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fable française de La Fontaine De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le Berger et le Roi est la neuvième fable du livre X de Jean de La Fontaine situé dans le second recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1678.
Le Berger et le Roi | ||||||||
Illustration par Gustave Doré | ||||||||
Auteur | Jean de La Fontaine | |||||||
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Pays | France | |||||||
Genre | Fable | |||||||
Éditeur | Claude Barbin | |||||||
Lieu de parution | Paris | |||||||
Date de parution | 1678 | |||||||
Chronologie | ||||||||
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La nouvelle interpelle le lecteur sur les dangers de l'ambition.
Dans la fable, le fabuliste met en scène un berger, appelé par le roi à exercer de hautes fonctions à la Cour.
Très rapidement, le berger devenu haut fonctionnaire est en butte à la jalousie des autres courtisans.
Le fabuliste crée une mise en abîme, dans la mesure où la fable contient elle-même une fable, racontée au berger par un tiers qui le met en garde sur le fait d'agir de manière inappropriée.
LE BERGER ET LE ROI
[Tavernier + Pilpay]
Deux démons[N 1] (1) à leur gré partagent notre vie,
Et de son patrimoine ont chassé la raison.
Je ne vois point de cœur qui ne leur sacrifie :
Si vous me demandez leur état et leur nom,
J'appelle l'un Amour, et l'autre Ambition.
Cette dernière étend le plus loin son empire ;
Car même elle entre dans l'amour.
Je le ferais bien voir ; mais mon but est de dire
Comme un Roi fit venir un Berger à sa cour.
Le conte est du bon temps[N 2], non du siècle où nous sommes.
Ce Roi vit un troupeau qui couvrait tous les champs,
Bien broutant, en bon corps[N 3], rapportant tous les ans,
Grâce aux soins du Berger, de très notables sommes.
Le Berger plut au Roi par ces soins diligents.
Tu mérites, dit-il, d'être pasteur de gens[N 4] ;
Laisse là tes moutons, viens conduire des hommes.
Je te fais juge souverain.
Voilà notre Berger la balance[N 5] à la main.
Quoiqu'il n'eût guère vu d'autres gens qu'un Ermite,
Son troupeau, ses mâtins, le loup, et puis c'est tout,
Il avait du bon sens ; le reste vient ensuite.
Bref, il en vint fort bien à bout.
L'Ermite son voisin accourut pour lui dire :
Veillé-je ? et n'est-ce point un songe que je vois ?
Vous favori ! vous grand ! Défiez-vous des rois :
Leur faveur est glissante, on s'y trompe ; et le pire
C'est qu'il en coûte cher ; de pareilles erreurs
Ne produisent jamais que d'illustres malheurs.
Vous ne connaissez pas l'attrait qui vous engage.
Je vous parle en ami. Craignez tout. " L'autre rit,
Et notre Ermite poursuivit :
Voyez combien déjà la Cour vous rend peu sage.
Je crois voir cet Aveugle à qui dans un voyage
Un Serpent engourdi de froid
Vint s'offrir sous la main : il le prit pour un fouet.
Le sien s'était perdu, tombant de sa ceinture.
Il rendait grâce au Ciel de l'heureuse aventure,
Quand un passant cria : " Que tenez-vous, ô Dieux !
Jetez cet animal traître et pernicieux,
Ce Serpent. C'est un fouet . C'est un Serpent, vous dis-je.
À me tant tourmenter quel intérêt m'oblige ?
Prétendez-vous garder ce trésor ? Pourquoi non ?
Mon fouet était usé ; j'en retrouve un fort bon ;
Vous n'en parlez que par envie.
L'Aveugle enfin ne le crut pas ;
Il en perdit bientôt la vie.
L'animal dégourdi piqua son homme au bras.
Quant à vous, j'ose vous prédire
Qu'il vous arrivera quelque chose de pire.
Eh ! que me saurait-il arriver que la mort ?
Mille dégoûts[N 6] viendront ", dit le prophète Ermite.
Il en vint en effet ; l'Ermite n'eut pas tort.
Mainte peste de cour fit tant, par maint ressort[N 7],
Que la candeur du juge, ainsi que son mérite,
Furent suspects au Prince. On cabale, on suscite
Accusateurs et gens grevés[N 8] par ses arrêts.
De nos biens, dirent-ils, il s'est fait un palais.
Le Prince voulut voir ces richesses immenses ;
Il ne trouva partout que médiocrité[N 9],
Louanges du désert et de la pauvreté[N 10] ;
C'étaient là ses magnificences.
Son fait[N 11], dit-on, consiste en des pierres de prix.
Un grand coffre en est plein, fermé de dix serrures.
Lui-même ouvrit ce coffre, et rendit bien surpris
Tous les machineurs d'impostures.
Le coffre étant ouvert, on y vit des lambeaux,
L'habit d'un gardeur de troupeaux,
Petit chapeau, jupon, panetière[N 12], houlette[N 13],
Et je pense aussi sa musette.
Doux trésors, ce dit-il, chers gages qui jamais
N'attirâtes sur vous l'envie et le mensonge,
Je vous reprends ; sortons de ces riches palais
Comme l'on sortirait d'un songe.
Sire, pardonnez-moi cette exclamation.
J'avais prévu ma chute en montant sur le faîte.
Je m'y suis trop complu ; mais qui n'a dans la tête
Un petit grain d'ambition ? "
— Jean de La Fontaine, Fables de La Fontaine, Le Berger et le Roi, texte établi par Jean-Pierre Collinet, Fables, contes et nouvelles, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, p. 408
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