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mathématicien, militant anarcho-écologiste et terroriste américain (1942-2023) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Theodore Kaczynski, dit Ted Kaczynski et surnommé « Unabomber » par le FBI, est un terroriste américain, mathématicien de formation, activiste anarcho-écologiste et néo-luddiste[1],[2], né le à Evergreen Park dans l'Illinois et mort le près de Butner dans le comté de Durham en Caroline du Nord[3],[4].
Naissance | |
---|---|
Décès | |
Nom de naissance |
Theodore John Kaczynski |
Surnom |
Unabomber |
Nationalité | |
Domiciles |
Chicago (à partir de ), Lombard (- |
Formation |
Université Harvard (baccalauréat universitaire) (- Université du Michigan (doctorat) (- Evergreen Park Community High School District 231 (en) Eliot House (en) |
Activités |
Mathématicien, terroriste intérieur, terroriste, écologiste, écrivain, philosophe, anarchiste |
Père |
Theodore Richard Kaczynski (d) |
Mère |
Wanda Dombek (d) |
Fratrie |
David Kaczynski (en) |
A travaillé pour | |
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Idéologie | |
Mouvements | |
Taille |
1,75 m |
Directeur de thèse |
Allen Lowell Shields (en) |
Influencé par | |
Condamné pour |
Meurtre () |
Condamnation | |
Lieux de détention |
ADX Florence (- |
Il a fait l'objet de la chasse à l'homme la plus coûteuse de l'histoire du FBI, ayant aspiré, deux décennies durant, à devenir le « parfait tueur anonyme ». Il est en même temps l'auteur de plusieurs textes et ouvrages[5].
Il s'est battu, selon lui, contre les dangers inhérents à la direction prise par le progrès dans une société industrielle et une civilisation technologique, une société qui s'éloignerait de l'humanité et de la liberté humaine pour la majorité sinon pour la totalité de la population[6]. Après des études et une courte carrière de professeur de mathématiques, il décide de se retirer dans la nature et s'installe dans une cabane isolée à Lincoln au Montana. À la suite de la disparition de l'environnement naturel où il réside, il décide de combattre la société technologique et industrielle. Il s'engage dans une campagne d'envoi de colis piégés de manière artisanale à diverses personnes au prétexte qu'elles construisent ou défendent la société technologique. Cette campagne d'attentats dure dix-huit ans, faisant trois morts et 23 blessés avec 16 bombes artisanales envoyées. En septembre 1995, il fait publier son manifeste par le Washington Post. Son texte attire l'attention de son frère, qui le dénonce au FBI. Kaczynski est finalement repéré et arrêté le , avant d'être condamné à la prison à perpétuité.
Avant que son identité ne soit connue, le FBI se réfère à lui comme UNABOM (« UNiversity and Airline BOMber »). Plusieurs variantes de ce surnom seront utilisées par les médias : Unabomer, Unabomber et UniBomber.
Theodore John Kaczynski naît le à Evergreen Park, dans la banlieue de Chicago, aux États-Unis. Il est le premier enfant de Theodore Richard Kaczynski, ouvrier dans une usine de saucisses, et de Wanda Theresa Kaczynski, née Dombek[7]. Ses parents appartiennent à la seconde génération d'une famille d'émigrés polonais[8].
À l'âge de neuf mois, il développe une grave allergie médicamenteuse, son corps étant recouvert d'urticaire. Il est placé en isolement dans un hôpital pendant huit mois. Séparé de ses parents et de son milieu, il développe alors une altération de la personnalité. La naissance de son frère David le le perturbe aussi[9],[10].
Élève surdoué, il entre à l'école en avance et saute deux classes si bien qu'il se retrouve marginalisé. Dans des résultats de test de quotient intellectuel à dix ans, Kaczynski obtient le score de 167[11], probablement sur l'échelle de Cattell, qui est la plus utilisée aux États-Unis. Il semble cependant que cette information soit à prendre avec précaution, la passation du WAIS-R en 1996 estimant le QI total de Ted Kaczynski à 136 sur l'échelle de Wechsler[12]. Il entre à Harvard à seize ans[13], obtient son baccalauréat en mathématiques avec des résultats moyens. Ses colocataires et d'autres étudiants de Harvard ont décrit Kaczynski comme une personne très intelligente mais socialement réservée[14].
À Harvard, Kaczynski se porte volontaire pour participer à une expérience du département de psychologie, conduite sur différents étudiants entre 1959 et 1962 par le professeur Henry Murray[15]. Durant cette expérience visant à analyser les réactions des gens sous stress[16], Kaczynski fut soumis à des interrogatoires intensifs, que Murray lui-même qualifia de « personnellement abusifs »[15]. Cette expérience serait liée au projet MK-Ultra (expériences de psychologie sociale, recherches sur le LSD dans le cadre de manipulations mentales…)[17],[18],[19].
À vingt-cinq ans, il devient docteur en mathématiques à l'université du Michigan[20]. Au Michigan, Kaczynski se spécialise dans l'analyse complexe, notamment dans la théorie géométrique des fonctions (en). Il impressionne ses professeurs. Le professeur Peter Duren dit de Kaczynski : « C'était une personne inhabituelle. Il n'était pas comme les autres étudiants diplômés. Il avait la volonté de découvrir la vérité mathématique. » George Piranian, un autre de ses professeurs de mathématiques à Michigan, déclare : « Il ne suffit pas de dire qu'il était intelligent[21]. » Kaczynski obtient 1 F, 5 B et 12 A dans ses 18 cours à l'université. En 2006, il dit qu'il avait des souvenirs désagréables du Michigan et qu'il pensait que l'université avait des normes de notation assez légères, comme en témoignent ses notes relativement élevées[22].
En 1964, il trouve une preuve du théorème de Wedderburn n’utilisant que des résultats de théorie des groupes finis[23],[24].
Theodore Kacynski devient en 1967 professeur assistant en mathématiques à l'université de Californie à Berkeley dont le département de mathématiques est considéré comme le premier dans le pays. Introverti, plutôt que de se tourner vers la recherche, il démissionne en 1969 et retourne vivre chez ses parents[25].
En 1971, il part vivre dans le Montana, y achète une terre et construit une cabane en bois pour y vivre, sans eau ni électricité[26],[27]. Marqué par les travaux de Jacques Ellul et des néo-luddites, il adopte une forme de survivalisme et mène une vie proche de celle d'un ermite.
Son premier colis piégé est envoyé à la fin du mois de mai 1978 au professeur Buckley Crist de l'université Northwestern. Le paquet est trouvé dans un parc de stationnement de l'université de l'Illinois à Chicago, avec, pour adresse de retour, celle du professeur Crist et adressé au professeur E. J. Smith de l'Institut polytechnique de Rensselaer dans l'État de New York. Le paquet est renvoyé à Crist. Pris de soupçons devant un paquet qu'il n'a jamais envoyé, il en informe la police du campus. Un policier, du nom de Terry Marker, ouvre le paquet, qui explose ; Marker n'a que des blessures légères.
L'attentat de 1978 est suivi par d'autres à l'encontre de compagnies aériennes, avec l'objectif de faire exploser des avions, notamment un Boeing 727-223 opérant le vol 444 d'American Airlines, le . Au début, les bombes sont l'œuvre d'un amateur et causent peu de dommages.
La première conséquence grave survient en 1985, quand un étudiant diplômé de l'université de Californie à Berkeley perd quatre doigts et la vision d'un œil. La bombe était empaquetée avec l'inscription « FC » — à ce moment-là traduit par « Fuck Computers » — que l'on traduisit plus tard par « Freedom Club »[réf. nécessaire]. Le propriétaire d'un magasin d'informatique californien est tué par un clou et des éclats qu'il reçoit d'une bombe laissée sur sa place de stationnement en 1985. Une attaque similaire contre un magasin d'informatique a lieu à Salt Lake City (Utah), le [réf. nécessaire].
Après six années d'inactivité, Kaczynski frappe de nouveau en 1993, expédiant une bombe à David Gelernter, un professeur d'informatique de l'université Yale et développeur de Linda, un système de programmation coordonné[réf. nécessaire]. La même année, une autre bombe vise le généticien Charles Epstein (en). Kaczynski écrit une lettre au New York Times revendiquant pour son « groupe anarchiste », appelé FC, la responsabilité des attaques[réf. nécessaire].
En 1994, un publicitaire est tué par un autre colis piégé. Dans une lettre, Kaczynski justifie le meurtre en expliquant que le travail d'un publicitaire est le développement de techniques permettant la manipulation des gens. Suit le meurtre du président de l'Association de sylviculture de Californie, Gilbert Murray, en 1995[réf. nécessaire].
Au cours de son enquête pour identifier celui qu'il surnommait UNABOM (« UNiversity and Airline BOMber »), le FBI fait un rapprochement avec le roman L'Agent secret de Joseph Conrad qui aurait inspiré Kaczynski[28].
Le FBI va toutefois identifier Kaczynski à partir d'un tout autre indice. En 1995, il envoie des lettres à ses victimes et aux médias dans lesquelles il demande que son manifeste soit publié dans un journal réputé ou une grande revue. Il menace de continuer de tuer si sa demande n'est pas satisfaite. Le département de la Justice des États-Unis, le directeur du FBI Louis Freeh et la procureure générale Janet Reno recommandent d'accéder à son souhait dans un souci de sécurité publique et dans l'espoir qu'un lecteur reconnaisse l'auteur du manifeste. The New York Times et The Washington Post publient son pamphlet le [29],[30],[31].
Linda Patrik, la belle-sœur de Kaczynski qui n'a jamais rencontré son beau-frère, avait déjà interpellé son mari David sur les similitudes des propos de Unabomber rapportés par la presse et ceux de Ted rapportés par la famille. Après la publication du manifeste et comparaison avec une lettre haineuse que Ted avait écrite à son frère par le passé, David est un peu plus convaincu par sa femme et ils décident de signaler au FBI ces ressemblances. Entre-temps, David découvre chez sa mère une sorte de proto-manifeste de jeunesse de Ted. Totalement convaincu, il recontacte le FBI avec ce nouvel élément. Une équipe de linguistes détermine que les deux documents ont été écrits par une seule et même personne[32].
Le FBI place la cabane de Theodore Kaczynski, où il vit en ermite dans les bois de Lincoln du Montana, sous surveillance contrôlée. Sa maîtrise des explosifs rend son arrestation délicate. Aussi, le [33], des centaines d'agents du FBI se positionnent autour de sa cabane. Ils utilisent la ruse en faisant appel à un garde-forestier pour l'attirer dehors. Les autorités découvrent dans la cabane tout le matériel servant à fabriquer des explosifs, la bombe numéro 17, prête à être envoyée, et 40 000 pages de notes manuscrites sur la fabrication d'engins explosifs[34].
Au cours du procès, ses avocats veulent initialement plaider la démence, afin que la préméditation de ses crimes ne soit pas retenue. Kaczynski écrit au juge pour demander à se défendre lui-même, refusant d'être catégorisé comme « malade mental »[35]. Afin de pouvoir se défendre, Kaczynski passe un examen psychologique auprès de Sally Johnson, qui le diagnostique avec de la schizophrénie paranoïde[35]. Le juge refuse sa demande de se défendre sans avocats. Craignant une annulation de la peine pour des raisons d'irresponsabilité pénale en raison de la santé mentale de Kaczynski, les procureurs lui proposent de plaider coupable en échange de la prison à vie, que Kaczynski accepte[35].
Il est condamné le à la prison à perpétuité sans possibilité de liberté conditionnelle, à payer 15 millions de dollars à ses victimes et est enfermé à l'ADX Florence dans le Colorado, une prison de très haute sécurité dite Supermax[36].
En 2021, il est transféré dans une prison en Caroline du Nord[37].
Source : FBI[38]
Theodore Kaczynski a tenu un journal intime où il détaille ses activités courantes. Ce journal est rédigé dans un langage chiffré que les policiers sont incapables de décoder. En , à la suite de la découverte d'un annuaire cryptographique parmi les papiers de Kaczynski, la CIA parvient à le déchiffrer[39].
Le journal intime révèle que Theodore Kaczynski a eu recours à plusieurs subterfuges pour mener les policiers sur de fausses pistes. Par exemple, il empaqueta volontairement deux cheveux, ramassés dans un arrêt d'autobus, dans une bombe. Il colla aussi deux semelles plus courtes à une paire de chaussures, espérant tromper la police sur sa pointure, et donc sur sa taille[39]. Enfin, ce journal décrit sa frustration lorsqu'une bombe n'explosait pas selon ses attentes.
En prison, il rédige un livre publié en 2016, Anti-tech Revolution[40].
Theodore Kaczynski est retrouvé mort dans sa cellule de la prison fédérale de Caroline du Nord, près de Butner dans le comté de Durham, au matin du 10 juin 2023[37]. À l'âge de 81 ans, il souffrait d'un cancer en phase terminale et s'est suicidé en prison[41].
Theodore Kaczynski résume ainsi les quatre postulats principaux qu'il affirme et développe dans ses écrits[42][source secondaire nécessaire] :
Pour Kaczynski, c'est la technologie en elle-même qui joue un rôle moteur dans les transformations sociales, davantage que l'économie[43]. Il se montre également très critique envers les partis de gauche, qu'il estime soumis à la croyance dans le rôle positif de la technologie[43].
Kaczynski justifie la violence de ses actes[44] :
« À mon humble avis, l’utilisation de la violence (exemple : contre la réalisation de l’utopie d’une société technologique inhumaine), c’est de l’autodéfense. Certains peuvent en débattre, bien sûr. Si vous pensez que c’est immoral et inadéquat, alors vous devriez éviter TOUTE utilisation de la violence. Mais j’ai une question pour vous dans ce contexte : quel genre de violence a causé le plus de dégâts dans l’histoire de l’humanité ? La violence autorisée par les États (la société, la civilisation, l'idéologie) ou la violence non autorisée, employée par des individus ? »
Selon lui, la révolution industrielle conduit nécessairement à un ordre économique et politique de plus en plus contraignant qui détruit la nature vierge, réduit la liberté individuelle, transforme l'homme en simple rouage du système technologique et qui, à court terme, détruira l'espèce humaine elle-même.
« Ce système n'existe pas pour satisfaire les besoins des hommes, et n'en est pas capable. Les désirs et le comportement des hommes doivent en fait être modifiés pour satisfaire aux besoins de ce système. »
Il en déduit que c'est toute la société moderne technologique qui doit être abattue. Il est bien conscient qu'un tel effondrement subit plongerait l'humanité dans la famine, et serait un cataclysme qui ferait périr beaucoup de gens, mais il conclut :
« On ne peut pas avoir l'argent du beurre et le beurre[45]. »
Son texte, d'abord publié dans la presse américaine sous la menace, est par la suite librement édité soit sur Internet, soit par exemple en France sous forme de livre, en 1996, avec une préface d'Annie Le Brun et, en 1998, dans une nouvelle traduction par les éditions de l'Encyclopédie des Nuisances.
En 2008, Theodore Kaczynski publie son premier livre, L'Effondrement du système technologique, aux éditions Xenia à Vevey, en Suisse. Publié en anglais par les mêmes éditions sous le titre Road to Revolution, c'est une compilation de tous ses textes, et notamment du Manifeste, dans leur première version complète, corrigée et autorisée[46]. Selon l'auteur, cette version doit désormais faire autorité[réf. nécessaire]. Une nouvelle édition paraît en 2010, Technological Slavery[46]. En 2016, Kaczynski publie un nouveau livre, Anti-Tech Revolution: Why and How, traduit en français sous le titre Révolution anti-tech, pourquoi et comment ? en 2021[40].
Les idées de Theodore Kaczynski sont inspirées du mouvement luddiste[43]. Ses actions s'inscrivent dans le mouvement néo-luddite qui se développe aux États-Unis dans les années 1990 et développe une critique radicale de la technologie[47] autour d'auteurs comme Chellis Glendinning, John Zerzan et Kirkpatrick Sale[47]. Theodore Kaczynski est fortement marqué par les écrits du philosophe français Jacques Ellul[46].
Dans l'article « La vérité au sujet de la vie primitive » produit après son arrestation, Kaczynski analyse les écrits et les thèses des anarcho-primitivistes qu'il juge ainsi :
De même, Theodore Kaczynski analyse les pages qu'il a pu récupérer de Futur Primitif[49] du philosophe John Zerzan, tout en essayant de correspondre avec lui[50], et il finit par juger :
En , Bill Joy cite un extrait du manifeste dans son texte Pourquoi le futur n'a pas besoin de nous publié dans le magazine Wired. Son texte inclut une réflexion sur les positions néo-luddites de Unabomber[réf. nécessaire].
En 2011, le manifeste 2083 d'Anders Behring Breivik est un large copier-coller de portions du manifeste d’Unabomber, dont il se réclame[52].
De nombreux psychiatres se sont penchés sur la personnalité de Kaczynski[53]. Plusieurs indices convergent à ce qu'il soit porteur de troubles du spectre autistique (TSA), qui se seraient aggravés dans le temps[54],[55] entraînant une comorbidité du type schizophrénie à délire paranoïaque[56].
Les troubles psychiatriques de Kaczynski ont reposé le problème entre la maladie mentale et la responsabilité. S'il est indéniable qu'il souffre de graves troubles schizophréniques à délires paranoïaques, cependant, en raison de sa formation et de son intelligence nettement au-dessus de la moyenne, il est capable de faire des choix et d'avoir conscience des conséquences de ceux-ci, c'est pourquoi il n'a pas été déclaré pénalement irresponsable[35][source insuffisante].
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