Loading AI tools
type de statue De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Les Vierges noires sont des effigies féminines qui appartiennent à l’iconographie du Moyen Âge européen. Elles figurent généralement la Vierge Marie, mais certaines d'entre elles représentent également Sara la noire ou sainte Anne. Elles tirent leur nom de leur couleur sombre, souvent limitée au visage et aux mains. La plupart d'entre elles sont des sculptures produites entre le XIe et le XVe siècle, mais parfois aussi des icônes de style byzantin des XIIIe et XIVe siècles. On trouve parmi elles de nombreuses Vierges à l’Enfant.
On trouve bien sûr des Vierges noires dans les régions du monde où vivent des populations à peau sombre, bien que leur couleur ait alors une signification clairement différente de celle des Vierges européennes. La majorité des 450 à 500 Vierges noires recensées en Europe se trouvent dans le bassin méditerranéen occidental, domaine de l'art roman, avec une concentration importante dans le sud de la France, où on en compte 180. La Vierge noire de Częstochowa (Pologne) est, par sa localisation, un exemple atypique. Bien que parfois conservées dans des musées, la plupart des Vierges noires sont placées dans des églises, et certaines suscitent des pèlerinages importants.
Les Vierges noires romanes ont inspiré de nombreuses imitations ultérieures.
À côté des Vierges, il existe en France une célèbre sainte noire : sainte Sarah, patronne des gitans, roms, surnommée Sara e Kali (Sarah la noire). Sa statue se trouve dans la crypte de l'église des Saintes-Maries-de-la-Mer (Bouches-du-Rhône).
L'origine de l'iconographie de la Vierge noire ne fait pas l'unanimité des commentateurs. On trouve des théories spiritualistes, matérialistes et scientifiques. On peut distinguer les interprétations catholiques, confession qui est à l'origine de ces représentations, de celles qui font remonter cette iconographie aux cultes des déesses antiques d'origines diverses et variées, voire aux cultes préhistoriques de la déesse-mère des chasseurs-cueilleurs européens du Paléolithique.
La supposition a été avancée jusqu’au milieu du XXe siècle, que le choix du matériau pour les statues (ébène, acajou) les rendaient noires. Mais les sculpteurs du Moyen Âge n'utilisaient que du bois local (noyer, chêne, tilleul, fruitiers…) facile à obtenir et plus facile à travailler. Or ces bois sont de couleur claire à l’origine.
D'autres spéculations matérialistes évoquaient la possibilité de dépôts de suie provenant des bougies votives, mais alors le noir ne se serait pas uniquement concentré sur les visages et les mains ; d’autre part il existe un grand nombre de statues médiévales n’ayant pas de visage noir, bien qu’ayant été exposées aux mêmes bougies votives.
L’hypothèse a également été avancée que le noircissement serait dû à une altération des pigments. Par exemple, les pigments à base de plomb utilisés pour les carnations se seraient oxydés avec le temps et auraient donc noirci. Le « blanc de plomb », composé de carbonate de plomb contenu dans la céruse, est le coloris qui est à la base du composé utilisé dans la peinture médiévale pour figurer les carnations. Or le carbonate de plomb se transforme en plattnérite noire[1],[2]. Selon cette thèse, on retrouverait systématiquement une polychromie claire d'origine sous une couche superficielle noircie[3],[4]. Ceci explique pourquoi l’enfant Jésus est lui aussi noir, car les pigments utilisés pour les carnations sont les mêmes. On trouve également d'autres statues de la même époque et qui ne représentent pas la vierge Marie, mais dont les carnations sont noires.
Néanmoins, on retrouve aussi bien de nombreuses statues médiévales dont la carnation n'est pas noire. Il est donc difficile d'expliquer la totalité des Vierges noires par un pur processus chimique.
Il faut reconnaitre aussi que la noirceur des Vierges noires est devenue un élément important de leur identité cultuelle, que leur couleur provienne ou non à l’origine d’un processus chimique. En témoignent les allusions au Cantique des cantiques mentionnées plus haut. Certaines ont même été délibérément repeintes en noir sur leur totalité (comme la vierge Notre Dame de Moulins) lors de tentatives de restauration, et d’autres ont inspiré des imitations qui en ont repris la couleur sombre. A partir du XVIIe siècle il est indiscutable que certains sculpteurs produisent des vierges d'emblée noires.
Il existe un fondement de théologie chrétienne qui explique ces statues.[réf. souhaitée] Les liturgies médiévales des fêtes de la Vierge puisent abondamment dans le Cantique des cantiques, notamment pour les formules dévotes des litanies telles que turris eburnea ou turris David.[réf. souhaitée]
Un passage célèbre du Cantique des cantiques proclame :
שחורה אני ונאוה, Je suis noire et belle. (coordination dans la version hébraïque)
Μέλαινά εἰμι καὶ καλή, Je suis noire et je suis belle (coordination dans la version grecque)
Nigra sum sed formosa, Je suis noire mais belle. (opposition dans la version latine)
Bible, Ancien testament, (Ct 1:5)
Il s’agirait pour les commentateurs, chrétiens comme juifs, d’une expression symbolique du péché de l’homme[réf. souhaitée], mis en évidence par l’approche de Dieu. Le dévot (la dévote), en s’approchant intérieurement de la lumière brillante de Dieu, en vient à se considérer soi-même comme noirci. Ainsi depuis St. Jean de la Croix l’on parle même de « nuit obscure de l’âme ».Un analogue de cette expérience existe aussi dans le domaine de l’alchimie, où l’ expérience du « noircissement » (nigredo), voire du « soleil noir », précède celle du « mariage » (coniunctio).[réf. nécessaire] Pourtant, avant ces interprétations symboliques, le texte-même de la Bible évoque en premier lieu la couleur de la peau d'une femme noire:
μὴ βλέψητέ με, ὅτι ἐγώ εἰμι μεμελανωμένη, ὅτι παρέβλεψέν με ὁ ἥλιος
Ne prenez pas garde à mon teint noir car c'est le soleil qui m'a brulée. (version grecque de la Septante)
Bible, Ancien Testament, (Ct 1:6)
Par ailleurs, pour la polémique protestante, la dévotion catholique à la Vierge n'est que paganisme recyclé. Ainsi, le pasteur écossais Alexander Hislop écrivait en 1858, à grands coups de citations, que le culte catholique n'était qu'une « nouvelle Babylone[5] ».
De nombreux courants de pensée, aussi différents qu'opposés dans leur méthodes et leurs interprétations, se rejoignent pourtant pour retrouver un soubassement plus ancien qui relierait les Vierges noires du Moyen-Âge européen à différentes déesses antiques ou préhistoriques. Ces déesses peuvent être celles d'anciens cultes païens endogènes au continent européen (Artémis, Cybèle, Diane, etc), ou exogène, venue d'Afrique, comme la déesse Isis. Certains chercheurs poussent plus loin dans le temps en remontant au Paléolithique supérieur et aux déesses-mères européennes.
Le ou les auteurs connu sous le nom de plume de Fulcanelli écrivait :
« Jadis, les chambres souterraines des temples servaient de demeure aux statues d’Isis, lesquelles devinrent, lors de l’introduction du christianisme en Gaule, ces Vierges noires que le peuple, de nos jours, entoure d’une vénération toute particulière. Leur symbolisme est d’ailleurs identique ; les unes et les autres montrent, sur leur soubassement, la fameuse inscription : Virgini parituræ ; à la Vierge qui doit enfanter. Ch. Bigarne[6], nous parle de plusieurs statues d’Isis désignées sous le même vocable. “Déjà, […] le savant Elias Schadius avait signalé, dans son livre De dictis Germanicis, une inscription analogue : Isidi, seu Virgini ex qua filius proditurus est (À Isis, ou à la Vierge de qui le Fils prendra naissance). Ces icônes n’auraient donc point le sens chrétien qu’on leur prête, du moins exotériquement. Isis, avant la conception, c’est, dit Bigarne, dans la théogonie astronomique, l’attribut de la Vierge que plusieurs monuments, bien antérieurs au christianisme, désignent sous le nom de Virgo paritura, c'est-à-dire la terre avant sa fécondation, et que les rayons du soleil vont bientôt animer. C’est aussi la mère des dieux, comme l’atteste une pierre de Die : Matri Deum Magnæ ideæ.” […] Un détail encore, utile pour l’hermétiste. Dans le cérémonial prescrit pour les processions de Vierges noires, on ne brûlait que des cierges de couleur verte.
Quant aux statuettes d’Isis — nous parlons de celles qui échappèrent à la christianisation —, elles sont plus rares encore que les Vierges noires. Peut-être conviendrait-il d’en rechercher la cause dans la haute antiquité de ces icônes. Witkowski[7] en signale une que logeait la cathédrale Saint-Étienne de Metz. “Cette figure en pierre d’Isis, écrit l’auteur, mesurant 0 m. 43 de haut sur 0 m. 29 de large, provenait du vieux cloître. La saillie de ce haut relief était de 0 m. 18 ; il représentait un buste nu de femme, mais si maigre que, pour nous servir d’une expression imagée de l’abbé Brantôme, 'elle ne pouvoit rien monstrer que le bastiment' ; sa tête était couverte d’un voile. Deux mamelles sèches pendaient à sa poitrine comme celles des Dianes d’Éphèse. La peau était colorée en rouge, et la draperie qui contournait la taille en noir… Une statue analogue existait à Saint-Germain-des-Prés et à Saint-Étienne de Lyon”[8]. »
Cependant dans les années 1950, avec l’avancée des études en matière de religions comparées, certains chercheurs laïcs ont laissé de côté la question des origines matérielles de la pigmentation des Vierges noires, et recommencé à envisager que leur teinte sombre a été voulu dès l’origine. Des rapprochements ont ainsi été faits avec les déesses des anciens cultes polythéistes d'Europe occidentale que la romanisation, puis la christianisation, avaient fait disparaître, en particulier les déesses-mères. Cette hypothèse est confortée par la présence de sanctuaires dédiés à la mère de Dieu sur les lieux d’anciens cultes païens (par exemple Cybèle, Diane, etc.).
Dans les années 1970, Stephen Benko a remarqué la ressemblance entre la Vierge à l’Enfant et les représentations d’Isis portant Horus datant de l’Égypte ptolémaïque. Pour Benko (qui rejoint ainsi Hislop), la Vierge noire est l'ancienne déesse-terre « convertie au christianisme. »
« Benko commence par montrer que de nombreuses représentations de déesses sont noires, parmi lesquelles Artemis d'Éphèse, Isis, Cérès et d'autres. Cérès, déesse romaine de la fertilité agricole, est particulièrement importante. Son équivalent grec est Déméter, Déesse-Terre. Le sol le plus fertile est noir, et plus il est noir, plus il convient pour l'agriculture[9]. »
Dans les années 1980, des psychologues comme Gustafson[10] et Begg[11], s’appuyant sur Carl Gustav Jung, pensent y avoir reconnu un archétype maternel, ou bien un aspect chtonien et psychopompe. En 2005, Monique Scheer a recensé les différents symbolismes liés à la Vierge noire selon les lieux et les époques[12]
Plus récemment des égyptologues ont repéré une filiation entre les Vierges noires les plus anciennes et les cultes égyptiens, particulièrement celui d'Isis[13]. Par exemple, c'est l'avis d'Ashraf Sadek, professeur d'égyptologie à l'Université de Limoges, lui-même de confession orthodoxe copte et écrivant pour la revue Le monde copte. Il s'appuie non seulement sur la religion comparée mais aussi sur une étude iconographique poussée pour établir une filiation entre le christianisme et les religions antiques pratiquées par exemple en Égypte, les premiers Coptes recyclant les poncifs artistiques pharaoniques[13].
D'autres chercheurs comme Sophie Cassagnes-Brouquet adoptent un point de vue allant dans le sens de certains apologistes chrétiens[Lesquels ?] em niant toute filiation aux religions du passé, en ne voyant qu'une origine strictement paléochrétienne dans l'ensemble du culte et de l'iconographie associés aux Vierges noires et en se référant également aux coptes et aux chrétiens éthiopiens, mais comme source originale[14].
L'auteur New Age américain Lucia Chiavola Birnbaum (en) s'est longuement étendue sur la signification spirituelle des Vierges noires comme véhicules d'anciennes croyances matriarcales[15].
La Vierge noire de la cathédrale de Chartres est la Vierge-de-sous-Terre, dans la crypte, détruite en 1793. La piété attribue alors à une autre Vierge, du XVIe siècle, appelée Notre-Dame-du-Pilier, ses caractéristiques, et en particulier la couleur noire des carnations, qui lui est attribuée lors d'une restauration au XIXe siècle. Une nouvelle restauration au début du XXIe siècle rend à Notre-Dame-du-Pilier sa polychromie originelle.
La Vierge noire de la cathédrale romane du Puy-en-Velay mesurait environ 72 cm, taillée probablement dans du cèdre et recouverte d’une toile marouflée.
Brûlée à la Révolution, le 8 juin 1794, ses membres ne sont pas apparents et elle affecte la figure d’un triangle, par sa robe qui la ceint au col et s’évase sans un pli jusqu’au pied.
L’étoffe en est décorée de ceps de vigne et d’épis de blé, allégories du pain et du vin eucharistiques, et laisse passer, au niveau de l’ombilic, la tête de l’Enfant, aussi somptueusement couronnée que celle de sa mère[8].
La statue actuellement exposée sur le maître-autel est une copie. Elle est portée en procession le 15 août, fête de l'Assomption qui, chaque année, rassemble des milliers de personnes.
But d’un pèlerinage fameux, déjà fréquenté en l’an 1166, la Vierge noire de Rocamadour est une madone miraculeuse dont la tradition fait remonter l’origine au juif Zachée, chef des publicains de Jéricho, et qui domine l’autel de la chapelle de la Vierge construite en 1479.
C’est une statuette de bois, noircie par le temps, enveloppée dans une robe de lamelles d’argent qui en consolide les débris vermoulus. D'après l'alchimiste Fulcanelli, « la célébrité de Rocamadour remonte au légendaire ermite, saint Amadour ou Amateur, lequel sculpta en bois une statuette de la Vierge à laquelle de nombreux miracles furent attribués. On raconte qu’Amateur était le pseudonyme du publicain Zachée, converti par Jésus-Christ ; venu en Gaule, il aurait propagé le culte de la Vierge. Celui-ci est fort ancien à Rocamadour ; cependant, la grande vogue du pèlerinage ne date que du XIIe siècle. »[8]
En novembre 2015, la cellule patrimoine du département du Lot a confié l'étude de cette statuette à Dominique Faunières, pour obtenir une meilleure connaissance de son état en vue d'une éventuelle restauration.
L’œuvre a été scannée au Centre hospitalier Jean Rougier de Cahors par le radiologue Xavier Durbise. L'analyse des résultats a montré que la statue est composée d'une seule pièce de noyer, sans relique cachée à l'intérieur, avec une robe de métal et un collier d'argent. Sa structure est en relativement bon état malgré des décollements et des trous sur le visage et le buste. La statuette de l'enfant est fixée sur son genou droit par de grandes chevilles de bois.
Les consolidations réalisées en 1949 à l'aide de plâtre et d'agrafes apparaissent clairement. Un prélèvement de bois a été effectué au printemps 2016 pour une datation par le carbone 14. Dans le cadre de cette étude, les variations de température et d'humidité de la chapelle qui abrite cette Vierge sont analysées pendant un an[16],[17].
Cette Vierge noire est réputée pour avoir une intercession efficace. Dans le livre d'or de la chapelle, on peut lire des témoignages d'intercession (ou pris comme tels) comme « Sainte Vierge, je suis venu vous prier trois fois pour avoir un enfant. Je viens d'accoucher de triplés. Merci ».
Située dans le Puy-de-Dôme, cette statue est portée en procession le jusqu'au sanctuaire de Vassivière (Notre-Dame de Vassivière à Besse-et-Saint-Anastaise), un édifice du XVIe siècle situé à 7 kilomètres du village. Elle y passe l'été et redescend le premier dimanche de septembre qui suit la Saint Mathieu ; ce retour s'appelle La dévalade[18]
Camille Flammarion[19] parle d’une statue analogue qu’il vit dans les caves de l’Observatoire, le , deux siècles après la première observation thermométrique, qui y fut faite en 1671.
« Le colossal édifice de Louis XIV, écrit-il, qui élève la balustrade de sa terrasse à vingt-huit mètres au-dessus du sol, descend au-dessous en des fondations qui ont la même profondeur : vingt-huit mètres. À l’angle de l’une des galeries souterraines, on remarque une statuette de la Vierge, placée là cette même année 1671, et que des vers gravés à ses pieds invoquent sous le nom de Nostre-Dame de dessous terre. »
Cette Vierge parisienne peu connue paraît être une réplique de celle de Chartres, la benoiste Dame souterraine[8]. Plus tard, Eugène Canseliet confirmera cette observation[20].
En 1705, l’urbaniste français De Lamare dressa le plan de la ville de Paris et y mentionna des temples d’Isis en lieu et place de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés et de la cathédrale Notre-Dame de Paris.[réf. nécessaire]
Ce fait fut encore confirmé par le père Jean du Breul qui, dans son ouvrage Théâtres des antiquités de Paris publié en 1639, dit ceci :[réf. nécessaire]
« Au lieu où le roi Childebert fit construire à l’église de Saint-Vincent, à présent dite de Saint-Germain-des-Prés et à laquelle il donna son fief d’Issy, la commune opinion est qu’il y avait un temple d’Isis, femme d’Osiris. (le texte concerné)[réf. nécessaire] »
Auvergne-Rhône-Alpes
Bretagne
Autres régions
La Vierge noire est située à Sant-Cruz d'Oran
Seamless Wikipedia browsing. On steroids.
Every time you click a link to Wikipedia, Wiktionary or Wikiquote in your browser's search results, it will show the modern Wikiwand interface.
Wikiwand extension is a five stars, simple, with minimum permission required to keep your browsing private, safe and transparent.