Le prieuré Notre-Dame de La Charité-sur-Loire est un prieuré bénédictin situé dans le département de la Nièvre, dont la charte de fondation remonte à 1059 avec la donation d'une église Sainte-Marie[n 1]. Il est connu en 1070 sous le nom de Caritate et fait partie du diocèse d'Auxerre.
Faits en bref Présentation, Culte ...
Prieuré Notre-Dame de La Charité-sur-Loire
Chevet de l'église Notre-Dame et bâtiments conventuels.
Il a subi des modifications au XIIesiècle, notamment la construction d'un déambulatoire à chapelles rayonnantes. L'église est surtout réputée pour son chevet à chapelles rayonnantes et sa façade (Ouest) avec ses deux tympans. Elle appartenait à un important prieuré dépendant de la puissante abbaye de Cluny, en Bourgogne dont il était une des cinq filles aînées. C'est pourquoi elle était, au Moyen Âge, la seconde plus grande église de France, après celle de Cluny III. Riche et puissant, le prieuré clunisien de La Charité-sur-Loire s'enrichit de nombreuses donations et possessions dès sa création. La grande église priorale actuelle doit montrer de par son décor soigné et sa grandeur, tout comme celle de Cluny, le rayonnement de l'ordre et du prieuré[3].
La construction du monastère de La Charité commence en 1052 sous le prieur dom Gérard de Cluny, sur des terres que lui donne Guillaume Ier, comte de Nevers. Il y avait cependant déjà eu une ou des constructions préexistantes, révélées par des recherches archéologiques sur la place Sainte-Croix (devant l'église) en 2015[4]. Un monastère du nom de Seyr aurait été construit à cet emplacement vers l'an 700; il aurait été détruit lors des raids vikings du IXesiècle[5].
En 1213, le pape Innocent III approuve la garde du prieuré et la procuration ou pension due par le prieuré de La Charité au comte de Nevers[6]:
«[Les comtes de Nevers] de fort grande anciénné avoient droit de garde & protection de plusieurs Abbayes, Prieurez & Églises, tant pour en être Fondateurs, comme en vertu des convenances faites avec justes causes, homologuées, ou par prescription de tems immemorial […] le Prieuré de La Charité au Diocese d'Auxerre […] Quant à la garde du Prieuré de La Charité se trouve Jugement arbitral de l'Évêque de Senlis, Guarin, Chancellier de France, par lequel les religieux reconnoissent le Bourg de La Charité & appartenance, êtes de la garde du comte est tenu de faire amender les torts qui auroient été faits ausdits Religieux en ce qui est de Juridiction seculiere […]. Jugement homologué par Louis qui témoigne que le compromis fut fait en sa presence en date de l'an 1224[7].»
Une crise éclate au début du XIIIesiècle entre la maison-mère et le prieuré qui connaît des problèmes financiers, ainsi que des conflits politiques. Puis viennent les guerres des XIVeetXVIesiècles, qui détruisent les bâtiments. Sans oublier l'incendie de juillet 1559 qui ravage église et bâtiments conventuels. N'ayant pas les moyens de remettre l'ensemble des bâtiments en état, les travaux de première nécessité sont réalisés en ce temps de guerres de Religion. Pendant deux siècles du XVIIesiècle au XVIIIesiècle, plusieurs tentatives de réforme sont envisagées sans succès.
Nicolas Colbert et son neveu Jacques Nicolas Colbert furent nommés successivement par le pape prieurs de La Charité à condition de reconstruire le prieuré dévasté par un incendie 100 ans plus tôt. Les travaux commencèrent en 1667. Le prieuré retrouve son faste sous le prieurat du cardinal François-Joachim de Pierre de Bernis (1757–1790).
La Révolution laisse son empreinte sur le monastère qui est fermé en 1791. L'église devient paroissiale, les bâtiments sont vendus, et pendant les XIXeetXXesiècles s'installent successivement: une faïencerie, une fabrique de chaussures, un négoce en vin, qui font subir des transformations néfastes mais sauvent le prieuré de la destruction.
En 1840, Prosper Mérimée sauva l'édifice d'une destruction programmée par le passage de la route royale de Nevers à Paris entre le chœur et la tour de façade.
Depuis 2001 le prieuré est le site d'un des plus grands chantiers de restauration de Bourgogne[8].
Son tympan daté de 1132, provenant de la façade occidentale, est visible sur la face intérieure du bras sud du transept. Son thème principal est la Transfiguration, c'est-à-dire l'apparition de Moïse et d'Élie aux côtés du Christ dans sa gloire divine. Ce sujet n'était pas le plus représenté à l'époque romane, car le Christ n'en est pas l'unique protagoniste, ce n'est donc pas une théophanie dans le vrai sens du terme. Cependant, il est très bien maîtrisé à La Charité-sur-Loire, le Sauveur étant nettement séparé des personnages de l'Ancien Testament, dans une mandorle.
Le tympan est ceinturé d'un arc outrepassé, qui lui permet d'être découpé en un demi-disque sur le registre supérieur, et une frise de type linteau pour le registre inférieur. Cette partie est elle-même scindée en deux zones inégales, à gauche portant l'Adoration des Mages, et à droite la Présentation de Jésus au Temple. Ces deux scènes font partie du cycle iconographique de l'Enfance du Christ incarné, alors que la Transfiguration qui prend la place habituelle d'une Ascension ou d'une théophanie à la fin des Temps est un des symboles de la continuité entre l'Ancien Testament et le Nouveau Testament. C'est Pierre le Vénérable qui introduisit la fête de la Transfiguration dans la liturgie clunisienne.
Église Notre-Dame de La Charité-sur-Loire
Le clocher de l'église.
L'entrée sud de l'église.
L'ossuaire de l'église.
Frise sur le portail de l'église.
L'intérieur de l'église Notre-Dame
Au XIIesiècle, le chevet à sept absides échelonnées est replacé par un chevet déambulatoire et chapelles rayonnantes.
Bien que très remaniée au XVIIesiècle, l'intérieur de l'église Notre-Dame, récemment[Quand?] restauré, impressionne par son transept de grande dimension, avec de hautes colonnes reposant sur des arcs brisés. Le chœur est composé de trois travées avec une voûte en berceau brisé, l'abside présentant un faux triforium et est entouré d'un déambulatoire avec des chapelles rayonnantes. Les chapiteaux du chœur présentent des sculptures à motifs pour la plupart animaliers. Les stalles furent installées sous Jean de La Magdeleine de Ragny en même temps que fut réalisé le passage de La Madeleine et la façade de l'église. C'est sous le prieur Jacques Nicolas Colbert que fut refaite une partie de l'église.
Son chevet fut découvert lors des fouilles de 1975, dans le jardin contigu à l'église prieurale. Elle est dédiée à «tous les saints», mais plus tard elle est connue sous le vocable de saint Laurent. C'était un lieu de prières autour des reliques, à l'attention de tous les saints, et des défunts y ayant fondé leur obiit. On y donne des cérémonies avec de nombreuses processions, selon les coutumiers. Elle est refaite après les incendies du XIIIesiècle.
Le cloître
Il a été refait après les incendies du XIIIesiècle du côté est, puis au XVIIesiècle par le prieur Jacques Nicolas Colbert, toujours du côté de la galerie est.
Les bâtiments conventuels
Au début du XVIesiècle, de nombreux travaux de restaurations et de constructions furent entrepris sous le prieurat de Jean de La Magdeleine de Ragny, dont la porterie, le logis prieural et le pressoir commun. Des bâtiments disparaissent sous des terrasses pendant le prieurat de Jacques Nicolas Colbert. Le bâtiment au nord du cloître est réalisé sous le cardinal François-Joachim de Pierre de Bernis.
Le grenier à sel
Le prieuré avait un grenier à sel qui comprenait quarante et une paroisses de sa juridiction[11].
L'Élection de La Charité-sur-Loire est créée en 1635 et dépend de la généralité de Bourges. Supprimée en 1661, elle est rétablie en 1669 et passe en 1696 à la généralité d'Orléans[12].
Liste des dépendances
Prieurés en France
Quarante-cinq prieurés dépendent de La Charité, ainsi que quatre cents dépendances:
Prieuré Saint-Victor de Nevers (Nièvre). Après la mort d'Ermengarde de Tonnerre, Guillaume se remaria peut-être car on trouve, dans une charte où le comte donne le prieuré Saint-Victor qu'il tenait en fief du roi[6], au prieuré de La Charité-sur-Loire, la signature d'une Mathilde à côté de la sienne[18],[19];
Prieuré Saint-Germain de Rouy (Nièvre), au XIesiècle;
Prieuré Saint-Victor de Biches, fondé par Gauthier dit le Fort, seigneur de Biches, et uni par le pape Clément VI au prieuré de la Charité en 1350[25];
Prieuré de Coulonge[28]. Une charte donnée à Donzy en septembre 1331, signée par le prieur de La Charité et les religieux, stipule que le droit de garde est reconnu à un sergent gardien. Clause encore observée en 1600;
prieuré Saint-Laurent de Béard, qui cessera au XIIIesiècle pour devenir une église paroissiale, l'église Saint-Laurent de Béard citée comme étant curatus (cure) de Béard. Dans le pouillé de 1478, elle est au prieuré de Lurcy-le-Bourg qui lui-même dépend du prieuré Notre-Dame de La Charité-sur-Loire;
Le prieuré Notre-Dame possédait vingt-cinq paroisses des Amognes dans le Nivernais. Elles rendaient hommage au prieur le jour de la Nativité de Notre-Dame[22]:
église de Fleury-la-Tour (Nièvre), avec les sépultures, baptistères et autres dépendances comme le moulin de Fleury, à charge pour le prieur de Saint-Sulpice de venir prêcher de temps à autre à Fleury[35];
Fief de Gérigny, paroisse Saint-Pierre de La Charité;
Fief d'Ouche, paroisse de Raveau;
Fief de Mignard, paroisse de Narcy;
Fief de Ville, paroisse de Narcy;
Fief de Maurepoux, paroisse de Narcy;
Fief de Bulcy, paroisse de Bulcy;
Fief des Roches, paroisse d'Aubigny;
Fief du Clos d'Estroches, paroisse de Laché, en Nivernais;
Fief du Petit-Charly, paroisse de Chaulgnes;
Fief de Froidefonds, paroisse de Sancoins;
Fief dixme de Passy, paroisse de Narcy;
Fief de Mannay (Vielmanay);
Fief de la Boullaye, paroisse de Perroy;
Fief de la Pointe, près de La Charité;
Fief de la Grande Maison de Raveau;
Fief de la Métairie à l'Âne
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Maisons
À Nevers, rue de la Saulnerie et sur l'actuelle place Saint-Sébastien, plusieurs maisons groupées autour de la chapelle Notre-Dame, puis chapelle du Marché au blé, puis chapelle Saint-Sébastien, et enfin Saint-Sébatien et Saint-Roch. Ces maisons et la chapelle furent démolies en 1759[40].
1143–1150: Guy dit aussi Guillaume I (sixième prieur)[44];
1150–1154: Thurdart ou Theodart;
1154–1162: Raynaud;
1162–1173: Rodolphe de Sully Il fait élever les remparts autour de la ville (dixième prieur)[45].;
1173–1175: Geoffroy I;
1175–1179: Odes II;
1179–1192: Guy de La Charité;
1192–1198: Savary;
1198–1209: Guillaume II de Gaucourt, ex prieur de Sézanne[46];
1209–[47],[n 3]: Geoffroy II de Donzy Il dilapide le patrimoine du prieuré et est excommunié par l'abbé de Cluny, Guillaume (abbé 1207–1215), qui le retient prisonnier dans le prieuré[46].;
1212[47]–1215: Guillaume III, alors abbé de Cluny (Guillaume II d'Alsace, 1207–1215);
1488–1504: Antoine de Roche (1422–1505), grand-prieur de Cluny, prieur de Morteau, religieux profès du monastère de Vaux, docteur et célèbre professeur de droit canonique à l'université de Dole, fondateur en 1491 du collège Saint Jérôme à Dole. Quelque temps avant sa mort il résigne le prieuré de la Charité au profit de Jean de la Madeleine[49];
1504–1538: Jean de la Magdeleine de Ragny, prieur régulier;
1663–1664: Jean Martineau, neveu du précédent, conseiller-clerc au parlement de Paris, l'échange avec le suivant contre l'Abbaye Saint-Sauveur de Vertus[50];
Dom Robert Mauvielle, prieur claustral (sous-prieur), mort le de la peste, contractée après avoir remplacé un curé de la ville défaillant. Il joua un rôle dans la réforme du prieuré de la Charité. Son culte fut d'assez courte durée[51]. Il participa en 1627, avec trois autres moines de Cluny, à la réalisation du bréviaire romain-monastique (celui du pape Paul V), à l'usage de Cluny, à savoir: dom Henri Girard, procureur général, Pierre Lucas, maître des novices, Jacques Naudin, chantre. Son épitaphe se trouve dans la chapelle de la Vierge dans l'église Sainte-Croix de La Charité-sur-Loire[52];
Dom Antoine Parmentier, religieux profès de Cluny, chantre du prieuré Notre-Dame de La Charité et prieur de Saint-Honoré, il fut en procès avec Messire Arnaud de Lange, chevalier et seigneur de Villemenan, et Hubert Lange, son fils, le [53].
«D'azur, à trois bourses ouvertes d'or, liées et ampadonnées de même, chacune chargée d'une quintefeuille de gueules, et en chef une fleur de lys du second émail.»
Il fut dressé en 1739 par Antoine Bataillier, notaire royal[54].
Il s'agit probablement de l'église priorale, bien que les fouilles archéologiques montrent qu'au XIesiècle une église existait dans l'enceinte du monastère. Voir Arnaud 2002, p.45, note 2.
Archives départementales de la Nièvre, cote H.36. et 1.Q.850, procès-verbaux d'estimation, soumissions et ventes (plan visuel du bois des Brosses non daté) (Cercy-la-Tour, Limanton et Vandenesse), 1790–1817.
M. Maupassant, «Notice sur l'abbaye de Saint-Sauveur de Vertus», Séance publique de la Société d'agriculture, commerce, sciences et arts du département de la Marne, (lire en ligne, consulté le ).
Mgr Crosnier, 1916, t. I, pp. 408-409. Cité par Dominique Dinet, Religion et sociétés: les réguliers et la vie régionale dans les diocèses d'Auxerre, Langres, Dijon, fin XVIeetXVIIIesiècles, vol.1, Paris, La Sorbonne, , 950p..
[Arnaud 1995] Chantal Arnaud et M. J. Garniche, «Le prieuré clunisien de La Charité-sur-Loire. État de la question.», Bulletin de la Société nivernaise des lettres, sciences et arts, vol.44, , p.63-94.
[Arnaud 2002] Chantal Arnaud, «Le monastère de La Charité-sur-Loire (Nièvre)», Dossiers d'Archéologie, no25,.
[Aveline 1924] Claude Aveline, Petite histoire de La Charité, La Charité-sur-Loire, .
[Bouthier 2006] Alain Bouthier, «L'élection de La Charité-sur-Loire: une anomalie administrative d'ancien régime», Les Cahiers haut-marnais, colloque de l'Association bourguignonne des sociétés savantes, nos16, 248-251, 2006–2007, p.11-126.
[Coquille 1703] Guy Coquille, Les Œuvres de maistre Guy Coquille, sieur de Romenay, contenant plusieurs traitez touchant les libertez de l'Eglife Gallicane…, t.1, Bordeaux, Claude Labottière, , 569p. (lire en ligne).
[Eysenbach 1841] G. Eysenbach, Insurrection des serfs du Prieuré de Sainte-Milburge de Wenlock, dépendant de La Charité-sur-Loire, vers 1163, t.3, Bibliothèque de l'École des Chartes, 1841–1842, p.563, 561-567.
[Henrion 2015] Fabrice Henrion, «Aux origines du prieuré Notre-Dame de La Charité-sur-Loire (Nièvre), nouvelles données archéologiques et nouvelles hypothèses», Bulletin du Centre d'études médiévales, Auxerre, vol.19, no1, (lire en ligne[sur journals.openedition.org]).
[Lespinasse 1887] René de Lespinasse, Cartulaire du prieuré de La Charité-sur-Loire (Nièvre), Ordre de Cluni, Nevers, Morin-Boutillier, (réimpr.H. Champion à Paris), 478p. (lire en ligne sur Gallica).
[Rochelle et al. 1827] Jean Née de La Rochelle, Pierre Gillet et Jean-François Née de La Rochelle, Mémoires sur le département de la Nièvre, vol.I, Bourges, J.B.C. Souchois, , sur books.google.fr (lire en ligne).
[Vallery-Radot 1967] J. Vallery-Radot, «L'ancienne prieurale Notre-Dame à La Charité-sur-Loire», Congrès archéologiques de France, , p.86-103 (présentation en ligne).
[Vergnolle 1994] Éliane Vergnolle, L'Art roman en France: architecture, sculpture, peinture, Paris, éd. Flammarion, 1994, 2003, 2005, 383p. (ISBN978-2-08-011296-5).
Archives nationales, XVIIIesiècle, H5. 4764.
Archives départementales de la Nièvre, sous-série 1 Q 822-844, par Marie-Claude Guyot: