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peuple minoritaire de Chine De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Les Moso, Mosuo ou Musuo (chinois : 摩梭 ; pinyin : ), autrefois retranscrit en Mossos, forment une ethnie habitant le Sud-Ouest de la Chine, à la frontière des provinces du Yunnan et du Sichuan, sur les contreforts de l'Himalaya. Elle compte de 30 000 à 60 000 habitants. Officiellement ainsi que linguistiquement, les Moso constituent un sous-ensemble de la nationalité Naxi et utilisent un sous-système de l'écriture daba pictographique, et proche de l'écriture dongba de ces derniers.
Langues | Na (Moso) |
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Religions | Dongba et bouddhisme tibétain |
Ethnies liées | Naxi |
Ils forment une société matrilinéaire (les enfants sont rattachés au groupe parental maternel, qui les élève, leur transmet le nom et l'héritage), matrilocale (les femmes sont au centre de leur famille et ne la quittent pas pour rejoindre leur conjoint après une union) et avunculaire (la paternité des enfants est exercée par leur oncle maternel)[1],[2].
Les Moso présentent également dans leurs traditions certaines particularités qui leur ont valu l'intérêt de nombreux ethnologues : le mariage n'existe pas et les amants ne résident pas ensemble[3]. Ces spécificités ont été mises à mal sous la révolution culturelle (1966-1976) par une propagande active en faveur du mariage et de la monogamie[4]. Le succès de cette politique fut tout de même limité, de nombreux Moso étant restés fidèles à leur modèle traditionnel ou y retournant par la suite[5].
Le terme « Moso » désignait anciennement (avant 1954) tous les Naxi ; il est maintenant repris par un sous-groupe, essentiellement les habitants de l'ancien tusi de Yongning (1381 à 1951) et des bords du lac Lugu, qui souhaitent souligner les différences entre eux et les Naxi de la ville de Lijiang et des environs. Les ethnologues préfèrent l'appellation « Na » pour l'ensemble des populations qui utilisent pour autonyme la syllabe « Na » ; cette appellation recouvre les Naxi de Lijiang et les Moso de Yongning et du lac Lugu. Ainsi, un livre (en français) consacré aux coutumes des Moso est intitulé « Une société sans père ni mari : les Na de Chine ».
Certains ouvrages anciens utilisent la dénomination Mosso :
La société matrilinéaire des Moso a été étudiée et révélée en Occident par l'explorateur austro-américain Joseph Rock en 1924. Par la suite, des recherches sur le terrain ont été entreprises par l'anthropologue Wang Shuwu en 1954 et l'ethnologue Yan Ruxian en 1980. Enfin, une expédition au pays des Moso a été organisée en 1993 par l'ethnologue allemande Heide Goettner-Abendroth, de l'International Academy for Modern Matriarchal Studies and Matriarchal Spirituality[13].
Certains chefs Moso aiment à rapporter qu'ils sont des descendants des Mongols[14]. L'élite Moso du Sichuan aurait d'ailleurs rapporté à Joseph Rock que leurs ancêtres descendrait d'un général de Khubilai Khan qui se serait installé dans la région, lors de sa conquête au XIIIe siècle, pour gouverner Yongning[14],[15]. Pour Shih, il est probable que les chefs Moso trouvent une fierté à avoir une descendance de personnages de grand renom, mais il existe des traces des Moso dans la région bien avant cette période. La présence d'une communauté mongole sur le xian de Tonghai, au Yunnan, pourrait rendre cette hypothèse plausible d'un point de vue historique, mais les Moso ne retiennent pas de traits culturels des Moso de Tonghai. D'autre part la généalogie des chefs moso, recensée depuis 1381, ne comporte aucun nom de tradition mongole. Les écrits chinois depuis plusieurs milliers d'années associent les Moso et les Naxi par leurs traitements laissant penser une origine et culture commune, bien qu'elles soient aujourd'hui distinctes. Quoi qu'il en soit, les façons de vivre, de penser et de mourir des Moso sont absents chez les Naxi et totalement inconnus chez les Mongols[15].
La langue moso, aussi appelée « na » et « narua », appartient au groupe des langues na-qianguiques[16],[17],[18].
Les Moso utilisent l'écriture daba, proche de l'écriture dongba, des Naxi non-Moso.
Les Moso sont organisés à la fois en yidu, le groupe domestique dans lequel ils organisent et partagent leur vie quotidienne, et en sizi, le groupe de descendance des Moso, une organisation de parenté, dans lesquels les gens effectuent leurs devoirs d'attention envers leurs ancêtres défunts. Le sizi est le seul type d'organisation de parenté parmi les Moso, mais son étendue peut varier en fonction du contexte[19]. Les yidu sont une division des sizi[20].
Les familles sont constituées de fratries, frères et sœurs de plusieurs générations vivent ensemble et forment une famille. Les amoureux ne vivent pas en couple mais chacun dans sa fratrie d'origine. Les enfants sont rattachés à la fratrie de la mère pour y être élevés par les hommes et les femmes qui la composent (la mère et ses frères et sœurs : oncles et tantes ; la grand-mère et ses frères et sœurs : grands-oncles et grand-tantes).
L'homme élève donc les enfants de sa sœur, avec qui il partage foyer, nom, héritage et ancêtres communs, mais n'élève pas ses enfants biologiques. L'organisation familiale fait qu'un enfant sera proche de son oncle maternel et éprouvera à son égard le même type d'affection qu'il aurait envers son père dans d'autres types de sociétés[21].
La naissance d'une fille est cruciale car elle permet la continuité de la lignée. Si une famille n'a que des descendants de sexe masculin, les enfants de ces derniers habiteront la maison de leur mère et la lignée s'éteindra. La naissance d'un garçon est aussi importante car il exercera plus tard la paternité des enfants de sa sœur. Le bon fonctionnement d'une famille passe donc par la présence des deux sexes[réf. souhaitée]. Le statut de minorité ethnique des Moso permet à chaque femme d'avoir autant d'enfants qu'elle souhaite, indépendamment de la politique de contrôle de la population du gouvernement chinois[22].
Si malgré tout, une famille n'a pas de descendance d'un sexe, elle peut avoir recours à l'adoption. L'enfant ou l'adulte adopté sera alors considéré comme un membre à part entière de sa nouvelle famille, avec l'ensemble des droits et devoirs qui en découlent[23].
Chez les Moso, les hommes et femmes sont considérés comme différents et doivent donc avoir un rôle spécifique dans la société. Le partage des tâches est sexué et réglé avec précision. Les femmes s'occupent des travaux domestiques (cuisine, ménage), de la collecte de bois pour les feux et du tissage. Les hommes sont chargés des travaux plus physiques (labour, charpente, pêche, soins du bétail) et de la politique[24]. Seuls les travaux d'agriculture (principale source d'alimentation des Moso) sont effectués conjointement.
Au sein d'une famille, l'ensemble du travail est planifié par deux chefs, un homme et une femme choisis en fonction de leurs compétences. La dabou (chef féminin) administre les affaires internes et l'économie domestique : gestion des récoltes, des finances, accueil des hôtes. Un de ses frères, choisi pour être le chef masculin, administre les affaires extérieures, ce qui implique les communications avec les familles et peuples voisins, ainsi que la planification du travail des hommes.
Les Moso jouissent d'une grande liberté amoureuse et sexuelle. Hommes et femmes sont libres d'avoir autant de partenaires qu'ils le désirent[21],[25]. Comme les familles sont acquises de naissance et ne dépendent pas d'un conjoint, les ruptures ne sont pas un problème : se séparer revient simplement à effacer le lien entre deux membres de deux familles distinctes qui resteront intactes. Les enfants étant élevés par le clan maternel, leur cadre social ne s'en retrouve pas altéré et il n'y a pas de conflits conjugaux concernant la garde. Les amours se font et se défont sans contraintes et sans instabilité familiale. Seul l'inceste est interdit. Quand un homme et une femme deviennent inséparables, ils deviennent azhu et azha, une union appelée axia[22].
La pudeur est cependant de mise et les Moso montrent rarement de signes d'affection en public. Les relations s'effectuent généralement selon le principe de la « visite furtive » : chaque fille Moso bénéficie à 13 ans d'une chambre individuelle avec accès direct appelée « babahuago » (ou chambre des fleurs), où elle est libre d'accueillir les garçons qu'elle souhaite. À la nuit tombée, les hommes quittent leur domicile familial pour rejoindre la chambre d'une amante, et repartent chez eux tôt le matin[26].
Les relations demeurent généralement secrètes, à tel point qu'il est parfois difficile de savoir qui fréquente qui. Sans vie de couple, en toute liberté et discrétion, ce système exclut si radicalement la possession que la jalousie en devient honteuse. Malgré les efforts du gouvernement chinois pour diffuser le modèle familial conjugal, de nombreux Moso restent attachés à leurs traditions. Certaines femmes estiment ne vivre avec leur compagnon que des moments d'amour et de sentiments partagés sans que les questions pratiques s'immiscent dans cette relation. Les aspects matériels, les questions de propriété, de l'éducation des enfants, tous les sujets dont débattent nécessairement les couples qui vivent ensemble, n'ont qu'une importance secondaire dans la relation entre amants du peuple Moso. Il n'y a pas de relations arrangées ou forcées, ils se sont choisis et lorsque l'homme se languit d'une compagne, il va la voir[22].
La religion des Moso est le daba (ou Ddaba), un chamanisme, préservé de génération en génération par des hommes de la même famille, appelés ddaba, ayant conservé oralement la culture Moso. Il n'y a pas de reconnaissance officielle de ce titre, mais uniquement un passage des connaissances. Malgré la présence et dominance du bouddhisme tibétain dans la région depuis des siècles, Joseph Rock, notait ça en 1947, cette tradition a toujours un rôle important dans la culture spirituelle des Moso, et cela n'a pas changé un demi siècle après[27]. Si les érudits, savent répéter les phrases, ils ne sont pas pour autant capable de les traduire complètement. Ce culte ne fait pas que survivre, il est constamment renouvelé et adapté aux évolutions de la vie sociale[28]. Autrefois, chaque sizi (parenté) avait son propre ddaba spécialisé dans la tenues des rituels de son propre sizi. Lorsque les territoires et organisations familiales changeaient, le ddaba devait s'étendre et couvrir la connaissance afin de couvrir plus d'un sizi[29]. Après l'arrivée du bouddhisme tibétain, ce type de ddaba finit par perdre sa base dans le réseau de parenté et était alors obligé de prendre une place secondaire[30].
Les Moso vénèrent une pluralité de divinités associées à la nature et à ses forces, mais placent l'amour et la fertilité au-dessus de tout. La divinité la plus importante est Hlidi Gemu, Déesse mère qu'ils associent à la montagne éponyme, qui donne sur le Lac Lugu. Sur la montagne se trouve le ventre de la déesse, une grotte sacrée où une stalagmite géante est vénérée en tant qu’idole. Il y coule une source où viennent boire les femmes qui désirent un enfant. Gemu est également la seule divinité anthropomorphique des Moso, représentée sous les traits d'une femme vêtue de blanc et de rouge, chevauchant un cheval blanc. Son culte donne lieu à un festival, le « cercle de la Montagne », qui est organisé chaque année le vingt-cinquième jour du septième mois lunaire[31].
Le bouddhisme tibétain est devenu un élément important de la religion Moso, issue d'un apport de populations extérieures, peut-être des conquêtes mongoles au XIIIe siècle[citation nécessaire][32]. Les liens entre les rois Naxi et les karmapa remontent à l'époque du 8e karmapa et du 10e karmapa qui s'est réfugié pendant environ 15 ans à la suite de l'invasion du Tibet dans les années 1640 par Güshi Khan, (qui soutenait l'église des Gelugpa et mit en place le dalaï-lama sur le trône en 1642), et épousa une femme naxi à Lijiang[33]. Selon une légende, dont fait état le réalisateur Patrick Profit, la déesse Gemu, rendue furieuse par le manque de respect des lamas pour la femme, défia les dieux bouddhistes et réussit à conserver sa place au sein du peuple Moso[22]. Cette légende marque symboliquement le syncrétisme caractéristique de la religion Moso, un bouddhisme adapté et imbibé de références locales animistes. L'influence bouddhiste s'observe largement dans la vie des Moso. Ils se rendent aux temples pour prier, des moines sont présents dans les rues, des statuettes de divinités Bouddhistes se retrouvent dans la plupart des foyers[34].
La sphère religieuse est gérée par trois types de personnes : les « Ammas », les « Dabas » et les lamas. L'Amma est la grand-mère d'une famille, la femme la plus âgée, qui jouit d'un titre honorifique important. Ancienne Dabou[35], elle est la gardienne de la maison et du culte des ancêtres. Le Daba est un homme, prêtre gardien de l'histoire et des traditions Moso. Il participe surtout aux cérémonies qui marquent la vie de la société : rites de passage à l'âge adulte, cérémonies funéraires. Les lamas, enseignants religieux du bouddhisme tibétain, participent également aux célébrations et aux processions. Selon les croyances Moso, si l'esprit d'un défunt n'est pas guidé par un Daba, il finira par se perdre, et sans les prières d'un lama, il ne pourra pas se réincarner[21].
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