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ancien recueil de contes et de fables animalières composés en Inde De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le Pañchatantra[1] (du sanskrit पञ्चतन्त्र, IAST : Pañcatantra signifiant « Le Livre d’instruction en cinq parties ») est un ancien recueil de contes et de fables (probablement le plus ancien qui nous soit parvenu). Ce livre écrit sous forme d’apologues racontant l’histoire des chacals Karataka (करटक) et Damanaka (दमनक).
Titre original |
(sa) पञ्चतन्त्र |
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Formats |
Recueil de nouvelles Recueil de contes (d) Recueil de nouvelles |
Langue | |
Auteur |
Inconnu |
Genre | |
Date de création |
Vers |
Pays |
Inconnu |
Éditeur |
Inconnu |
Œuvre dérivée |
Sa compilation est traditionnellement attribuée à un brahmane du Cachemire nommé Vishnusharman (विष्णुशर्मन्), qui l’aurait produite au IIIe siècle avant notre ère[2], à la demande d’un râja, comme un guide de gouvernement à destination des princes. D'autres spécialistes placent la date de composition du noyau primitif vers le début de notre ère ou même plus tardivement.
Le Pañchatantra a eu une riche postérité littéraire, notamment via le Kalîla wa Dimna arabo-persan.
L’ouvrage, comme son nom l’indique, est composé de cinq parties thématiques[3]. regroupant plusieurs textes :
Son organisation en cinq livres semble indiquer un choix conscient plutôt qu’un empilement de textes au cours du temps, contrairement aux Jâtaka (जातक), recueils de fables bouddhistes plus anciens et plus nombreux. Tous deux comportent des fables mettant en scène des animaux au comportement anthropomorphe. On y a parfois vu le remaniement d’un texte du Cachemire, aujourd’hui perdu, le Tantrākhyāyikā (तन्त्राख्यायिका)[9].
Quelques fables se trouvent dans le Mahabharata, d'autres ont leur source dans des livres bouddhiques[10]. Un certain nombre de récits présentent une analogie frappante avec des fables ésopiques. Comme celles-ci se sont répandues dans le monde indien à la suite des expéditions d'Alexandre le Grand (voir Campagne indienne d’Alexandre le Grand), il faut en conclure que le Pañchatantra est postérieur. Comme, en outre, une des fables contient un passage de Varahamihira, astronome indien qui écrivait au VIe siècle, Lancereau en conclut que l'ouvrage sanskrit « devait être récemment rédigé lorsqu'il fut introduit dans l'Asie occidentale[10]. » Toutefois, cette hypothèse est écartée par Renou, qui, tout en reconnaissant des analogies entre ce recueil et Ésope, estime que celles-ci proviennent de la propagation orale de thèmes de folklore et place la date de composition du noyau primitif vers le début de notre ère[11].
Ce recueil s'est répandu dans une grande partie de l'Asie, gagnant la Chine et les pays de l’Asie du Sud-Est sur les routes des pèlerins bouddhistes. Le Pañchatantra connut aussi plusieurs adaptations en Inde-même, comme le très populaire Hitopadesha (हितोपदेश) et le Pañchâkhyânoddhâra (पञ्चाख्यानोद्धार), rédigé au Gujarat par le moine jain Meghavijaya vers 1660. On a identifié plus de 200 textes, en une soixantaine de langues[11].
Dès 570, l'empereur perse Khosro Ier, ayant entendu vanter ce recueil, envoya en Inde son premier médecin Borzouyeh avec pour mission d’en rapporter une copie. Le Pañchatantra connaît alors une traduction en pehlvî, avec adjonction d'une préface d'Ali Ben Ach Chah al Farsi, puis quelques années plus tard en syriaque. Vers 750, il est traduit en arabe par l'écrivain persan Ibn al-Muqaffa à partir d’une version en pehlvî désormais perdue. C'est l'importance de ces modifications qui va amener André Miquel dans sa traduction contemporaine à présenter Ibn al-Muqaffa comme l'auteur à part entière. Le titre de la version arabo-persane, Kalîla wa Dimna, vient des noms de deux chacals, Kalîla et Dimna (dérivés du sanskrit Karataka et Damanaka), qui sont les héros du premier conte du premier livre.
Cette version arabe a été le chaînon majeur du passage de l'œuvre dans le monde occidental. Elle connaît très vite un immense succès dans un monde arabe en expansion et féru de culture antique. Ainsi de nombreux manuscrits vont être produits et diffusés ; il en reste de nombreux exemples aujourd'hui, mais ni le manuscrit original, ni les premières versions n'ont été conservés.
Cet ouvrage a été traduit en grec au XIe siècle par Syméon Seth et en hébreu par Rabbi Joël au XIIe siècle[12].
Le Livre de Kalila et Dimna diffère notablement du Pañchatantra. Il est divisé en dix-huit chapitres, dont cinq seulement correspondent au livre indien (chapitres V, VII, VIII, IX et X). Beaucoup de contes et d'apologues de l'ouvrage indien ont été omis dans la version arabe, et celle-ci, à son tour, en contient d'autres qui manquent dans le texte sanscrit[13].
Le Kalîla wa Dimna a été joliment enluminé, en particulier par l’école de miniature persane de Hérat en Afghanistan (à laquelle se rattache le peintre miniaturiste Behzad) au XVe siècle.
Une version en castillan (Calila y Dimna) est faite en 1251 à la demande d'Alphonse X le Sage. Traduit en latin en 1278, par Jean de Capoue sous le titre de Directorium Humanae Vitae, le recueil se répand dès lors dans tout le monde occidental. Le Pañchatantra a ainsi inspiré de nombreux auteurs comme Marie de France, Jean de La Fontaine ainsi que Grimm. On peut également sentir une filiation avec le Roman de Renart ou certains fabliaux du Moyen Âge[11].
Une traduction latine est exécutée par Raymond de Beziers et offerte en 1313 à Philippe le Bel à l’occasion de la chevalerie de son fils Louis, roi de Navarre, le futur Louis le Hutin. Une version persane est traduite en français par Gilbert Gaulmin sous un pseudonyme, en 1644, sous le titre Le Livre des lumières ou la Conduite des Rois, composée par le sage Pilpay Indien, traduite en français par David Sahid, d’Ispahan, ville capitale de Perse[14]. Le Père Poussines en fait aussi une autre traduction en 1666 sous le titre Specimen sapientiæ Indorum veterum (Modèle de la sagesse des anciens Indiens), mais en se basant sur la version grecque de Syméon Seth[15].
Pilpay (ou Pilpaï) est l'auteur auquel on attribue le Pañchatantra en Europe au XVIIe siècle, bien que son existence ne soit pas avérée. Le nom de Pilpay est dérivé de Bidpaï, qui se trouve dans la version arabe, mais non dans l'original indien[16]. Jean de La Fontaine reconnaît expressément sa dette à l'égard de la source indienne dans l'avertissement du second tome de ses Fables :
« Il ne m'a pas semblé nécessaire ici de présenter mes raisons ni de mentionner les sources à partir desquelles j'ai tracé mes derniers thèmes. Je dirai, comme dans un élan de gratitude, que j'en dois la plus grande partie à Pilpaï, sage indien. Son livre a été traduit en toutes les langues. Les gens du pays le croient fort ancien, et original à l'égard d'Ésope, si ce n'est Ésope lui-même sous le nom du sage Locman[17]. »
En plus de cet avertissement qui fait office de courte préface, La Fontaine, fait référence par trois fois à ce Pilpay :
« […] Par le moyen de cet argument circulaire,
Pilpay jusqu'au Soleil eût enfin remonté […] »
« Pilpay fait près du Gange arriver l'aventure. »
« Pilpay conte qu'ainsi la chose s'est passée ».
Une dizaine de fables racontent à peu de chose près la même histoire avec les mêmes personnages, d'autres en sont inspirées. La Fontaine lui-même a volontiers reconnu sa dette envers la source indienne[18].
La Fontaine s'inspire également de cet ouvrage pour les fables L'Ours et l'Amateur des jardins, Le Chien qui lâche sa proie pour l'ombre, Le Loup et le Chasseur et La Tortue et les Deux Canards.
Extrait : L.X-F.02 - La Tortue et les Deux Canards : Pilpay, Livre des Lumières, p. 124-126, D'une Tortue et de deux Canards ; cf. Ésope, La Tortue et l’Aigle, mis en quatrain par Benserade (XCV).
« Par une année de grande sécheresse, des canards abandonnèrent un étang où ils vivaient et vinrent faire leurs adieux à une tortue leur amie.
- — Ce n’est pas sans peine que nous nous éloignons de vous, mais nous y sommes obligées, et quant à ce que vous nous proposez de vous emmener, nous avons une trop longue traite à faire et vous ne pouvez pas nous suivre parce que vous ne sauriez voler ; néanmoins, si vous nous promettez de ne dire mot en chemin, nous vous porterons ; mais nous rencontrerons des gens qui vous parleront et cela sans cause de votre perte.
- — Non, répondit la tortue, je ferai tout ce qu’il vous plaira.
- Alors les canards firent prendre à la tortue un petit bâton par le milieu, qu’elle serra bien fort entre ses dents et, lui recommandant ensuite de tenir ferme, deux canards prirent le bâton chacun par un bout et enlevèrent la tortue de cette façon. Quand ils furent au-dessus d'un village, les habitants qui les virent, étonnés de la nouveauté de ce spectacle, se mirent à crier tous à la fois, ce qui faisait un charivari que la tortue écoutait impatiemment. À la fin, ne pouvant plus garder le silence, elle voulut dire :
- — Que les envieux aient les yeux crevés s'ils ne peuvent regarder.
- Mais, dès qu’elle ouvrit la bouche, elle tomba par terre et se tua. »
On peut ajouter à cette liste Le Corbeau, la Gazelle, la Tortue et le Rat (La Fontaine XII, 15) ; Le Chat, la Belette et le petit Lapin (VII, 15) ; La Souris métamorphosée en fille (IX, 7).
(Ordonnées chronologiquement.)
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