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réacteur nucléaire à eau pressurisée de génération III+ De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'EPR2, pour Evolutionary Power Reactor 2, aussi initialement appelé EPR-NM (« Nouveau Modèle »), est un projet de réacteur nucléaire à eau pressurisée (REP) de génération III+. Ce modèle est une évolution de l'EPR, Evolutionary Power Reactor, construit dans les centrales nucléaires de Flamanville (France), de Taïshan (Chine), d'Olkiluoto (Finlande) et d'Hinkley Point C (Angleterre).
Type | |
---|---|
Génération |
III+ |
Utilisation |
Production d'électricité |
Statut |
en projet |
Nombre de réacteurs | 6 en projet 8 à l'étude |
Concepteur |
Combustible |
uranium enrichi à 5 % |
---|---|
Caloporteur | |
Modérateur |
eau légère |
Neutrons |
thermiques |
Puissance thermique |
4 590 MW |
Puissance électrique |
1 670 MW |
Localisation |
---|
Fin 2021, un programme de six réacteurs EPR2 répartis en trois paires est lancé en France. La réalisation de la première paire sur le site de la centrale de Penly en Normandie devrait débuter mi-2024. Dans le même temps, une étude pour la réalisation de huit réacteurs supplémentaires (en quatre paires) est engagée.
Ce modèle de réacteur, évolution de l'EPR, est conçu par EDF et Framatome, à travers leur filiale Edvance créée en 2017[1]. L'objectif par rapport à l'EPR est d’améliorer la réalisation industrielle et d'abaisser les coûts de fabrication, grâce à des modifications de conception, tout en maintenant le niveau de sûreté de l'EPR en ce qui concerne le fonctionnement, la protection du personnel, la limitation de production de déchets radioactifs, la gestion de perte de confinement (récupérateur de corium) et la résistance aux agressions internes (explosion, rupture de tuyau, etc.) ou externes (causes naturelles ou humaines)[2],[3],[4].
Il a aussi pour objectif, d'améliorer la souveraineté énergétique et la décarbonation de l'économie française[5],[6],[7],[8].
Les difficultés rencontrées lors de l'élaboration de l'EPR de Flamanville 3 ont poussé le PDG d'EDF Jean-Bernard Levy à commander en auprès de Jean-Martin Folz, alors ex-PDG de PSA, un audit en expliquant les raisons. Ce rapport, connu sous le nom du « Rapport Folz », est livré en [9]. Il fait état de neuf causes principales :
Le concept d'EPR n'est pas remis en cause, comme en témoignent la mise en service et le fonctionnement nominal des deux EPR de Taishan en Chine[9], Taishan 2 devenant le réacteur le plus productif au monde à l'année, ayant fourni 12,884 TWh en 2023[14],[15]. Cela n'exclut pas entre-temps la réalisation d'améliorations, mais sans modification majeure, afin de ne pas perdre le bénéfice de l'effet tête-de-série de Flamanville 3, et l'expérience des EPR déjà construits[9].
Après la remise du Rapport Folz en , le ministre de l'Économie Bruno Le Maire commande auprès d'EDF la mise en place d'un plan d'action. Ce dernier est livré en , sous le nom de « Plan Excell »[16].
Ainsi publiés, les points soulevés dans le Rapport Folz ont mis en lumière la nécessité de repenser le projet EPR à tous les niveaux : gouvernance, conception et réalisation.
L’État français souhaite un rapprochement d'EDF et d'Areva NP, initié en et finalisé en par le rachat par EDF d'ArevaNP (redevenant alors Framatome)[17],[18].
Parallèlement, l'abandon du nucléaire civil allemand est voté en 2001 par la coalition SPD/Les Verts du gouvernement Gerhard Schröder, et accéléré en 2011 à la suite de l'accident de Fukushima par la Chancelière allemande Angela Merkel. En 2011, Areva rachète les parts de Siemens dans la société ArevaNP pour 1,62 milliard €[19].
Ces restructurations font de l'EPR, et a fortiori de l'EPR2, des projets à gouvernance exclusivement française (EDF, Framatome, Orano). Les différentes activités (ingénierie, sous-traitance, etc.) restent cependant internationalisées, principalement en Europe.
EDF et Framatome (ex ArevaNP) fondent en la société d'ingénierie Edvance, une EPCC chargée de la conception et de la réalisation de l'entièreté de l’îlot nucléaire (chaudière nucléaire incluse) et du contrôle-commande[20]. Les objectifs visés par cette co-entreprise, sont une meilleure coopération, une meilleure cohérence et une meilleure intégration des nombreuses équipes chargées de la réalisation des différents composants de l'îlot nucléaire.
Le Plan Excell est une réponse d'EDF, élaborée sous la supervision d'Alain Tranzer (délégué général à la qualité industrielle et aux compétences nucléaires) en collaboration avec le GIFEN, aux dysfonctionnements mis en évidence par le Rapport Folz[16],[21],[22]. Il est construit autour de trois grands thèmes principaux :
Afin d'atteindre ces objectifs, le Plan Excell détaille 30 engagements pris par EDF au printemps 2020, à réaliser en trois étapes-paliers[27]. La première est atteinte à l'automne [27], la deuxième en [28] et la troisième en 2023, les 30 engagements étant alors atteints[29].
À Framatome, une profonde transformation organisationnelle et des méthodes de travail au travers de stratégies de standardisation sont également initiées à travers les « plan Roméo » et « plan Juliette »[30],[31]. Le plan Roméo vise à anticiper les différents besoins des futurs projets (notamment en qui concerne la chaudière nucléaire) afin de développer un design standard modulaire, suivant une approche descendante dite top-down. Le plan Juliette vise lui à définir un standard industriel d’organisation, de procédés et de gammes de fabrication chez Framatome, pouvant ensuite s’appliquer aux spécificités de chacun des futurs projets potentiels, suivant une approche ascendante dite bottom-up[30].
Bernard Fontana, président de Framatome, annonce en , dans le cadre de son programme « Juliette », destiné à assurer « la continuité de la charge opérationnelle » dans ses usines, son intention de lancer la production de certains gros composants des futurs EPR2 dès mi-2021, soit un an et demi avant la date butoir fixée par l'exécutif pour s'engager dans la commande de nouveaux réacteurs. Il estime avec cette organisation pouvoir réduire les coûts de production de 25 %[32].
Ces différentes améliorations sont mises en place progressivement ce qui profite à la finalisation des EPR en construction, ainsi qu'aux projets d'EPR ultérieurs à Flamanville 3, comme à Hinkley Point C et Sizewell C au Royaume-Uni[9],[33].
Les difficultés de réalisation des EPR de Flamanville et Olkiluoto, les dysfonctionnements pointés par le Rapport Folz, mais aussi les nombreuses améliorations d'EDF et Framatome, entraînent le développement d'un EPR-NM, pour « Nouveau Modèle ». Celui-ci conserve les caractéristiques principales de l'EPR, mais contenues dans une version à la réalisation industrielle optimisée et moins coûteuse. EDF dépose en un dossier d’options de sûreté (DOS) à l'ASN pour un EPR-NM[34].
La puissance thermique nominale de cet EPR-NM est initialement légèrement supérieure à celle de l'EPR de Flamanville (4 850 MWth pour 1 750 MWe au lieu de 4 590 MWth pour 1 660 MWe). L’ASN considère cette augmentation de nature à réduire les marges de sûreté et n’y est donc pas favorable[35]. Le projet d'EPR-NM est renommé « EPR2 » après quelques modifications supplémentaires, consistant essentiellement en un retour à la puissance de l'EPR initial, et l'utilisation des mêmes assemblages combustibles[36].
Ainsi, le , après étude du dossier, consultation du public, consultation de l'IRSN et appui du Groupe permanent d’experts pour les réacteurs (GPR), l'ASN rend son avis : « L’ASN considère que les objectifs généraux de sûreté, le référentiel de sûreté et les principales options de conception sont globalement satisfaisants »[37].
Le , le président de la République Emmanuel Macron annonce le rachat à General Electric par EDF de l'activité GE Steam Power, spécialisée dans les turbines nucléaires et dont les usines se trouvent à Belfort, pour la somme annoncée de 175 millions d'euros[38],[39],[40]. Cette branche d'Alstom a été vendue en 2015 à General Electric avec l'aval d'Emmanuel Macron, alors ministre de l'Économie, de l'industrie et du numérique. Contestée à l'époque, cette transition a été perçue comme une perte de souveraineté nationale[38],[41] ; en effet, cette activité inclut la fabrication et la maintenance des turbines nucléaires Arabelle équipant le parc nucléaire français et celle des turbines des sous-marins nucléaires français et du porte-avions Charles de Gaulle. Le rachat de 2022 permet de reprendre le contrôle sur tous les maillons de la chaîne nucléaire et de renforcer la filière française[41]. Cette opération est accueillie de manière plus mitigée par EDF, qui n'a pas de logique industrielle dans cette acquisition, n'étant pas un fabricant de composant, et se voit tenu de se fournir en turbines auprès de cette nouvelle filiale et non chez un concurrent pour ses futurs EPR2[39].
Le , Emmanuel Macron entérine le rachat définitif de GE Steam Power (hors maintenance des réacteurs nucléaires américains) par EDF dans une nouvelle entité nommée Arabelle Solutions, pour un montant non dévoilé[42],[43]. La vente annoncée en 2022 a été retardée par le gouvernent américain dans un contexte de sanctions économiques secondaires à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le groupe russe Rosatom étant un des clients de GE Steam Power[44].
Emmanuel Macron annonce en le lancement d'un nouveau programme nucléaire français avec la construction de six EPR2[45],[46]. La supervision gouvernementale de ce nouveau programme est confiée à la Délégation interministérielle au nouveau nucléaire (Dinn), crée en et présidée par Joël Barre. Elle est chargée de piloter la maîtrise d’ouvrage publique du programme de construction de nouveaux réacteurs EPR2 en France[47].
Parallèlement, EDF réorganise en sa Direction Ingénierie et Projets Nouveau Nucléaire (DIPNN) sous la houlette de Xavier Ursat[47],[48]:
S’inspirant des grands programmes d’armement et du spatial, EDF et la Dinn mettent en place en une « revue de maturité générale » constituée d’une quinzaine d’experts extérieurs présidés par Hervé Guillou, et chargée d'évaluer la maturité de l'avancement du projet EPR2[47],[49]. Leur premier rapport rendu en conclu à une maturité insuffisante du design général (« basic design ») de l'îlot nucléaire de l'EPR2 pour passer aux études de design détaillé (« detailed design »)[47]. En conséquence EDF annonce en le report de la finalisation du basic design de fin 2023 à mi-2024, afin d'éviter de reproduire l'erreur commise pour l'EPR de Flamanville : le chantier n'avait été lancé alors que le groupe ne disposait que de 25 % des études d'ingénierie[50]. 89 recommandations d'améliorations sont formulées et acceptées par le PDG d'EDF Luc Rémont. Le deuxième rapport de approuve l'engagement du detailed design des principaux bâtiments de l'EPR2, mais il demande également de sécuriser le lancement du nouveau programme nucléaire (aucune loi n'ayant encore été votée), et de définir le mode de financement du programme[47],[51].
Le même mois, Luc Rémont annonce maintenir l'estimation d'un délai de construction de la première paire d'EPR2 à Penly à 105 mois (soit environ 9 ans), mais cibler une diminution à terme à 70 mois (soit un peu moins de 6 ans) pour la troisième paire d'EPR2 au Bugey, diminution permise par le retour d'expérience et l'optimisation des chantiers[47],[52].
Les caractéristiques techniques de l'EPR2 sont similaires à celles de l'EPR, qui partage le même cœur de réacteur et la même instrumentation.
Durée de fonctionnement de conception | 60 ans |
Puissance thermique | 4590 MWth |
Puissance électrique brute | 1750 MWe |
Puissance électrique finale nette | 1670 MWe |
Rendement | 36,3 % |
Taux de disponibilité les 20 premières années | > 90 % |
Combustible | 241 assemblages combustibles |
Uranium faiblement enrichi à 5 % | |
Combustible MOX en proportion variable, jusqu'à 30 % | |
Gestion fusion du cœur (corium) | Récupérateur externe, refroidissement actif |
Durée du cycle | 18 mois (renouvellement d'un tiers du combustible) |
La puissance thermique est la puissance totale développée par la chaudière nucléaire. La puissance électrique brute correspond à la puissance électrique produite à la sortie du groupe turboalternateur. La puissance électrique brute moins la consommation de tous les équipements électriques de la centrale donne la puissance électrique nette disponible pour le réseau électrique.
L'accent est fortement porté sur une amélioration de la constructibilité, ainsi qu'une rationalisation et une réduction des catalogues de pièces (valves, pompes, câbles, tuyaux...)[33].
À titre d'exemple, l'EPR recense 13 300 références de robinetterie, réduites à 571 pour l'EPR2[57] ; également, les EPR d'Hinkley Point C comportent 400 références de tuyaux, diminuées à 250 pour l'EPR2[56] ; ou encore 1 700 modèles de portes (pour la plupart uniques) dans l'EPR de Flamanville, chiffre abaissé à 100 pour l'EPR2[56],[58]. Des efforts de standardisation sont également engagés, comme l'utilisation de références de tuyauterie déjà utilisées et qualifiées, notamment dans l'industrie pétrolière ou gazière.
Du point de vue du génie civil, diverses pièces sont agrandies afin de faciliter leur aménagement à la construction ainsi que leur exploitation : l'enceinte de confinement fait environ 70 mètres de hauteur pour 50 mètres de diamètre[47]. Un recours accru est fait à la préfabrication de composants, voire de bâtiments complets de l'îlot conventionnel (partie non nucléaire du réacteur), comme le bâtiment des auxiliaires électriques conçu pour être assemblé en usine et transporté sur site. Le moindre compartimentage du bâtiment réacteur et la simple enceinte de confinement (au lieu d'une double enceinte comme sur l'EPR) permettent aussi une simplification du génie civil[56],[58].
La non-participation allemande au projet d'EPR2 permet le retrait d'exigences imposées par les électriciens allemands :
EPR | EPR2 | |
---|---|---|
Îlot nucléaire | Équipement de la chaudière | Conservé |
6 groupes électrogènes Diesel dont deux Diesel d'ultime secours (DUS)[b] | Conservé | |
Récupérateur de corium | Conservé, avec modifications[34] | |
Maintenance possible du réacteur en fonctionnement | Abandonné | |
Soupape du pressuriseur de modèle identique à celui des réacteurs allemands KWU | Soupape du pressuriseur commune au reste du parc français. | |
Quatre trains de sauvegarde | Trois trains de sauvegarde | |
Enceinte du bâtiment réacteur à double-parois de 1,3 m chacune, avec liner métallique sur la paroi interne[62],[63] | Enceinte du bâtiment réacteur à simple-paroi épaisse en béton précontraint, avec liner métallique[56] | |
Bâtiment des auxiliaires nucléaires (BAN) | Abandonné, fonctions transférées dans d'autres bâtiments | |
Îlot conventionnel (partie non nucléaire) | Groupe turbo-alternateur | Conservé |
Bâtiment électrique non modulaire | Bâtiment électrique modulaire | |
Pompage de la source d'eau froide non diversifiée | Pompage de la source d'eau froide diversifiée |
L'EPR de Flamanville a un bâtiment unique « bunkerisé » (renforcé contre les agressions externes) de pompage de l'eau de mer, laquelle constitue la source froide du réacteur. Pour les futurs EPR2 en bord de mer (comme ceux prévus à Penly et Gravelines), la solution retenue répondant aux mêmes exigences de sûreté que l'EPR repose sur trois bâtiments « non bunkerisé », séparés entre eux et répartis sur deux emplacements distincts. Deux stations de pompages assurent l'alimentation en eau de mer du circuit de refroidissement et des systèmes de sûreté (refroidissement par l'eau) ; et un bâtiment doté d’aéroréfrigérants permet le refroidissement des circuits et l’appoint d’eau en cas d’accident (refroidissement par l'air). Cette organisation permet un refroidissement diversifié par l'eau en fonctionnement normal, et par l'air ou l'eau en situation accidentelle. La suppression de la « bunkérisation » facilite également la construction[56].
Les mêmes exigences de sécurité sont retenues pour l'EPR2 et pour l'EPR[35], avec quelques améliorations supplémentaires, comme la mise en place d'une source d'eau froide diversifiée (cf supra)[54].
Il s'agit du premier réacteur à intégrer dès sa conception les leçons de l'accident de Fukushima. Ainsi, le site est conçu pour être plus résistant à une agression extérieure, et ses systèmes de secours sont dotés d'une autonomie de 100 heures en cas de perte d'alimentation externe[34].
En , l'ASN accepte le principe d'exclusion de rupture des tuyaux principaux du circuit primaire et des lignes de vapeurs du circuit secondaire, principe déjà appliqué à l'EPR de Flamanville[64]. L'exclusion de rupture consiste à ne pas étudier intégralement les conséquences d'une rupture de ces conduites, car jugée extrêmement improbable. Cela permet, outre la diminution d'heures d'ingénierie, l'amélioration de l’accessibilité des équipements pour leur maintenance et leur inspection en service, et donc de la diminution de la dosimétrie reçue lors de ces interventions. Le tracé de lignes auxiliaires est aussi plus simple, ce qui diminue les contraintes mécaniques et in fine améliore la sécurité[64],[65].
En contrepartie, ce principe ne peut être appliqué que pour des circuits se trouvant dans l'enceinte de confinement du réacteur. Sa mise en œuvre implique des normes particulièrement exigeantes de conception, de fabrication, de soudure et de suivi en service de ces tuyauteries ; normes permises entre autres par la mise en place du plan Excell. Enfin, malgré cette mesure, EDF renforce les mesures de protection si une telle rupture devait se produire : étude de la résistance de l'enceinte de confinement à l'élévation de pression et de température induite, réalisation de séparations en béton entre certaines tuyauteries, dispositifs anti-fouettement et évents d’évacuation de la vapeur[64],[65].
AP1000[68],[69] | VVER-1200[70],[71] | VVER-TOI[72] | APR1400[73],[74] | Hualong-1[75] | |
---|---|---|---|---|---|
Société | Westinghouse | Atomenergoprom | Atomenergoprom | KEPCO | CGN et CNNC |
Pays | Etats-Unis | Russie | Russie | Corée du Sud | Chine |
Type de réacteur | REP (ou PWR) | REP (ou PWR) | REP (ou PWR) | REP (ou PWR) | REP (ou PWR) |
Durée de vie de conception | 60 ans | 60 ans | 60 à 80 ans | 60 ans | 60 ans |
Puissance thermique | 3400 MWth | 3200 MWth | 3300 MWth | 4000 MWth | 3050 MWth[c] |
Puissance électrique nette | ~1160 MWe | ~1100 MWe | 1175 MWe | 1400 MWe | 1080 MWe |
Gestion fusion du cœur (corium) | Rétention interne, refroidissement passif | Récupérateur externe, refroidissement passif et actif | Récupérateur externe, refroidissement passif et actif | Rétention interne, refroidissement actif | Rétention interne, refroidissement actif et passif |
Durée du cycle | 18 mois | 12-18 mois | 12-18 mois | 18 mois | 18 mois |
La fusion accidentelle du cœur d'un réacteur nucléaire produit du corium à plus de 3 000 °C, pouvant percer le fond de la cuve. Afin de gérer cette éventualité, les réacteurs sont équipés d'un récupérateur de corium. Deux grandes conceptions sont appliquées : un récupérateur externe, situé sous la cuve permettant un étalement et un refroidissement confiné du corium ; ou une rétention du corium dans le fond de la cuve, ce qui nécessite alors qu'elle soit refroidie par un refroidissement actif (au moyen de pompes) et/ou un refroidissement passif (par simple gravité du fluide réfrigérant).
D'autres projets de réacteurs nucléaires appartiennent à la génération III/III+, mais leurs stades de développement sont moins avancés (APR+, SRZ-1200[76], etc.) voire à l'arrêt (ATMEA1, ESBWR, etc.).
Le coût total de réalisation des six EPR2 estimé par le gouvernement en 2021 à 51,7 milliards €, montant incluant la construction, le financement, la maintenance, la gestion des déchets, le démantèlement, et une provision pour différents aléas[77]. La première paire est alors évaluée à 17 milliards €[78], soit une seule tranche à 8,5 milliards €[79].
En , le journal Les Échos révèle que programme de six EPR2 serait réévalué à la hausse de 30 %, soit 67,4 milliards €[80],[81]. Cette hausse des coûts serait imputable à deux raisons principales : une hausse des coûts d'ingénierie (avec des études prolongées de neuf mois pour finaliser le basic design) ; et une hausse des coûts de construction dans un contexte d'inflation importante[80],[81],[82]. Cette information n'est pas confirmée par EDF, qui annonce rendre fin 2024 une nouvelle estimation du coût de son programme[51],[83].
Plusieurs réacteurs sont construits en série, pour bénéficier de l'effet de série, et par paire, afin de bénéficier d'économie d'échelle par la mutualisation des moyens sur un même site (permettant un gain de l'ordre de -15 % pour la deuxième tranche), comme décidé pour les EPR de Taishan, Hinkley Point C ou Sizewell C[84]. La construction par paire permet aussi une optimisation des délais de construction : un retard ou une anomalie de conception d'un composant du premier réacteur peuvent être compensés par l'utilisation du composant initialement prévu pour le deuxième. A contrario, la deuxième tranche bénéficie du retour d'expérience de la première, permettant une optimisation de la construction. À titre d'exemple, la construction du radier d'Hinkley Point C2 a été 30 % plus rapide que celle du radier d'Hinkley Point C1[85].
Le principal déterminant du coût de production du mégawattheure est le coût du capital nécessaire à la construction du réacteur[2]. L'électricité d'origine nucléaire voit son prix de production essentiellement lié au coût de fabrication du réacteur, les coûts fixes (combustible, personnel, loyers, consommable...) comptant pour une part mineure du coût total de production. Le capital initial nécessaire à la construction d'un réacteur s'élevant à plusieurs milliards d'euros engagés sur plusieurs années, le constructeur et exploitant (ici EDF) ne peut uniquement s'autofinancer sur ses capitaux propres ou ses recettes ; il se voit tenu de se financer par un mécanisme de prêt.
La Cour des comptes estime en 2022 qu'un taux d'intérêt du capital initial à 5 % compte pour 50 % du prix de production final de l'électricité. Pour un taux d'intérêt à 10 % ce coût s'élève jusqu'à 70 % du prix de production final[2]. Ainsi, pour un taux d'intérêt à 4 % le coût de production final est estimé à 60 €/MWh, augmente à 100 €/MWh pour un taux à 7 %, mais baisse à 40 €/MWh pour un taux à 1 %[86].
Il apparaît alors primordial pour la compétitivité de l'EPR2 d'être financé à un taux d'intérêt le plus bas possible. En ce sens, l'inclusion de l'énergie nucléaire à la taxonomie verte européenne en [87], et le rachat à 100 % d'EDF par l’État français en , apparaissent comme des facteurs favorisant l'obtention d'un financement à faible taux d’intérêt[88].
Dans un rapport publié en , l'ONG antinucléaire Greenpeace France évalue le coût des six premiers EPR2 à plus de 100 milliards d'euros[89], soit plus de six fois le coût de l'EPR de Flamanville[89],[90]. Le coût du mégawatt-heure produit se situerait entre 135 et 176 euros, pour une référence de 70 €/MWh pour le parc nucléaire français existant en 2024[90].
En , seule la France a des projets de construction d'EPR2.
Le , le président de la République Emmanuel Macron annonce publiquement la relance du programme nucléaire français[45],[46]. Ce programme comporte la réalisation de six EPR2 en trois paires, ainsi que l'étude de la réalisation de huit EPR2 supplémentaires. Cette orientation doit néanmoins être intégrée et détaillée dans la prochaine Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) à voter avant [91],[92]. À la mi-, est adoptée la « loi relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes ». Cette loi facilite temporairement, pendant 20 ans, les procédures administratives pour la construction à proximité des réacteurs déjà existants, de nouveaux réacteurs, tels que l'EPR2 ou des SMR. Elle supprime par ailleurs le plafonnement de la capacité de production nucléaire à 63,2 GW, ainsi que la baisse de la part du nucléaire à 50% dans le mix électrique français qui avaient été introduits en 2015 dans la première PPE[93].
L'objectif pour la première paire de réacteurs est de pouvoir lancer les travaux préparatoires dès 2024, une coulée du premier béton en 2028, et une mise en service entre 2035 et 2037[94]. Le délai de construction entre deux tranches d'une même paire serait de 18 mois, et de trois à quatre ans entre les trois premières paires[54]. Les huit potentiels autres réacteurs seraient mis en route entre 2045 et 2065, au rythme d'une paire tous les cinq ans[95]. Même avec 14 réacteurs EPR2 supplémentaires et la prolongation de la durée d'exploitation des réacteurs existants au-delà de 50 ans, la part du nucléaire dans le mix électrique français devrait baisser de 70 % en 2021 à 40 % à l'horizon 2050[96].
Eiffage Energy Systèmes, Spie Nucléaire et ABC sont sélectionnés en par EDF pour fournir les 24 groupes électrogènes de secours (de 10 MW chacun) des six premiers EPR2 (trois principaux et un de maintenance pour chaque réacteur), pour un montant total de 900 millions d'euros[97],[98].
La centrale nucléaire de Penly était initialement dimensionnée pour accueillir quatre réacteurs. Seuls deux réacteurs appartenant au palier P'4 ont été construits, Penly 1 et 2, et les travaux des deux derniers se sont limités aux terrassements.
Après un premier projet avorté d'un seul EPR à Penly, discuté de 2008 à 2012, un second projet est relancé par EDF en 2019 pour une paire d'EPR2. Le site est présenté et retenu en première intention par EDF[99],[100]. Le lendemain de l'annonce d'Emmanuel Macron du , le PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy, confirme la sélection de Penly pour la première paire[101].
Le , la Commission nationale du débat public (CNDP) est saisie en vue d'organiser le débat public pour cette paire d'EPR2[78]. Ce dernier s'est tenu, sous la présidence de Michel Badré, du au sur l'ensemble du territoire français[102],[103]. Le , EDF engage les procédures d’autorisations nécessaires au lancement des travaux de construction de cette première paire d'EPR2 (la demande d'autorisation de création, ou DAC)[104], ainsi que les autres procédures administratives nécessaires à sa réalisation et à son raccordement au réseau de transport d’électricité[105]. Les travaux préparatoires commencent à l'été 2024[106],[107],[108].
Le choix de la centrale nucléaire de Gravelines pour accueillir la deuxième paire d'EPR2 est confirmé par Jean Bernard Levy le [101].
Le débat public, présidé par Luc Martin (ancien ingénieur et directeur des affaires publiques à RTE)[109] et organisé par la Commission nationale du débat public, est prévu du au [110],[111]. Le coût de cette paire d'EPR2, estimé au moment de la saisine, est de 16,9 milliards d'euros[112].
La troisième paire d'EPR2 était envisagée en région Auvergne-Rhône-Alpes sur un site non défini entre la centrale du Tricastin ou celle du Bugey[101]. Lors du Conseil de politique nucléaire du , c'est finalement le site du Bugey qui est retenu[113].
Afin de fortement diminuer les prélèvements en eau et de limiter l'échauffement du Rhône en aval, les nouveaux réacteurs de Bugey 6 et 7 seront équipés de tours aéroréfrigérantes réalisant alors un circuit dit « fermé »[114],[115]. En effet, à cause du réchauffement climatique, l'été est marqué par une plus forte diminution du débit du Rhône et une température moyenne plus élevée ; cela peut entrainer des limitations ponctuelles de production électrique afin de respecter les limites réglementaires lors des épisodes caniculaires, notamment pour les réacteurs de Bugey 2 et 3 dont la source froide est en circuit dit « ouvert » (sans tour de refroidissement)[116],[117]. Le nombre de tour de refroidissement n'est pas encore fixé : soit une par réacteur et mesurant 200 mètres de hauteur, soit deux de 161 mètres pour chaque réacteur[118].
En , la Commission nationale du débat public annonce l’organisation d’un débat public sur le projet[119], sous la présidence de David Chevallier[120].
Une paire d'EPR2 couvrirait la consommation électrique de 40% de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Le coût de cette paire d'EPR2 estimé au moment de la saisine, est de 15,3 milliards d'euros[118].
En , Emmanuel Macron évoque la possibilité d'implantation d'une paire d'EPR2 dans le bassin de Marseille-Fos, afin de répondre au besoin à venir en énergie décarbonée du Grand port maritime de Marseille (GPMM). Selon lui, malgré une augmentation de la part d'énergie renouvelable, cette dernière serait insuffisante pour couvrir les besoins du GPMM : « on fera en effet plus de renouvelable [...] Je pense qu'il y en aura, mais je ne pense pas à hauteur de 4-5 giga »[121].
La ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher déclare en vouloir aller « au delà des six premiers EPR2 » car « le parc historique ne sera pas éternel ». Elle envisage la construction de 13 GW de réacteurs nucléaires supplémentaires, soit huit EPR2[122]. Des élus locaux de communautés attenantes aux centrales du Tricastin[123], de Belleville-sur-Loire[124], de Chinon[124], de Nogent-sur-Seine[125],[126], du Blayais[127] ou encore de Golfech[128] manifestent leur intérêt pour la construction de nouvelles paires d'EPR2.
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