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artiste peintre, scientifique, archéologue, ethnologue et photographe De Wikipédia, l'encyclopédie libre
George Groslier (né et mort à Phnom Penh, - ) est un artiste peintre, scientifique, archéologue, ethnologue et photographe. Il laisse une œuvre écrite dense et variée composée de nombreux ouvrages sur l'archéologie et l'art du pays khmer. En 1912, Groslier est à l'origine de la création de l'École des Arts cambodgiens devenue depuis Université royale des beaux-arts. À partir de 1926, il ajoute à cette œuvre une production littéraire centrée sur la thématique de la rencontre de l’homme occidental avec les peuples, civilisations et cultures de l'Asie du Sud-Est. Il est le père de Bernard-Philippe Groslier (1926-1986), archéologue dans la lignée de Jean Commaille, Henri Parmentier et Henri Marchal à qui il succédera en tant Directeur des Arts et conservateur au musée national du Cambodge et conservateur du site d'Angkor.
Naissance |
Phnom Penh, Protectorat du Cambodge |
---|---|
Décès |
(à 58 ans) Phnom Penh, Protectorat du Cambodge |
Nationalité | Française |
Profession | |
Activité principale |
Conservateur du Musée des Arts du Cambodge |
Ascendants |
Antoine-Georges Groslier Angeline-Sidonie Legrand |
Conjoint |
Suzanne Cecile Poujade (1893-1979) |
Descendants |
Nicole Groslier (1918-2015), Gilbert Groslier (1922-) Bernard-Philippe Groslier (1926-1986) |
George Groslier né le à Phnom Penh au Cambodge est le fils d'Antoine-Georges Groslier 31 ans, à cette époque commis de comptabilité, qui devint administrateur français des Services civils de l’Indochine, et d'Angeline Sidonie Legrand 22 ans[1],[2].
Il fait ses études en France et suit les cours de peinture de l’École des Beaux-Arts de Paris. À l’issue de ces études, déçu de n’avoir pas obtenu le premier grand Prix de Rome (il n’obtient que le second), il effectue un premier retour au Cambodge où il découvre les temples d’Angkor.
L’éblouissement que lui procure cette découverte des joyaux de la culture et de l'art khmer détermine alors le cours de son existence. George Groslier rentre en France où il multiplie les publications et les conférences destinées à faire connaître la culture khmère. Ces activités lui valent de se voir confier en 1913 et 1914 une mission au Cambodge par le ministère de l'Instruction publique (qui avaient alors aussi en charge la culture et les beaux-arts) et la Société asiatique.
En juin 1914, George Groslier fut mobilisé et enrôlé au commencement de la guerre en tant aéronaute, il devait survoler en ballon les positions ennemis. C'est à cette époque qu'il rencontre Suzanne Cécile Poujade, fille de Jules Poujade et ami d'Albert Sarraut (1872-1962). Suzanne Poujade participe au Championnat de tennis en terre battue à Saint-Cloud en mai 1914[3],[4]. Ils auront ensemble trois enfants dont le futur conservateur d'Angkor Bernard-Philippe Groslier.
Le Cambodge a toujours été considéré à part en Indochine avec un pouvoir d'attraction moindre que les autres provinces telles le Tonkin, l'Annam ou la Cochinchine où se concentrent les coloniaux qui privilégient leur statut "d'hommes blancs" par rapport aux populations locales. De plus, la situation géographique de ces provinces est plus favorisée que celles du Cambodge par exemple sans débouchés maritimes.
De ce fait, le Cambodge assez négligé par l’administration coloniale française jusqu'en 1907, est relégué en une sorte d’état-tampon entre la Cochinchine et le Siam, sous influence britannique.
À partir de 1907, la "donne" change au moment de la rétrocession par le Siam des provinces de Battambang, Sisophon et Siem Reap au Cambodge. Le pays acquiert subitement une attention spécifique de la part des chercheurs et de l'administration coloniale. En effet, cet évènement de rétrocession a une portée significative immense en particulier pour la province de Siem Reap dans laquelle se trouve le fameux site d'Angkor, Capitale de l’ancien empire khmer qui a bâti des temples, d'une grande magnificence dans la région, devenus depuis des vestiges archéologiques. Dès lors, les efforts du gouvernement colonial vont s'orienter vers la sauvegarde de ce patrimoine avec pour objectif qu'Angkor devienne la vitrine culturelle de la France en Indochine.
Le domaine culturel est un enjeu politique majeur pour les grandes puissances coloniales de l'époque. La préservation du patrimoine et de la création d’écoles d’art ou de musées dépassent largement l'aspect uniquement culturel. Dans le cas du Cambodge, la France veut se montrer à la hauteur du patrimoine de valeur placé sous sa protection, la volonté est aussi de rendre à ce pays sa véritable identité culturelle, en Indochine en vue de le soustraire à l’influence des voisins britanniques.
Le gouvernement colonial français cherche, en outre, à amenuiser l'influence du Siam exercée depuis des siècles sur le Cambodge. Le Siam étant quant à lui occupé par les Britanniques, une rivalité entre deux puissances coloniales européennes va se jouer[5].
C’est dans ce contexte que le gouverneur général d'Indochine Albert Sarraut décide, en 1916, de créer une nouvelle école d’art à Phnom Penh. Il souhaite remplacer la section artistique de l’École professionnelle par un lieu entièrement voué à l’art et détaché de la technique. Afin de mener cette mission, il fait appel à George Groslier (1887-1945) qui connaît bien le Cambodge. En effet, sa candidature a pleins d'atouts, George Groslier est né à Phnom Penh, parle la langue khmère et de plus, a longuement étudié l’art lors de séjours personnels et d’une mission du ministère de l’Instruction publique en 1913. Par ailleurs, étant peintre lui-même, George Groslier a une sensibilité artistique et de plus, est en mesure de créer un programme d’enseignement artistique. En outre, il bénéficie de l’appui de son beau-père, Jules Poujade le père de Suzanne son épouse, ami du gouverneur général Albert Sarraut.
George Groslier est appelé par Albert Sarraut qui lui confie la mission de revitaliser les traditions artistiques des peuples indochinois. Lorsque George Groslier, au-delà de la mission qu'on lui confiait dont il avait une très haute idée, son but ultime était de redonner aux Cambodgiens le souci et l’amour de leur patrimoine artistique qui à l’époque était tombé en désuétude ou en décadence, ainsi s'était-il consacré à vouloir redonner au Ballet royal son lustre d'antan alors que ce ballet était sur le point de perdre son enchantement et sa valeur.
Sur les fondations de l’École des Arts décoratifs ouverte en 1912 au sein de la Manufacture royale du Palais elle-même créée par le Roi Sisowath en 1907, Groslier organise alors en 1918 l'émergence d'une École des Arts cambodgiens, véritable lieu de transmission du savoir-faire des anciens « maîtres » vers les apprentis artisans du pays.
La réussite de cette École des Arts cambodgiens qui développe sa propre coopérative de production d’artisanat khmer contribue à la notoriété de George Groslier désormais reconnu comme le rénovateur des arts cambodgiens[6].
En 1923, le jeune André Malraux perd sur des mauvais placements en actions mexicaines, la fortune de son épouse Clara Goldschmidt. Comme il n'envisage pas de prendre une profession — il déclara à son épouse « Vous ne voudriez donc pas que je travaille » —, il cherche un moyen de se renflouer rapidement.
Grand amateur du musée Guimet, il a alors appris l'existence d'un temple khmer du Xe siècle quelque peu oublié, Banteay Srei, ce qui lui donne une idée: aller y chercher des statues et les revendre en France à des collectionneurs. « En vendant quelques statues, cela leur permettrait de vivre deux à trois ans.. » comme il l'écrira plus tard dans La Voie royale (roman récompensé en 1930 du prix Interallié, créé cette année-là). Malraux obtient une autorisation de la part du ministère des Colonies en prétextant vouloir réaliser une étude.
Le couple et un ami, Louis Chevasson partirent pour le Cambodge, se rendent sur le site du temple, y découpent des bas-reliefs et d'autres éléments sculptés tels trois des sept têtes d'Apsara. Walter Langlois donne les précisions suivantes: « Au fond de niches profondes, une série de devatas ou déesses gardiennes, belles et richement ornées, sculptées en haut-relief presque de grandeur nature. Elles occupaient la surface de trois blocs superposés (…) ».[7]
L'École française d'Extrême-Orient (EFEO) et George Groslier sont prévenus par un des guides khmers qui accompagnaient et surveillaient discrètement, à la demande de ce dernier, le couple Malraux et Chevasson.
Groslier a alors un rôle décisif fin 1923 dans l'interruption de cette opération de découpage, transport et vol de statuettes du temple de Banteay Srei. Son intervention conduit la police à procéder à l'arrestation du couple et de leur ami lors de leur retour à Phnom Penh — ce qui devient alors l'« affaire du vol d'œuvres d'art à Angkor » —, pour délit de pillage archéologique « d'un magnifique temple du Xe siècle, un des précieux joyaux d'Angkor, une valeur sacrée pour le Cambodge, un patrimoine inestimable pour le monde ». On retrouva même une des têtes d'Apsara dans la sac de Clara.
Groslier conduisit l'interrogatoire de Malraux et de Chevasson, et dans son premier rapport, il fit état des dégâts occasionnés sur les pierres du temple et conclut, photographies à l’appui, « que les bas-reliefs ont été arrachés avec maladresse, abîmant très sérieusement l’édifice. ». Le couple et son ami sont alors assignés à résidence à Phnom Penh. Le , André Malraux est condamné à 3 ans de prison ferme, Chevasson à 1 an et demi, Clara est elle acquittée et repart en France.
Au début du mois suivant, Malraux fait la une de la presse française[8] On peut ainsi y lire « Georges Malraux, 22 ans, vient d’être condamné par le tribunal correctionnel de Phnom-Penh, en Indochine française, pour vol d’antiquités » (à cette époque, il s'appelait encore George Malraux et officialisa ensuite son nom de plume d'André Malraux[8], André étant son second prénom) ou « Il se disait lui-même "homme de Lettres" et était très connu dans certains cercles littéraires d'avant garde ainsi que dans de nombreux endroits de plaisirs qu'il fréquentait assidument »[8].
En France, Clara mobilise des gens du monde intellectuel pour militer à sa libération et la peine de son mari est allégée en appel à un an et huit mois avec sursis et il peut alors quitter le Cambodge.
Dans Angkor Chronique d’une Renaissance (1997), Maxime Prodromides écrit : « Le 29 décembre 1923, six jours après le vol, Henri Parmentier Chef de l'archéologie de l'EFEO partit à Banteay Srei constater les dégâts causés par le trio. Il y retourna, sur commission rogatoire, entre le 17 et le 20 janvier 1925 accompagné de Louis Finot et de Victor Gouloubew. Le relevé détaillé des arrachements demandés par la justice se doubla, de facto, d’une mission scientifique… ». Prodromes conclut ainsi « un an et quelque pour la réhabilitation de l’écrivain, huit pour celle de Banteay Srei ».
Groslier désignera plus tard Malraux, et avec toujours beaucoup de mépris, « le petit voleur ».
À ce titre, il est fait appel à George Groslier pour la réalisation des pavillons du Cambodge lors de l'Exposition des arts décoratifs de 1925 et de l'Exposition coloniale de 1931 à Paris.
Il participe encore à la création et à l’organisation des écoles d'art de Bien-hoa et de Hanoï ainsi que de l'École supérieure des Beaux-Arts de Hanoï.
Après le projet de l'École des Arts cambodgiens dont il est directeur, école devenue depuis Université des Arts du Cambodge, puis devenu Inspecteur général des Arts en Indochine, George Groslier est chargé d'une nouvelle mission en 1914 par Albert Sarrault, celle de créer un musée qui succédera au précédent musée créé en 1905 mais avec une ambition de devenir un Musée national pour le Cambodge. La construction de ce musée débute en 1917 et se prolongera jusqu'en 1924 avec différentes étapes : en 1918, avec une partie ouverte au public, en 1920 avec l'inauguration par le roi Sisowath. L'architecture des bâtiments du musée est inspirée des temples khmers.
George Groslier est le créateur, l’organisateur et le premier conservateur du musée Albert-Sarraut à Phnom Penh, nom donné en 1920 mais qui est rebaptisé en musée national du Cambodge en 1951, modèle d'architecture khmère traditionnelle, dont il fit le sanctuaire de l'art cambodgien.
En 1913, George Groslier a écrit sur la danse avec son livre Danseuses cambodgiennes anciennes et modernes avec une préface de Charles Gravelle. Plus tard, il s’est encore beaucoup investi dans ce domaine avec un « projet de sauvegarde » incluant un projet photographique d’envergure[9].
George Groslier restera conservateur du musée jusqu'à sa retraite en 1941 ou 1942
Retraité, George Groslier reste au Cambodge et à la suite du coup de force japonais du 9 mars 1945 en Indochine, il s’engage dans la résistance contre l’occupant japonais en tant qu’opérateur radio clandestin. Le 18 juin 1945, suspecté d'appartenir à la résistance anti-japonaise, il est capturé et emprisonné par la Kempeitai, police militaire et service de renseignement de l'armée japonaise. La Kempetai sema la terreur et l'horreur dans toute l'Indochine pendant l'occupation. George Groslier succombe sous la torture à l'âge de 58 ans.
Le 5 mai 1947 le gouvernement français lui attribua la mention honorifique posthume de Mort pour la France.
En 1946, les autorités cambodgiennes baptisèrent rue Groslier une rue proche du Musée national du Cambodge qu'il avait conçu et dirigé. Cette rue fut ensuite débaptisée (actuellement nommée Preah Ang Eng), mais certains connaisseurs des arts du Cambodge et de l'œuvre de George Groslier essaient depuis 2019 de convaincre les autorités de rebaptiser une rue George Groslier à Phnom Penh en l'honneur de sa contribution considérable à la conservation et la mise en valeur des richesses artistiques et culturelles du Cambodge[10].
Un certain nombre de ses livres ont été réédités en français et en anglais au XXIe siècle, mais les autorités et les milieux culturels français ne paraissent pas avoir été actifs dans la valorisation et la diffusion de son œuvre.
George Groslier est le père de l'archéologue et conservateur du site d'Angkor Bernard-Philippe Groslier (1926-1986).
Préface
Rééditions
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