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œuvre d'Augustin d'Hippone De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Les Confessions (en latin Confessiones) est une œuvre autobiographique d'Augustin d'Hippone, saint Augustin, écrite entre 397 et 401, où il raconte sa quête de Dieu. Il a donc un double but : avouer ses péchés et ses fautes directement à Dieu (confession au sens chrétien) mais aussi proclamer la gloire de Dieu. L'œuvre est composée de treize livres. « Les treize livres de mes Confessions louent le Dieu juste et bon de mes maux et de mes biens, ils élèvent vers Dieu l'intelligence et le cœur de l'Homme. » C'est un ouvrage fondamental, tant par la profondeur des analyses qui y sont faites que par la qualité du style de l'écriture.
Les Confessions | ||||||||
Auteur | Augustin d'Hippone | |||||||
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Pays | Empire romain | |||||||
Genre | autobiographie, théologie | |||||||
Date de parution | entre 397 et 401 | |||||||
Chronologie | ||||||||
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L'Empire romain connaît de profondes transformations au IVe siècle. Durant son règne de 306 à 337, Constantin réunifie et réforme l'Empire. Il fonde une nouvelle capitale, Constantinople, et favorise l'essor du christianisme, religion nouvelle à laquelle il se convertit. L'Empire romain est ensuite à nouveau divisé en deux parties : l'Occident et l'Orient. Chacune est dirigée par un empereur et par un second. On parle alors de tétrarchie (deux Auguste et deux César). Il y a aussi deux capitales (Constantinople à l'Est et Ravenne, puis Milan à l'Ouest). On assiste à cette époque à une débauche de luxe et de raffinement oriental à la cour impériale.
Théodose réunit une dernière fois brièvement l'empire en 394. À sa mort en 395, un malaise s'installe dans l'Empire, dont la puissance militaire s'est considérablement affaiblie, à la suite des luttes internes et des conflits frontaliers incessants. Quand Augustin rédige les Confessions, l'empire n'a pas encore succombé aux invasions mais la menace plane. Une première étape importante sera le sac de Rome en 410 par le Wisgoth Alaric, événement souvent considéré comme marquant la fin de l'Antiquité.
Au IVe siècle, on assiste à un retour au goût du classique, les auteurs prenant par exemple Cicéron pour modèle.
On peut citer quelques auteurs de l'époque :
Cette œuvre a été écrite en trois années. Augustin a alors 45 ans, il est baptisé depuis dix ans et est évêque d'Hippone depuis deux ans.
En 394, il comprend que l'être humain est incapable de se tourner vers le bien sans la grâce divine, après une relecture du verset de saint Paul : « Qu'as-tu que tu ne l'aies reçu ? ».
Dans les livres I à IX, Augustin raconte de façon chronologique sa vie de sa naissance à la mort de sa mère. Les livres X à XIII, eux, contiennent une méditation, une réflexion ontologique et théologale, une célébration de Dieu.
Tel le Grec antique dont Rome s’est emparé de la culture, saint Augustin est un citoyen. En tant que tel, il est homme de loisir, tout entier consacré à la gestion de sa cité[1]. Sa cité, c’est sa relation avec Dieu, son diocèse d’Hippone, toutes prenantes qu’en soient les charges, restant secondaire. Or, sa confession de louange est aussi celle d’une vie d’homme. Pas de n’importe lequel, un mortel et un pécheur. Cet auto-accusé passe aux aveux, se raconte de façon stupéfiante, du jamais vu, du jamais entendu. Certes, l’Antiquité tardive n’avait pas ignoré le regard rétrospectif, mais uniquement sur des itinéraires intellectuels ou spirituels. Augustin lui-même, rarement et fugitivement, s’était déjà interrogé. Ici, cependant, il s’agit d’autre chose : pour la première fois, en toute lucidité et franchise, un homme de l’esprit, parmi les plus grands – et qui le savait – , un primat de l’Église, point de mire de la chrétienté, jetait sa vie à la merci des admirateurs ou des chiens. Dieu savait tout cela et connaissait la suite (« Qu’y aurait-il en moi qui te serait caché même si je refusais de te le confesser ? » Confessions, X, 2). Vers lui ne vont que l’acte de contrition, la profession de foi et la confession de louange. Tout le reste, cette nudité, s’offre aux hommes, quitte à donner des armes à la polémique, voire au dénigrement. Avec saint Augustin, naissait un genre nouveau, celui que nous appelons aujourd’hui « autobiographique ».
La réflexion d’Augustin sur ce parti qu’il a pris de se livrer n’a pas cessé avec l’écriture des Confessions. Une douzaine d’années plus tard, il est revenu sur ce qu’il appelle l’enuntiatio uitae. Il faut, dit-il, « raconter sa vie », non pour se complaire à soi-même ou s’être utile, mais pour le devenir aux autres. C’est un service dû à l’humanité, la confession de soi complétant nécessairement celles de foi et de louange. Au moment de dire l’état de son âme, Augustin écrira : « Je veux faire la vérité dans mon cœur, devant toi par la confession, mais aussi dans mon livre, devant de nombreux témoins » (X,3). Non qu’il considère sa vie comme édifiante, il ne la dévoile pas comme un bien précieux ou un modèle, ainsi que l’avait fait Sénèque qui, au moment de se donner la mort, condamné par Néron, disait à son entourage qu’à défaut d’autre chose, il leur léguait du moins l’essentiel, « l’image de sa vie »[2]. À ses yeux, édifiante elle ne l’est que dans la mesure où elle montre comment, la grâce aidant, et à la condition d’une réceptivité active à ses appels, l’homme peut sortir de la « région de dissemblance » et se tourner vers Dieu. Les Confessions présentent donc un modèle chrétien fondé, et c’est-là leur puissante originalité, sur des données autobiographiques.
Pourtant, si l’autobiographie est bien, selon Philippe Lejeune, le récit rétrospectif qu’une personne fait de sa propre existence en mettant l’accent sur sa vie individuelle[3], le propos d’Augustin n’est pas primordialement autobiographique. Certes, le livre fait connaître la première vie de l’auteur, jusqu’à sa trente-troisième année, mais la diagonale de l’anecdotique en est vite achevée. De plus, il comporte des omissions, des silences, des blancs. De la famille, seule émerge la figure, inébranlable, brûlante, de Monique, sa mère. Rien, en revanche, sur la mère d’Adeodatus, son fils, rien sur ce fils lui-même, chéri et perdu, à part son nom. Des amis, ne demeure que le tendre aimé de Thagaste, emporté par la fièvre à vingt-deux ans. D’autre part, la chronologie laisse filer des anachronismes, bénins certes mais réels. La mobilisation des souvenirs, c’est évident, n’a pas pour premier objectif d’alimenter la narration suivie et homogène d’un vécu repensé.
Cette reviviscence des souvenirs, tenus en réserve et rangés par catégories dans les « vastes palais de la mémoire », donne l’occasion d’une page souvent citée : « […] vision poétique […] découvrant l'abîme de signification que revêt le passé, l'émouvante docilité d'un souvenir animé de la vie du possible, paré non des livrées ternies du temps déchu, mais de la luxuriance de la personne retrouvée »[4]. Elle n’est pas d’une pièce ; pour l'extraire, il convient de piocher çà et là, d’en supprimer les digressions, de la décanter.
« Et j'arrive aux vastes palais de la mémoire, là où se trouvent les trésors d'images innombrables […]. Quand je suis là, je fais comparaître tous les souvenirs que je veux. Certains s'avancent aussitôt […]. Je les éloigne avec la main de l'esprit du visage de ma mémoire, jusqu'à ce que celui que je veux écarte les nuages et du fond de son réduit paraisse à mes yeux […]. J'ai beau être dans les ténèbres et le silence, je peux, à mon gré, me représenter les couleurs par la mémoire, distinguer le blanc du noir, et toutes les autres couleurs les unes des autres ; mes images auditives ne viennent pas troubler mes images visuelles : elles sont là aussi, cependant, comme tapies dans leur retraite isolée […]. Je discerne le parfum des lis de celui des violettes, sans humer aucune fleur ; je peux préférer le miel au vin cuit, le poli au rugueux, sans rien goûter ni rien toucher, seulement par le souvenir […]. C'est en moi-même que se fait tout cela, dans l'immense palais de mon souvenir. C'est là que j'ai à mes ordres le ciel, la terre, la mer et toutes les sensations […]. C'est là que je me rencontre moi-même […]. Grande est cette puissance de la mémoire, prodigieusement grande, ô mon Dieu ! C'est un sanctuaire d'une ampleur infinie […]. Les hommes s'en vont admirer la cime des montagnes, les vagues énormes de la mer, le large cours des fleuves, les côtes de l'océan, les révolutions et les astres, et ils se détournent d'eux-mêmes[5]. »
Telle est donc, affichée, la maîtrise augustinienne de la remémoration. Sa démarche confirme et révèle l’immense curiosité qu’Augustin se porte à lui-même. Son enfance lointaine « morte depuis longtemps », il la reconstruit telle une mosaïque éparpillée, avec des petits carreaux de souvenir, et si la mémoire lui fait défaut, il emprunte à celle des autres ou y supplée par les renseignements que lui apporte son expérience personnelle. « C’est ce que l’on m’a dit : je l’ai cru parce qu’on voit les autres enfants se comporter ainsi » (I,6,11). Aussi retrouve-t-il les frémissements de son adolescence imaginative, inquiète et féconde : « Je n’aimais pas encore, et j’aimais à aimer » (le célèbre amare amabam, III,1,74). Les passions le « tirent par son vêtement de chair » (ibid., 11) : émois, désirs, sentiments, enthousiasmes, regrets, remords. Un homme, en effet, jouissant du corps, abandonné sans retenue aux beautés de ce qu’il appelle la « concupiscence ». Comme l'écrit Joseph Trabucco, « Il n'a été étranger à aucun des sentiments de la terre, l'amitié lui fut douce. Il l'a aimée jusqu'à ressentir de la perte d'un ami une sorte de désespoir. Il a eu le goût des larmes. Il a été fou de poésie[6]. »
Le livre dit aussi que la mémoire a eu ses failles, qu’elle a trahi : oublié, le menu de certains écrits, oublié, si la personnalité de l’un avait vraiment le charme qu’il lui prête, oublié pourquoi l’autre était absent lors de la visite d’un troisième à Milan, oubliées, même les réponses à sa mère pendant leur dernier entretien dans le jardin d’Ostie. De plus, mémoire délibérément sélective, écartant de la remontée les souvenirs inutiles à la perspective spirituelle. Ainsi : « Je passe sous silence bien des choses, dans ma hâte d’en arriver à celles qui me pressent pour que je te les confesse » (III,21). « Chaque goutte de temps [lui] coût[ant] cher », il ne racontera pas son accession à l’épiscopat, « les exhortations, les consolations et les directions » (ibid.) par lesquelles Dieu l’a conduit à prêcher sa parole. Rien non plus des années passées à Thagaste après son retour d’Italie, ni de son séjour à Rome suivant la mort de sa mère en l’été 387. Le dernier rappel, justement : ces pleurs versés à Ostie sur la fraîche tombe, et l’évocation fugitive de son père Patricius. Ultime faiblesse, avant d’entrer dans le monde héroïque des serviteurs (ou esclaves) de Dieu (serui Dei).
Ainsi, la lecture des Confessions devrait être celle d’un témoignage au service d’une « pédagogie de la transmission de la foi »[7]. « Je raconte cela, mais à qui ? Ce n’est pas à toi, mon Dieu ; mais devant toi, je le raconte à ma race, à la race humaine […] Et pourquoi cela ? Évidemment pour que moi et mon lecteur éventuel, nous considérions de quelle profondeur il faut crier vers toi » (II,3). La lecture sera d’ « imitation » et de communion spirituelle, et au livre X (IV,6), Augustin martèle encore sa certitude : « Tel est le fruit que j’attends de ces confessions, où je vais me montrer, non tel que je fus, mais tel que je suis. Je veux les faire non seulement devant Vous, avec cette mystérieuse joie qui tremble, avec cette tristesse mystérieuse qui espère, mais aussi pour être entendu des fils des hommes, associés à ma foi, à mon allégresse, et qui participent à ma condition mortelle – mes concitoyens, voyageurs ici-bas comme moi, et qui marchent sur ma route, soit devant moi, soit à côté de moi […]. Je ne suis qu’un petit enfant, mais mon Père vit toujours, et je trouve en lui un tuteur capable de m’aider […]. C’est donc à ceux que vous m’ordonnez de servir que je me montrerai, non pas tel que j’ai été, mais tel que je suis désormais, tel que je suis aujourd’hui […]. Voilà dans quel esprit je souhaite qu’on m’écoute[8]. ».
Alors, se trouveraient-ils exclus, ceux qu’Augustin appelle « les enfants étrangers » ? Qui se situent en marge de sa foi ? Cette « race curieuse de connaître la vie d’autrui, paresseuse à corriger la sienne » (X,3) ? Peut-être. Mais l’œuvre a semé sa beauté et, à quelque frontière spirituelle que l’on se situe, on s’émerveillera toujours et encore du parcours accompli par l’enfant de Thagaste, et surtout, de la hauteur de « son absolue exigence d’homme dans l’ordre de l’esprit »[9],[10].
On peut distinguer les caractéristiques suivantes dans l'œuvre d'Augustin :
Ce passage se situe au livre II, chapitre IV : Augustin s'y accuse d'avoir, à seize ans, volé des poires en compagnie d'une bande de mauvais garçons. Mais il s'inquiète moins du larcin lui-même que de ses causes : il n'a pas agi par nécessité, ni même par envie de ces fruits, mais par « plénitude d'iniquité » : « Et ce n'est pas de l'objet convoité par mon larcin, mais du larcin même et du péché que je voulais jouir. » En effet, dans ce passage des Confessions, Saint Augustin raconte un vol qu'il a commis : tout d'abord il parle directement à Dieu, montrant bien qu'il n'a pas volé car il en avait besoin mais bien parce qu'il avait envie de jouir de l'acte défendu : « j'ai volé ce que je possédais » Dans le paragraphe qui suit, saint Augustin raconte son histoire : « une bande de mauvais garçons », « la nuit », « dans le voisinage » qui s'en vont pour voler des poires pour ensuite les jeter aux cochons, leur seul plaisir étant de jouir d'avoir volé quelque chose... Enfin, dans le dernier paragraphe du passage, Saint Augustin montre à Dieu (auquel il parle directement) : « Voilà mon cœur, ô Dieu », qu'il a aimé voler, et que, s'il est tombé dans « l'infamie », c'est pour pouvoir avoir le plaisir d'avoir commis un acte défendu. Il finit par une phrase à portée morale pour tous les hommes : l'homme peut faire le mal seulement pour jouir de faire le mal : « Ô laideur de l'âme qui abandonnait votre (Dieu) soutien pour sa ruine, et ne convoitait dans l'infamie que l'infamie elle-même ». Dans ce passage, l'expression d'un « je » est très présente, et révèle une véritable expérience personnelle et l'expression de sentiments personnels.
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