Établissements pénitentiaires de Belle-Île-en-Mer
ancien bagne français De Wikipédia, l'encyclopédie libre
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Les établissements pénitentiaires de Belle-Île-en-Mer constituent un ancien bagne situé au Palais sur l'île de Belle-Île-en-Mer (Morbihan), en France.
Colonie pénitentiaire de Belle-Île-en-Mer | |||||
Carte postale de la colonie pénitentiaire Haute-Boulogne de Belle-Ile - Le salut au drapeau. | |||||
Localisation | |||||
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Pays | France | ||||
Région | Bretagne | ||||
Département | Morbihan | ||||
Localité | Le Palais | ||||
Coordonnées | 47° 21′ 09″ nord, 3° 09′ 22″ ouest | ||||
Géolocalisation sur la carte : Belle-Île-en-Mer
Géolocalisation sur la carte : Morbihan
Géolocalisation sur la carte : Bretagne (région administrative)
Géolocalisation sur la carte : France
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Architecture et patrimoine | |||||
Construction | |||||
Installations | |||||
Type | Colonie pénitentiaire, puis Institution publique d’éducation surveillée | ||||
Fonctionnement | |||||
Date d'ouverture | |||||
Date de fermeture | |||||
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À la fin du mois de juin 1848, des baraquements sont créés à Haute-Boulogne situé sur le glacis de la citadelle à Belle-Île-en-Mer qui deviennent , dès le de la même année, par décret du ministre de l'Intérieur, le dépôt de Belle-Île-en-Mer. Il se transforme en colonie pénitentiaire à partir de 1880, en Maison d'Éducation Surveillée en 1927 puis en une institution publique d’éducation surveillée (IPES) après 1945[1]. Le ministère de la Justice acquiert, en 1902, le domaine de Bruté[2] qui devient, en 1977, après la fermeture, un centre de colonie de vacances et d'accueil de classes vertes[3].
L'histoire du lieu commence en 1802, lorsque Napoléon décide d'élever des fortifications sur l'île. Elles sont d'abord construites par le génie militaire, puis une compagnie disciplinaire. Les guerres contraignent l’Empereur à les retirer, et à partir de 1808, les travaux sont réalisés par l'envoi régulier de bagnards[4],[5]. Les travaux continuent d'être effectués par des bagnards jusqu'en 1848, avant leur achèvement[5].
Le site de Haute-Boulogne devient une prison à partir de l'été 1848, pendant lequel sont construits par le génie militaire les premiers baraquements prêts à accueillir les insurgés de juin[6],[5]. Au fil des années, plusieurs prisonniers politiques célèbres, au premier rang desquels on trouve Armand Barbès ou Auguste Blanqui, y sont enfermés avec d'autres moins connus venus de toute la France[5]. Après une première année d'un régime d'emprisonnement libéral, des directeurs à poigne sont nommés et instaurent un règlement sévère, afin de soumettre les détenus. Cette prison est vidée par les grâces successives et ferme en 1858. En 1866, elle est remplacée par un bagne[5]. Des soldats prussiens de la guerre de 1870, au nombre de 600, y sont également détenus[7],[4]. Enfin, en 1871, une fois ceux-ci libérés, ce sont 2 000 communards qui y sont internés, les derniers partant en 1879[5].
Avec l'avènement de la Troisième République, le gouvernement décide de lancer un programme national contre la délinquance juvénile à travers la création sur l'ensemble du territoire de 35 « colonies pénitentiaires agricoles et maritimes ». Ayant fermé en 1880 plusieurs colonies pénitentiaires privées administrées par des congrégations non autorisées (la Grande-Trappe dans l'Orne, Beaurecueil dans les Bouches-du-Rhône et Fontgombault dans l'Indre), le Gouvernement se trouve à répartir 620 jeunes détenus sur des colonies existantes et à ouvrir, pour loger l'excédent, une nouvelle colonie à Belle-Île[8].
La prison de Belle-île est ainsi convertie par décision ministérielle du pour ses bâtiments de Haute-Boulogne[4]. En 1881, l'état loue, puis acquiert, le domaine agricole de Bruté, comprenant l'habitation du Souverain[8].
La colonie reçoit dans l'écrasante majorité des cas des jeunes détenus acquittés comme ayant agi sans discernement mais non remis à leurs parents et, très rarement, des jeunes condamnés à un emprisonnement de six mois à deux ans. Les jeunes détenus y sont âgés de 12 à 21 ans. Durant les premières décennies d'existence de l'institution, on trouve des enfants qui peuvent être âgés de 8 à 12 ans[9].
Dans son ouvrage Le bataillon des "nuisibles" paru en 2022[10], l'historien Julien Hillion décrit le quotidien de la colonie pénitentiaire à partir de milliers de sources conservées dans les archives de la Préfecture du Morbihan. Ses travaux mettent pour la première fois en lumière la réalité des nombreuses violences dont ont été victimes les pupilles bellilois. Il y recrée également les parcours de vie des nombreux colons depuis leur naissance jusqu'à leur mort.
Dans son ouvrage, Julien Hillion remet toutefois en cause l'utilisation du terme "bagne pour enfants" pour désigner l'établissement. En effet, les pupilles n'y étaient pas soumis à des travaux forcés, élément qui constitue la condition première de l'existence d'un bagne (en Guyane ou en Nouvelle-Calédonie par exemple). Notant qu'il est utilisé dans les sources dès son ouverture, l'historien suggère d'utiliser le terme "maison de correction" pour désigner l'établissement.
La formation maritime est la vocation première de l'établissement. Dirigée par un ancien capitaine au long cours, la section maritime regroupe, vers 1890, une centaine de colons, avec quatre ateliers : matelotage et timonerie ; voilerie et filets ; garniture ; corderie. Un atelier de sardinerie est ajouté en 1900.
Les apprentis matelots s'exercent d'abord sur le Ville de Palais, un trois-mâts ensablé dans la cour. En 1895, l’Administration pénitentiaire met à disposition un navire de vingt-cinq mètres, le Sirena, qui peut embarquer vingt colons. Plusieurs canots (le Bangor, le Sauzon, le Locmaria, le Louis Herbette) complètent la flottille.
Les pupilles bellilois peuvent également être formés à des métiers agricoles (à la ferme de Bruté, qui alimente et équipe l'ensemble des colons), mais aussi artisanaux (tailleurs, maçons, charrons, boulangers, cordonniers) ou industriels (sardinerie)[11].
La discipline est extrêmement sévère. L'historien Julien Hillion explique que les pupilles bellilois subissent "une violence physique quotidienne, pourtant interdite par les règlements, qui crée rancœur et désir de vengeance"[12]. Il insiste sur le fait que les violences psychologiques font elles aussi de nombreux dégâts sur les jeunes détenus. Il ajoute enfin que ces pratiques sont dénoncées dans les journaux dès le début du XXe siècle, bien avant la campagne de presse des années 1930[13].
L'institution devient en 1927 une Maison d'Éducation Surveillée puis, en 1945, un Institut Public d’Éducation Surveillée (IPES). En 1967, 80 jeunes étaient encore enfermés à Haute-Boulogne. L’établissement ferme définitivement le .
La colonie pénitentiaire de Belle-Île est restée célèbre par la révolte, le 27 août 1934[14], d’une centaine de colons. La révolte trouve son origine dans le traitement et la discipline extrêmement durs de l'internat. Lors d'un repas du soir, au cours du mois d'août, un des enfants croque dans son fromage avant de manger sa soupe ce qui pousse un gardien zélé à le frapper. Un déchainement de violence se produisit[4].
Quelques moments plus tard, l'émeute se transforme en évasion, celle de 56 mutins qui se dispersent sur l'île. Le poète Jacques Prévert[15] ainsi que des amis de Saint-Germain-des-Prés sont à ce moment-là en résidence estivale sur l'île, et comme tous les habitants de l'île, ils sont sollicités à participer aux recherches des fuyards ; une récompense de 20 francs est proposée. En quelques heures, l'ensemble des fuyards est ramené dans leurs cellules[4]. Cette « chasse aux enfants » interpelle grandement l'auteur qui compose un poème, la Chasse à l'enfant[16]. Un film sur ce thème a débuté en 1947 mais n'a jamais été finalisé : La Fleur de l'âge[17].
Ce qui était un fait divers local, est progressivement relayé par les journaux parisiens et nationaux, dont Paris-Soir, et prend une tournure nationale[4], notamment grâce à la médiatisation du journaliste Alexis Danan[18].
Il faut attendre 1992 pour que la mairie du Palais rachète l'enceinte avec deux bâtiments encore debout, qui servent alors de locaux associatifs[4].
À partir de 2019, un double projet se concrétise pour les locaux de l'ancienne colonie pénitentiaire. Une association, La Colonie, s'est constituée afin d'y établir un site mémoriel en l'honneur des enfants et adolescents et d'y constituer un fonds d'archive. L'association souhaite également « organiser des événements consacrés à la justice des mineurs »[19].
Le second projet est le tiers-lieu nommé Propice. Sa vocation est d'implanter un « tiers-lieu socioculturel et associatif » et de l'exploiter à travers une Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), à gouvernance partagée : « Il constituera un tiers lieu insulaire, un lieu de convergence autour de l’art et la culture, un lieu de loisir et de travail, de rencontres et de découvertes, de promotion et d’éducation, de réunion et de création. »[19],[20]. Le projet est retenu par la Fondation du Patrimoine et la Mission Stéphane Bern en 2022 aux côtés de 17 autres sites[19]. L'ancienne colonie pénitentiaire bénéficie d'une subvention de 500 000 € ; somme doublée par la participation du département du Morbihan, de la région Bretagne et de l'Union Européenne. L'intégralité du projet de réhabilitation pour ce projet coûtant 3 000 000 €, la mairie a décidé de lancer un appel au financement participatif depuis la Fondation du Patrimoine : « Leur identité [celle des donateurs, ndrl] figurera sur un espace qui leur sera dédié ». Un prêt soutenu par la municipalité est envisagé pour compléter le budget, « le cas échéant »[20].
Les bâtiments de Haute-Boulogne rassemblent l’administration, le réfectoire, une buanderie, des ateliers, une chapelle, un quartier disciplinaire de vingt cellules et les dortoirs qui sont pour la plupart compartimentés en cellules grillagées de 1,5 mètre sur 2 mètres.
Dès 1880, l’Administration pénitentiaire loue à la famille Trochu, au centre de l’île et à trois kilomètres de Haute-Boulogne, le domaine de Bruté-Souverain pour y installer une section agricole. Les cent dix-sept hectares (61 en culture et 56 sous bois)[8] sont définitivement acquis par l’Administration pénitentiaire en 1902. Elle y construit, en 1906 et 1910, deux bâtiments de pierre pour accueillir les colons.
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