Abbaye de Saint-Winoc
abbaye française De Wikipédia, l'encyclopédie libre
abbaye française De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'Abbaye de Saint-Winoc est un ancien établissement religieux situé à Bergues (Nord), en Flandre maritime, dans l'actuel arrondissement de Dunkerque.
Abbaye de Saint-Winoc | |
Les tours carrée et octogonale de l'abbaye de Saint-Winoc | |
Nom local | Abbaye Saint-Winoc |
---|---|
Destination initiale | Abbaye |
Protection | Inscrit MH (1926, 1946) |
Coordonnées | 50° 58′ 09″ nord, 2° 26′ 06″ est |
Pays | France |
Région | Hauts-de-France |
Commune | Bergues |
modifier |
En fait, elle est d'abord un monastère fondé au VIIe siècle par saint Winoc sur des terres données à proximité des bois de Wormhout par Hérémard[1]. La première implantation ayant été détruite à la suite des raids vikings en France, l'abbaye a été refondée vers 900, quand une église a été construite dans la partie basse de Bergues sous l'impulsion de Baudouin II de Flandre[2]. Ce dernier y amena les reliques de saint Winoc, y plaça des chanoines et dota le chapitre de biens et de privilèges.
L'abbaye de Saint-Winoc, proprement dite, bâtie plus tard au XIe siècle, est attachée à l'ordre de Saint-Benoît et au diocèse d'Ypres. Monastère réputé pour ses possessions et sa richesse, l'abbaye disparaît avec la révolution française, et seuls n'en subsistèrent alors que quelques éléments.
Winociberga, Winoci mons.
Winoc serait le fils de Hoël III et le frère d'Urielle de Trémeur. Selon d'autres légendes, il serait le neveu ou le fils de Saint Judicaël, roi de Domnonée en Bretagne et il serait né dans le pays de Dol.
D'après d'autres sources, Winoc (ou Winox), fils de roi breton (c'est-à-dire de Grande-Bretagne selon François-Joseph Grille), vient avec trois amis anglais à l'abbaye de Saint-Bertin à la fin du VIIe siècle. Saint Bertin les aurait envoyé évangéliser les cantons maritimes[3]. Il se serait retiré entre 665 et 675 avec quelques compagnons sur le « Groenberg (Le mont vert) », ancien nom de Bergues, une colline isolée en bordure des anciens marais côtiers[3].
Héremard (ou Heremare), seigneur de Wormhout, serait allé voir saint Bertin pour donner des possessions en . Il y exprima son souhait d'élever sur ses domaines un monastère et un hospice pour les pauvres, malades et pèlerins. Il obtint de saint Bertin que Winoc vienne diriger l'établissement de Wormhout. Winoc en devint le 1er abbé et y décède en 717[4],[5].
Vers 1022–1028, le monastère de Wormhout ayant été ruiné par les Normands, le comte Baudouin IV le Barbu érige l'abbaye Saint-Winoc à Bergues . Il fait venir des bénédictins de Saint-Omer, leur donne les biens des chanoines de l'église Saint-Martin et Saint-Winoc créée par Baudouin II, chassés en raison de leurs mœurs dissolues, le village de Wormhout et y fait déposer les ossements du saint ramenés à Bergues vers 902 ou 910. Il place le moine Roderic de l'abbaye de Saint-Vaast[6] (ou de l'abbaye de Saint-Bertin, ce qui parait plus vraisemblable du fait des liens étroits entre l'abbaye de Saint-Winoc et celle de Saint-Bertin, et du lieu où se retira Roderic ensuite[7]) à la tête de l'abbaye. Roderic reste sept ans puis se retire à Saint-Bertin, il est remplacé par Germain, autre moine de Sithiu[6]. La flèche de l'église de l'abbaye fut érigée en 1031[7].
En 1038, sont déposés dans l'abbaye les corps de deux saints anglais, Saint Oswald et Sainte Itisberghe, ramenés d'Angleterre par Balgar, moine de Saint-Winoc[6]. En 1058, y est également déposé le corps de Sainte Lévinne[8].
L'abbaye de Saint-Winoc garda tout au long de son histoire des liens privilégiés avec l'abbaye de Saint-Bertin. Jusqu'à Rumoald, abbé de 1041-1070, l'abbé fut nommé par l'abbé de Saint-Bertin. À la mort de Rumoald, les moines de Saint-Winoc voulurent élire leur supérieur. Cette situation donna lieu à nombre de discussions, intrigues. Après l'intervention des autorités civiles et ecclésiastiques, Ermenger fut nommé abbé[9]. Lors de leur avènement, les évêques de Thérouanne prirent l'habitude de rendre une visite solennelle à l'abbaye pour marquer la filiation entre elle et celle de Saint-Bertin[10]. Les abbés de Saint-Winoc gardèrent la tradition de se faire investir à Saint-Bertin[11].
L'abbaye pouvait se développer, favorisée par les comtes de Flandre successifs : en 1067, Baudouin V de Flandre dit Baudouin de Lille, présent dans l'abbaye lui accorda par une charte rédigée en latin plusieurs dîmes des environs (voir ci-dessous), une partie de la dîme de Zuydcoote[12] (l'abbaye en reçut la totalité en 1121 de Charles Ier de Flandre[12]), des terres et d'autres biens (moulin, pêcherie), ainsi que le droit de justice et l'affranchissement de taxes[8]. Ces donations valurent à l'abbaye de devoir régler avec la ville et la châtellenie de Bergues des contestations relatives à leurs droits respectifs[13]. Plus tard, le comte Thierry d'Alsace et sa femme Sibylle d'Anjou dotèrent également l'abbaye. Leur fils Philippe d'Alsace confirmera tous ses privilèges à Bergues en 1183[14].
L'abbaye de Bergues va ainsi petit à petit étendre ses possessions sur tous les villages environnants, par donation des puissants, achat, contestations, etc.
Au XIe siècle, vers 1070, Bertolf, comte de Ghistelles (Gistel), veuf de sainte Godelina, qu'il avait tourmentée pendant leur union, parent de Baudouin de Mons (Baudouin VI de Flandre), se remaria. Il eut une fille, née aveugle. La tradition relate que l'enfant fut guérie par l'intercession de sainte Godelina. Après ce miracle, Bertolf se repentit et s'en alla à Rome pour obtenir l'absolution de sa faute. Il partit ensuite en pèlerinage en terre sainte et se fit moine à l'Abbaye de Saint-Winoc de Bergues où il mourut[9].
En 1083, un incendie déclenché par des tisserands ruine l'abbaye et la ville de Bergues. L'abbaye sera réédifiée en 1106 avec le secours de celle de Saint-Bertin, du légat du Pape Bruno et l'aide de Clémence de Bourgogne, femme de Robert II de Flandre[15].
Charles Ier de Flandre dit Charles Le Bon séjourna quelques jours dans l'abbaye, qui vécut à cette époque un nouvel incendie, en 1125[16] (ou 1121 à la suite des dissensions internes à l'abbaye que l'abbé Hermès (voir ci-dessous) avait tenté de réformer[17]). Auparavant par un acte dressé à Cassel en 1121, en présence de Thémard châtelain de Bourbourg, de Walter son fils, et de Friolphe ou Froulfus, châtelain de Bergues, Charles, avoué (protecteur) de l'abbaye, avait confirmé celle-ci dans tous ses biens et privilèges, et il l'aida à se rétablir en punissant les membres qui avaient oublié leurs devoirs[15],[17].
En 1138, l'abbé Alger put mener à bien la rénovation de l'église, après l'incendie de 1125, et célébrer cet évènement par une grande cérémonie en présence des évêques de Thérouanne, Arras, Noyon, Tournai, du comte de Flandre et de plusieurs abbés des environs (abbé de Saint-Bertin, de Cassel, Furnes, Watten)[15].
En 1196, le pape Célestin III, à la demande de Philippe, abbé de Bergues confirme au monastère plusieurs privilèges dont la possession de l'autel de Wormhout[18] et en 1201, l'abbaye se voit attribuer la menue dîme de la paroisse de Wormhout[19].
En 1197, l'abbé Alard et les religieux de Fémi (? à Ypres ou près d'Ypres?), cèdent à l'abbaye de Bergues moyennant un cens annuel de 6 deniers tout ce qu'ils possédaient à Téteghem[20]. À la même époque, l'abbaye récupère également la dîme de Hoymille[21]. En 1199, Lambert évêque de Thérouanne confirme à l'abbaye de Bergues la possession de l'hospice Saint Gohard d'Ernteka (Arnèke) où étaient reçus les passants pauvres[22].
Louis II de Flandre, dit Louis de Male, âgé de 17 ans, se fiança dans l'Abbaye, le , avec Isabelle d'Angleterre, plus ou moins contre son gré, il épousera la même année Marguerite de Brabant[23].
L'abbaye de Saint-Bertin et l'abbaye de Saint-Winoc ont soutenu les prétentions de l'antipape Clément VII. Ce dernier a été le premier des papes d’Avignon du Grand schisme d'Occident. En 1383, les français mettent la ville à sac dans le cadre de la croisade d'Henri le Despenser contre l'antipape : la ville prise d'abord par les Anglais arrivés en Flandre est ravagée par les Français à la suite du repli anglais, l'abbaye n'est pas épargnée, notamment la bibliothèque qui fut incendiée[23]. Néanmoins, elle ne fut pas entièrement détruite et par précaution, les reliques avaient été transportées à l'abbaye Saint-Bertin[24].
Le duc de Bourgogne Philippe II de Bourgogne, dit Philippe le Hardi, comte de Flandre par son mariage avec Marguerite III de Flandre, fille et héritière de Louis de Male, fait restaurer l'abbaye de même que la ville dans les années suivantes. La ville et l'abbaye de Saint-Winoc favorisées par le duc et ses successeurs purent se développer[11].
En 1554, l'abbé de Saint-Winoc est présent à la réception dans la cathédrale de Saint-Omer des chanoines fugitifs de Thérouanne rasée sur ordre de Charles-Quint en 1553. De par la disparition de l'évêché de Thérouanne à cette même date, Bergues est rattachée à l'évêché d'Ypres[25].
Le , Bergues subit le passage du Maréchal de Thermes (Paul de La Barthe de Thermes) à la tête des troupes françaises : la France a repris Calais en 1558 aux Anglais, alliés de Charles Quint, et depuis cette base, le Maréchal mène une expédition en Flandres : il prend Dunkerque, puis après un siège de deux jours, Bergues. Comme partout lors de cette équipée, les Français, pillent et ravagent, la ville est incendiée et l'abbaye de Saint-Winoc n'est pas épargnée[26]. Selon Henri Piers, elle ne retrouva jamais sa splendeur d'avant ce désastre[27].
À l'époque du développement du protestantisme, des hérétiques pillèrent l'abbaye le [28] et de nouveau en 1578[29]. À l'époque de ces événements, l'abbé se réfugia auprès de l'infant Juan d'Autriche, tandis que les religieux partirent pour l'abbaye de Saint-Bertin emportant avec eux la châsse de Saint-Winoc, ramenée à Bergues ultérieurement[29]. Philippe II d'Espagne décide alors d'installer un poste militaire dans l'abbaye pour la protéger, il y reste jusqu'en 1590[29].
Le , l'abbaye fut visitée par Isabelle-Claire-Eugénie d'Autriche, gouverneure des Pays-Bas, dans le cadre d'une tournée d'inspection en Flandre et semble-t-il d'un pèlerinage à l'abbaye des Dunes. Isabelle d'Autriche souhaitait visiter les reliques de Saint Winoc. Ayant logé à Dunkerque le , elle vint à l'abbaye avec une suite nombreuse. Elle fut reçue par l'abbé Charles II d'Argenteau qui venait d'être installé le 1er mai par l'évêque d'Ypres, Antoine de Haynin[30].
Louis XIV accordera de nombreux privilèges à l'abbaye en 1678[31].
Le , Bergues reçut en grande pompe un membre de la famille royale Louis-Philippe d'Orléans, duc de Chartres, accompagné de toute une suite, venant d'Ypres et se rendant à Dunkerque. L'équipage passa la nuit à l'abbaye de Saint Winoc[32].
Est également signalée la visite le de l'intendant des Flandres, représentant du Roi, avec son épouse. Ils passèrent la nuit à Saint-Winoc. comme à chaque passage de notabilité, la ville était parée pour l'occasion[32].
Le , l'Assemblée Nationale décrète la vente des biens des couvents et ordonne le recensement de leurs biens et propriétés, les conseillers municipaux furent chargés de cette action[33].
La châsse de Saint-Winoc composée en partie d'or et d'argent, à la suite de l'embellissement donné par Alger, 10e abbé, fut brisée et envoyée à la monnaie pour en récupérer ce qui pouvait être réutilisé pour les finances du pays[34].
L'abbaye sera rasée à la suite de la Révolution de 1789. L'inventaire des biens réalisé à la demande des révolutionnaires montra toute sa richesse : tableaux de peintres , une bibliothèque immense dont le catalogue faisait 480 pages, de nombreux objets en or et argent (détails dans Louis de Baecker[35] et voir ci-dessous la section Patrimoine et biens). Lors de l'inventaire, l'abbaye comptait 27 religieux. Elle fut démolie le [35]. Selon Henri Piers, cette dernière date est celle à laquelle elle fut abandonnée, sa destruction intervenant en 1793, deux tours étant conservées pour servir de point de repère aux bateaux en mer, après qu'elle fut vendue comme bien national[27].
L'abbaye était située sur la rive droite du canal de la Colme.
Les vestiges de l'abbaye Saint-Winoc font l'objet d'une inscription au titre des Monuments historiques depuis 1926, confirmée en 1946[36]. Il en demeure les deux tours datées des XIIe et XIVe siècles pour la grosse tour, la tour polygonale ayant été reconstruite après son écroulement en 1812[37].
La liste des abbés de Saint-Winoc provient du croisement des données de l'ouvrage de Louis de Baecker[43] et du Tome V de Gallia Christiana[44].
Seamless Wikipedia browsing. On steroids.
Every time you click a link to Wikipedia, Wiktionary or Wikiquote in your browser's search results, it will show the modern Wikiwand interface.
Wikiwand extension is a five stars, simple, with minimum permission required to keep your browsing private, safe and transparent.