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fable de Jean de la Fontaine De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le Lion, le Singe et les Deux Ânes est la cinquième fable du livre XI de Jean de La Fontaine situé dans le second recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1678.
Le Lion, le Singe et les deux Ânes | ||||||||
Gravure de Jacques Jean Pasquier d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759 | ||||||||
Auteur | Jean de La Fontaine | |||||||
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Pays | France | |||||||
Genre | Fable | |||||||
Éditeur | Claude Barbin | |||||||
Lieu de parution | Paris | |||||||
Date de parution | 1678 | |||||||
Chronologie | ||||||||
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Le Lion, pour bien gouverner,
Voulant apprendre la morale,
Se fit un beau jour amener
Le Singe Maître ès arts[N 1] chez la gent animale.
La première leçon que donna le régent[N 2]
Fut celle-ci : " Grand Roi, pour régner sagement,
Il faut que tout prince préfère
Le zèle de l'État à certain mouvement
Qu'on appelle communément
Amour propre[N 3] ; car c'est le père,
C'est l'auteur de tous les défauts
Que l'on remarque aux animaux.
Vouloir que de tout point[N 4] ce sentiment vous quitte,
Ce n'est pas chose si petite
Qu'on en vienne à bout en un jour :
C'est beaucoup de pouvoir modérer cet amour.
Par là, votre personnage auguste
N'admettra jamais rien en soi
De ridicule ni d'injuste.
Donne-moi, repartit le Roi,
Des exemples de l'un et l'autre.
Toute espèce, dit le docteur,
(Et je commence par la nôtre)
Toute profession s'estime dans son cœur,
Traite les autres d'ignorantes,
Les qualifie impertinentes[N 5] ;
Et semblables discours qui ne nous coûtent rien.
L'amour-propre au rebours[N 6] fait qu'au degré suprême
On porte ses pareils ; car c'est un bon moyen
De s'élever aussi soi-même.
De tout ce que dessus[N 7] j'argumente[N 8] très bien
Qu'ici-bas maint talent n'est que pure grimace,
Cabale, et certain art de se faire valoir,
Mieux su des ignorants que des gens de savoir.
L'autre jour suivant à la trace
Deux Ânes qui, prenant tour à tour l'encensoir[N 9],
Se louaient tour à tour, comme c'est la manière,
J'ouïs que l'un des deux disait à son confrère :
Seigneur, trouvez-vous pas bien injuste et bien sot
L'homme, cet animal si parfait ? Il profane
Notre auguste nom, traitant d'âne
Quiconque est ignorant, d'esprit lourd, idiot :
Il abuse encore d'un mot,
Et traite notre rire, et nos discours de braire[N 10].
Les humains sont plaisants de prétendre exceller
Par-dessus nous ; non, non ; c'est à vous de parler,
À leurs orateurs de se taire :
Voilà les vrais braillards ; mais laissons là ces gens :
Vous m'entendez, je vous entends :
Il suffit ; et quant aux merveilles
Dont votre divin chant vient frapper les oreilles,
Philomèle[N 11] est au prix[N 12] novice dans cet art :
Vous surpassez Lambert[N 13]. L'autre Baudet repart :
Seigneur, j'admire en vous des qualités pareilles.
Ces Ânes, non contents de s'être ainsi grattés[N 14],
S'en allèrent dans les cités
L'un l'autre se prôner : chacun d'eux croyait faire,
En prisant ses pareils, une fort bonne affaire,
Prétendant que l'honneur en reviendrait sur lui.
J'en connais beaucoup aujourd'hui,
Non parmi les baudets, mais parmi les puissances[N 15]
Que le Ciel voulut mettre en de plus hauts degrés,
Qui changeraient entre eux les simples Excellences[N 16],
S'ils osaient, en des Majestés.
J'en dis peut-être plus qu'il ne faut, et suppose
Que Votre Majesté gardera le secret.
Elle avait souhaité d'apprendre quelque trait
Qui lui fit voir entre autre chose
L'amour-propre donnant du ridicule aux gens.
L'injuste aura son tour : il y faut plus de temps. "
Ainsi parla ce Singe. On ne m'a pas su dire
S'il traita l'autre point[N 17] ; car il est délicat ;
Et notre Maître ès arts, qui n'était pas un fat[N 18],
Regardait ce Lion comme un terrible sire.
— Jean de La Fontaine, Fables de La Fontaine, Le Lion, le Singe et les Deux Ânes , texte établi par Jean-Pierre Collinet, Fables, contes et nouvelles, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, p. 433
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