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association chrétienne De Wikipédia, l'encyclopédie libre
La Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) est une association catholique et apostolique d’éducation populaire et de formation spirituelle à destination des jeunes du milieu ouvrier, généralement considérée comme étant située à gauche, voire, dans le passé, à l'extrême gauche de l'échiquier politique.
« Un jeune travailleur vaut plus que tout l'or du monde car il est fils de Dieu » |
Fondation |
1925 |
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Origine |
Belgique |
Sigle |
JOC |
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Zone d'activité |
Mondiale (plus de 50 pays) |
Type | Association de jeunesse Association d’éducation populaire Mouvement d'église Organisation du mouvement ouvrier |
Structure | Jeunesse ouvrière chrétienne internationale (JOCI) Coordination internationale des JOC (CIJOC) |
Pays |
Fondateur | |
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Présidente |
Laetitia Navarro (d) (depuis ) |
Récompense | |
Site web |
Créée en Belgique en 1925 par le père Joseph Cardijn, elle est aujourd'hui ancrée dans la majorité des pays francophones et présente dans plus d'une cinquantaine de pays au total[1], par le biais de deux organismes internationaux : la Jeunesse ouvrière chrétienne internationale (JOCI) et la Coordination internationale des Jeunesses ouvrières chrétiennes (CIJOC).
La JOC a pour but :
Les militants de la JOC sont appelés des « jocistes »[2] et, en 2014, la JOC belge change de nom, passant de « Jeunesse ouvrière chrétienne » à « Jeunes organisés et combatifs »[3], conservant ainsi l'acronyme mais abandonnant les références exclusives au christianisme et au monde ouvrier[3].
Les mouvements nationaux JOC partagent trois caractéristiques fondamentales communes, plus ou moins affirmées selon les pays :
Le slogan de la JOC est une citation de son fondateur Joseph Cardijn : « Un jeune travailleur vaut plus que tout l'or du monde car il est fils de Dieu »[11],[12].
La pédagogie centrale de la JOC est la révision de vie[13],[14],[15],[16]. C'est une méthode de relecture en trois étapes qui se vit généralement en équipe de 3 à 10 jeunes[17],[18] :
La méthode de la révision de vie est également utilisée par d'autres mouvements d'action catholique. Elle a été mise en lumière par le Pape Jean XXIII dans la lettre encyclique Mater & Magistra[19].
La JOC a développé différentes méthodes de formation et d'action qui lui sont propres :
Au XIXe siècle, la révolution industrielle pousse une population majoritairement rurale à quitter les campagnes pour travailler dans les villes. À la fin du XIXe siècle, une crise économique majeure éclate : la Grande Dépression (1873-1896) qui affecte grandement la Belgique et pousse la classe ouvrière encore plus dans la misère. Dans les années 1890, la dépression cède la place à une expansion de la société industrielle, la population est asservie, hommes, femmes et enfants sont mis au travail pour assouvir les besoins grandissants de main d’œuvre[27],[28]. Les enfants et les jeunes entrent massivement dans le circuit du travail, dans le monde des adultes sans aucune transition. Les jeunes sont engrenés dans la fatalité, le déracinement et le manque d’identité propre.
Les conditions de travail sont inhumaines, la rémunération très maigre et les journées de travail très longues allant de dix à douze heures sans couverture sociale. Au même moment, de nombreux mouvements sociaux et contestations ouvrières contre la domination de la bourgeoisie éclatent aux quatre coins du monde. En Belgique, cette crise donne lieu aux « émeutes de la faim » en 1886[29],[27]. Le Parti catholique, alors seul au pouvoir de 1884 à 1916, cède aux pressions et l’émancipation de la masse ouvrière débute. En 1893, le droit de vote plural réservé aux hommes remplace le vote censitaire. Le Parti Ouvrier Belge accède à la Chambre des représentants et les autorités publiques s’intéressent alors aux problèmes des classes ouvrières et adoptent les premières lois sociales dès 1887, posant ainsi les premières pierres d’un système de protection des travailleurs et de sécurité sociale.
Au milieu du XIXe siècle, le patronage[note 1] se développe en Belgique et constitue pendant longtemps la seule association catholique destinée aux jeunes de milieu populaire[30]. Des enfants et des jeunes travailleurs de 12 à 20 ans commencent à se réunir en petits cercles tous les dimanches sous la direction de bourgeois et de nobles. Lors de ces réunions, ils participent à des activités religieuses et sont instruits dans l’optique d’atténuer ce passage forcé et précoce de l’enfance à la vie professionnelle et donc adulte dans une perspective morale et religieuse[30]. À cette période, les convictions religieuses baissent dans les milieux populaires. La religion, paternaliste, est considérée comme un instrument des classes dirigeantes et une partie du clergé est défavorable à l’action ouvrière. Christianisme et socialisme semblent être des notions inconciliables et les deux courants politiques rivalisent à travers leurs partis politiques et syndicats[31]. La déchristianisation de la population ne cesse de croître, principalement dans les villes, et pour tenter d’atténuer ce phénomène, l’Église tente dans un premier temps de multiplier les églises et paroisses, sans succès. L’idée française selon laquelle l’avenir du prêtre est plus social et réside dans des œuvres sociales catholiques et dans la vie associative se répand[32].
À l’issue de la Première Guerre mondiale, le Pape Pie XI lance alors l’Action catholique qui regroupe des jeunes et des adultes en associations afin de tenter de restaurer l’influence de l’Église et d’anéantir la décadence morale avec pour référence « Omnia instaurare in Christo »[33] (« Tout restaurer dans le Christ » Eph. 1, 10).
Cardijn demeure vicaire de Laeken jusqu’en 1918 et prend la direction des œuvres sociales catholiques de l’arrondissement de Bruxelles. En 1915, il met sur pied le syndicat des apprentis à Laeken et forme un cercle d’étude central des jeunes ouvriers. Ce cercle central d’étude donnera naissance à l’association Jeunesse Syndicaliste en 1919 affiliée à la fédération bruxelloise des syndicats chrétiens et créée sous l’impulsion de Cardijn et de Fernand Tonnet. Le « trio fondateur » est constitué de Paul Garcet, Jacques Meert et de Fernand Tonnet qui jouèrent un rôle essentiel dans le développement de la JOC[34],[35].
L’association dispose d’un secrétariat permanent et regroupe les jeunes de quatorze ans jusqu’au service militaire. Le cercle d’étude central constitue le cœur du mouvement. Il s’assemble presque tous les mois et réunit les délégués des sections locales, qui se sont créées, chaque semaine pour discuter des mesures à prendre, du rôle de l’Église, des problèmes religieux et moraux[36],[37]. Les objectifs de l’association sont d’aider et protéger les jeunes travailleurs sur les plans professionnel, social et moral. Des buts qu’elle tente d’atteindre par la formation et l’action syndicale. Les outils de formation pour les jeunes de ce cercle sont l’enquête, des rencontres et des discussions, des journées d’étude et des excursions.
Les sections locales sont au nombre de onze en 1920, et dix-huit en 1921 avec 300 membres[38],[39].
En 1923, le cercle d’étude central se réorganise et est divisé en une branche pour les anciens et une branche pour les jeunes. Par la suite ces deux sections se réorganisent en une branche néerlandophone et une branche francophone[36],[39]. Imprégné de la formation sociologique de Cardijn, le mouvement utilise l’enquête pour appréhender les problèmes sociaux et basait sa philosophie sur le triptyque : Voir (prendre conscience des injustices), Juger (analyser et confronter les injustices) et Agir (mener des actions collectives).
La Jeunesse Syndicaliste fonde en 1920 un journal mensuel portant le nom de Jeunesse Syndicaliste. Ce journal revendique le respect pour la classe ouvrière et principalement les jeunes. Il donne une image négative de la société pour tenter de susciter un comportement plus digne d’inspiration chrétienne qui permettrait à la masse ouvrière de susciter « l’estime des autres classes sociales »[38]. En 1924, le journal abandonne son titre pour celui de Jeunesse Ouvrière, juste avant le changement de nom du mouvement lui-même pour celui de Jeunesse Ouvrière Chrétienne[38].
Du côté néerlandophone du pays, l’abbé Joseph Bloquaux alors directeur adjoint des œuvres sociales d’Anvers fonde avec la collaboration du syndicaliste Arthur Donse une association appelée De Jonge Werkman. Elle est inspirée du mouvement de Cardijn et de celui du même nom qui s’est développé aux Pays-Bas[40] et dispose elle aussi d'un journal mensuel du même nom. Elle a été conçue comme « un mouvement syndical combatif, à orientation anti-socialiste, qui mènerait une action religieuse et morale dans le milieu ouvrier »[41]. Le cœur de l’association était la ville d’Anvers mais des succursales commencent à se créer un peu partout dans les communes flamandes, dans lesquelles la formation de ses membres devient l’objectif central. En 1924, toutes les entités sont regroupées pour ériger une fédération nationale flamande sous le nom de Kristene Arbeidersjeugd (KAJ) dont le secrétariat s’implante dans un premier temps à Anvers[42],[43].
En , Cardijn a organisé des réunions auxquelles participent des prêtres, des directeurs d’œuvres sociales et des vicaires de Wallonie, où son projet d’une organisation pour les jeunes travailleurs est accepté. Cela marquera la naissance officielle de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC). Cardijn et le « trio fondateur » établissent une dizaine de fédérations régionales regroupées en une fédération nationale. Les statuts de cette association sont approuvés en , date du premier congrès national qui a lieu à Bruxelles, au cours duquel une direction centrale est formée : le premier président de l’association sera Fernand Tonnet. Paul Garcet, Jacques Meert et Fernand Degive deviennent des membres permanents du secrétariat national de Bruxelles[43].
À partir d’ le mouvement jociste existe officiellement dans tout le pays. La JOC féminine et la JOC masculine sont regroupées et de nombreux cercles de jeunesse se développent. Le président de la KAJ déclare lors du congrès de Bruxelles des 18 et que « le mouvement néerlandophone et la JOC ne font qu’un »[44],[45]. Ce congrès est aussi l’occasion de définir les objectifs de l’association et les besoins de la classe ouvrière sur base des enquêtes faites par les différents groupes. Le , la JOC est affiliée à l’Association Catholique de la Jeunesse Belge (ACJB).
La JOC est créée en 1925 en Belgique par le prêtre Joseph Cardijn et par deux laïcs Paul Garcet et Fernand Tonnet. Cardijn affirme alors : « un jeune travailleur vaut plus que tout l'or du monde parce qu'il est fils de Dieu ».
En France, en , le père Cardijn fait son premier voyage à Paris, invité au Congrès de l'Union des Œuvres, à Reims par le père Jean-Emile Anizan. Cardijn déchaîne lors de cette rencontre un grand enthousiasme : on parla ensuite du « baptême de Reims » de la JOC[46].
Dans la lancée, le Père Georges Guérin fonde une branche française de la JOC, qu'il avait découverte en Belgique grâce au Manuel de la JOC et à la revue Jeunesse Ouvrière. Il en parle à Georges Quiclet, jeune aide-comptable d'une entreprise de Clichy, dans la banlieue de Paris. Ensemble, ils rédigent un tract intitulé La Jeunesse Ouvrière. Le a lieu une première réunion à Clichy. 700 invitations sont envoyées pour finalement réunir une soixantaine de jeunes. La JOC s'affilie à l'Association catholique de la jeunesse française (A.C.J.F.) comme mouvement autonome.
Le père Guérin propose aux jeunes ouvriers de réfléchir, d’analyser ce qu’ils vivent, de se former et d’agir selon la démarche « Voir, Juger, Agir », fondement de la méthode jociste. Il les encourage à militer dans des syndicats et à participer à des groupes d’étude de la doctrine sociale de l'Église.
La JOC se fonde sur l'idée d'un mouvement ouvrier consacré aux chrétiens, selon le slogan « Entre eux, Par eux, Pour eux », qui vise entre autres à rechristianiser le monde ouvrier : « Nous referons Chrétiens nos frères ».
Cardijn effectue plusieurs voyages qui influenceront sa cause au cours de ses études de sociologie à l’université de Louvain. Le voyage qui influencera particulièrement son projet futur sera celui qu’il effectuera en Angleterre en 1911. Au cours de ce voyage, il rencontre les dirigeants du mouvement ouvrier (les trade-unions) et se prend alors d’admiration pour l’approche du mouvement et des syndicats ouvriers. Ce sont des organisations à la fois fortes, car donnant de l’importance à l’éducation de leurs membres, et indépendantes car reposant sur la contribution de leurs affiliés[47],[48],[33]. Ce mouvement devient puissant, soucieux d’unité au plan national et international, respectueux de la religion et préoccupé par l’action éducative auprès de ses membres[49].
En 1912, Cardijn devient vicaire de la paroisse de Notre-Dame à Laeken, et se voit confier la direction des œuvres paroissiales féminines, son projet étant de mettre en place un réseau d’organisations sociales en s’inspirant de l’organisation des trade-unions anglais[47],[50]. Cardijn a totalement transformé les œuvres paroissiales féminines francophones et le patronage féminin du dimanche. Il promut le syndicalisme féminin qu’il conçoit à l’image du syndicalisme anglais comme « un moyen de défense des intérêts matériels des ouvrières, mais aussi, comme un instrument de formation professionnelle, générale et morale »[48].
En , il développe dans la paroisse un cercle d’étude social avec l’aide de Madeleine De Roo appelé noyau des demoiselles ou des dirigeantes. Ce cercle se réunit deux fois par mois sous la direction de Cardijn et est composé d’une vingtaine de jeunes filles de milieu aisé qui se consacrent à l’étude des problèmes sociaux et tentent d’y apporter des solutions. En octobre de la même année, il crée une section locale du Syndicat féminin de l’Aiguille (lui-même fondé en 1906 par Victoire Cappe). Cette création est suivie par celle d’un syndicat d’étude syndical et une ligue des femmes du monde ouvrier[51],[52]. Pour Cardijn et l’archevêque Mercier, le développement de ces œuvres sociales catholiques est une nécessité pour élever matériellement et spirituellement les ouvriers et ainsi restaurer la dignité humaine et chrétienne des ouvriers entachée par les conditions de travail inhumaines. L’Homme, en tant que créature de Dieu a une finalité plus grande que celle d’être asservi[53].
Cardijn souhaite aller plus loin dans la formation des jeunes filles et pour cela, il réorganise le patronage des filles en quatre groupes différenciés selon les âges en 1916. Il réunit le patronage tous les quinze jours et forme des groupes d’adolescentes ouvrières et apprenties membres des syndicats et œuvres religieuses à qui il confie l’animation du groupement par le biais d’interventions et divers exposés sur différents aspects tirés de leur vie quotidienne. En 1919, il ressort des journées d’étude de la fédération bruxelloise des patronages de jeunes filles une affiliation de cette fédération aux Œuvres Sociales Féminines Chrétiennes (OSFC)[54],[53],[55]. En , lors du congrès des OSFC, une section jeunesse du mouvement social féminin est mise sur pied par le biais de groupements locaux de jeunesse (s’adressant aux jeunes filles du monde ouvrier de 14 à 21 ans) qui apparaissent un peu partout[56],[55]. Au niveau national le journal Joie et Travail est publié mensuellement à partir de . Le journal a été conçu pour principalement pour promouvoir les organisations sociales tout en comprenant une partie divertissement, une partie instructive[57].
En 1923, le mouvement est restructuré et les cercles de jeunesse bénéficient de moins d’autonomie. Ils deviennent une branche de l’organisation féminine des adultes qui regroupe les représentants des œuvres de jeunesse et des Ligues de Femmes sous le nom Fédération Joie et Travail. Cette fédération devient officiellement la Jeunesse Ouvrière Chrétienne Féminine (JOCF) en décembre 1924 mais la date de création officielle de l’association est considérée comme étant le , date de l’assemblée nationale des déléguées de tous les cercles de jeunesse ouvrière féminine et un comité national de onze membres est constitué[58],[59]. Lors de cette assemblée, Cardijn explique les buts de cette fédération : « former les jeunes filles au bien », « les assister, ne pas les abandonner à elles-mêmes », « les défendre », « les représenter auprès des pouvoirs publics, auprès des patrons »[59].
A la fin des années 1920, il pousse Émilie Arnould, alors permanente régionale du Secrétariat des œuvres sociales de la région du Centre à s'engager davantage dans la mouvement. Elle occupe successivement les fonctions de secrétaire générale puis de présidente de la Jeunesse ouvrière chrétienne féminine de 1930 à 1948[60]. Sous son impulsion, les dirigeantes nationales s'impliquent davantage dans les relations avec les sections et les fédérations et veillent à améliorer la qualité du travail des militantes. Elle fait aussi en sorte que la JOCF s'implante davantage dans les milieux populaires de la grande industrie[60].
Du côté néerlandophone, l’évolution du mouvement est assez similaire. Différents cercles se développent dans les localités flamandes à partir de 1923. Le journal Lenteleven est créé en 1922. Ce mouvement porte dans un premier temps le nom de Christelijke Jeugdorgansatie voor Meisjes (CJOM) pour ensuite prendre celui de Vrouwelijke Kristene Arbeidersjeugd (KAJ)[42].
En Belgique, les deux cofondateurs de la JOC avec Joseph Cardijn, Paul Garcet et Fernand Tonnet, participent à la résistance. Ils sont arrêtés et déportés dans des camps de travail en Allemagne et ensuite au camp de Dachau. Ils y meurent en . Joseph Cardijn, séquestré par la Gestapo, puis mis au secret, survit et reprendra son œuvre dès la libération. Par ailleurs, le président Victor Michel est devenu, pendant l'occupation, l'une des chevilles ouvrières du Réseau Socrate qui va, entre autres, financer l'aide aux jeunes travailleurs réfractaires au service du travail obligatoire (STO) en Allemagne.
L’année 1969 marquera un tournant dans l’histoire de la JOC. L’idéologie du mouvement va passer de ce que certains appelaient un progressisme chrétien modéré vers « une célébration péremptoire de la lutte des classes »[61]. De 1925 à 1969, la JOC s’est globalement tenue à l’écart de la politique « tout en adoptant des positions sociales réformistes »[62]. Un virage à gauche va s’opérer et cela est perceptible tant au niveau des personnalités jugées emblématiques par les dirigeants de la JOC qu'à la formule interne du mouvement. Ainsi le pape Jean XXIII, le médecin missionnaire Albert Schweitzer, le Mahatma Gandhi seront rejoints par le révolutionnaire argentin Che Guevara, le président chinois Mao Zedong et le trotskyste argentin Posadas. Dans un même temps, la formule de 1964 « tous unis dans la même amitié partagée dans Notre Seigneur » deviendra en 1973 « unis dans la lutte »[62].
La JOC devient de plus en plus critique envers l’Église et notamment envers la hiérarchie ecclésiastique. Celle-ci étant jugée trop soumise à une « élite » ainsi que largement complaisante envers les dictatures de droite, « elle n’a plus ni véritable fibre apostolique, ni élan missionnaire »[62]. Ainsi, la JOC se structure sur un nouveau départ et va rompre « les amarres avec une Action catholique spécialisée que beaucoup considèrent alors, non sans raisons d’ailleurs, comme dépourvue d’avenir »[62]. Le nouveau but va être « la transformation radicale des structures de la société »[62].
À l’instar de nombreux mouvements de jeunesses, « la JOC francophone est fortement influencée par la poussée contestataire et par la vague anti-impérialiste de la fin des années 1960 »[62]. Le parcours de la JOC est semblable à celui d’autres organisations chrétiennes comme la Jeunesse rurale catholique, la JEC et la KSA flamande[63],[64].
En 2014, la JOC, belge, change de nom afin d’abandonner toute référence chrétienne, passant ainsi de « Jeunesse Ouvrière Chrétienne » à « Jeunes Organisés Combatifs », conservant ainsi l'acronyme mais abandonnant les références exclusives au christianisme et au monde ouvrier[65]. Au-delà de l’appartenance chrétienne, il s’agit d’un véritable repositionnement idéologique ; l'argument avancé étant que les jeunes ne se reconnaissent plus forcément dans une jeunesse ouvrière chrétienne ou simplement ouvrière, bien que nombreux sont les membres issus de milieux précarisés et sans emploi[66]. Dans un contexte de crise, l'association se donne pour objectif de lutter concrètement pour abolir les pivilèges (anti capitalsite anti sexiste anti raciste), la combativité devenant la principale valeur du mouvement[66].
Néanmoins les « Jeunes Organisés Combatifs » restent liées à la JOC Européenne (JOCE), à la JOC Internationale (JOCI) ainsi qu'elle demeure l’une des organisations constitutives du Mouvement Ouvrier Chrétien (MOC)[67].
Forme juridique | association loi de 1901 |
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But |
- Former des jeunes militants ouvriers chrétiens durables, acteurs de leur vie, de la société et de l'Eglise. - Agir pour un changement qui conduise à une société nouvelle, juste et fraternelle. |
Zone d’influence | France métropolitaine et Corse |
Fondation | 1927 |
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Fondateur | Georges Guérin |
Origine | Clichy |
Siège | 15 rue Armand sylvestre – BP36 92403 Courbevoie Cedex |
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Structure | Fédération nationale réunissant 120 associations locales |
Présidente | Laetitia Navarro |
Affiliation internationale | Coordination internationale de la JOC |
Membres | 10.000 |
Représentativité |
Membre du Forum Français de la Jeunesse Membre du Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d'éducation populaire |
Slogan | « Un jeune travailleur vaut plus que tout l'or du monde car il est fils de Dieu » |
Site web | www.joc.asso.fr |
Comme dans chacun des pays où la JOC s'est implantée, la JOC de France a développé des caractéristiques et une histoire qui lui sont propres.
La JOC est une association loi de 1901 qui réunit 10 000 jeunes âgés de 13 à 30 ans répartis sur tout le territoire métropolitain au travers de 120 fédérations locales[5],[70].
Chaque fédération locale fédère des équipes de base (ou de révision de vie) qui réunissent de 3 à 10 jeunes[71]. Les équipes se rencontrent régulièrement pour vivre la révision de vie et pour mener des actions locales. Le mouvement propose de nombreuses formations à ses adhérents sur la vie associative, la méthodologie de projet, la compréhension du monde et sur les valeurs du mouvement[72].
La JOC est agréée « Jeunesse et éducation populaire »[73] par le ministère de la Jeunesse. Elle est membre fondatrice du Forum Français de la Jeunesse[74] et membre du Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d'éducation populaire (CNAJEP)[75]. Depuis 2015, la JOC a une représentante au Conseil économique, social et environnemental (CESE)[76],[77]. Reconnue pour son expertise sur la vie des jeunes du milieu ouvrier et des quartiers populaires, elle est régulièrement auditionnée et citée par le Sénat[78],[79],[80], par l'Assemblée nationale[81],[82],[83] et par différents ministères[84],[85],[86]. Par sa présence et sa reconnaissance institutionnelle, la JOC est reconnue comme l'une des principales associations de jeunesse et d’éducation populaire de France.
La JOC est active dans le mouvement ouvrier. Elle participe régulièrement à des mouvements sociaux comme celui contre le Contrat Première Embauche en 2006[87],[88], contre la réforme des retraites[89],[90] ou contre la « loi travail »[91]. Elle entretient des relations étroites avec les syndicats ouvriers[92],[93],[94].
La JOC est un mouvement de l’Église catholique[95]. Elle fait partie de la Mission Ouvrière[96],[97], structure chargée de coordonner l’évangélisation du monde ouvrier et des quartiers populaires en France. Elle y est reconnue pour ses méthodes innovantes et son efficacité dans la première annonce et la responsabilisation des jeunes des périphéries[98].
La JOC fut introduite en France dès 1927, deux ans après sa création en Belgique. Le mouvement a connu plusieurs phases de développement.
Avec la révolution industrielle, des millions de paysans quittent les campagnes pour aller travailler dans les usines dans grandes agglomérations. Dans les mines, les usines et autres manufactures, les conditions de travail sont extrêmement difficiles et les salaires permettent à peine aux familles ouvrières de survivre. D'abord opposée à cette industrialisation, l’Église catholique finit par accepter et justifier celle-ci. Dans ce contexte, un fossé profond se creuse entre les ouvriers et l'Église[100]. En 1891, le pape Léon XIII publie l'encyclique Rerum novarum qui condamne les excès du capitalisme et admet la nécessite des organisations ouvrières[101]. Des catholiques sociaux comme Albert de Mun, Frédéric Ozanam, l'abbé Lemire ou Marc Sangnier prennent des initiatives en faveur des ouvriers[102]. Mais ces initiatives sont le fait de chrétiens issus des classes privilégiés et non pas des ouvriers eux-mêmes.
La JOC se développe rapidement et arrive en France en 1927 à Lille[103] et dans la banlieue parisienne[104]. Elle est officiellement fondée à Clichy en 1927 par l'abbé Georges Guérin et le jeune Georges Quiclet[105]. L'année suivante la JOCF est fondée par Jeanne Aubert[106]. La JOC se fonde sur l'idée de rechristianiser le monde ouvrier avec le slogan : « Nous referons chrétiens nos frères »[107].
Le mouvement se développe très rapidement sur tout le territoire français. En 1937, dix ans après sa fondation, la JOC compte 86 fédérations, 734 sections et 50 000 militants. La JOCF compte 96 fédérations, 650 sections et 50 000 militantes. Le journal du mouvement, La Jeunesse ouvrière, tire à plus de 100 000 exemplaires[108].
Cette période de fort développement est marquée par la création de nombreux services[109] : le service pré-JOC pour les apprentis ; la librairie de la jeunesse ouvrière qui deviendra les éditions ouvrières puis les éditions de l'atelier ; le service d'aide aux malades avec la création de sanatoriums; un centre d'orientation professionnelle qui sera à l'origine des premiers centres d'information et d'orientation (CIO) ; ou encore un bureau de placement pour les jeunes chômeurs (ancêtre de l'actuel Pôle emploi)[réf. nécessaire]
En 1928, la JOC lance ses premières enquêtes sur « l'argent de poche » et « les apprentis »[110]. Les premières campagnes nationales d'action s’enchaînent sur le chômage, la santé au travail, les délégués jeunes en entreprise… En 1936, la JOC mène sa première enquête internationale sur les conditions de travail et la dépose au Bureau international du travail à Genève[111].
En 1937, pour ses 10 ans, la JOC réunit plusieurs dizaines de milliers de jeunes dans un stade de football de Paris, le parc des princes pour son premier grand rassemblement.
En 1939, le pèlerinage mondial de la JOC à Rome est annulé à cause de la Seconde Guerre mondiale[113]. Comme une grande partie des associations de jeunesse, la JOC est interdite par le régime de Vichy dès le [114]. Le mouvement poursuit son activité dans la clandestinité avec la protection discrète de l'épiscopat français. Georges Guérin, l’aumônier général de la JOC est emprisonné[115]. De nombreux jocistes entrent en résistance militaire dans les maquis ou en résistance spirituelle dans les camps du STO. Beaucoup seront déportés et assassinés comme Marcel Callo, jociste de Rennes, mort en déportation en 1945 et béatifié par Jean-Paul II le [116]. Sur les 50 chrétiens visés par la cause de béatification collective pour leurs martyrs lors de cette guerre, 20 sont des jocistes[117]. La JOC de diverses régions a participé au mouvement Jeunes chrétiens combattants, animé à Paris par l'abbé Raymond Borme.
Après la guerre, la JOC et la JOCF misent sur la formation de leurs membres et poursuivent leurs actions de terrain. Le mouvement s'ouvre à de nouveaux partenaires, pas uniquement chrétiens, et se rapproche des organisations ouvrières. Il s'ancre à gauche dans le paysage politique[118].
Les jocistes s'investissent dans tous les champs de la société. Ils créent la Ligue Ouvrière Chrétienne (LOC) qui deviendra le Mouvement Populaire des Familles (MPF) avant de se diviser en Mouvement de libération du peuple (MLP) et Mouvement de libération ouvrière (MLO)[119],[120]. En 1950, ils créent l'Action Catholique Ouvrière (ACO). En politique, les anciens jocistes seront très présent dans le Mouvement Républicain Populaire (MRP) avec de grandes figures comme Fernand Bouxom et Pierre Bacon[121]. Côté syndicalisme, les jocistes continuent d'adhérer majoritairement à la CFTC[122]. Ils seront les principaux acteurs de la déconfessionnalisation du syndicat chrétien et de sa transformation en CFDT avec Eugène Descamps[123]. Dans le monde de l’éducation populaire, des jocistes comme Michel Aluni fondent l'Institut de Culture Ouvrière puis le Centre de Culture Ouvrière et l'association Culture et Liberté[124],[125]. Dans les loisirs, André Guignand et Maurice Cayron créent les Villages Vacances Famille (VVF)[126]. Dans les médias, Georges Montaron lance Télérama et dirigera longtemps le Témoignage chrétien.
La JOC et la JOCF poursuivent leur campagnes nationales d'action avec de belles réussites : Le , la JOCF obtient la signature de la première convention collective nationale des employées de maison[127]. En 1950, la JOC obtient une à deux semaines de congés payés supplémentaires pour les jeunes[128]. En 1945, des jocistes de Tours ouvrent le premier foyer de jeunes travailleurs[129]. En 1955, la JOC et la JOCF s’associent aux « Amitiés sociales » et à l’Uniopss (Union interfédérale des œuvres privées sanitaires et sociales) pour donner naissance à l’UFJT, l’Union des foyers de jeunes travailleurs. En 1966, la JOC créée les première « Permanences-Saison » dans les zones vacancières pour accueillir et informer les jeunes saisonniers sur leurs droits[130].
En 1957, les évêques de France initient la Mission ouvrière pour coordonner toute la pastorale en monde ouvrier[131]. La même année, la Jeunesse Ouvrière Chrétienne Internationale (JOCI) est créée lors d'un grand rassemblement à Rome et est rapidement reconnue sur la scène internationale[132].
L'éducation sexuelle est un des nombreux thèmes de la grande manifestation appelée « rassemblement Paris 1967 » qui compte 50 000 participants[133]. Parmi les festivités, le « Gala de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne » dans un cirque, le 16 avril 1967[134], au moment où le gouvernement prépare un « Livre Blanc sur la jeunesse » destiné à freiner l'influence croissante de la gauche et des syndicats dans les associations de jeunesse et les Maisons des jeunes et de la culture. Ce « Livre blanc sur la jeunesse » sera rendu public en novembre 1967, au moment de la montée du mécontentement social. Le gala festif du 16 avril 1967 sera suivi par un rassemblement de la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), le 30 juin 1967, au Parc des Princes, un stade de football à Paris[135].
1975 marque la fin des trente glorieuses et le début d'une importante crise économique dans le monde occidental. Le chômage de masse, les fermetures d'usine, la précarisation du monde du travail et les politiques d'inspiration néolibérales portent de sévères coups au mouvement ouvrier et à l’éducation populaire, et donc aussi à la JOC et à la JOCF.
La JOC mène des grandes campagne de résistances contre les fermetures d'entreprise[136], contre le chômage[137] et contre la dérégulation du monde du travail. Elle créa des permanences précarité « bouge ta galère » pour soutenir les jeunes à la recherche d'un emploi ou en précarité[138].
Dans les années 1980-90, la JOC et la JOCF de France traversent plusieurs crises profondes :
En 1986, la JOC et la JOCF fusionnent en un seul mouvement mixte[142].
Dans les années 1980-90, la JOC se lance dans le combat des valeurs. Face à la montée de la xénophobie, le mouvement enchaîne les campagnes nationales d'actions et les rassemblements sur des thématiques morales comme le vivre ensemble : « Vil'avenir » en 1986, « Bercy ensemble » en 2003 et la solidarité : « Cap Solidaires » en 1997. Il centre aussi son action sur des sujets locaux comme la participation démocratique des jeunes.
À partir de l'an 2000, la JOC cherche a innover pour faire face à la crise de l'engagement du monde associatif militant.
En 2005, elle reforme en profondeur ses statuts pour favoriser la participation des jeunes. À partir de 2003, elle envoie de nombreux permanents régionaux sur le terrain afin de fonder de nouvelles équipes. En 2005-2006, elle lance une campagne nationale d'action très structurée sur l'emploi des jeunes. Une enquête réalisée en partenariat avec le CSA est remplie par 30 000 jeunes[143]. 220 tables rondes locales donneront naissance à la charte pour l'emploi des jeunes finalisé lors des états généraux de l'emploi des jeunes au CNIT de la Défense[144]. D'autres campagnes du même genre suivront. Lors du conseil national de 2010, la JOC sort du flou identitaire en réaffirmant sa dimension apostolique et en définissant clairement sa dimension ouvrière[145].
La JOC de France mène actuellement la campagne « Dignes et travailleurs » sur l'emploi digne qui a donné lieu à un rassemblement national le à Paris[146].
La JOC de France organise régulièrement de grands rassemblements nationaux :
La JOC de France a été formée et a été accompagnée par de nombreux militants associatifs, politiques, syndicaux et ecclésiaux. Un grand nombre d'entre-eux figurent au Maitron, le dictionnaire biographique du mouvement ouvrier[147].
Au Canada, on parle de la Jeunesse ouvrière catholique, dont l'acronyme est évidemment le même, et dont la fondation remonte à 1932[150]. La même année est fondée la Jeunesse ouvrière catholique féminine (JOCF) par l'abbé Henri Roy, oblat d'origine ouvrière[151].
La JOC est aujourd'hui présente dans plus d'une cinquantaine de pays[1] par le biais de deux organismes internationaux : la Jeunesse Ouvrière Chrétienne Internationale (JOCI)[152] et la Coordination Internationale des Jeunesse Ouvrière Chrétienne (CIJOC)[153].
La JOC Internationale, créée en 1957, bénéficie d'un statut officiel auprès des organisations telles que l'Organisation Internationale du Travail (OIT), l'UNESCO, le Conseil économique et social (ECOSOC), l'Unité de la Jeunesse de l'ONU, l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) ainsi que la Conférence des Organisations Internationales Catholiques (COIC)[152].
La Coordination internationale JOC a quant à elle été fondée en 1987 et est reconnue depuis 1989 comme organisation internationale catholique par le Vatican[154]
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