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peintre français (1791-1824) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Théodore Géricault, né le à Rouen[1] et mort le à Paris, est un peintre, sculpteur, dessinateur et lithographe français.
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Grave of Théodore Géricault (d) |
Nom de naissance |
Jean-Louis André Théodore Géricault |
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Georges-Hippolyte Géricault (d) |
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Influencé par |
Officier de chasseurs à cheval de la garde impériale chargeant, Le Radeau de La Méduse, Série des « Monomanes », Tête de cheval. |
Incarnation de l'artiste romantique, il a eu une vie courte et tourmentée, qui a donné naissance à de nombreux mythes. Son œuvre la plus célèbre est Le Radeau de La Méduse (1818-1819). Il est également connu pour sa passion pour les chevaux, à l'écurie ou en action sur les champs de bataille napoléoniens. Outre ses peintures à l'huile, Géricault réalise des lithographies, des sculptures, rares mais remarquables, et des centaines de dessins.
Théodore Géricault naît dans une famille aisée de Rouen, originaire de la Manche, à Saint-Cyr-du-Bailleul où un lieu-dit du même nom, l'« Hôtel Géricault » existe toujours. Il y revient régulièrement pendant de nombreuses années, notamment chez ses cousins à Saint-Georges-de-Rouelley. C'est là qu'il découvre le milieu équestre, future source d'inspiration[2] et qu'il peint sa première œuvre connue : son autoportrait (1808). De nombreux tableaux du peintre sont restés dans cette famille, dont une majorité a été détruite lors des bombardements de 1944. Géricault y a fait également le portrait de son oncle normand, le conventionnel Siméon Bonnesœur-Bourginière (Minneapolis Institute of Arts[3]), et de son cousin Félix Bonnesoeur-Bourginière.
Tout au long de sa brève existence, il a un lien profond avec Mortain[4], où il a vécu une partie de son enfance et de son adolescence[5]. Cet artiste prodigieux, créateur du Radeau de la Méduse, apprécie de se rendre chez un forgeron[6] de Mortain, où il y étudie ses animaux de prédilection.
Le père du peintre, Georges (1743-1826), "homme de loi" a perdu son poste au parlement de Normandie en 1790. Sa mère, Louise Caruel (1753-1808), fille d'un procureur du Parlement de Normandie, descend d'une vieille et riche famille normande. Vers 1796, la famille Géricault s'installe à Paris au 96, rue de l'Université. Le père de Théodore obtient un poste dans l'entreprise familiale de tabac située à l'Hôtel de Longueville sur la Place du Carrousel. Le talent de Géricault a probablement été reconnu pour la première fois par le peintre et marchand d'art Jean-Louis Laneuville. Laneuville vivait à l'Hôtel de Longueville avec Jean-Baptiste Caruel (1757-1847), banquier, collectionneur, le futur Jean-Baptiste Caruel de Saint-Martin, oncle maternel de Théodore Géricault, et avec d'autres membres de la famille élargie de Géricault[7].
Élève médiocre « paresseux par délices[8] », il entre en 1806 au Lycée Impérial, où il a pour professeur de dessin le prix de Rome Pierre Bouillon.
En 1807, Jean-Baptiste Caruel épouse Alexandrine-Modeste de Saint-Martin (1785-1875)[9], de 28 ans sa cadette.
Le couple encourage Théodore Géricault à suivre des études artistiques. Peintre fortuné, Géricault ne connaît pas de problèmes d'argent et n'a pas besoin de vendre ses œuvres pour vivre, excepté à la fin de sa vie, à la suite de mauvais placements[10].
Théodore Géricault étudie en 1810 dans l'atelier du peintre Carle Vernet, spécialiste de scènes de chasse, et y fait la connaissance de son fils, Horace Vernet. Il étudie ensuite avec Pierre-Narcisse Guérin, avant de s'inscrire, le , à l'École des beaux-arts de Paris. Géricault pratique alors assidûment la copie au musée Napoléon (Le Louvre), où il copie les tableaux rassemblés par Napoléon Ier, qu'ils soient italiens, comme La Mise au tombeau et l'Assomption d'après Titien, français, d'après Jean Jouvenet, Eustache Le Sueur, Rigaud, Prud'hon, ou flamands, La Peste de Milan d'après Jacob van Oost, Portrait d'après Rembrandt, Van Dyck ou Rubens[11].
Il alterne les études des académies de nus masculins, où l'influence de Michel-Ange se remarque, avec de nombreux portraits de chevaux aux écuries, dont celui de Tamerlan, le cheval de l'empereur. Ses camarades d'atelier notent son goût pour les textures épaisses et riches et le surnomment : « le Cuisinier de Rubens ». Guérin voit en lui « l'étoffe de trois ou quatre peintres[12] ». En , Vivant Denon, le directeur du musée Napoléon, exclut Géricault pour inconduite. Géricault loue alors une arrière-boutique sur le boulevard Montmartre et peint Officier de chasseurs à cheval de la garde impériale chargeant (portrait équestre du lieutenant Dieudonné) en cinq semaines, d'un jet, et le présente au Salon. Dans cette toile aux couleurs sombres et vibrantes, on voit toute la virtuosité du jeune peintre, notamment dans le choix de la position héroïque et du dessin du cheval. La toile est accrochée à côté du Portrait de Murat d'Antoine-Jean Gros. Le peintre Jacques-Louis David, en découvrant l'œuvre de Géricault, aurait dit : « D'où cela sort-il ? Je ne reconnais pas cette touche ! ». Géricault reçoit pour ce tableau la médaille d'or du Salon : il a 21 ans. Célèbre désormais, il s'installe au 23, rue des Martyrs, non loin de Carle Vernet. Il est entouré de nombreux peintres et amis, Delacroix, Léon Cogniet, Ary Scheffer, son élève Louis-Alexis Jamar[13], et de Dedreux-Dorcy[14].
Deux ans plus tard, Géricault, qui peint de nombreuses scènes militaires, présente Cuirassier blessé quittant le feu (1814, musée du Louvre) qui forme un contraste saisissant avec la toile de 1812. Elle représente un officier sur une pente avec son cheval, s'éloignant de la bataille. Son regard, tourné vers la tuerie qu'il vient de quitter, traduit le désarroi, la défaite. Une autre toile présente un cuirassier à terre désarçonné. Dramatiques et monumentaux, ces deux portraits suscitent un intérêt distant lors du Salon de 1814, dans un Paris occupé par les Alliés.
En 1814, Théodore Géricault s'éprend de sa tante Alexandrine qui n'a que 6 ans de plus que lui. De cette liaison, qui va durer plusieurs années et qui s'avère désastreuse pour l'artiste, naîtra le un fils, Georges-Hippolyte[15], déclaré à sa naissance comme le fils de la bonne Suzanne et de père inconnu. À la mort de Géricault, l'enfant sera reconnu par le père de l'artiste, Georges-Nicolas[16].
Géricault s'engage dans la Compagnie des mousquetaires[17] gris du Roy Louis XVIII. Il accompagne le Roi à Gand pendant les Cent-Jours. Il revient en France fin 1815, caché par son oncle Bonnesoeur-Bouginière, dont il fait alors le portrait.
Géricault se présente au concours du grand prix de Rome où il échoue. Il décide alors, en 1816, de partir pour l'Italie à ses propres frais. Il est durablement impressionné par les peintres de la Renaissance italienne, en particulier Michel-Ange et Titien qu'il copie, ainsi que par Pierre Paul Rubens et le mouvement qu'il donne à ses œuvres. Son ami le peintre Jean-Victor Schnetz lui fait rencontrer Ingres à la villa Médicis. Géricault quitte Rome en 1817 pour Paris.
Parmi ses contemporains, Géricault porte une admiration particulière à Antoine-Jean Gros dont il copie les œuvres à plusieurs reprises[18]. Delacroix explique : « Géricault aussi avait l'admiration de Gros. Il n'en parlait qu'avec enthousiasme et respect. Il lui était beaucoup redevable dans son talent, quoique leurs deux talents fussent dissemblables. C'est surtout dans la représentation des chevaux que Gros a été son maître. Géricault a mieux rendu la force dans les chevaux, mais il n'a jamais su faire un cheval arabe comme Gros. Le mouvement, l'âme, l'œil du cheval, sa robe, le brillant de ses reflets, voilà ce qu'il a rendu comme personne[19]. »
Peignant des portraits (Louise Vernet, Portrait d'Alfred et Élisabeth Dedreux), mais aussi des scènes de genre comme Le Marché aux bœufs, Géricault semble toujours hanté par l'Italie, Michel-Ange et Titien, ou par Jules Romain, tant il accentue l'anatomie et les effets dramatiques du clair-obscur. Il peint de nombreuses scènes militaires : Le Train d'artillerie ou L'Artillerie changeant de position.
En 1819, un nouveau Salon s'ouvre au Louvre. Géricault veut réaliser une œuvre immense, spectaculaire. Cherchant son inspiration dans les journaux, il y découvre l'« affaire de la Méduse », catastrophe maritime peu glorieuse que la monarchie restaurée avait tenté d'étouffer. Le fait divers que le peintre évoque par sa toile est celui du naufrage d'une frégate, la Méduse, le , au large des côtes du Sénégal. Le moment culminant choisi par Géricault dans cette tragédie est celui où les quelques naufragés survivants, après avoir dérivé pendant treize jours sur un radeau de fortune, aperçoivent au loin le navire qui vient les sauver, le brick Argus. Géricault peint l'instant dramatique où les hommes encore valides, qui ont pratiqué le cannibalisme pour survivre[21], se lèvent pour faire signe au navire, un point à peine visible à l'horizon.
Le peintre a trouvé son inspiration. Soucieux d'ancrer son œuvre dans la réalité, il prend connaissance du récit de deux survivants : Alexandre Corréard, l'ingénieur géographe de la Méduse, et Henri Savigny, le chirurgien du bord. Il fait construire une réplique grandeur nature du radeau dans son atelier et demande à sept rescapés de venir poser pour lui. Il va jusqu'à exposer dans son atelier des restes humains. Grâce à l'entremise d'un ami médecin à l'ancien hôpital Beaujon, proche de son atelier, Géricault peut obtenir des bras et des pieds amputés afin de les étudier. De même, il dessine plusieurs fois une tête coupée obtenue à Bicêtre, une institution tout à la fois hospice, prison et asile d'aliénés. Selon Charles Clément, son biographe, une puanteur étouffante régnait parfois dans son atelier de la rue du Faubourg-du-Roule. Géricault travaille avec acharnement, pendant une année entière, à une œuvre de cinq mètres sur sept qui est, selon l'expression de Michel Schneider, « une leçon d'architecture autant qu'une leçon d'anatomie ».
Le Radeau de La Méduse est présenté au musée du Louvre en 1819. Lors de l'accrochage, le tableau est placé beaucoup trop haut, à côté d'autres œuvres immenses.
La toile est mal accueillie par la critique qui feint l'incompréhension : « L'auteur n'a pas cru devoir indiquer la nation ni la condition de ses personnages. Sont-ils Grecs ou Romains ? Sont-ils Turcs ou Français ? Sous quel ciel naviguent-ils ? À quelle époque de l'histoire ancienne ou moderne se rapporte cette horrible catastrophe ?[22] » ou encore « ce cadre immense et ces dimensions colossales qui semblent réservés pour la représentation des événements d'un intérêt général, tels qu'une fête nationale, une grande victoire, le couronnement d'un souverain ou un de ces traits de dévouement sublimes qui honorent la religion, le patriotisme ou l'humanité[23]. ». En réalité, l'un des sujets, l'anthropophagie, est connu de tous : il n'est pas considéré comme un crime par le Code Civil de 1810 et a été régulièrement pratiqué par les soldats affamés des armées du Premier Empire, en Espagne, au Portugal et pendant la retraite de Russie[24].
Pour Jules Michelet, dans ses cours au Collège de France de 1847, Géricault peint « le naufrage de la France, ce radeau sans espoir, où elle flottait, faisant signe aux vagues, au vide, ne voyant nul secours[25]. »
Géricault reçoit néanmoins la commande d'une toile, dont il confie la réalisation à Delacroix.
Éreinté par la critique française et en conflit avec sa famille, Géricault quitte Paris pour l’Angleterre où le Radeau de la Méduse est présenté. La toile est applaudie par la presse anglaise — pour des raisons inverses des critiques françaises — et par le public, plus de 40 000 visiteurs.
L'architecte anglais Cockerill témoigne dans son journal intime de son admiration pour le peintre français et nous livre son portrait : « Admiration pour son talent et sa modestie […] son profond sentiment de pitié, son pathétique, à la fois la vigueur, le feu et la vitalité de son œuvre. […] à la fois profond et mélancolique, sensible, vie singulière, comme celles des sauvages américains dont on parle dans les livres, baignant dans la torpeur pendant des jours et des semaines puis se livrant à des actions violentes, chevauchant, se précipitant se lançant s'exposant à la chaleur, au froid, à toutes sortes de violences […] Géricault n'a pas présenté dix œuvres au public, pourtant sa réputation est grande. »[26].
Il voyage en Angleterre d’ à , et découvre les grands paysagistes anglais, dont Constable et Turner, et les courses de chevaux, thème qui lui dictera une nouvelle série d’œuvres inspirée par « la plus grande conquête de l’homme » dont notamment le Derby d’Epsom (musée du Louvre). Le thème du cheval est un sujet central de son œuvre, au début et surtout à la fin de sa vie. Il copie en particulier les œuvres de George Stubbs et de Ward, et réalise de nombreuses lithographies de chevaux et de scènes de rues de la vie londonienne.
Depuis son apprentissage chez Guérin, Géricault peint des chevaux dans plus d'une centaine de scènes de genre, qu'ils évoluent à l'écurie, sur des champs de bataille, au travail, qu'ils soient de trait ou de halage, cob ou selles français, représentant jusqu'aux ateliers de maréchaux-ferrants. Pour Théophile Gautier, le cheval permet à Géricault d'exprimer « les plus hautes aspirations de l'esprit ». Pour Bruno Chenique, le cheval dans l'art de Géricault, « c'est surtout l'âme de l'homme, ses instincts, sa douceur, sa violence, ses pulsions sexuelles et mortifères »[27], il « est le miroir de la psyché avec la complicité duquel peuvent se vivre des passions insensées ».
En , le peintre revient à Paris, après être tombé malade en Angleterre. Il ne se débarrasse pas de son état[28]. Son ami médecin-chef de la Salpêtrière et pionnier en études psychiatriques Étienne-Jean Georget lui propose de peindre les portraits de dix malades mentaux. De cette série, nous restent cinq toiles dont le Monomane du vol[29].
On associe souvent à cette série le Vendéen, portrait d'un saisissant réalisme d'un homme traumatisé par la Guerre civile de Vendée, mais qui est sans doute plus ancien[30].
En 1822, il a une relation suivie avec une certaine madame Trouillard, à qui il confie être malade[32]. Bien qu'épuisé, Géricault continue de vivre « comme s'il était dans la plénitude de ses forces alors que les ravages d'une maladie dont le ferment était depuis plusieurs années dans son sang réapparurent »[33].
Il tombe plusieurs fois de cheval, et se brise le dos en en tombant rue des Martyrs, à Paris. Il est alité, paralysé. Les médecins diagnostiquent une phtisie de la colonne vertébrale[34].
Il meurt le au 23, rue des Martyrs[35], après une longue agonie due officiellement à cette chute de cheval[36] mais plus probablement à une maladie vénérienne[37],[38], ce qui fit dire au philosophe et critique d'art Élie Faure que « Géricault est mort d'avoir trop fait l'amour »[39].
Dans son Journal, Eugène Delacroix décrit ainsi Géricault qu'il a connu : « Il a gaspillé sa jeunesse ; il était extrême en tout ; il n'aimait à monter que des chevaux entiers, et choisissait les plus fougueux. Je l'ai vu plusieurs fois au moment où il montait en selle ; il ne pouvait presque le faire que par surprise ; à peine en selle, il était emporté par sa monture. Un jour que je dînais avec lui et son père, il nous quitte avant le dessert pour aller au bois de Boulogne. Il part comme un éclair, n'ayant pas le temps de se retourner pour nous dire bonsoir, et moi de me remettre à ta table avec le bon vieillard. Au bout de dix minutes nous entendons un grand bruit : il revenait au galop ; il lui manquait une des basques de son habit ; son cheval l'avait serré, je ne sais où, et lui avait fait perdre cet accompagnement nécessaire. Un accident de ce genre fut la cause déterminante de sa mort. Depuis plusieurs années déjà, les accidents, suite de la fougue qu'il portait en amour comme en tout, avaient horriblement compromis sa santé ; il ne se privait pas pour cela tout à fait du plaisir de monter à cheval. Un jour dans une promenade à Montmartre, son cheval s'emporte et le jette à terre. […] Cet accident lui causa une déviation dans l'une des vertèbres[40]. »
Puis lors de sa dernière visite à Géricault, le , Delacroix écrit : « Il y a quelques jours, j'ai été le soir chez Géricault. Quelle triste soirée. Il est mourant ; sa maigreur est affreuse. Ses cuisses sont grosses comme mes bras. Sa tête est celle d'un vieillard mourant. Je fais des vœux bien sincères pour qu'il vive, mais je n'espère plus. Quel affreux changement. Je me souviens que je suis revenu tout enthousiasmé de sa peinture : surtout une étude de tête de carabinier. S'en souvenir. C'est un jalon. Les belles études. Quelle fermeté. Quelle supériorité. Et mourir à côté de cela, qu'on a fait toute la vigueur et la fougue de la jeunesse, quand on ne peut se retourner sur son lit d'un pouce sans le secours d'autrui[41]! »
Géricault est enterré à Paris au cimetière du Père-Lachaise (division 12) dans le caveau des Isabey en 1824, puis, après la mort de son père, déplacé dans le tombeau familial avec celui-ci en 1828.
Alexandrine Caruel de Saint-Martin meurt en 1875, dans sa propriété au Chesnay.
La figure plus ou moins extravagante de Géricault - cavalier - héroïque - amant - vu par ses contemporains devient une des figures du romantisme une vingtaine d'années après sa mort[42]. Jules Michelet écrit sa vie dans son Journal 1828-1848 et consacre un long passage au peintre dans son cinquième cours au Collège de France. Il voit dans le peintre un « peintre-magistrat », un juge sévère du Premier empire qui « dans les mélanges bâtards de la Restauration, conserva ferme et pure la pensée nationale. Il ne subit pas l'invasion, ne donna rien à la réaction ». Géricault est un homme seul, génie pathétique et désespéré, pris dans des amours éphémères et des amitiés légères et envieuses alors que la France fait naufrage[25]. Prosper Mérimée copie les figures de chevaux d'après Géricault[43], Alexandre Dumas écrit sur lui[44]. Delacroix écrit ses souvenirs de Géricault.
Son fils Georges-Hippolyte Géricault lui consacre en 1840 une tombe particulière, au cimetière du Père-Lachaise. La tombe est surmontée d'une statue de bronze ainsi que d'un bas-relief représentant Le Radeau de La Méduse, tous deux signés Antoine Étex. Pour ce dernier, Géricault est l'unique artiste, depuis Phidias et l'Antiquité grecque, à avoir su dessiner les chevaux, jusqu'à proposer une étrange psycho-physionomie de l'artiste. Il affirme en effet dans sa sixième leçon de son Cours de dessin : « Deux hommes ont peint le cheval, Gros y a largement touché : mais un seul l'a bien rendu, dans ses mouvements, dans sa fougueuse vie, dans ses mouvements, c'est Géricault […] Géricault, c'est le cheval incarné.[…], il semble que l'âme d'un cheval soit venue se loger dans le corps d'un homme. Tous ses chevaux sont si vivants dans sa peinture, et de vraies races chevalines ! Il y a une chose singulière ; j'ai sculpté Géricault, j'ai étudié son type ; si on regarde sa tête, son masque moulé sur nature après sa mort, on trouve qu'il y a quelque chose qui se rapproche un peu de l'anatomie de la tête du cheval : il n'a pas le nez, les pommettes d'un homme ordinaire[45]. »
À la fin du XXe siècle, la vie de Géricault est lue au travers de la psychanalyse, des interactions des pulsions de mort et de vie, du romantisme comme scandale, de la figure de l'inceste entre Géricault et sa tante Alexandrine en vis-à-vis du Radeau de la Méduse, singulièrement mis en avant par l'écrivain Hervé Guibert, mort du sida[46].
Dans Vingt Mille Lieues sous les mers de Jules Verne, le Nautilus est décoré de peintures, dont des Géricault : « Les diverses écoles des maîtres anciens étaient représentées par une madone de Raphaël, une vierge de Léonard de Vinci, une nymphe du Corrège, une femme du Titien, une adoration de Véronèse, une assomption de Murillo, un portrait d’Holbein, un moine de Vélasquez, un martyr de Ribeira, une kermesse de Rubens, deux paysages flamands de Téniers[Lequel ?], trois petits tableaux de genre de Gérard Dow, de Metsu, de Paul Potter, deux toiles de Géricault et de Prud'hon, quelques marines de Backuysen et de Vernet. » (chapitre IX)
Théodore Géricault est le personnage principal du roman de Louis Aragon, paru en 1958, La Semaine Sainte. La vie et l'oeuvre de Théodore Géricault sont au centre du roman d'Andrée Chedid paru en 1992, Dans le soleil du père : Géricault.
Le 10 septembre 2004, l'historien de l'art Bruno Chenique, membre de l'Union française des experts en objets d'art et auteur de nombreuses publications de référence sur l'artiste, annonce dans la presse l'établissement d'un nouveau catalogue raisonné des peintures et dessins inédits de Théodore Géricault[112]. Lors de l'exposition « Géricault, Au coeur de la création romantique » organisée sous sa direction au musée d'Art Roger-Quilliot de Clermont-Ferrand en 2012[113],[114], Bruno Chenique attribue, peut être à tort, à Géricault la paternité d'un tableau longtemps resté dans les réserves du musée, affirmant que cette toile qu'il intitule Tête d'étude d'après le modèle Gerfant se rattacherait à la complexe et fascinante élaboration du Radeau de la Méduse[115]. Mais le rapprochement de ce tableau avec deux œuvres du peintre Auguste Bigand permet de douter de l'attribution à Géricault, et tendrait à penser que cette prétendue étude n'est en réalité qu'une toile du premier[116].
Dans la même exposition de Clermont-Ferrand, Bruno Chenique dévoile un tableau inédit de l'artiste, un Portrait d'Africain, qu'il date de 1819[117]. Cette toile a été récemment acquise par le Virginia Museum of Fine Arts[118].
- Théodore Géricault, The Hans E. Bühler Collection of Pictures, Drawings and Lithographs, 15 novembre 1985, Christie's Londres (catalogue comprenant 155 numéros).
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