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peintre français De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Lubin Baugin (né vers 1612 à Pithiviers ou à Courcelles-le-Roi - mort en 1663 à Paris) est un peintre français du XVIIe siècle.
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Né à Pithiviers ou à Courcelles-le-Roi dans une famille aisée, Lubin Baugin se forme dans l'entourage des peintres de Fontainebleau, avant de rejoindre Paris dans les années 1628-1629.
Son origine provinciale lui interdit, dans un premier temps, d'entrer dans la confrérie des peintres parisiens et de pratiquer les sujets les plus élevés de la hiérarchie des genres. Aussi s'installe-t-il rue du Cœur-Volant, dans l'enclos de l'Abbaye de Saint-Germain-des-Prés, qui accueillait les peintres provinciaux, à l'instar des frères Le Nain ses contemporains, ou étrangers, notamment flamands, qui peignaient des tableaux destinés à la décoration des intérieurs privés. Il est reçu en 1629 maître peintre de la corporation de Saint-Germain-des-Prés. C'est pourquoi l'on suppose[1] que les quatre natures mortes qui sont parvenues jusqu'à nous, la Nature-morte à la coupe d'abricots, la Nature morte à l'échiquier, le Dessert aux gaufrettes et la Coupe de fruits datent de cette période des années 1630-1635. Une cinquième nature morte, dite au couteau ou au plat en étain ou encore à la miche de pain[2] lui est attribué, de façon incertaine[3].
Grâce à sa fortune familiale, Baugin se rend en Italie entre 1632 et 1640. Il y épouse une Romaine, Brigitte D’Asté (sœur du peintre Jean Baptiste d’Asté) dont il a deux enfants à Rome, et,deux autres a Paris en 1637 et 1640 1641 et 1642. S'il a longtemps été difficile de prouver ce séjour, les deux œuvres Les Saints Barthélemy et Mathias et Les Saints Philippe et Thaddée, achetée par le musée des Beaux-Arts de Nancy en 2016, viennent témoigner en ce sens, en particulier d'un séjour en Émilie, puisqu'elles sont des copies de la fresque de la coupole de l'église Saint-Jean-l'Évangéliste de Parme[4]. Il revient en France chargé de l'influence des peintres italiens comme Corrège, Parmesan et Raphaël, vers lesquels son inspiration va désormais se tourner.
De retour à Paris, Baugin s'installe pont Notre-Dame. Titulaire d'un brevet de peintre du roi (vers 1641), il choisit désormais des sujets religieux, d'un rapport plus important que les natures mortes. Vers 1640-1642, il peint des huiles sur bois de petit format, où l'on reconnaît l'influence de Raphaël, comme dans le portrait de la Sainte Famille conservé au musée des beaux-arts de Dijon.
En 1643, c'est la consécration : il entre enfin dans la corporation des peintres parisiens, et peut à ce titre pleinement exercer son métier dans la capitale. Fort du titre de « maître peintre à Paris et peintre ordinaire du roi », il s'installe rue Saint-Antoine, et peut, dans un style que Jacques Thuillier a nommé l'atticisme parisien, pratiquer les genres les plus nobles, pour une clientèle officielle : grands tableaux de sujets mythologiques, retables et décors sacrés, notamment celui de la chapelle de la Congrégation des Nobles. Il reçoit également commande de plusieurs tableaux pour orner les chapelles de Notre-Dame de Paris. Il est alors au sommet de sa gloire et entre, en 1651, à l'Académie royale de peinture et de sculpture - et en est exclu quatre ans plus tard pour absentéisme.
La fin de sa carrière est marquée par un style plus dépouillé, mais qui fait toujours preuve de la même maîtrise technique et du même sens de la mise en scène, comme en témoigne son Christ mort pleuré par deux anges, d'une sobriété toute pathétique, considéré comme son chef-d'œuvre[5].
Le lendemain de sa mort, le , il est enterré à l'église Saint-Sulpice, à Paris.
On a longtemps pensé que trois périodes ponctuent son œuvre :
Cependant, à partir de 1955, lorsque Michel Faré défend la thèse d'une œuvre unique, les spécialistes s'y rallient progressivement, à mesure que s'affirme la connaissance de cette œuvre[6].
À sa mort, Lubin Baugin sombre rapidement dans l'oubli, sa manière étant jugée fautive par rapport au classicisme triomphant de la fin du XVIIe siècle. L'arrêt définitif que donne sur son œuvre l'influent historiographe André Félibien en 1688, en raison de « certaines pratiques de peindre qui ne sont point naturelles », lui porte un coup fatal : « Lubin Baugin ne peut être mis au nombre des excellen[t]s peintres[7]. » Et le surnom de « petit Guide » qui lui fut attribué au XVIIIe siècle, en raison d'un rapprochement (malencontreux) avec Guido Reni fait par le collectionneur d'art Pierre-Jean Mariette[8] et qui persiste encore de nos jours[9], confirma le dénigrement dont son œuvre fut victime, et eut pour conséquence de l'enterrer pendant près de deux siècles.
Lubin Baugin est redécouvert au XXe siècle, notamment par le biais de deux de ses natures mortes (à l'échiquier et à la chandelle), qui sont exposées lors de la fameuse exposition des « Peintres de la réalité en France au XVIIe siècle » organisée par Paul Jamot et Charles Sterling et qui se tint au musée de l'Orangerie en 1934. Cette exposition (qui contribua à faire redécouvrir également un peintre comme Georges de La Tour) le rapproche d'autres maîtres de natures mortes comme Jacques Linard ou Louise Moillon. Cette exposition a donné lieu à une nouvelle exposition hommage, au musée de l'Orangerie, du au , intitulée « Orangerie, 1934 : les “peintres de la réalité” », et qui exposa les deux mêmes natures mortes de Baugin[10].
Mais la manière du Baugin peintre de natures mortes était tellement différente de celle du peintre des années parisiennes que certains historiens d'art, tels que Charles Sterling, purent émettre l'hypothèse de l'existence de deux peintres homonymes, qu'une exposition du musée des beaux-arts d'Orléans, « Artistes orléanais du XVIIe siècle », confronta en 1958.
La pleine reconnaissance de son œuvre, en particulier de sa partie religieuse, est due en grande partie à un article de Jacques Thuillier, intitulé Lubin Baugin, paru dans la revue L'Œil en 1963.
Depuis, l'intérêt porté à Baugin n'a fait que croître, pour preuve, l'exposition Lubin Baugin (vers 1610-1663), un grand maître enfin retrouvé, qui s'est tenue au musée des beaux-arts d'Orléans du au , puis au musée des Augustins de Toulouse du au , et qui présenta au public treize toiles nouvellement mises au jour du maître[11]. À cette occasion fut publiée, sous la direction de Jacques Thuillier, la première véritable monographie consacrée au peintre, recensant ses 100 œuvres actuellement identifiées.
« Voici le peintre le plus charmant du XVIIe siècle français. Non pas le plus brillant (qui l'emporterait sur Simon Vouet ?) ni le plus élégant (Eustache Le Sueur reste le premier) ; le plus profond, le plus savant, moins encore : il lui arrive de dessiner un pied trop menu, un profil trop sec, sans qu'on puisse toujours décider entre invention et négligence. [...] Son univers, tout pénétré d'une lumière fine et bleue qui enlève aux êtres leur pesanteur, qui livre des créatures idéales à un rêve de douceur et de tendresse, offre, dans ce siècle où la peinture hésite toujours plus ou moins entre le réalisme et la pompe, un refuge tout de délicate fiction. Regards voilés ; sourires graves, lointains à la Vinci où tremble la silhouette d'un arbre grêle : comment ne pas s'attacher à cette poésie d'une qualité si subtile ? »
— Jacques Thuillier, historien d'art, texte de 1963 (Histoire de l'art – 2009. (ISBN 978-2081227767)).
Charmant et poétique, Lubin Baugin l'est assurément. Lorsque l'historien de l'art Jacques Thuillier écrivait ce texte, en 1963, Baugin venait à peine d'être redécouvert : trois ans auparavant, Charles Sterling avait révélé son talent dans l'exposition « Peintres de la réalité » où étaient présentées certaines de ses natures mortes. Le peintre excellait dans la représentation des objets inanimés : une économie de moyens, une qualité de silence qui annonçaient déjà l'œuvre de Jean Siméon Chardin, un siècle plus tard, et dont on peine à comprendre qu'elles soient si longtemps restées dans l'oubli.
Dans La Vie mode d'emploi[17] de Georges Perec, paru en 1978, la Nature Morte à l'échiquier fait partie des tableaux donnant lieu à des « Allusions et détails »[18], parfois très minces, qui se répartissent dans dix chapitres:
Dans le roman de Pascal Quignard publié en 1991, Tous les matins du monde, le compositeur Sainte Colombe est (en dépit de vraisemblance chronologique) un ami de Lubin Baugin, alors peintre de natures mortes, ce qui donne lieu à des allusions précises à la Nature morte aux gaufrettes, et à la Nature morte à l'échiquier:
Dans l'adaptation filmique du roman de Quignard par Alain Corneau, sorti également en 1991, Lubin Baugin, joué par Michel Bouquet, peint les deux mêmes natures mortes, dont les modèles apparaissent à l'écran. Alain Corneau dit à ce propos : « J'ai tenté de reconstruire exactement le tableau [Les Gaufrettes] […] et puis avec un mouvement de fondu-enchaîné ça devient le tableau ; […] ce petit moment est un petit moment d'image musicale qui est pour moi l'équivalent de la musique[24]. »
La Main d'oublies, de Sophie Nauleau, publié aux Éditions Galilée en 2007, est un récit qui tient à la fois de l’essai et de l’enquête quasi policière, et qui explore le rôle de la nature morte Le Dessert de gaufrettes dans le roman de Pascal Quignard et, à sa suite, dans le film d'Alain Corneau.
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