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idéologie politique De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le nationalisme corse est un mouvement politique, culturel et social qui proclame que la Corse constitue une nation et revendique son autonomie ou même son indépendance. Cet article traite du nationalisme corse aux XXe et XXIe siècles.
Pour le XXe siècle, des initiatives corsistes et autonomistes apparaissent dès , par exemple avec la création par de la revue A Cispra[1] — dont un seul numéro paraît — par Xavier Paoli et Jacques Toussaint Versini[alpha 1]. Toutefois, l'initiative la plus notoire et notable est le journal A Muvra, fondé par Petru Rocca en . Ce journal donne naissance à un véritable mouvement politique et culturel — les muvristes — et devient dès l'organe de presse officiel du Partitu Corsu d'Azione (PCA)[alpha 2], lui aussi fondé par Petru Rocca sur le modèle du Partito Sardo d'Azione[2].
Le mouvement muvriste est principalement issu de la petite bourgeoisie avec une forte proportion d'italophiles et de réactionnaires. Une partie du mouvement se tourne rapidement vers l'irrédentisme et reçoit des subsides de l'Italie fasciste ce qui conduit à une marginalisation progressive du journal en Corse et à son interdiction dès le lorsque la Seconde Guerre mondiale débute[3]. Son impact s'avère assez limité sur le plan politique, notamment en raison de son tournant irrédentiste rejeté par la société corse qui adhère alors massivement au patriotisme français de la Première Guerre mondiale[2],[4]. Néanmoins, sur le plan culturel, Petru Rocca et le mouvement muvriste posent aussi les bases du Riacquistu des années [5], non seulement par une importante production en langue corse, mais aussi par une première expression de revendications telles que la demande de reconnaissance du peuple et de sa langue ou encore la réouverture de l'université de Corte.
À la fin des années 1950, la démographie et l'économie insulaires atteignent leurs plus bas niveaux. Depuis la fin du XIXe siècle, la Corse continue de se dépeupler en cumulant une situation démographique inquiétante ainsi qu'un retard immense en termes d'industrie et d'infrastructure.
C'est alors que surviennent deux chocs qui vont profondément bouleverser la société corse.
Le premier est l'effondrement de l'Empire colonial français. La Coloniale est en effet devenue l'un des principaux débouchés pour les Corses qui représentent, au début des années 1920, 20 % de l'administration coloniale, alors qu'ils ne représentent qu'1 % de la population métropolitaine[réf. nécessaire]. La fin de l'Empire prive la jeunesse corse des perspectives de ses aînés et entraîne le retour forcé d'un certain nombre d'entre eux sur l'île. Cette situation entraîne l'apparition de mouvements régionalistes[réf. nécessaire], tentant de redonner des perspectives à un peuple en manque de repères. Lors des soulèvements en Algérie en 1958 et 1961, la Corse est le seul département métropolitain à avoir « fait sécession », au niveau d'une partie de ses autorités, pour rejoindre les colons insurgés[réf. nécessaire].
Le second choc est l'arrivée des Français rapatriés des anciennes possessions africaines, auxquels l'État octroie majoritairement des terres dans la Plaine orientale. Au début des années 1960, avant l'arrivée des rapatriés d'Algérie, ils représentent environ 10 % de la population insulaire[réf. nécessaire].
En 1959 est fondé le Mouvement du 29 novembre, qui organise des mobilisations très suivies pour un aménagement de fiscalité, contre la vie chère et contre l'abandon des réseaux de transports.
Nombreux sont alors les Corses à prendre conscience du déclin démographique et du délabrement économique de l'île. Ces mouvements sont à l'origine d'un important renouveau de la langue corse et d'un travail de promotion des anciennes traditions culturelles corses.
Mai 1962 est une date cruciale pour l'histoire de l'île et pour les nationalistes corses. La France négocie la paix (accords d'Évian) avec le FLN algérien, mettant fin à la guerre d'Algérie après huit ans de guérilla sanglante. Plus d'un million de Français implantés en Algérie coloniale depuis des générations sont contraints à l'exil, dont 17 000 viennent s'installer en Corse. Parmi eux se trouvaient des vignerons ayant perdu leurs terres et qui ont reçu des subventions de l'État pour acquérir une superficie nécessaire à la culture de la vigne[6].
Après le Front régionaliste corse (FRC) surtout de racines parisiennes, se créa à Vizzavona l'Action régionaliste corse (ARC) en 1970, qui demande à l'État français la prise en compte des difficultés économiques de l'île ainsi que de ses spécificités culturelles, notamment linguistiques, grandement menacées par l'absence de la langue corse dans l'administration et l'éducation, et l'exode rural. Ces mouvements demandent donc aussi la protection, la diffusion et l'enseignement de la langue corse.
La situation économique et démographique de l'île est exposée dans un essai, Main basse sur une île, paru en 1971, dans laquelle les auteurs, membres du FRC, comparent la Corse à une colonie.
Mais ces mouvements estiment que leurs revendications sont ignorées et voient dans le traitement que l'État réserve aux rapatriés des colonies un signe de mépris. Ils soulignent que la Corse est traitée comme une « terre vierge » où il n'est pas besoin de consulter la population locale sur les rapatriements et critiquent les soutiens financiers accordés aux nouveaux arrivants (ainsi par exemple que la création de la Société de mise en valeur agricole de la Corse (SOMIVAC), chargée de la mise en valeur de la plaine agricole).
Dans une situation qu'elle estime fermée, l'Action régionaliste corse (ARC) décide de choisir des moyens d'actions plus radicaux.
Le , une vingtaine de ses membres, emmenés par Edmond Simeoni, dirigeant de l'Azzione per a rinascita di a Corsica (ARC), occupent la cave Depeille, du nom d'un exploitant d'origine pied-noir installé dans la plaine orientale, près d'Aléria. Équipés de fusils et d'une mitrailleuse, ils veulent enfin attirer l'attention du public sur la situation de l'île et notamment sa situation agricole. Ils dénoncent la mainmise sur une partie des terres de la plaine orientale de quelques familles « pieds-noirs ». Le ministre de l'Intérieur Michel Poniatowski envoie 2 000 CRS et des gendarmes mobiles épaulés de véhicules blindés légers, et ordonne l'assaut le mercredi 22 août vers 16 h. Deux gendarmes sont tués au cours de l'affrontement. Le conseil des ministres suivant, le mercredi 29 août, ordonne la dissolution de l'ARC. La tension monte rapidement dans Bastia et des échauffourées éclatent en fin d'après-midi. Elles se transforment en émeutes à la nuit tombée et de nombreuses fusillades ont lieu : un CRS sera tué et de très nombreux blessés.
Cette affaire marque le début de la radicalisation des mouvements nationalistes, dont les revendications évoluent pour exiger l'indépendance de l'île, et forcent les gouvernements successifs à prendre en compte la « question corse ».
Quelques mois plus tard, dans la nuit du 4 au , des militants nationalistes créent le Front de libération nationale de la Corse (FLNC) à partir du Fronte paesanu di liberazone di a Corsica (FPCL), responsable du plasticage d'un bateau italien pollueur, et de Ghjustizia paolina, l'organisation clandestine supposée être une antenne armée de l'ARC. Cette naissance est marquée par une série d'attentats en Corse et sur le continent. Ils tiennent une conférence de presse au couvent Saint-Antoine de Casabianca, lieu hautement symbolique puisque c'est là qu'avait été votée la Constitution corse et que Pascal Paoli avait proclamé l'indépendance en 1755.
De 1975 à la fin des années 2000, les attentats (plasticages ou mitraillages) sont quasi quotidiens en Corse, majoritairement la nuit. Ils sont revendiqués par le FLNC et divers groupes dissidents, certains ont cependant des motivations crapuleuses éloignées de la politique. Les nuits bleues caractérisées par de multiples attentats simultanés et localisés sur l'ensemble de l'île attirent l'attention des médias.
L'assassinat de Claude Érignac, préfet de Corse et de Corse-du-Sud, survenu le , est la plus grave atteinte à l'autorité de l’État en Corse.
À partir de la fin des années 2000, les attentats deviennent plus rares sans disparaître totalement.
La coalition Unione Naziunale a remporté 17,34 % des suffrages aux élections territoriales de 2004. Aux élections territoriales de 2010, les listes nationalistes corses totalisent 35,74 % des voix au second tour : les autonomistes de Femu a Corsica conduits par Gilles Simeoni et Jean-Christophe Angelini récoltant 25,89 % des suffrages et les indépendantistes de Corsica Libera menés par Jean-Guy Talamoni recevant 9,85 % des voix.
Le , Gilles Simeoni remporte la mairie de Bastia devenant le premier nationaliste à diriger une grande ville. Les nationalistes conservent la mairie aux élections municipales de 2020, et conquièrent Porto-Vecchio (3e ville de l'île) ainsi que plusieurs autres communes.
Aux élections territoriales de 2015, la coalition « Pè a Corsica » (fusion des autonomistes de Femu a Corsica et des indépendantistes de Corsica Libera) remporte le second tour en totalisant 35,34 % des voix. Cette victoire historique porte pour la première fois les nationalistes à la tête Collectivité territoriale de Corse. Ils sont désormais la première force politique de l'île. Cette situation est de nouveau confirmée lors des élections territoriales de 2017 et de 2021.
Lors des élections législatives françaises de 2017, trois députés issus des rangs de Pè a Corsica sont élus à l'Assemblée nationale sur les quatre que compte la Corse : Paul-André Colombani en Corse-du-Sud, Michel Castellani et Jean-Félix Acquaviva en Haute-Corse.
Bien que de nombreux courants idéologiques soient présents au sein des différents mouvements, groupes et partis se réclamant du nationalisme corse à travers les périodes (communisme, socialisme à nationalisme de droite), les mouvements peuvent être positionnés au centre, à l'extrême droite, à l'extrême gauche ou à gauche[7],[8],[9],[10],[11],[12],[13]
La côte corse est moins urbanisée que le littoral méditerranéen de la France continentale, notamment du fait d'attentats attribués au mouvement nationaliste contre de nombreuses habitations des non-autochtones[14],[15].
U Rinnovu, un mouvement nationaliste corse généralement désigné comme proche du FLNC du 22 octobre, qualifie d'« hérésie » et de « contresens économique » la construction de villas au profit de non-résidents[16]. Le slogan Vergogna à tè chì vendi a terra (« Honte à toi qui vends la terre ») est également le titre d'une chanson, et un hymne de ralliement aux nationalistes.
Lors du processus de Matignon sous l'égide du gouvernement Jospin, l'article 12 des accords de Matignon prévoyait une adaptation de la loi littoral pour rendre plus facile la délivrance de permis de construire sur le littoral corse. Le jour de l'examen de cet article à l'Assemblée Nationale, les militants de l'organisation A Manca Naziunale ont encerclé la villa d'André Tarallo, le monsieur Afrique d'Elf, située à Piantaredda, en protestation contre l'octroi de permis de construire contestés[17]. L'article a cependant été rejeté par la suite.
Tract du FLNC contre la vente de villas à la clientèle internationale, laissé sur les lieux de la régie publicitaire du journal Nice-Matin[18] :
Cela étant la dénonciation d'un mouvement qui loin de se cantonner à la Corse, touche l'Europe tout entière, apparaît comme inefficace puisque ce sont des Corses qui vendent des terres et qui espèrent en tirer un bénéfice maximum quitte à protester lorsque voulant acheter un nouveau bien ils se heurtent à une hausse de l'immobilier à laquelle ils ont peu ou prou contribué. Une étude plus fine des prix, de l'offre et de la demande démontre qu'aujourd'hui c'est la génération du baby boom qui, prenant sa retraite, cherche des lieux de retraite les plus ensoleillés possible. Ce sont bien souvent les Corses du continent qui achètent des biens sur leur terre d'origine. Appartenant pour beaucoup à la moyenne bourgeoisie et à cette génération qui a profité de l'expansion d'après guerre, elle est capable d'offrir des sommes qui font flamber le marché. La véritable question qui concerne le foncier en Corse est celle de la disparition des arrêtés Miot promulgués sous le premier Empire et qui, entre autres mesures, exonèrent les successions immobilières de tous droits et acceptent l'indivision. La fin des arrêtés Miot pourrait bien ouvrir la voie à une spéculation effrénée.
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