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film sorti en 1982 De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Yol, la permission (en turc : Yol signifiant « route », « chemin ») est un film dramatique turco-suisse réalisé en 2 langues, soit en turc et kurde par le cinéaste kurde de Turquie Yılmaz Güney et le réalisateur turc Şerif Gören.
Titre original | Yol |
---|---|
Réalisation |
Yılmaz Güney Şerif Gören |
Scénario | Yılmaz Güney |
Acteurs principaux |
Tarık Akan |
Pays de production |
Turquie Suisse |
Genre | Drame |
Durée | 109 minutes |
Sortie | 1982 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.
Le film est sorti en 1982 et a remporté la Palme d'or à l'unanimité, ex æquo avec Missing de Costa-Gavras.
En tant que film de production suisse, il représente la Suisse aux Oscars 1982 du meilleur film en langue étrangère.
Le film commence sur l'île-prison d'İmralı, en Turquie. Cinq détenus de droit commun bénéficient d’une permission d’une semaine. Chacun d'eux va suivre un chemin différent et difficile.
« Dans Yol, j'ai voulu montrer combien la Turquie était devenue une immense prison semi-ouverte. Tous les citoyens y sont détenus. »[1]
— Yilmaz Güney
L’espace construit dans Yol est carcéral avec un cadre généralement très serré autour du personnage, excepté dans les plans suivant les chevaux et cavaliers kurdes. Cette atmosphère carcérale est aussi construite par les nombreux sur-cadrages : l’encadrement d’une fenêtre ou d’une porte réduit souvent la surface de l’écran, jusqu’à parfois masquer une partie du visage des personnages[1].
Güney pratique une « esthétique de la distanciation » avec des séquences d’attentes, de longs silences qui ouvrent une place à la réflexion du spectateur[1].
Yol est également un film qui montre le patriarcat et les forces qui s’y opposent. Yilmaz Güney disait d’ailleurs en 1980 : « Au cinéma, j’ai toujours voulu donner une vision claire et nette du monde à travers des personnages écartelés. Ces hommes dominent les femmes mais ils portent en eux l’humiliation générale et sont, aussi, lâches et impuissants, prisonniers des coutumes auxquelles ils doivent se soumettre. Cela ne vient pas de la dictature militaire, mais de traditions, de chaînes invisibles, legs d’un long passé féodal et inséparables, d’ailleurs, des structures économiques […] Il n’y a pas en Turquie de séparation entre la lutte des classes et la lutte des sexes. »[2]
Güney écrit le scénario de Yol depuis une cellule de prison. En effet en 1974, Güney est arrêté, accusé d’avoir tué un juge au cours d’une bagarre dans un bistro d’un village proche d’Adana. Il dirigeait alors le tournage du film Inquiétude. Cet épisode tragique lui vaut d’être condamné à 18 ans de prison[3]. Dans un premier temps, Güney confie la réalisation de Yol à Erden Kiral mais n’est pas satisfait de son travail et décide finalement de travailler avec Serif Gören[4]. Comme Güney est un détenu exemplaire, il obtient parfois des permissions de sortie pour les week-ends[5]. Cela lui permet de rencontrer l’équipe du film et de maintenir un certain contrôle sur le tournage. Gören lui rend visite en prison pour discuter le scénario. Ces visites sont l’occasion pour Güney de donner des indications scéniques pour le tournage[5].
En , Güney profite d’une courte permission pour quitter la Turquie. Donald F. Keutsch, producteur suisse, le fait voyager dans le coffre de sa voiture jusqu’à la frontière. Ils louent ensuite un yacht qu’ils abandonnent en Grèce[6]. Grâce à l’intervention de Melina Mercouri, ministre de la Culture en Grèce, auprès du ministre de l’Intérieur français, Gaston Defferre, Güney gagne la France en avion et y trouve l’asile[3]. En , quelques jours à peine après son arrivée, il commence le montage du film avec la monteuse suisse, Elisabeth Waelchli. Le film est monté à la hâte pour qu'il puisse concourir au festival de Cannes en [7]. Afin de convaincre la direction du Festival de le sélectionner, le film est projeté sans le son avec Güney qui interprète les voix masculines en direct[6].
En , l’attention médiatique autour de Güney est grande car il est recherché par la police turque et Interpol[5]. Yol est projeté pour la première fois à l’occasion de la trente-cinquième édition du Festival de Cannes[8]. Le public le salue avec 15 minutes de standing ovation[6]. Le réalisateur remporte la palme d’or pour le film, ex-aequo avec Costa-Gavras pour son film Missing[9].
La sortie de Yol dans les salles française a lieu le [10] et le film se classe 31e au box-office France 1982 avec 1 250 767 entrées[11].
Pendant 17 ans, le film est censuré en Turquie. En effet en 1982, les œuvres de Yilmaz Güney — livres, articles et films — sont interdites dans le pays, sous régime militaire depuis le coup d’État de 1980[12]. Cette censure s’explique notamment du fait de la représentation de la culture et de la langue kurde dans ses œuvres.
Fatos Güney, veuve du réalisateur, a beaucoup lutté contre la censure et a créé une fondation, la Fondation Yilmaz-Güney, afin de réconcilier les Turcs avec le cinéaste, écrivain et acteur[12]. La fondation œuvre pour parvenir à projeter Yol dans les salles turques car l’interdiction des œuvres de Yilmaz Güney est levée en 1992. « Il a été profondément blessé quand il a été déchu de sa nationalité et catalogué ennemi des Turcs. Nous voulons montrer le film pour que les jeunes comprennent qui il était et qu’il reste dans le cœur des gens. »[12] explique Fatos Güney qui a investi plusieurs centaines milliers de dollars pour renouveler techniquement la bande originale[8]. Il est projeté dans 27 salles de dix villes de l’Ouest du pays en .
Pour se prémunir contre la censure, la fondation a coupé le passage localisé au Kurdistan, une localisation indiquée par une insertion en grande lettre rouge du nom de la région. « Nous avons dû le sacrifier, sinon le film n’aurait pas été montré pendant encore dix-sept années. » indique la veuve du réalisateur[12].
Une nouvelle version du film, intitulée Yol - The Full Version, est présentée à Cannes Classics en 2017. Ce film offre une sixième histoire qui avait été coupée au montage et les sons nettoyés[6].
Cette nouvelle version a été produite par Donat F. Keutsch qui affirme détenir les droits d’auteur de Yol, une affirmation contestée par la famille de Güney[13]. Keutsch justifie sa démarche en expliquant qu’« en 1982 pour le Festival du Film de Cannes, 25 minutes ont été supprimées. Après 35 ans, je me suis dit que ce film méritait d’être restauré. »[14] Cette nouvelle version du film fait controverse notamment car l’insertion en lettres rouges du mot « Kurdistan » au début du film n’apparaît pas[15]. Le producteur Suisse a donc été accusé de censure[14].
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