il doit alors à Lecomte, ou selon Louis Scutenaire à Mesens, sa plus grande émotion artistique : la découverte d’une reproduction du Chant d'amour de Giorgio De Chirico (1914)[alpha 5]. « Mes yeux ont vu la pensée pour la première fois », écrira-t-il en se souvenant de cette révélation.
En Magritte, abandonnant son emploi à l'usine de papiers peints Lacroix, séjourne brièvement à Paris à la recherche d'un nouveau travail. De retour à Bruxelles il s'installe à son compte, créant de 1924 à 1928 des projets pour des films, des théâtres, des sociétés automobiles, Alfa Romeo et Citroën, ou des entreprises, la Maison Norine, les Établissements Minet, le chocolatier Neuhaus, la Maison Vanderborght, Primevère, la lingerie Thila Naghel[14]. En , Magritte, par des aphorismes, et Mesens participent à la revue 391, dirigée par Francis Picabia et projettent de lancer, avec Goemans et Lecomte, une nouvelle revue dadaïste, Période, calquée sur celle de Picabia mais coulée dès avant sa naissance par un tract lancé par Paul Nougé, puis fonderont en la revue Œsophage (un seul numéro)[alpha 6].
Le rapprochement du groupe de Correspondance qui réunit en 1924 et 1925 Nougé, Goemans et Lecomte, avec Mesens et Magritte, leur confection d'un tract commun en septembre et contre Géo Norge et Jean Cocteau, auquel s'associe le musicien André Souris, leur participation commune en 1927 au dernier numéro de la revue Marie. Journal bimensuel pour la belle jeunesse, créée par Mesens en , marquent les débuts de la constitution du groupe surréaliste de Bruxelles, que rejoignent en juillet Louis Scutenaire et Irène Hamoir. Dès 1926, Magritte conclut un contrat avec Paul-Gustave van Hecke, mari de la créatrice de mode Norine et ami de Mesens, qui lui achète sa production et écrira en dans la revue Sélection un premier article consacré au peintre[15]. Il expose en , préfacé par Van Heck et Nougé, à la galerie Le Centaure, dans laquelle travaille Goemans, une cinquantaine de ses peintures dont Le Jockey perdu, l'une de ses premières toiles surréalistes, peinte en 1926. Il rencontre à cette occasion Scutenaire dont Goemans et Nougé ont peu auparavant fait la connaissance. Magritte illustre pour la maison Muller et Samuel ses catalogues de fourrures 1926-1927 et 1927-1928, ce dernier édité avec des textes de Nougé.
En , Magritte quitte la Belgique et séjourne au Perreux-sur-Marne (Val-de-Marne)[16] jusqu'en [alpha 7]. Il rencontre les surréalistes (André Breton, Paul Éluard, Max Ernst, Salvador Dalí), participe à leurs activités. À Paris il expose à la galerie qu'y a ouverte Goemans et à Bruxelles en à la galerie L'Époque, dirigée par Mesens, la préface du catalogue étant écrite par Nougé et contresignée par Goemans, Lecomte, Mesens, Scutenaire et Souris. Il publie en 1929, Le Sens propre, suite de cinq tracts reproduisant chacun l'un de ses tableaux avec un poème de Goemans, et Les Mots et les images dans La Révolution surréaliste. Durant l'été, il rend visite à Dalí à Cadaqués où il retrouve Éluard et Gala. André Breton préconisant l'adhésion au parti communiste et Nougé s'y opposant les rapports entre les surréalistes bruxellois et parisiens restent cependant difficiles, et René Magritte se brouille avec André Breton, au sujet d'un christ en pendentif que porte Georgette Magritte[17],[18].
La crise de 1929 arrivant en Europe, René Magritte doit retourner en Belgique en 1930, les différents contrats qui lui permettaient de vivre ayant été rompus. Il s'installe alors rue Essenghem à Jette[19] et présente à Bruxelles en 1931 une exposition organisée par Mesens, avec une préface de Nougé[20]. Il adhère l'année suivante au parti communiste belge et rencontre Paul Colinet. Entre 1931 et 1936, il participe à une petite entreprise de publicité[alpha 8], une activité alimentaire qu’il n'exerce certainement pas par vocation et qui s’est étendue sporadiquement entre 1918 et 1965.
Magritte expose en 1933 au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles et dessine en 1934 Le Viol pour la couverture de Qu'est-ce que le surréalisme ?, d'André Breton. Il réalise en 1936 sa première exposition à New York, à la galerie Julien Levy, fait la connaissance l'année suivante de Marcel Mariën et séjourne à Londres où il expose en 1938 à la London Gallery de Mesens. De février à , Magritte dirige avec Raoul Ubac la revue L'Invention collective (deux numéros). Cinq jours après l'invasion allemande de la Belgique, il quitte Bruxelles le avec Raoul et Agui Ubac, rencontrant à la gare Scutenaire et Irène Hamoir[alpha 9] (Georgette y demeurant près de sa sœur Léontine et surtout de Paul Colinet[21]). Le groupe rejoint Paris pour Carcassonne où vit le poète Joë Bousquet. Le peintre, arrivé le 23 mai, y séjourne trois mois. À son retour à Bruxelles en août, René Magritte, qui s'était épris en 1936[22] de l'artiste britannique Sheila Legge (créatrice en juillet 1937 d'une performance à Trafalgar Square lors de l'Exposition internationale du surréalisme de Londres), et Georgette Magritte, qui a entrepris une liaison avec Paul Colinet, se réconcilient[23].
De 1943 à 1945, Magritte utilise la technique des impressionnistes durant sa période du surréalisme « en plein soleil » ou « période Renoir ». Entre 1943 et 1947, paraissent les premiers livres qui lui sont consacrés : Les Images défendues de Nougé, Magritte de Mariën[alpha 10] et René Magritte de Scutenaire[alpha 11].
Sous la plume de Christian Dotremont, l'édition du 8- du journal Le Drapeau rouge annonce l'adhésion de Magritte au Parti communiste belge. Conscient de ne pouvoir en faire évoluer les positions et anticipant sur son exclusion, il le quitte rapidement[24]. Magritte expose pour la première fois à New York en 1947 à la galerie Hugo dirigée par Alexandre Iolas qui présente de nouveau ses peintures en mai 1948, dans sa nouvelle galerie en 1951 et 1952, à Milan en 1953. Les relations entre le peintre et le marchand, qui n'apprécie pour des raisons commerciales ni sa « période Renoir » ni sa « période vache » et lui commande plutôt des variations ou des répliques d'œuvres anciennes, se dégraderont souvent mais Iolas présentera ou organisera des expositions de ses œuvres jusqu'à la mort de Magritte [25].
En , Magritte peint en six semaines une quarantaine de tableaux et de gouaches aux tons criards (« période vache ») destinées, en un acte typiquement surréaliste, à dérouter les marchands parisiens et scandaliser le bon goût français. Elles sont exposées à la galerie du Faubourg et préfacées par Scutenaire (Les Pieds dans le plat)[26]. Irène Hamoir léguera bon nombre de ces œuvres au musée de Bruxelles.
De 1952 à 1956, Magritte dirige la revue La Carte d'après nature, présentée sous forme de carte postale. Il réalise en 1952 et 1953 Le Domaine enchanté, huit panneaux pour la décoration murale du casino de Knokke-le-Zoute ; en 1957, La Fée ignorante pour le palais des beaux-arts de Charleroi et, en 1961, Les Barricades mystérieuses pour le palais des congrès de Bruxelles[alpha 12]. Une première exposition rétrospective de son œuvre est organisée en 1954 par Mesens, au palais des beaux-arts de Bruxelles. Le succès de Magritte vient lentement grâce au marchand Iolas, à partir de 1957, et à l’Amérique. En , il part pour Ischia en Italie pour améliorer sa santé et passe par Rome, avant de se rendre en décembre pour la première fois aux États-Unis à l'occasion d'une exposition rétrospective au MoMA, présentée par la suite à Chicago, Berkeley et Pasadena[alpha 13].
En et , les Magritte passent, avec Scutenaire et Irène Hamoir, des vacances en Italie. Le , une nouvelle rétrospective ouvre au musée Boijmans Van Beuningen de Rotterdam.
En 2013-2014, le MoMA à New York organisa une exposition intitulée "Magritte: The Mystery of the Ordinary, 1926–1938"[27] en collaboration avec The Menil Collection and The Art Institute of Chicago.
Magritte meurt chez lui, au 97, rue des Mimosas à Schaerbeek[alpha 14], le 1967 en début d'après-midi[28], d’un cancer du pancréas[alpha 15] à soixante-huit ans. Il est inhumé dans le cimetière communal de Schaerbeek ; son épouse morte en 1986 repose à ses côtés. Depuis 2009, la sépulture est classée comme monument et site par la Région bruxelloise[29].
« Une caisse auprès de son berceau, la récupération d’un ballon de navigation échoué sur le toit de la maison familiale, la vision d’un artiste peintre peignant dans le cimetière[alpha 16] où il jouait avec une petite fille[alpha 17]… trois souvenirs d'enfance que l'artiste gardera toute sa vie », résume une biographie de Magritte[30].
Magritte met en évidence notre difficulté à faire coïncider la réalité du monde avec nos images mentales. Il a développé un véritable alphabet pictural en usant de motifs récurrents : la pomme, l’oiseau, l’homme au chapeau melon, les corps morcelés… Ses images sont souvent cachées derrière ou dans d’autres images, alliant deux niveaux de lecture possibles, le visible et l'invisible[31].
Ses peintures jouent fréquemment sur le décalage entre un objet et sa représentation. Par exemple, un de ses tableaux les plus célèbres est une image de pipe sous laquelle figure le texte : « Ceci n’est pas une pipe » (série La Trahison des images, 1928-1929). Il s’agit en fait de considérer l’objet comme une réalité concrète et non pas en fonction d’un terme à la fois abstrait et arbitraire. Pour expliquer ce qu’il a voulu représenter à travers cette œuvre, Magritte a déclaré : « La fameuse pipe, me l’a-t-on assez reprochée ! Et pourtant, pouvez-vous la bourrer ma pipe ? Non, n’est-ce pas, elle n’est qu’une représentation. Donc si j’avais écrit sous mon tableau « Ceci est une pipe », j’aurais menti ! »
La peinture de Magritte s’interroge sur sa propre nature, et sur l’action du peintre sur l’image. La peinture n’est jamais une représentation d’un objet réel, mais l’action de la pensée du peintre sur cet objet. Magritte réduisait la réalité à une pensée abstraite rendue en des formules que lui dictait son penchant pour le mystère : « Je veille, dans la mesure du possible, à ne faire que des peintures qui suscitent le mystère avec la précision et l’enchantement nécessaire à la vie des idées », déclara-t-il. Son mode de représentation, qui apparaît volontairement neutre, académique, voire scolaire, met en évidence un puissant travail de déconstruction des rapports que les choses entretiennent dans la réalité.
Parmi les objets qui contribuent à faire de ses toiles d'impénétrables énigmes, un objet apparaît de façon particulièrement récurrente : une sphère noire, lustrée, fendue en son milieu, qui apparaît dans de nombreuses œuvres, dans des dispositions et des tailles extrêmement différentes. Souvent qualifié de « grelot », dont il n'a pourtant pas la forme, il a été successivement interprété comme un œil noir, la représentation d'un sexe féminin, ou une simple forme géométrique. L'artiste, avec un humour dont ses toiles portent souvent la trace, laisse intact le mystère sur un objet qui concentre l'attention tout en résistant à l'interprétation.
Magritte excelle dans la représentation des images mentales. Pour Magritte, la réalité visible doit être approchée de façon objectale. Il possède un talent décoratif qui se manifeste dans l’agencement géométrique de la représentation. L’élément essentiel chez Magritte, c’est son dégoût inné de la peinture plastique, lyrique, picturale. Magritte souhaitait liquider tout ce qui était conventionnel. « L’art de la peinture ne peut vraiment se borner qu’à décrire une idée qui montre une certaine ressemblance avec le visible que nous offre le monde » déclara-t-il. Pour lui, la réalité ne doit certainement pas être approchée sous l’angle du symbole. Parmi les tableaux les plus représentatifs de cette idée, La Clairvoyance (1936), nous montre un peintre dont le modèle est un œuf posé sur une table. Sur la toile, le peintre dessine un oiseau aux ailes déployées.
Un autre tableau, La Reproduction interdite (1937), montre un homme de dos regardant un miroir, qui ne reflète pas le visage de l’homme, mais son dos. De la même manière, la peinture n’est pas un miroir de la réalité.
Peintre de la métaphysique et du surréel, Magritte a traité les évidences avec un humour corrosif, façon de saper le fondement des choses et l’esprit de sérieux. Il s’est glissé entre les choses et leur représentation, les images et les mots. Au lieu d’inventer des techniques, il a préféré aller au fond des choses, user de la peinture qui devient l’instrument d’une connaissance inséparable du mystère. « Magritte est un grand peintre, Magritte n'est pas un peintre », écrivait dès 1947 Scutenaire[32].
« Voici, je crois, une idée neuve pour tous : on demande parfois : « Que représente ce tableau? », un « intellectuel » se garderait de la poser, de crainte de n’être pas « au courant » ; cette question signifie une exacte réception de l’image, mais une interprétation de ce que l’on ressent, qui est inexacte. Ce que l’on ressent ou ce que l’on pense vraiment en regardant le tableau correspondrait à la question posée ainsi : « Qu’est-ce qui représente ce tableau, et c’est celui qui regarde, qui représente le tableau, ses sentiments et ses idées représentent le tableau. Nos idées et nos sentiments, fussent-ils extraordinaires, ne sauraient être exprimés ou représentés par la peinture, à moins qu’une convention permette une vague expression d’idées ou de sentiments : C’est à partir d’une image peinte que des idées ou des sentiments peuvent apparaître et rencontrer cette image. Une image peinte ne représente pas d’idées ou de sentiments, mais des sentiments ou des idées peuvent représenter une image peinte.
René Magritte[33] »
Le musée Magritte Museum est implanté dans un ancien bâtiment de style néoclassique datant de la fin du XVIIIe siècle, et faisant partie d’un ensemble architectural construit après l’incendie du palais du Coudenberg en 1731. Au cours des siècles, les propriétaires se sont succédé pour le transformer en hôtel, en bijouterie et enfin en musée.
La place Royale et les bâtiments qui l’entourent sont un témoignage historique de la Belgique sous l’Ancien Régime et de son indépendance. C’est sur cette place que se déroula la cérémonie d’intronisation du prince Léopold de Saxe-Cobourg, roi des Belges le , cinquante ans après sa construction. Le bâtiment se transformera alors en hôtel pour voyageurs pendant plus d’un siècle, avant d'être revendu à un bijoutier au début du XXe siècle.
En 1951, les façades et portiques bordant la place Royale seront reconnus pour leur intérêt architectural et historique et seront définitivement protégés de toute modification par arrêté de classement sur la liste du patrimoine de Belgique.
Les musées royaux des beaux-arts de Belgique investiront les lieux en 1962 et l’hôtel Altenloh sera transformé en musée. D’importants travaux de rénovation seront réalisés dans les années 1980 et l’intérieur du bâtiment sera entièrement reconstruit[34].
L’importance de la collection d’œuvres de René Magritte et la renommée internationale de celui-ci méritent un espace consacré à la communication de l’artiste et de son œuvre. En 2007, le projet d’un futur musée Magritte dans l’ancien hôtel Altenloh voit le jour; les travaux commencent l’année qui suit pour s’achever en 2009[34].
La collection d’œuvres de René Magritte qui lui a valu un musée était détenue par les musées royaux des beaux-arts de Belgique. Cette collection est la plus grande au monde et couvre toutes les différentes périodes de l’artiste ; de plus, elle est très diversifiée, par ses peintures, dessins, gouaches, affiches, travaux publicitaires, lettres, photographies, sculptures, films et autres documents.
L’essentiel de la collection provient de dons de la part des personnes suivantes : Georgette Magritte, Irène Scutenaire-Hamoir, Mme Germaine Kieckens, la première épouse du célèbre dessinateur Hergé, Maurice Rapin et Mirabelle Dors, la fondation Magritte, l’ULB, ainsi que de prêts privés.
Dans le legs d’Irène Scutenaire-Hamoir au musée, figurent de nombreuses œuvres du peintre : plus d’une vingtaine de peintures, une vingtaine de gouaches, une quarantaine de dessins, etc. Ces œuvres étaient accrochées aux murs de leur maison située rue de la Luzerne, notamment :
La collection du musée Magritte comporte également plus de 300 tirages photos qui retracent la vie de Magritte : sa famille, ses années de formation, ses amis et son épouse Georgette. La photographie était essentielle à son art et ces clichés lui ont servi pour la réalisation de ses peintures.
Depuis 2010, une politique d’échange est mise en place avec la Fondation de Menil à Houston (Texas, États-Unis) et certaines œuvres détenues par le Museum of Modern Art de New York (MoMA) ont été prêtées pour une durée de quatre mois. En , une série d’œuvres prêtées par un collectionneur privé d’origine anglaise est exposée[34].
Un musée René Magritte est également installé, depuis 1999, dans la maison qu'il a habitée avec son épouse Georgette de 1930 à 1954, au 135, rue Esseghem, à Jette. L'artiste y a peint la moitié de son œuvre, dont notamment la première version de L'Empire des lumières, en 1949. Ce musée présente en particulier le salon meublé dans son état d'origine, l'atelier — il peignait dans sa salle à manger — et le studio Dongo dans le fond de son jardin, où l'artiste réalisait ses travaux publicitaires. Il s'est beaucoup inspiré de l'intérieur de cet appartement dans ses peintures (fenêtre à guillotine, cheminée, poignées de porte, escalier, volière, etc.). À l'étage, le musée présente une exposition biographique : il y a quelques œuvres originales (des dessins, des gouaches, des aquarelles), une collection d'objets personnels et des documents originaux (revues, lettres, tracts surréalistes). Une exposition intitulée « Les Magrittes disparus » présente également une trentaine d’œuvres détruites qui ont été reconstituées (même style et même format) sur base des archives fournies par David Sylvester. Le vol de la peinture L'Olympia (1948) y a eu lieu en 2009 ; le tableau a aujourd'hui été restitué.
La maison Magritte où l’artiste a grandi est située à Châtelet et est accessible au public. Cette maison, souvent représentée dans ses œuvres, a été pour Magritte une source importante d'inspiration de par les éléments décoratifs qu'elle contient et l’histoire tragique du suicide de sa mère, auquel certaines de ses peintures font allusion.
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Le logo d'Apple Records, la compagnie de disque des Beatles, est créé par le graphiste britannique Gene Mahon[42]. La pomme verte Granny Smith est inspirée du tableau de Magritte Le Jeu de Mourre acheté par Paul McCartney[43].
La chanson Rene and Georgette Magritte with Their Dog after the War du chanteur américain Paul Simon apparaît sur son album Hearts and Bones publié en 1983[44].
Nadine Monfils a publié une série de romans policiers, Les folles enquêtes de Magritte et Georgette, dont le peintre et son épouse sont les détectives amateurs : 1. Nom d'une pipe ! 2. À Knokke-le-Zoute, 3. Les fantômes de Bruges, 4. Liège en eaux troubles (2021-2022).
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