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malaise ressenti par certaines personnes ayant quitté leur pays ou région d'origine De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'expression « mal du pays » désigne le malaise ressenti par certaines personnes (ou leurs descendants) ayant quitté leur pays ou région d'origine. Cela peut représenter une souffrance importante, qui ne peut alors être guérie que par un retour dans le pays ou la région d'origine.
Cette émotion se traduit dans de nombreuses langues par des mots (Heimweh, en allemand, morriña en espagnol) ou des expressions propres à la culture des pays.
Le mal du pays recouvre un sentiment de manque et de regret de son pays ou de sa région d'origine. Il peut être causé par un changement trop brutal de mode de vie qui provoque une perte de repères chez ces personnes, ou le manque d'un élément auquel la personne était attachée. Ce terme est très proche de la définition de la nostalgie, dont l'étymologie provient du grec ancien nóstos (« retour ») et álgos (« douleur »)[1].
Le mal du pays est un phénomène ancien, bien connu de certaines sociétés humaines. Il est notamment évoqué dans l'Ancien Testament dans le psaume 137 du livre des Psaumes, dans son premier verset[2] :
« Sur les bords des fleuves de Babylone, nous étions assis et nous pleurions, en nous souvenant de Sion. »
L'Odyssée, épopée grecque antique, composée après l’Iliade, vers la fin du VIIIe siècle av. J.-C. et attribuée à l’aède Homère, décrit la fabuleuse histoire d'un voyage initiatique : Ulysse parti pour la guerre de Troie voit son retour à Ithaque, sa patrie, retardé et entravé par de nombreuses péripéties. Il connaît de multiples épreuves qu'il doit affronter avec courage, avant de pouvoir retrouver sa terre natale tant désirée.
L'attachement à la patrie, au pays d'origine, est le thème essentiel de cette épopée
En Suisse, l'expression mal du pays, correspondant à l'allemand à Heimweh, signifiant littéralement « mal du chez-soi », qui, elle-même, correspond à la nostalgie de la patrie lointaine est d'origine alémanique. Il apparaît pour la première fois en 1651, dans un recueil de textes moquants[3].
C'est également dans ce pays que le Heimweh fut défini comme phénomène médical et culturel et fut longtemps considéré comme une maladie propre à ce pays et à ces habitants, ce pourquoi on l'appelait aussi le « mal du Suisse » ou Schweizerheimweh. En 1688, le médecin mulhousien Johannes Hofer le décrivit pour la première fois dans une dissertation bâloise comme une pathologie qu'il dénommait « Nostalgie », terme qui passa ensuite dans la langue française.
Dans l'article Nostalgie, maladie du pays publié dans l'Encyclopédie d'Yverdon en 1774, Albert de Haller présente ce phénomène comme une sorte de mélancolie, « qui pouvait conduire à l'affaiblissement, à la maladie et à la mort, mais que l'espoir d'un retour pouvait guérir »[4].
Jusqu'au début du XXe siècle, les symptômes dépressifs liés à l'éloignement de son pays ou de sa région d'origine étaient traités médicalement. La philosophe et historienne Tiffany Watt Smith relate dans son livre Le livre des émotions humaines (the book of human emotions) le cas de soldats suisses qui durant le XVIIe siècle, alors dans l'attente de rentrer chez eux, furent « frappés de léthargie et de tristesse à l’évocation de leur pays natal ».
Jusqu’au début du XXe siècle le mal du pays dénommé plus couramment sous le vocable « nostalgie » était un terme à usage médical, utilisé pour décrire un désir intense et considéré comme « potentiellement dangereux », pour la personne hantée par ce désir de retourner dans son pays natal[5].
Selon Christina Gierse, rédactrice en chef d'un site sur l'expatriation, les expatriés (ou émigrés) victimes du mal du pays peuvent développer des symptômes physiques et psychologiques marqués, comme des pathologies digestives et/ou dermatologiques, des troubles de l'humeur pouvant même aller jusqu'à des crises d'angoisse, voire un état dépressif. La journaliste indique également que plus la culture du pays d'accueil est éloignée de celle de l'expatrié, plus le risque de choc culturel est grand. Le fait que la famille soit restée au pays est généralement un facteur aggravant. Afin de pallier ces difficultés, la ville de Singapour héberge une antenne téléphonique de support psychologique destinée aux expatriés et dénommée Lifeline[6].
La morriña, mot espagnol dérivé du terme galicien et portugais « morrinha », est une mélancolie que l'on ressent quand on est loin de la terre sur laquelle on est né et que les dictionnaires bilingues traduisent par les termes mal de vivre, ennui ou manque, en les liant toujours à un lieu[7]. Rosalía de Castro, poète galicienne qui quitta sa région d'origine, montra au monde le terme galicien "morriña".
La saudade, mot portugais, souvent considéré comme équivalent du mal du pays est cependant définie par le dictionnaire français Larousse comme « sentiment de délicieuse nostalgie, désir d'ailleurs »[8] mais il n'y a pas de mot exact qui correspond à ce terme en français.
Le Heimat, mot allemand, ne définit pas directement le mal de vivre car il désigne le pays où l'on naît, le village où l'on a grandi, mais aussi la maison où on a passé son enfance, c'est-à-dire celle où « on est chez soi » (souvent lié à une certaine conception du bonheur et de l'attachement familial), mais il est à l'origine du terme « Heimweh » (créé en Suisse alémanique) qui, lui désigne une réelle et très forte nostalgie de son « Heimat ».
L'Hiraeth des gallois est, selon l'auteure britannique Lily B. Francis, « le mal du pays éprouvé pour un lieu, un moment on ne peut retourner ou un lieu qui jamais ne fut, teinté d'un profond sentiment d'incomplétude et de nostalgie. » l'Hiraet évoque donc un mélange de désir, de souvenirs embellis et de rêve de l'âge d'or[9]
Le poème de Joachim du Bellay (1522 - 1560) dénommé Les Regrets, a été composé par l'auteur lors de son séjour en terres italiennes. L'extrait, publié ci-dessous, illustre bien l'expression du « mal du pays », bien que ce terme n'existât pas à l'époque :
« Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison,
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m’est une province, et beaucoup davantage ? »
Dans une de ses œuvres littéraires (consultable en ligne dans le recueil les tourmentées)[10], l'écrivain et poète français Jules Barbey d'Aurevilly (1808 - 1889) est l'auteur de cette citation :
« Le passé, cette nostalgie du temps, comme le mal du pays est la nostalgie de l'espace, ne me lâcha plus, et vint profaner, par des rêveries insensées, un amour plein, magnifique, infini, et qui jusque là n'avait réfléchi que lui-même. »
Le mal du pays est un poème du romancier et dramaturge français Jean Aicard (1848 - 1921), paru dans le recueil Poèmes de Provence, en 1874[11].
Le mal du pays est un récit de l'écrivain belge francophone (É)tienne Hénaux, publié à Liège en 1842 (ISBN 978-12-744-1471-7)[12].
Le mal du pays (suivi par les sables mouvants) est une pièce théâtrale de Jacques-Pierre Amette, joué au Théâtre national de l'Odéon 12 avril 1983
Le Mal du pays. Autobiographie de la Belgique de l'écrivain belge francophone Patrick Roegiers, publié en 2003 par les éditions du Seuil est une sorte de dictionnaire nostalgique et humoristique de la Belgique.
Vincent Van Gogh a utilisé cette expression dans une lettre à son frère Théodurus dit Théo:
« Loin du pays, j'ai souvent le mal du pays pour le pays des tableaux. »
Les « Lettres à Théo » seront publiées en janvier 1914 et sont consultables sur le web[13].
« Il est un âge dans la vie, Où chaque rêve doit finir,
Un âge où l'âme recueillie
A besoin de se souvenir.
Lorsque ma muse refroidie
Aura fini, ses chants d'amour,
J'irai revoir ma Normandie,
C'est le pays qui m'a donné le jour. »
« J'ai le mal de Paris
De ses rues, d' ses boulevards
De son air triste et gris
De ses jours, de ses soirs
Et l'odeur du métro
Me revient aussitôt
Que je quitte mon Paris
Pour des pays moins gris. »
L'auteur, compositeur et interprète français Enrico Macias, expatrié d'Algérie, a écrit de nombreuses chansons qui évoquent le mal du pays :
« J'ai quitté mon pays J'ai quitté ma maison
Ma vie ma triste vie
Se traîne sans raison... »
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