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limites à ne pas dépasser si l'humanité veut survivre dans un écosystème sûr De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Les limites planétaires sont les seuils que l'humanité ne devrait pas dépasser pour ne pas compromettre les conditions favorables dans lesquelles elle a pu se développer et pour pouvoir durablement vivre dans un écosystème sûr, c’est-à-dire en évitant les modifications brutales et difficilement prévisibles de l'environnement planétaire.
Ce concept a été proposé par une équipe internationale de vingt-six chercheurs et publié en 2009. Il a depuis été mis à jour par des publications régulières.
Il consiste en neuf limites planétaires, dont huit sont chiffrées par les chercheurs et six sont déjà franchies. Neuf processus sont retenus comme limites, car ensemble ils remettent en cause la stabilité de la biosphère : le changement climatique, l’érosion de la biodiversité, la perturbation des cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore, les changements d'utilisation des sols, l’acidification des océans, l’utilisation mondiale de l’eau, l’appauvrissement de la couche d'ozone, l'introduction d’entités nouvelles dans l’environnement (pollution chimique) et l'augmentation des aérosols dans l’atmosphère.
Certains auteurs préfèrent utiliser l'expression de frontières planétaires, qui constitue selon eux une traduction correcte de l'anglais boundaries[6]. Dans un contexte de vulgarisation, ils expliquent notamment qu'une frontière peut être franchie, pas une limite.
Les limites planétaires sont des seuils à l'échelle mondiale à ne pas dépasser pour que l’humanité puisse vivre dans un écosystème sûr, c’est-à-dire évitant les modifications brutales, non-linéaires, potentiellement catastrophiques et difficilement prévisibles de l’environnement. Le concept de limites planétaires est défini en 2009 par une équipe internationale de 26 chercheurs, menés par Johan Rockström du Stockholm Resilience Centre (en) et Will Steffen de l'université nationale australienne, dans un article publié dans les revues Nature[1] et Ecology and Society (en)[7]. Parmi ces chercheurs figurent notamment le climatologue James E. Hansen (directeur du Goddard Institute for Space Studies de la NASA, pionnier des recherches sur le changement climatique), Paul Crutzen (prix Nobel de chimie 1995), le climatologue allemand Hans Joachim Schellnhuber (fondateur du Potsdam-Institut für Klimafolgenforschung et conseiller du gouvernement allemand et de la Commission européenne sur le réchauffement climatique) et le géographe belge Éric Lambin.
Depuis, l'estimation des limites planétaires a été affinée par plusieurs études scientifiques[2],[3].
Neuf limites planétaires sont définies. Pour chaque limite, un indicateur et une valeur seuil sont estimés en quantité émise ou extraite de l’environnement[8].
Six de ces limites sont en 2022 considérées comme dépassées :
Deux limites planétaires ne sont pas franchies à l'échelle de la planète :
Une limite n'a pas été quantifiée à l'échelle de la planète :
Les auteurs insistent sur les interactions entre ces limites (synergies possibles). Le concept de « limites planétaires » permet de définir le planetary playing field (« terrain de jeu planétaire ») dans les limites duquel l'humanité pourrait vivre en sécurité (du point de vue de la durabilité des ressources naturelles et des services écosystémiques).
Dimension | Mesure | Limite planétaire | Valeur actuelle | Limite dépassée ? | |
---|---|---|---|---|---|
Réchauffement climatique | Concentration de CO2 dans l'atmosphère (ppm) ou forçage radiatif (W/m2) | max. 350 ppm
max. +1,0 W/m2 |
415 ppm[13]
+3,22 W/m2[14] |
oui | |
Acidification des océans | Taux de saturation moyenne globale de l’aragonite dans les eaux de surface (noté Ωa[15]) | min. 2,75
(80 % du niveau pré-industriel) |
3,03
(en 2000, 84 % du niveau pré-industriel)[16] |
non | |
Diminution de l'ozone stratosphérique | Concentration de l'ozone stratosphérique (unité Dobson) | min. 275 DU | 220–450 DU[17] | non (régional et dans le temps) | |
Charge en aérosols atmosphériques | Épaisseur optique d'aérosols | pas de limite globale définie
Asie du Sud : max. 0,25 |
-
Asie du Sud : 0,3–0,4[18] |
non quantifié
(dépassé à l'échelle régionale) | |
Cycles biogéochimiques | Cycle du phosphore | Mondial : entrée du phosphore dans les océans (téragrammes par an)
Régional: Entrée du phosphore dans les systèmes aquatiques à eau douce (téragrammes par an) |
Mondial : max. 11 Tg/an
Régional: max. 6,2 Tg/an |
Mondial : 22 Tg/an[19]
Régional: 14 Tg/an[20] |
oui |
Cycle de l'azote | Fixation biologique industrielle et intentionnelle de l'azote (téragrammes par an) | max. 62 Tg/an | 150–180 Tg/an[21] | oui | |
Consommation d'eau douce | Consommation globale d'eau de surface et de nappe phréatique (kilomètres cubes par an)[2] | max. 4 000 km3/an | 2 600 km3/an[2] | non[2] | |
Utilisation d'eau verte[5],[12] | oui[5] | ||||
Changement d'usage des sols | Part de la forêt originelle | min. 75 % | 62 %[2] | oui | |
Intégrité de la biosphère | Diversité génétique | Taux d'extinction : Nombre d'extinctions par million d'espèce et par an (E/MEA)[22] | max. 10 E/MEA[2] | 100–1 000 E/MEA[2] | oui |
Diversité fonctionnelle | Index de biodiversité | min. 90 % | Non quantifié à l'échelle globale
84 % pour l'Afrique australe[2] |
non quantifié
(dépassé à l'échelle régionale) | |
Introduction d'entités nouvelles dans l'environnement | Concentration de substances toxiques, de plastiques, de perturbateurs endocriniens, d'éléments-traces métalliques et contamination radioactive | Une étude de 2022 quantifie cette limite et estime qu'elle est dépassée[10],[3]. | oui[10],[3] |
En 2009, une équipe internationale de vingt-six chercheurs, menés par Johan Rockström du Stockholm Resilience Centre (en) et Will Steffen de l'université nationale australienne, publie un article dans les revues Nature[1] et Ecology and Society (en)[7], dans lequel elle identifie neuf planetary boundaries (« limites planétaires ») à ne pas dépasser si l’humanité veut pouvoir se développer dans un écosystème sûr, c’est-à-dire évitant les modifications brutales, non-linéaires, potentiellement catastrophiques et difficilement prévisibles de l’environnement. Parmi ces chercheurs figurent notamment le climatologue James E. Hansen (directeur du Goddard Institute for Space Studies de la NASA, pionnier des recherches sur le changement climatique), Paul Crutzen (prix Nobel de chimie 1995), le climatologue allemand Hans Joachim Schellnhuber (fondateur du Potsdam-Institut für Klimafolgenforschung et conseiller du gouvernement allemand et de la Commission européenne sur le réchauffement climatique) et le géographe belge Éric Lambin.
Les auteurs considèrent alors que les seuils sont dépassés pour trois des sept limites pour lesquelles ils proposent des valeurs limites, en matière de volume émis ou extrait de l’environnement[8] :
Quatre limites planétaires n’ont pas encore été franchies à l'époque[8] :
Deux limites ne peuvent alors pas encore être quantifiées, par manque de données[8] :
Les auteurs insistent sur les interactions entre ces limites (synergies possibles). Le concept de « limites planétaires » permet de définir le planetary playing field (« terrain de jeu planétaire ») dans les limites duquel l'humanité pourrait vivre en sécurité (du point de vue de la durabilité des ressources naturelles et des services écosystémiques.
En , les auteurs ont publié, dans Science, une actualisation de leurs travaux, qui introduit une hiérarchie entre les neuf limites en définissant la notion de « frontières planétaires centrales » (changement climatique et intégrité de la biosphère) et conclut que quatre limites planétaires sont alors dépassées, ou sur le point de l’être[2],[23],[24] :
L’analyse de la limite des modifications des usages des sols a été recentrée sur les processus de régulation naturelle du climat, via les échanges d’énergie, d’eau et de CO2 entre les sols et l’atmosphère. Les chercheurs s’intéressent plus particulièrement au rôle des forêts dans cette régulation et constatent que, pour continuer à profiter de leurs bénéfices, il faudrait accroître leurs superficies, notamment celles des forêts tropicales et boréales.
Trois autres limites planétaires n’étaient pas encore franchies en 2015 :
La limite « pollution chimique », non quantifié dans l'article de 2009, est précisée. Elle correspond à la diffusion « d’entités nouvelles » dans l’environnement (molécules de synthèse, nanoparticules, radioisotopes…), qui peut avoir des conséquences biologiques et/ou géophysiques nocives. Plus de 100 000 substances entrant dans cette catégorie sont aujourd’hui commercialisées dans le monde, dont les impacts écotoxicologiques et environnementaux sont largement méconnus et probablement très complexes. Les chercheurs s’estiment donc incapables de fixer une limite planétaire pour ces substances, mais invitent à mieux les surveiller et, par précaution, à limiter leur usage autant que possible.
Les auteurs insistent sur la dimension systémique des impacts causés par le dépassement des limites planétaires. Ils insistent en particulier sur les risques liés au réchauffement climatique et à l’érosion de la biodiversité, deux limites fondamentales qui pourraient, si elles sont dépassées de manière substantielle et persistante, « entraîner le système terrestre vers un nouvel état » potentiellement destructeur, sinon pour la planète, au moins pour ses habitants. Ils rappellent aussi que l’interaction des limites entre elles ne doit pas être sous-estimée, de même que l’inertie des systèmes naturels. Par exemple, même si les émissions mondiales de gaz à effet de serre s’interrompaient demain, la concentration de ces gaz déjà émis dans l’atmosphère pourrait suffire à perturber durablement le climat.
Dans les documents récents, certaines limites présentent des sous-catégories. Le nombre des limites planétaires est ainsi ramené à neuf, bien que les graphiques en présentent davantage[25],[11].
Selon la Commission internationale de stratigraphie (ICS), membre de l'Union internationale des sciences géologiques (IUGS), les nouvelles entités (microplastiques, métaux lourds et radionucléides issus des tests d'armes thermonucléaires) pourraient accréditer la thèse de l'Anthropocène[26].
Le Secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon entérine le concept de limites planétaires le , tout en présentant les points clés du rapport de son « Groupe de haut niveau sur la durabilité mondiale » à une session plénière informelle de l'Assemblée générale des Nations Unies[27],[28].
Il déclare : « La vision du Groupe de haut niveau est d'éradiquer la pauvreté et de réduire l'inégalité, de rendre la croissance inclusive et la production et la consommation plus durables, tout en combattant le changement climatique et en respectant une série d'autres limites planétaires »[29]. Le concept est incorporé dans la version initiale des conclusions de la Conférence des Nations unies sur le développement durable à convoquer à Rio de Janeiro les 20–. L'utilisation du concept est ensuite retirée du texte de la conférence, en partie à cause de craintes de quelques pays pauvres que son adoption puisse mener à la mise à l'écart de la réduction de la pauvreté et du développement économique, mais aussi, selon des observateurs, « parce que l'idée est tout simplement trop nouvelle pour être adoptée officiellement et [a] besoin d'être soumise à la contestation, mûrie et retravaillée pour tester sa robustesse avant d'avoir une chance d'être acceptée internationalement aux négociations des Nations Unies »[30].
Selon un rapport du Bureau des Nations unies pour la réduction des risques de catastrophe (UNDRR (en)), l’humanité entre dans « une spirale d’autodestruction », en raison d’une « perception erronée des risques guidée par « l'optimisme, la sous-estimation et l'invincibilité », conduisant à des décisions politiques, financières et de développement qui exacerbent les vulnérabilités et mettent des vies en danger »[31]. Le monde est sur le point d'entrer dans une « polycrise », où les crises mondiales qui gagnent en ampleur et en vitesse « semblent également se synchroniser ». Ainsi, le changement climatique, la perte de biodiversité et les nouvelles entités alimentent les crises humaines que sont les conflits pour les territoires et les ressources, les déplacements de population et les catastrophes naturelles[32].
Cette approche est au cœur des démarches à l'origine du septième programme d’action pour l’environnement (2013-2020) de l’Union européenne : « Bien vivre, dans les limites de notre planète »[33].
En 2019, dans sa deuxième partie, le rapport L'environnement en France, publié par le Commissariat général au développement durable (CGDD) a repris le concept de neuf limites planétaires. Le rapport précise que la notion d'empreinte inclut les effets différés hors du territoire, par exemple en France une « déforestation importée » liée aux importations de matières premières agricoles et forestières s’élevant à 14,8 millions d'hectares en 2016[11].
Le 21 février 2023, les Jeunes vert-e-s déposent une initiative populaire fédérale pour demander d'inscrire dans la constitution l'obligation pour l'économie de respecter les limites planétaires, soutenue par les Verts, le PS et la Jeunesse socialiste[35],[36].
En 2012, l'économiste Kate Raworth propose d'ajouter à ces limites naturelles planétaires, extérieures (« plafond »), des limites intérieures (« plancher »), correspondant aux besoins humains essentiels pour le bien-vivre. Elle liste onze nécessités ou dimensions de vie distinctes, formant le « plancher social ». Les limites planétaires et les dimensions de vie peuvent être représentées en un anneau et former une grille d'analyse (utilisée par la France en 2019) pour étudier les interactions entre état de l'environnement et besoins humains.
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