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implant électronique visant à offrir un certain niveau d'audition pour des personnes atteintes de surdité De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'implant cochléaire est un implant électronique qui vise à fournir un certain niveau d'audition pour certaines personnes atteintes d'une surdité profonde (surdités endocochléaires profondes) ou sévère et pour des personnes souffrant d'acouphènes. Des électrodes posées chirurgicalement permettent de stimuler directement les terminaisons nerveuses de l'audition situées dans la cochlée[1].
Les implants cochléaires peuvent aider à fournir une audition partielle chez les patients dont la surdité est due à des dommages ou à l’absence totale de cils sensoriels dans la cochlée. La qualité du son est différente de celle obtenue par l'audition naturelle, car moins d'informations sonores sont transmises au cerveau. L'implant cochléaire ne fonctionne donc pas dans les cas de surdités dues à l’absence de nerf vestibulocochléaire, mais il peut permettre parfois la transmission parcellaire de quelques informations auditives dans les cas où ce nerf est sévèrement endommagé. Les résultats d'une implantation varient selon les patients et leur surdité, mais elle peut permettre dans les meilleurs cas de fournir une audition suffisante pour permettre la compréhension orale spontanée, des sons ambiants ou permettre des conversations au téléphone. Les implants les plus récents[Quand ?] peuvent permettre une audition améliorée dans les environnements bruyants, d'écouter de la musique, tout en autorisant par exemple la baignade en eau peu profonde.[réf. souhaitée]
Un suivi et un apprentissage, auprès d'un orthophoniste, sont nécessaires après la pose de l'implant. Le cerveau demande une période d'adaptation pour apprendre à identifier les informations reçues. Chez les adultes, les résultats semblent les plus positifs et les plus rapides chez les patients ayant perdu récemment leur audition, ou ceux ayant eu une audition bonne ou partielle dans leur enfance, ce qui les aide à effectuer la transition et à identifier les sons perçus. Chaque cas présente ses particularités, et différentes sensations sonores temporaires peuvent être perçues juste après l'activation de l'implant : une succession de bips et sifflements sans signification, une impression de voix déformées comme celle d'un robot ou aiguës comme celle d'un personnage de dessin animé. Le niveau sonore de l'implant est lentement augmenté, pour donner le temps au cerveau de s'habituer, et il est possible dans les meilleurs cas de récupérer plus de 80 % de l'audition.[réf. souhaitée] La psychologie du patient et son vécu de sa surdité entrent pour beaucoup dans l'impression des résultats obtenus. Les adultes sourds profonds de naissance et depuis une longue durée tendent à rencontrer plus de difficultés, alors que les jeunes enfants présentent une capacité d'adaptation très élevée. Ceci peut motiver une implantation précoce chez les enfants, alors qu'une partie des sourds et mal-entendants militent pour que ces enfants puissent s'ouvrir à la langue des signes, à la culture et à la communauté sourde, et que le choix d'une implantation soit reportée à l'âge adulte.[réf. souhaitée]
En décembre 2010, environ 219 000 personnes dans le monde ont reçu des implants cochléaires ; aux États-Unis, environ 42 600 adultes et 28 400 enfants disposent d'un implant[2]. La grande majorité des personnes disposant d'un implant proviennent des pays développés, en raison du coût élevé du dispositif, de la chirurgie et du suivi. Le nombre de bénéficiaires d'un implant dans chaque oreille est restreint, mais nettement en croissance en 2007[3].
L'historique de l'implant cochléaire doit être précédé par un aperçu[4] des traitements non chirurgicaux qui, dès le XVIIIe siècle, ont été proposés pour pallier les conséquences sociétales et intellectuelles d'une surdité néonatale totale.
Leur histoire commence au début du XVIIIe siècle. Si le Français, communément nommé l’abbé de l’Épée[5] (1712-1759), n’a pas réellement inventé la langue des signes, il a en tout cas rassemblé les diverses expériences antérieures, notamment espagnoles, et il a codifié et enseigné cette technique de communication, qui facilite les contacts entre ceux qui la pratiquent, qu'ils soient ou non malentendants. Il fut en tout cas le premier à y recourir, pour faciliter le développement intellectuel et l’instruction des enfants sourds, en créant, au milieu du XVIIIe siècle, une école publique et gratuite, qui traversa la Révolution et fut pérennisée par la République naissante en Institution nationale des sourds-muets. Cet établissement, devenu Institution Nationale des Jeunes Sourds, fut toujours situé rue St Jacques à Paris. Il fut longtemps, et pour beaucoup, le phare de l’éducation des jeunes sourds, bien au-delà des frontières.
Mais pédagogues et médecins de l’Institution n’avaient pas le même regard sur les modalités d’enseignement, les premiers préférant l’oralisation (difficile, parce que dépourvue de tout feed-back sensoriel) alors que les seconds optaient pour le langage gestuel, avec Prosper Menière et Édouard Fournié. En fait, l’opposition ne concernait pas seulement la communication mais aussi la place des sourds dans la société : le langage gestuel favorisait l’instruction et l’épanouissement des sourds dans leur communauté, et l’oralisation, l’intégration des sourds dans la société des entendants.
À la fin du XIXe siècle, le développement des transports et de l'oto-rhino-laryngologie ont mondialisé cette controverse.
Les débuts de l'implant cochléaire ont été émaillés par les échecs, avec abandon de l’appareillage, rencontrés lors des tentatives d’implantation de sourds néonataux, adolescents ou adultes. Les expériences sur l’animal[6] ont permis de comprendre que les centres auditifs du tronc cérébral ne se développaient pas, s’ils n’étaient pas stimulés très tôt après la naissance. Ces échecs ont été une des causes de l’opposition de la communauté sourde à cette éventualité thérapeutique nouvelle.
La stimulation électrique des voies afférentes de l’audition n’existe que depuis la dernière moitié du XXe siècle. La description chronologique des faits conduit à distinguer trois périodes :
En 1961, Georg von Békésy (1899-1972) reçoit un Prix Nobel, pour avoir démontré que les sons entraînent une vibration de la membrane basilaire, qui se propage de la base à l’apex de la cochlée sous forme d'ondes longitudinales ; celles-ci présentent des pics en divers endroits répartis selon la fréquence, comme les touches d’un piano : les graves vers l’apex, les aiguës vers les fenêtres. On parle à ce propos de tonotopie cochléaire et le terme de « clavier cochléaire » est souvent employé.
En 1968, H. Davis codifie la physiologie des récepteurs auditifs[7]. En 1972, N. Y. Kiang décrit la physiologie de la stimulation électrique de l’oreille interne[8] et en 1975, Evans MG montre que les fibres sensorielles afférentes du nerf cochléaire ont chacune une spécificité fréquentielle, qui la rend électivement sensible à une très étroite bande de fréquences[9].
En 1957, A. Djourno, professeur de physique médicale et C. Eyriès, otologiste parisien, redonnent, les premiers, de l'audition à un sourd total atteint de cholestéatome bilatéral, en stimulant électriquement les fibres nerveuses acoustiques encore présentes dans son oreille interne.
Certes, les résultats auditifs obtenus fortuitement par Djourno et Eyriès n'étaient pas ceux pour lesquelles ces auteurs s'étaient rassemblés transitoirement. Ils cherchaient à remobiliser les traits figés d'un patient souffrant d'un cholestéatome des deux oreilles, qui s'était compliqué, sans doute longtemps avant, d'une paralysie faciale bilatérale. Ils n'y parvinrent pas. Mais ils eurent le grand mérite de consigner en détail leurs observations électro-acoustiques, poursuivies pendant plusieurs semaines et de les publier dans la Presse Médicale[10]. On peut comprendre que ces auteurs parisiens n'aient pas repris leurs essais, lorsque leur appareil tomba en panne, après moins d'un mois.
Mais, sans eux et sans leurs réactions de chercheurs, William F. House n'aurait peut-être rien osé entreprendre pour pallier la surdité totale, dont il savait pourtant la gravité quand elle est bilatérale.
En 1961, W. House[11] était un otologiste californien, qui avait transformé le pronostic fonctionnel de la chirurgie de l'angle ponto-cérébelleux en l'effectuant à l'aide des premiers microscopes opératoires, apparus à la fin des années cinquante. Et c'est parce que cette surdité totale lui était familière, qu'un patient lui amena un jour un extrait des travaux parisiens reproduit dans le Los Angeles Times[12] : House s'empara du problème et reprit les recherches, en sélectionnant les indications en fonction de ce que l'on savait de la physiologie de l'audition, qui commençait déjà à être bien connue, au moins chez l'animal. House codifia l’intervention en positionnant l’électrode de stimulation de manière stable, en l’enfilant à travers la fenêtre ronde dans le tube cochléaire. Cet auteur connut quelques difficultés[12], notamment concernant l’étanchéité de l’implant ; elles s'aplanirent avec l'apparition des pacemakers. Cependant, il lui fallut presque dix ans pour mettre au point cet implant cochléaire monocanal. Ce système, finalement robuste et simple, stimulait l’ensemble des fibres du nerf auditif et ne permettait de reconnaître que les rythmes de la parole.
W. House commercialisa ce système avec J. Urban[13]. Il continuera à l'implanter jusqu'à au-delà de 1995. House en avait fait un système suffisamment fiable pour que les chercheurs et les otologistes ne lui reprochent plus guère que sa médiocrité fonctionnelle.
Il faut souligner ici l'influence considérable que W. House eut à cette époque sur toute une génération de jeunes chercheurs ORL du monde entier. Ceux-ci venaient à Los Angeles, soit pour y apprendre à disséquer au microscope l'ablation des tumeurs de l’angle ponto-cérébelleux, selon des méthodes chirurgicales très innovantes et simplifiées, nouvellement mises au point par W. House, soit pour parvenir à faire rapidement entendre les sourds profonds avec ce prototype d'implants cochléaires multiélectrodes, que fut pour beaucoup et pendant bien plus d'une décennie, l'implant monoélectrode et ses diverses variantes[14].
Comme un juste retour en France des travaux de Djourno et Eyriès, citons, parmi eux, les Français Jean-Marc Sterkers, qui, dès 1966, prit en charge les neurinomes[15] et divulgua en France les nouvelles méthodes chirurgicales ou, plus tard, Bernard Fraysse[16], qui, dès 1986, refit entendre de nombreux sourds avec divers systèmes mono canal. Puis, à la génération suivante, c'est Olivier Sterkers qui, inspiré par son père, utilisa, un des premiers, ses compétences neurochirurgicales pour placer les implants du tronc cérébral[17], lorsque ceux-ci furent disponibles, avant de devenir, en 2013 le Chef de l’Unité de Référence d'implantation auditive (adultes) de Paris et de la région Ile-de-France (AP-HP).
En 1966, B. Simmons[18] (Palo Alto, Californie) place le premier, chez l’homme (un volontaire sourd), un système multi-électrodes implanté temporairement dans l'épanouissement du nerf auditif lui-même. Ce travail expérimental démontre que la stimulation de contingents limités du nerf auditif entraîne des sensations fréquentiellement différentes selon l’origine cochléaire des fibres stimulées. Un peu plus tard M. Merzenich[19](UCSF-San Francisco) confirma d'une autre manière ces constations chez le macaque.
En 1967, G. Clark à Melbourne[20] constitue une équipe de recherche fondamentale sur la physiopathologie de la surdité profonde chez l’animal et la bio tolérance des matériels implantés.
R. Michelson en 1973[21](UCSF-San Francisco) place chez un homme sourd un implant multiélectrodes encore expérimental, mais chroniquement utilisable : c'est un système à quatre canaux avec quatre paires d'antennes différentes : pour chaque canal, une antenne émettrice et une antenne réceptrice. Il permettait de mesurer différents paramètres et de tester divers types de stimulation, notamment bipolaire ou monopolaire.
La même année, C.H. Chouard bénéficiait de l’amitié d’un spécialiste de la physiologie sensorielle, le Dr P. Mac Leod, et d’une expérience chirurgicale personnelle[22],[23] portant sur les nerfs vestibulaire et facial. Ils décident[24] de constituer une équipe multidisciplinaire au sein de son Laboratoire de Recherches ORL du CHU St-Antoine à Paris.
En 1975, ils démontrent, chez plusieurs patients atteints de surdité totale unilatérale traumatique avec paralysie faciale[25], que la stimulation électrique de 8 à 12 électrodes placées, isolées les unes des autres, dans différents endroits de la rampe tympanique de la cochlée, fournit des perceptions fréquentielles différentes.
Puis, après avoir mis au point un test de stimulation électrique de la fenêtre ronde destiné à être certain de la présence de fibres auditives encore fonctionnelles[26], l’équipe parisienne applique sa technique de mise en place des électrodes chez cinq patients atteints de surdité bilatérale totale ancienne. Dans les suites post-opératoires, après avoir bénéficié d’un entraînement orthophonique relativement bref, tous ces patients ont pu reconnaître un pourcentage variable de mots sans lecture labiale[27]. Sous la direction scientifique de P.Mac Leod, la fabrication industrielle d’un système implantable fonctionnel est alors confié à la Société Bertin©. L’appareil de table fut vite construit ; mais la mort prématurée de Jean Bertin à la fin de 1975 entraîna une restructuration de la Société, obligeant les Français à attendre l'été 1976 pour recevoir enfin les six premiers appareils.
D’autres équipes en France entamèrent également leurs propres recherches, notamment dans le domaine du porte-électrodes, mais elles ne purent se poursuivre[28],[29],[30].
En 1975, K. Burian[31], à Vienne, poursuivant la longue tradition de l'école ORL viennoise, évoque la problématique du premier implant autrichien.Ses travaux, qui ont exploré la stimulation monocanal intra et extra cochléaire, puis la stimulation multiélectrodes, seront ensuite repris peu après par son élève I. Hochmair-Desoyer et l’époux de celle-ci le Pr Hochmair de Innsbrück, pour aboutir, à partir de 1982, à l'implant autrichien Med-El.
Cette section traite de l'évolution de la technologie et des résultats des implants proposés par quatre nations (France, Autriche, Australie, États-Unis) jusqu’au consensus né de cette concurrence (1976-1997).
La première implantation eut lieu à Saint-Antoine le mercredi . Elle fut réalisée par C.H. Chouard assisté de Bernard Meyer. Devant l’audition revenue dès le lendemain, malgré le volume incommode de l’émetteur, les cinq autres patients furent très vite opérés. La société Bertin dépose le le brevet no 77/07824. Ce brevet, issu des exigences physiologiques de Mac Leod, comportait deux revendications simultanées :
Les premiers résultats furent présentés le lendemain au XIth World Congress of O.R.L. , qui se tenait alors à Buenos-Aires, puis rapidement publiés[32],[33].
Pendant près de vingt ans, ce document[34] va conditionner toutes les procédures et les recherches utilisées par les autres équipes internationales, qui seront obligées de le contourner, le plus souvent en n'envoyant qu'une partie de l'information sonore de la parole, jusqu'à ce que ce brevet tombe dans le domaine public en 1997.
Le , l’équipe de l'Australien G. Clark dépose le brevet d’un système comportant trois électrodes fonctionnelles et n’utilisant qu’une partie limitée de l’information sonore de la parole (voisement et un des deux formant des voyelles). En l’équipe autrichienne, après avoir employé une stimulation monocanal, implante un système multicanaux dont la souplesse le rend capable d’étudier les réponses à des traitements du signal sonore différents[35].
En a lieu à Paris le 1er cours international sur l’implant cochléaire, auquel assistent les représentants[36] des trois autres nations impliquées I. Hochmair-Desoyer et E . Hochmair (Autriche), J. Patrick (Australie), R. Michelson et R. Schindler (USA). G. Clark (Australie) implante son premier patient[37].
En 1982, Chouard, utilisant la technique de reconstruction de Born, qu’il avait employée dans ses recherches neuro-anatomiques effectuées avec C. Eyriès[38], démontre le premier, chez l’animal[6], la nécessité d’une implantation la plus précoce possible, pour éviter l’atrophie des formations auditives centrales qui se produit très vite en cas de surdité néo-natale persistante.
Le nouvel appareil de Bertin est présenté : le Chorimac 12 a maintenant douze électrodes et son émetteur est plus petit, mais il est encore beaucoup plus gros que les appareils australiens et autrichiens. Quelques années plus tard après avoir annoncé l’arrivée de l’appareil entièrement numérique[39] que Chouard et Mac Leod réclamaient depuis 1980, Bertin abandonne l’implant et en vend en 1987 la licence à une société française : MXM-Neurelec. Bertin est mis en faillite en 1998.
En 1982, lors d’un Symposium organisé par l'Académie des Sciences de New York, pour faire le point sur l’implant cochléaire[40], l'équipe parisienne a pu présenter ses résultats obtenus chez ses 48 premiers patients, dont 45 portaient leur appareillage depuis plus d'un an. Ces auteurs détaillaient également de nombreuses innovations, l’électrodogramme notamment, qui facilitait l'adaptation de l’implant à la quantité des fibres nerveuses restantes de chaque patient, et à leur situation sur le clavier cochléaire. Ces procédures facilitaient la rééducation. Elles ont été adoptées plus tard par la plupart des équipes internationales. Les résultats français obtenus en 1982 étaient considérables au regard de ceux des autres équipes présentés lors de cette Conférence : le nombre de ces autres patients implantés avec un système multiélectrode était au total inférieur à une dizaine.
En 1983, se tient à Paris, dans l’ancienne faculté de médecine, le 2e congrès international sur l’implant cochléaire, juste avant la réunion dans les mêmes locaux du meeting annuel du Collegium international d'ORL (Collegium ORLAS).
L'US Food and Drug Administration approuve en 1984 l’implant australien dans ses indications pour l’adulte. En 1985, les Australiens améliorent[41] leur appareil initial, qui transmet maintenant la totalité de l’information concernant les voyelles[42].
En 1988, l'Américain B. Wilson propose un système[43] directement inspiré du brevet français, auquel il ne fera jamais fait référence dans aucune de ses publications qui suivront. Il y adjoint une modification concernant le rythme de la stimulation, qu’il nomme Continuous Inerleaved Stimulation (CIS). Mais, les descriptions qu’il en fit ensuite, notamment en 1991 dans Nature[44], puis lors d’un événement médiatique récent[45] pour surprenantes qu’elles aient été sur le plan de l’électrophysiologie du nerf cochléaire, n’ont curieusement jamais été discutées jusqu’à la parution fin 2014 de trois articles techniques rectificatifs[46],[47],[48].
En 1990, l’US Food and Drug Administration approuve l’implant australien dans ses indications pour le jeune enfant. En 1991 MXM-Neurelec présente leur premier implant multi-électrodes construit à partir de la licence Bertin. Il est entièrement numérisé et peut être adapté aux cochlées ossifiées[49].
À partir de 1992, l’implant cochléaire multi-électrodes est à peu près admis en France. D’autres équipes, les deux premières à Montpellier[50] et à Toulouse[51], commencent à le mettre en place.
Simultanément, les différents implants cochléaires modifient progressivement leur stratégie du traitement du signal sonore. Celle-ci se rapproche de plus en plus de la technologie du brevet Bertin, c'est-à-dire envoyer aux patients la totalité de l'information de manière séquentielle. L’implant américain envoyait lui aussi de cette façon la totalité de l'information, mais quelques artifices habillement trouvés et quelques restrictions évitaient à ses promoteurs de tomber dans le domaine du brevet français. L'appareil australien modifia sa stratégie à son tour, en envoyant également la totalité de l’information sonore, mais en ne retenant que les canaux dans lesquels se trouvait le maximum d’énergie. Cette restriction, là encore permit à ce constructeur de ne rien redouter des détenteurs du brevet Bertin[52].
En 1995, Paris organise le 3e congrès international sur l'implant cochléaire. En 1997, la licence française fut indubitablement copiée. La Société Bertin intenta alors un procès en bonne et due forme, avec saisie du matériel et constats d'huissiers. C’était d’ailleurs juste avant que le brevet ne tombe dans le domaine public. Mais, après quelques tapages et quelques émotions dans certains centres chirurgicaux, les poursuites ont été vite abandonnées : le coût des procédures et des expertises à venir dépassait de beaucoup les avantages financiers que l'entreprise pouvait en attendre.
Depuis, tous les constructeurs appliquent les principes du brevet Bertin, définis par P. Mac Leod et CH Chouard[53].
À la suite de l’Avis du Comité Consultatif National d’Éthique[54] concernant le dépistage de la surdité dans la période néonatale précoce[55] et depuis le tricentenaire des travaux de l'abbé de l'Épée[56] célébré en 2012, se dessine en France un rapprochement entre les deux communautés sourdes et non sourdes. Dans un dialogue commun, dont la cordialité et le respect de l'autre restent les grands principes[57], les deux cultures, évitant tout prosélytisme, s’efforcent d’éclairer au mieux les enjeux du choix, pas toujours exclusif dans certaines indications, entre l’implant cochléaire et la langue des signes.
L'implant est placé chirurgicalement sous la peau, derrière l'oreille. Il existe plusieurs fabricants et différents modèles, mais ils se composent tous d'une partie externe et d'une partie interne.
La partie externe comporte :
La partie interne se compose de :
Les informations sonores reçues par un appareil installé derrière le pavillon (oreille externe), sont traitées par un microprocesseur inclus dans cet appareil. Le signal électrique est envoyé vers la cochlée, par un fil reliant une antenne (posée sous la peau du sujet) qui transmet le signal aux électrodes implantées dans la cochlée (jusqu'à 22 électrodes).
Les sensations sonores perçues par le sujet peuvent au début ne pas correspondre aux sensations de l'audition normale, ni à celles de l'audition appareillée de façon externe. C'est la raison pour laquelle une éducation auditive spécifique pratiquée avec un audiologiste ou un orthophoniste (professionnel qui traite et rééduque les troubles de communication liés à l'audition) est presque toujours nécessaire à sa bonne intégration par le sujet qui la porte.
Après une période d'adaptation, les résultats deviennent très souvent excellents : de très nombreux adultes devenus sourds ou enfants implantés très précocement sont par exemple capables d'utiliser le téléphone. Les publications récentes indiquent qu'approximativement un tiers des enfants implantés obtient d'excellents résultats avec une compréhension équivalente à celle d'enfants normo-entendants, qu'un autre tiers acquiert une compréhension de la parole correcte, et que le dernier tiers rencontre des difficultés (très souvent corrélées avec une implantation tardive ou la présence d'autres troubles que la surdité)[58].
En 2004 en France, le coût de l'implantation[59] est compris entre 34 000 € (enfants) et 32 000 € (adultes), l'implant cochléaire coûtant 22 000 €, l'opération 2000 à 3 000 € et la réhabilitation 4000 à 6 000 €. Toutefois, selon la même source, les chiffres de prise en charge totaux dans différents pays vont de 25 000 € à 64 000 € (valeur 2001).
Les différentes études coûts/utilité (QALY) de l'opération de pose d'implants cochléaire sont toutes positives, même chez les patients âgés jusqu'à 82 ans[60]. Pour les enfants, les économies réalisées par la suite sur le coût de l'enseignement compensent à eux seuls un quart des coûts d'implantation.
Les fabricants d'implants cochléaires reconnus en France sont Advanced bionics SARL, Cochlear France SARL, Neurelec, Vibrant MED-EL Hearing technology[61].
Elle se fait sous anesthésie générale et l'opération pour une oreille dure trois heures environ. Les électrodes cochléaires sont glissées dans cette dernière après création d'une minime ouverture dans l'os mastoïde, derrière l'oreille.
Des complications sont possibles mais le plus souvent mineures[62]. À long terme, le taux de pannes nécessitant une réintervention peut atteindre 3 à 6 % des cas[63].
L'implant n'est pas adapté à tous les cas de surdité.
La surdité peut s'atténuer naturellement (mais les cellules auditives ne se régénèrent pas), le cerveau palliant la déficience auditive principalement par la suppléance mentale. Avec des efforts suivis, et des appareils amplificateurs amovibles adaptés, même des petits enfants sourds arrivent à parler et à chanter des comptines, sauf pour les surdités profondes. L'implantation sur les jeunes enfants constitue pour les parents une décision difficile à prendre.
La politique actuelle d’implantation d’enfants sourds pré-linguaux est vivement contestée par une partie de la communauté sourde[64]. En effet, elle y voit une dévalorisation de la langue des signes au profit de la langue orale, voire une négation de la culture sourde. Une partie de la communauté sourde interprète le choix des parents d’enfants sourds qui optent pour l’implantation de leur bébé, comme une tentative de « réparer la surdité », de « réparer leur enfant », en en faisant un mauvais entendant, un malentendant, handicapé à la fois dans le monde sourd et dans le monde entendant. Elle craint que le choix de faire opérer un enfant sourd risque de freiner son intégration dans la communauté sourde sans pour autant lui assurer une intégration parfaite dans la communauté entendante.
Cette position est vivement défendue par la communauté sourde signante mais ne reflète aucunement la position de la Haute Autorité de Santé.
En France, le comité consultatif national d'éthique estime que, si les parents optent pour une implantation cochléaire, il convient de conjuguer l’implantation à un apprentissage de la langue des signes dès que possible, soit vers l'âge d'un an[65].
En revanche, l'avis[66] (plus récent) de la Haute Autorité de Santé conseille d'implanter l'enfant sourd profond le plus précocement possible pour lui permettre d'entrer le plus facilement possible dans l'oralité. Aucune mention n'est faite de la Langue des Signes.
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